Je continue ma découverte de l'oeuvre de
Larry McMurtry, en la remontant à l'envers de sa chronologie et
La dernière séance m'a emballé.
Roman contemplatif peut-on lire ci et là ; je préfère chronique du temps qui passe, dans cette petite ville du sud des États-Unis, à quelques heures de voiture du Mexique. Thalia n'est pas à proprement parler un trou paumé, avec son collège, son cinéma, ses restaurants et son billard. Mais quand on est jeune, comme Duane et Sonny, c'est un territoire qui reste limité aux études, au sport et aux petits boulots. Alors heureusement, le soir et le week-end, il reste l'alcool et les virées, et surtout les filles.
Car finalement, dans cette petite ville empreinte de puritanisme, le sexe transpire de partout. Chez les jeunes hommes, qui ne pensent qu'à ça : c'est de leur âge. Chez les jeunes filles, qui appliquent les consignes de prudence, jusqu'au jour où elles découvrent le pouvoir mais aussi l'intérêt social qu'elles peuvent en tirer. Chez leurs parents enfin, où il apparaît parfois comme une échappatoire qui finit par laisser un goût amer, ou parfois comme une renaissance salvatrice. Tour à tour, Duane, Sonny, Jacy, Loïs ou Ruth y seront confrontés, livrant une facette différente des usages et bénéfices de la chair, finalement souvent triste.
Comme toujours, le grand art de
McMurtry réside dans cette incroyable atmosphère qu'il parvient créer par la richesse et la diversité de ses personnages et les situations souvent cocasses dans lesquelles il les met. Sur un faux rythme lent comme les journées chaudes qui n'en finissent pas, on croise à Thalia foule de personnages aussi atypiques qu'attachants, tels Sam le Lion, le jeune Billy - sauvagement déniaisé dans une scène drôle et pitoyable à la fois - et même l'entraîneur
Popper qui aborde en fin de livre sa propre phase de remise en question que j'aurais aimé voir davantage poussée.
En quelques 300 pages,
Larry McMurtry n'aura laissé aucun de ses personnages indemnes. Tous auront traversé un cap de leur vie qui les fera évoluer, perdre leurs illusions et se projeter dans un avenir plus volontariste.
La dernière séance a eu lieu, le rideau est tombé, c'est la fin d'une époque, mais la vie must go on. C'est ce qu'auront appris Duane, Sonny et les autres.
Une très belle réussite.