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sur 5567 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Il y a des enfances qui sont un saccage.
Une mère traumatisée,  incapable de rien donner à  ses enfants qu'insécurité et effroi.
Un frère  carnassier qui rode comme un loup affamé autour de ses soeurs.
Des grands parents toxiques, haineux  qui vous jettent hors de portée de leurs cerisiers pleins de fruits.

Il y a des enfances meurtries.
Pleines d'errance et de rejets.
Des écoles qui vous stigmatisent.
Des copains de classe qui vous harcèlent.
Des voisines qui vous insultent.
Surtout quand vous avez la peau trop sombre, les cheveux trop noirs, les pommettes trop hautes d'une petite Indienne.

Il y a des enfances maudites.
Quand la pauvreté,  l'exclusion , le racisme vous rejettent à  la marge des plus pauvres, des plus exclus, des plus méprisés.
Quand vous ne pouvez habiter qu'une maison frappée par le mauvais sort dont tous les habitants ont mystérieusement disparu, si délabrée que son toit laisse passer vents et pluies, qu'elle semble parcourue de présences fantômatiques.
Quand les êtres qui vous sont les plus chers s'envolent, se noient, s'etouffent, se piquent, se tuent, se font tuer.

Et pourtant il y a des enfances magiques!

Quand la nature se fait glorieuse, généreuse, envoûtante.
Quand ses secrets vous sont enseignés,   qu'ils guérissent et apaisent, qu'ils vous rendent plus sage et plus forte.
Quand votre sang cherokee vous donne la puissance et l'assurance d'une royauté ancienne.
Quand la plume de corbeau plantée dans vos tresses est celle des conteurs fabuleux.
Quand vous devenez la maîtresse des histoires.
Quand même la mort vous obéit, que vous décryptez ses coups.
Quand le chagrin, le crime, le viol, deviennent des histoires qu'on peut raconter, mettre à  distance, enterrer.

Il y a des enfances que l'amour sauve.

Bien sûr,  il y a des pères atroces, qui tuent, saccagent, violent, blessent.

Mais  il existe aussi des pères miraculeux.

Il y a un père miraculeux comme celui de Betty, la petite Indienne.

Un père aux mains de terre et au coeur de soleil, un père qui dispense la poésie et la tendresse, qui comprend et soutient, qui réconforte et embellit, qui donne, qui donne, qui donne.

Tellement

que le saccage, la meurtrissure, la malédiction rentrent dans le rang,
elles demeurent mais trouvent une place et cessent d'obstruer le ciel,
laissent un peu d'air, pour respirer,
un peu d'espoir, pour continuer,
un peu de soleil pour se réchauffer

Et tant d'amour.

Il y a un père miraculeux qui sauve l'enfance terrible de Betty et en fait une histoire magnifique.

Il y a la plume magnifique de Betty/ Tiffany qui rend divinement belle, divinement forte, exceptionnellement prenante, émouvante,  cette histoire d'une enfance crue, cruelle, parfois insupportable .

Je n'ai pas lu un tel livre depuis bien longtemps! C'est tout un firmament qu'il faudrait pour le couronner, pas 5 pauvres étoiles.. .
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*** Rentrée littéraire 17 ***

« Devenir femme, c'est affronter le couteau. C'est apprendre à supporter le tranchant de la lame et les blessures. Apprendre à saigner. Et malgré les cicatrices, faire en sorte de rester belle et d'avoir les genoux assez solides pour passer la serpillière dans la cuisine tous les samedis. Ou bien on se perd, on bien on se trouve. Ces vérités peuvent s'affronter à l'infini. Et qu'est-ce que l'infini, sinon un serment confus ? Un cercle brisé. Une portion de ciel fuchsia. Si l'on redescend sur terre, l'infini prend la forme d'une succession de collines verdoyantes. Un coin de campagne dans l'Ohio où tous les serpents dans les hautes herbes de la prairie savent comment les anges perdent leurs ailes. »

Lorsqu'un roman commence ainsi, lorsque les promesses annoncées se confirment au fil de la lecture, je sais que je tiens entre les mains un roman coup de coeur. Betty rejoint la ronde des héroïnes Gallmeister inoubliables, Turtle ( My absolute darling), Tracy ( Sauvage ), Nel et Eva ( Dans la forêt ).

