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Critique de mumuboc


Comment l'union de deux tempéraments explosifs pouvait-elle perdurer ? N'était-elle pas promise à l'échec comme le père de Martha l'avait pressenti ?

Paula Mc Lain se glisse dans la peau de Martha Gellhorn, cette journaliste-écrivaine, dont la plus grande passion fut d'être correspondante de guerre, de témoigner, de rendre compte des douleurs, des massacres, de la vie des hommes et femmes qui vivaient au coeur de ces conflits.

Ernest Hemingway la rencontre à Key West, un de ses fiefs, et pour lui ce fut un coup de foudre, ce grand colosse avait un coeur qui pouvait s'enflammer au premier regard. Elle, jolie jeune femme de 27 ans,  il lui a fallu un peu plus de temps et c'est sur le terrain de la Guerre d'Espagne, que ses sentiments changèrent, passant de l'admiration pour le grand écrivain renommé, du correspondant de guerre qu'il était déjà à celui de l'amour.

Leur couple était explosif car fait de deux identités similaires : le même goût pour l'aventure, le même goût de liberté, le même désir d'écrire alors comment arriver à faire durer les sentiments quand s'installe peu à peu une sorte de rivalité, quand Martha n'est identifiée que comme Madame Hemingway, quand son travail d'écriture est toujours mis en comparaison avec celui de Monsieur, déjà reconnu et qui finit l'écriture de ce qui deviendra son chef-d'oeuvre : Pour qui sonne le glas.

Martha Gellhorn a souffert de l'ombre de ce mari hors du commun, buveur, pêcheur, déjà deux fois mariés, deux fois divorcés, père de 3 enfants, imprévisible mais aussi tendre, aimant, ne pouvant vivre seul, envahit de démons qui pouvaient le laisser de longs mois sans écrire. Il eut la maladresse de lui proposer d'écrire sous son nom d'épouse, peut-être généreusement mais elle refusa, elle voulait que son travail ne soit reconnu que pour sa valeur d"écrivain, de journaliste.

Il tendit les bras et me serra tout contre lui, et je sentis mon coeur affolé, petit oiseau aimé, attrapé et réconforté. J'étais sa chérie. On ne pouvait rien faire contre cela. J'aurais beau me débattre, je n'arriverais pas à sortir de son ombre. (p379)

Martha Gellhorn était une sorte d'Hemingway au féminin, seule femme journaliste présente lors du débarquement sur les plages françaises, baroudeuse, n'ayant qu'une idée en tête : voir et témoigner de ce que ses yeux voyaient. Un tempérament fort qui ne put que s'affronter à celui de l'écrivain. Leur couple courrait à sa perte dès le début, même si chacun tenta de trouver des moyens pour le sauver.

Nous sommes tellement indépendants, lui dis-je aussi doucement que possible. Nous avons tellement besoin de vivre notre vie. Je ne sais pas comment nous allons pouvoir concilier tout cela. (p335)

Mais comment, comment, comment veux-tu que ça marche ? aurais-je dû m'écrier. Tu es le soleil et je suis la lune. Tu es le fer et je suis d'acier. Nous ne pouvons ni plier, ni changer. Au lieu de cela, je me suis approchée de lui. J'ai posé la tête sur sa bonne épaule massive de nigaud, et je l'ai embrassé, ravalent mes doutes et mes craintes. faisant taire ma raison.

- Je t'aime tellement (p336)

J'ai retrouvé certains sentiments éprouvés à la lecture de Mrs Hemingway : la force et le caractère trempé de cette jeune femme, sa volonté d'être présente à l'égal de ses compatriotes journalistes masculins sur les terrains de guerre, ne souhaitant pas devenir mère mais ayant une profonde tendresse pour les fils d'Ernest. J'ai retrouvé également la fragilité d'Ernest Hemingway, s'enflammant et épousant la source de ses émois, devenant un homme ne supportant pas l'éloignement de son épouse, mais disparaissant parfois pour rejoindre ses amis pour des parties de pêche, des beuveries.

Par contre il ne supportait pas quand "Lapin" prenait l'initiative de partir pour des reportages, n'oubliant pas son mari mais ayant besoin de cet espace de liberté pour exister.

A travers le mariage de Martha et Ernest on parcourt avec les journalistes les villes bombardées, les risques pris, les luttes fratricides, les horreurs de la guerre mais on découvre également le travail de ces deux écrivains, dévorant, égoïste qui ne laisse que peu de place à autre chose.

Comme dans son précédent roman, Paula McLain s'attache à des femmes libres, fortes et déterminées. le récit se lit d'une traite, on est embarqué dans cette vie de baroudeur, vivant à leurs côtés cette vie de nomades, côtoyant la mort mais aussi une magnifique histoire d'amour faite de douceur et d'affrontements, de tendresse et de rivalités, où leurs personnalités ont trouvé dans leur mariage un terrain de combat dont aucun n'est ressorti indemne.

Il est surprenant de constater que leur union n'a vécu que le temps de deux guerres comme si l'amnistie et la paix ne pouvaient régner entre eux.

Une sensation délicieuse. Je m'allongeai pour lire, m'imprégnant de la paix et du silence, et ne me sentant qu'un tout petit peu coupable d'être aussi heureuse de cette solitude. (p372)

Merci à la Masse Critique Privilégie Babelio et aux Editions Presses de la Cité pour cette lecture
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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