Betty raconte les joies et les terribles secrets d'une mère, transmis à travers la fiction d'une fille. Tiffany McDaniel s'est fortement inspiré de l'histoire de sa mère, Betty, née dans les années 1950 en Ohio, dans les contreforts des Appalaches. C'est histoire d'un passage à l'âge adulte, qui commence non pas avec la naissance de Betty mais de la rencontre de ses parents, un Cherokee et une Blanche. Betty en est la narratrice, comme un voix vieillie par la sagesse, par l'expérience des bénédictions et malédictions du passé, par l'espérance de avoir que de jours meilleurs arriveront.

Le résumé ou plutôt les thèmes abordés peuvent faire craindre un pathos lacrymogène racoleur : racisme, handicap, viol, suicide, harcèlement, dépression, violence en tout genre, pauvreté. Et pourtant, jamais ce roman ne bascule dans le sordide vide de sens. Certains passages font mal par la brutalité qu'ils décrivent mais sans jamais tomber dans la pornographie émotionnelle. Plusieurs scènes m'ont bouleversée parce que la douleur exposée y est dite dans le respect de la dignité des personnages.

Ce que je retiens de ce roman superbe, c'est sa lumière. Celle du père, en premier lieu. Je crois que je n'ai jamais rencontré en littérature une figure paternelle aussi belle. Landon est un homme qui était fait pour être père. Il est la boussole morale de cette famille de six enfants. C'est lui qui qui réconforte Betty, celle des enfants qui lui ressemblent le plus, sa Petite Indiennes, comme il l'a surnomme, qui doit faire face aux insultes racistes, aux moqueries quotidiennes sur son physique et aux rejets violents de ses camarades à l'école. Lorsqu'ils se retrouvent tous les deux dans la nature, cela donne des pages absolument magnifiques de poésie : ces réflexions sur l'histoire du peuple cherokee, sa poésie sur la nature et la cosmogonie qui s'y rattache enchantent la noirceur.

Si le roman est celui de l'héritage des abus transmis de génération en génération, il est avant tout le roman d'une résilience. le père guide Betty vers l'écriture pour transcender le quotidien et c'est terriblement émouvant de voir Betty grandir et naître comme écrivaine et poétesse, ses mots lui permettant de transcender les tragédies que sa famille vit, ils ont le pouvoir de briser le cycle.

Oui, ce que je retiens c'est définitivement la lumière de cette destinée féminine et familiale déchirante inoubliable. 700 pages d'une intensité incroyable.
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C'est le livre d'une enfant à l'attention des adultes, de la rencontre du bien avec le mal, de l'innocence confrontée aux âmes corrompues ou malveillantes mais aussi à la magie poétique d'un père altruiste et naturaliste. C'est l'histoire de Betty qui avance dans la vie, la tête dans les étoiles, les pieds sur la frontière entre le paradis et l'enfer.
Ils se sont connus dans un cimetière. Alka Lark, 18 ans, mangeait une pomme sur sa courtepointe matelassée alors qu'il s'est assis à côté d'elle, Landon Carpenter, 28 ans. Ils se sont séduits et elle est tombée enceinte. Les choses les plus simples cachent souvent des choses plus alambiquées. Après avoir essuyé la rage de son père en lui annonçant, elle a ramassé ses affaires et a retrouvé Landon pour lui demander de l'épouser. Ils ont pris la route. Les enfants naquirent au fil des états qu'ils ont traversés. D'abord Leland, l'ainé qui a les traits de son grand-père maternel, en 1939, puis Fraya sa soeur, en 1944, Yarrow et Waconda qui moururent très jeunes, Flossie née en 1951, Betty en 1954, Trustin en 1956 et Lint, dernier de la fratrie en 1957, à la suite de la naissance duquel, Alka décida qu'il était tant de se poser à Breathed, Ohio, l'état où tout a commencé. Dès lors, la véritable histoire de « Betty » débute. Une vie entre un père Cherokee bienveillant et une mère « blanche » psychologiquement instable.
Betty grandit et voit le décor merveilleux qu'elle avait imaginé avec ses yeux d'enfant se déchirer petit à petit pour laisser la place à un cadre horrible, celui de la réalité du monde des humains. C'est un monde où se cultivent les idées étriquées du racisme, la méchanceté et la cruauté sadique des enfants. Un univers où existent l'inceste, l'intolérance aveugle envers la différence et le meurtre.
Betty a un atout énorme pour survivre au milieu de ce cauchemar qu'elle ne soupçonnait pas : son père.
Landon Carpenter trouve toujours les mots pour soigner les maux, et ces mots ont un lien magique avec la nature, un lien à tel point enchanteur que l'on a envie de les croire, de croire en leur pouvoir de guérison. Ces mots s'échappent des pages du roman de Tiffany Mc Daniel et résonnent longtemps à nos oreilles, nous collent à la peau et surtout embellissent la triste réalité de la famille Carpenter et un peu la nôtre.
Lorsque je referme la dernière page de « Betty », j'ai dix ans et mille étoiles s'échappent de mes yeux brillants… Et ce sera toujours l'été…
« Betty » de Tiffany Mc Daniel est un rendez-vous merveilleux que nous propose les éditions Gallmeister, qu'il serait dommage de manquer.
Traduction de François Happe.
Editions Gallmeister, 716 pages.
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Betty, Prix du Roman FNAC 2020 et Prix America du meilleur roman 2020, est un roman poignant que Tiffany McDaniel dédie à sa mère née le 12 février 1954 à Ozark dans l'Arkansas. Sur plus de 700 pages qu'on tourne sans s'en apercevoir, l'auteure raconte à la première personne, le passage de l'enfance à l'âge adulte de celle qui est née moitié blanche, moitié indienne.
Difficile d'exprimer son ressenti sur un livre aussi riche et aussi éblouissant qui raconte comment une jeune femme métisse tente d'exister face aux réalités de la société rurale américaine.
Betty Carpenter est la sixième enfant d'une fratrie de huit, dont deux sont déjà morts lors de sa naissance. Fille d'Alka Lark, blonde et fragile et de Landon Carpenter, cet Indien cherokee descendant de guerriers, de guérisseurs et de sorciers, déportés dans des réserves jusqu'en Oklahoma, dont elle a hérité la peau cuivrée et une grande imagination grâce à ses histoires magiques qui lui serviront à affronter le monde cruel dans ce coin de campagne de l'Amérique profonde, l'Ohio.
Si, dans la première partie, Je suis, 1909 – 1961, Betty raconte ses parents, leur rencontre, la naissance de ses frères et soeurs, une période d'errance, puis, cette attaque raciste dont est victime Landon à la mine par les hommes avec lesquels il travaille : « On pourrait croire qu'au fond de la mine, où tout le monde est noirci par le charbon, les différences n'existent plus entre nous... Qu'on peut travailler ensemble. »
En 1961, sa mère veut rentrer en Ohio où elle a ses racines, Ohio qu'ils avaient quitté en 1945. La famille va s'installer à Breathed, une bourgade imaginaire, dans un coin de campagne à la végétation luxuriante au pied des contreforts des Appalaches. Les quatre autres parties du roman nous permettent de suivre Betty jusqu'en 1973 et montrent comment le sexe et la classe sociale ont été, en sus de la couleur, des handicaps pour elle.
Très tôt, Betty est confrontée au racisme, que ce soit à l'école avec la brutalité de ses camarades de même que celle des enseignants ou dans la rue, et d'autre part, comment continuer à vivre lorsqu'on découvre que les personnes censées nous protéger sont de véritables monstres et ne pas être envahi par un sentiment de culpabilité pour ne pas avoir révélé les faits...
Betty comprend très vite le pouvoir de l'imagination capable de transcender la réalité environnante et qu'elle est une nécessité quand le monde devient trop rude et trop violent.
Les légendes de son peuple que son père lui raconte sont autant de leçons de vie qui lui permettent d'encaisser les blessures et de les réparer. Les mots seront également pour elle une autre échappatoire à cette cruauté de la vie. L'écriture est son refuge, elle griffonne sans cesse sur de petits papiers ses douleurs qu'elle enterre ensuite sous les pierres du jardin.
Douceur, poésie et violence se côtoient tout au long de ce roman à la fois enchanteur et tragique.
Une très belle page est celle où Betty définit son père : « je pensais que mon père - comme les histoires que ces livres racontaient (ceux qu'elle empruntait à la bibliothèque) – était né de l'esprit de ces écrivains. »
Il est un véritable hymne à la terre, à la nature, à l'environnement, un hommage rendu par l'écrivaine à sa mère, mais aussi aux femmes qui ont su résister et se dresser face à l'adversité pour affirmer leur propre pouvoir.
Tiffany McDaniel fait preuve de beaucoup de sensibilité dans son ouvrage et j'ai particulièrement aimé la relation père-fille, tout l'amour que met Landon dans le surnom donné à sa fille Betty « Petite indienne » et les valeurs qu'il lui enseigne. Bouleversantes sont les relations intrafamiliales.
Lumière et noirceur, amour et méchanceté, sauvage et civilisé, les thèmes s'affrontent tout au long du roman mais la magie des mots de l'écrivaine parvient à illuminer notre lecture et à nous donner la force de ne pas baisser les bras.
C'est un livre qui ne peut laisser personne indifférent, un livre dont la force vous étreint et qui pourrait être une véritable source d'inspiration pour le futur.
Un grand MERCI à Simon pour cette lecture éblouissante.

Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Betty est-il le roman qu'il faut avoir lu en cette rentrée littéraire de l'automne 2020?


L'histoire se déroule sur près d'un siècle, dans le sud de l'Ohio. Celle que son père appelle Petite indienne revient sur le passé de ses parents, son père Landon, né au début du siècle, héritier d'une lignée maudite, celle des Cherokees, qui savent fabriquer de la peinture rouge et parler des feux sacrés. Cette richesse culturelle est cependant un fardeau dans cette Amérique qui n'accorde de crédit qu'aux blancs, aux voleurs de terre.
L'histoire de la mère est plus dramatique encore, et c'est la rencontre avec Landon qui la sauvera des griffes d'une famille abjecte.
Betty complètera le tableau familial tout en racontant sa propre enfance, que sa couleur de peau désignera irrémédiablement comme l'exclue, la maudite.

C'est un long roman, qui s'attache à retracer le destin, souvent écourté, des nombreux personnages de la famille, dans cette maison que la majorité des habitants de Hampstead considèrent comme maudite. Et on aurait tendance à les croire, si l'on considère le nombre de survivants à la fin du récit!

Long roman donc, et pourtant -, malgré la noirceur (certains ont pu le comparer à My absolute Darling), la lecture n'est pas complexe et se fait avec facilité.

L'écriture est très belle, dans la lignée des plus beaux romans de nature-writing et c'est sans doute ce qui contribue à son charme .

Bel exemple de ce que la littérature américaine peut nous apporter de meilleur, dans la qualité de l'écriture et le soutien de valeurs humaines primordiales.
Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Betty est née dans une famille pauvre et métissée. Son père est un indien cherokee, sa mère la fille de petits paysans blancs. La famille compte 6 enfants, tous très différents ; deux autres sont décédés très tôt. Après une errance d'état en état, de petit boulot en petit boulot, ils sont revenus s'installer dans la région natale des parents, au sud de l'Ohio, dans une vieille bicoque qu'ils retapent progressivement.
La famille vit un peu à l'écart de la société, mais les qualités d'herboriste du père sont reconnues, ce qui leur permet de survivre. Cette activité les conduits à vivre près de la nature, avec la tête un peu dans les étoiles, tant le père aime raconter et inventer de vieilles légendes indiennes.
Leur principal lien social est l'école, mais Betty, qui a hérité de la teinte de peau de son père, y est harcelée. C'est un peu le déclencheur qui marque la fin de l'innocence et va ensuite lui faire découvrir les vicissitudes et les violences cachées de cette vie à la campagne...

Je crois que ce qui a fait, pour moi, de ce livre un coup de coeur, c'est une l'opposition entre le style et les événements qui structurent la narration.
L'écriture est ronde, lente, douce, poétique, envoutante... Combinée aux histoires que raconte le père, elle invite à la rêverie, à l'évasion.
Si l'on met de coté les liens familiaux, étroits et chaleureux, et la relation de la famille à la nature, le fond du livre est extrêmement violent : les discriminations que subit la famille, l'agression du père par ses collègues de travail, et ce n'est qu'un tout petit début... Il y a une sorte d'engrenage qui se met en place et qui broie progressivement presque tous les membres du clan.
Betty est pour moi l'égal des meilleurs romans de Steinbeck (Les raisins de la colère, Les naufragés de l'autocar) ou de Caldwell (La route au tabac, le petit arpent du bon dieu). Pour l'apprécier pleinement, je ne l'ai pas lu d'une traite. J'ai pris le temps, un petit mois, de le déguster et de le digérer avec lenteur.

Un cou de coeur, vous dis-je !
Lien : http://michelgiraud.fr/2020/..
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C'est dans le cimetière de Joyjug, Ohio, que se sont rencontrés Landon Carpenter et Alka Lark et où ils se sont échangé un peu plus qu'un simple baiser. Au bout de quelques mois, il ne lui était alors plus possible de cacher son ventre rond qui a mis son père dans un tel état de colère que Landon n'a pas eu d'autre choix que de lui rendre ses coups. Leland est alors le premier d'une fratrie de huit enfants. Huit enfants conçus au fil des voyages, d'État en État. Malheureusement deux d'entre eux ne survivront pas. C'est dans l'Ohio, à Breathed, que toute la petite famille décide de poser ses valises. Entre mensonges et secrets, rêve et réalité, violence et complicité, Betty, la petite Indienne, à la peau foncée et au regard noir, bercée par les histoires de son père qui lui transmettra l'héritage de son peuple, devra affronter les remous et les tempêtes de la vie...

Il est des histoires qui se racontent. D'autres qui se vivent... Betty est l'une d'elles. Sous la plume si tendre et magique de Tiffany McDaniel, Betty grandit, survit ou suffoque parfois, s'enivre des histoires de son père et brille dans les étoiles de ses yeux. S'inspirant de la vie de sa mère à qui elle rend un vibrant hommage, l'auteure tisse, avec force et fracas, une fresque familiale inoubliable. D'Alka, femme et mère instable à Lint, l'enfant fragile, en passant par Leland, le grand frère fougueux, Flossie qui se rêve grande star, Landon, ce père protecteur et aimant ou encore Betty. Sur fond de racisme, de violence, de désillusions, de pauvreté, de sexisme mais aussi d'espoir, de poésie et d'amour, ce roman fait montre d'une puissance insoupçonnable et d'une maîtrise incroyable et regorge d'émotions. Un magnifique hommage d'une fille à sa mère mais aussi à son grand-père qu'elle n'a pas connu, une épopée lyrique tout à la fois cruelle, sombre et lumineuse, un récit d'une tristesse et d'une beauté infinies... Betty, c'est tout cela et bien plus encore...
Bouleversant...
Vibrant...
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La dernière page est tournée, j'ai dit au revoir à la petite indienne. Elle est partie rejoindre ces personnages qui m'ont beaucoup touché dans ma vie de lecteur comme Cosette, Gavroche , Tom Sawyer, Huckleberry Finn, d'autres qui m'attendent comme Lolita, Oliver Twist,David Copperfield ou Demon Copperhead. Non je ne pleure pas se sont les pollens.
J'étais un peu méfiant au début du roman, il y a eu tellement de battages sur ce deuxième livre de Tiffany McDaniel que j'avançais prudemment. Et ce fut la grosse claque.
Nous sommes dans les années 1960 Ohio. Landon Carpenter et Alka Lark se sont rencontrés dans un cimetière. Lui est Cherokee, elle est blanche.
Betty la narratrice va nous raconter l'histoire de sa famille, celle de son père une sorte de philosophe qui grâce à ses talents de conteur va nous faire naviguer dans les croyances indiennes faites d'esprits et de nature. Betty a le talent de mettre en mots ce qu'elle voit, ce qu'elle ressent. Quand on est une enfant on ne devrait pas voir ou entendre certaines choses. La violence, le racisme. Betty enterre ce qui fait mal . « Je m'étais rendu compte que les secrets que l'on enterre sont des graines qui ne produisent que du mal supplémentaire. »
Une famille c'est comme une plante, il suffit d'un rejet pour l'affaiblir ou la tuer.
Betty vit entouré de frères et soeurs, tous ont une petite lumière en eux un talent qui ne demanderait qu'à sortir. Papa Carpenter les aime ses enfants Leland, Fraya, Flossie, Trustin et Lint. Ils et elles sont un peu ses étoiles.
Voilà je n'en dirais pas plus. Betty restera ma petite indienne, l'enfant que l'on aimerait serrer dans ses bras, la consoler, la faire rire. Hélas je ne suis pas papa Carpenter.
Non je ne pleure pas, se sont les pollens.
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Sombre et lumineux. C'est ainsi que je qualifierais ce livre.

Sombre comme une enfance brisée dont les conséquences perdurent des années après.
Lumineux comme un père auprès de ses enfants.

Sombre comme une mère qui ne sait pas comment aimer ses enfants.
Lumineux comme les histoires inventées par ce père qui rendent la réalité tellement plus belle et plus acceptable.

Et en filigrane, le racisme, la pauvreté, les relations entre soeurs, les relations hommes-femmes, la violence, l'écriture, les secrets, la nature, les animaux.... et la magie des Cherokee.

Un roman exceptionnel dont on ne sort pas indemne.
Un roman tiré de la vie de la mère de l'autrice.
Un roman dur et beau à la fois. Décidément je maintiens "sombre et lumineux". Je n'oublierai pas "Betty".
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Sixième de huit enfants, Betty Carpenter grandit dans l'Ohio des années soixante. Elle, qui de tous ses frères et soeurs possède la peau la plus foncée, subit de plein fouet l'ostracisme raciste dont est victime sa famille, depuis l'union de sa mère blanche et de son père Cherokee. Elle ignore pourtant encore que cette première confrontation à la violence n'est que le début d'un long apprentissage, à mesure que d'autres drames familiaux sortiront peu à peu de leur secret. Dans son désarroi et son chagrin, Betty tient debout grâce à l'écriture. Il faut dire qu'avec son incomparable et merveilleuse capacité à tout transformer en histoires, son père lui tend un formidable tremplin…


Tiffany McDaniel s'est inspirée de la vie de sa mère, métisse Cherokee, pour nous livrer cette histoire en clair obscur, d'une singulière poésie. Versant ombre, les coups du sort pleuvent sur cette famille prise dans une de ces inextricables spirales où le malheur sait si bien enfermer ses victimes, de génération en génération. Les épisodes révoltants se succèdent, empilant les préjugés et l'injustice les plus consternants à la méchanceté et à l'immoralité les plus effarantes, dans une narration digne et sobre, dénuée de pathos et de complaisance, qui démultiplie l'impact des violences évoquées. Pourtant, Betty, elle, trouve la force de ne pas succomber à la haine, portée par l'amour d'un père qui illumine littéralement le récit. Rarement pareille figure paternelle aura à ce point transfiguré un roman, chassant à elle seule la noirceur ambiante par la magie et la poésie de son imagination et de ses histoires, opposant à la bêtise son humble et respectueuse connaissance de la nature, et insufflant à sa fille la conscience de sa valeur et de sa puissance.


Quand on songe aujourd'hui à la perte d'identité et d'estime de soi qui, à lire des auteurs comme Louise Erdrich, Tommy Orange, Joy Harjo ou Naomi Fontaine, continue à miner bon nombre des descendants amérindiens, l'on comprend tout le sens de l'héritage de Landon Carpenter à sa fille. A travers Betty, grandie dans le respect d'elle-même malgré le racisme, mais aussi le sexisme qui sévit à part égale dans le roman, c'est la force de refuser l'aliénation, qu'elle conduise au sentiment d'humiliation et à l'auto-destruction, ou à la haine et à la riposte violente, qu'infuse cette splendide histoire d'amour paternel.


De cette tragédie, née de l'imbécile mais brutale suffisance d'hommes blancs convaincus de leur supériorité masculine et raciale, irradie une lumineuse humanité : celle d'un père magnifique, humble mais véritable figure centrale du roman, indéniablement responsable de mon coup de coeur pour ce livre.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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