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EAN : 9782756419046
402 pages
Pygmalion-Gérard Watelet (07/06/2017)
3.88/5   20 notes
Résumé :
Après la mort de son père, Childéric Ier, Clovis devient le roi de tous les Francs, jusqu'à poser les fondations de la future France. Comment un jeune barbare inexpérimenté a-t-il pu supplanter ses puissants voisins et rivaux ? Grâce à sa conversion au catholicisme lui assurant le soutien des élites gallo-romaines ? À sa science militaire ? Certainement. Mais avant tout grâce à l'action de trois agents secrets, une femme et deux hommes. Obéissant chacun à des motiva... >Voir plus
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J'ai découvert Patrick McSpare par la BD, mais je voulais approfondir en le découvrant sous l'angle du roman : en tant qu'amateur d'Histoire, mon choix s'est porté sur le stand alone intitulé Mérovingiens.
1er bon point il s'attaque à une période peu parcourue par les auteurs de romans historiques, le Ve siècle après Jésus-Christ, une époque trouble ou entre antiquité tardive et haut moyen-âge les rois et les royaumes se font et se défont en quelques années. le côté historique peut difficilement être pris en défaut car l'auteur a fait du bon boulot, après j'ai tiqué sur les troubadours, le concept de la monarchie de roit divin qui m'a semblé mal établie puisque mélangeant facilement paganisme et christianisme, et quelques attitudes trop modernes pour être honnêtes (mais ça, c'est le lot de tout roman historique ^^). 2e bon point au contraire de bon nombre de ses collègues il se contente pas d'une biographie ou d'une chronique romancée linéaire et prévisible puisqu'avec des personnages très connus tout est couru d'avance. Nous suivons donc l'ascension de Clovis et la formation du Regnum Francorum non en suivant les heurs et malheurs du souverain des Francs Saliens, mais ceux de ses trois maîtres assassins (eux on en connaît rien, donc on peut créer un récit avec de l'action, de l'émotion donc du suspens) : l'Irlandais Wyso, la Suève Valesta et le Gallo-romain Gunthar... Tous les trois sont des pions entre les mains du mystérieux sorcier Daga Wulf, et l'auteur recours à tous les codes de la la fantasy à capuche du coup on retrouve le trope de l'assassin contre son gré, une transposition médiévale du manga "Crying Freeman" : entre Robin Hobb et David Gemmell on retrouve donc des personnages bons ou mauvais qui dans chacun de leurs agissements sont motivés par des passions positives ou négatives... C'est le 3e bon point, j'ai retrouvé le style de Patrick McSpare : qui de Wyso qui agit par amour des siens, de Valesta qui agit par reconnaissance envers son prétendu sauveur et de Gunthar qui agit par vengeance va basculer du Côté Obscur !

Nous ne sommes pas dans la légende dorée de la France fille aînée de l'Église racontée par l'hagiographe Grégoire de Tours et véhiculée par les historiens de garde nationalistes voire néoconservateurs, mais dans la légende la plus noire, là où il n'y a plus d'espoir : la naissance du royaume franc se fait dans le sang à grand coup d'intrigues, de complots et d'assassinats... J'aurais adoré ce roman il y a quelques années, mais là j'overdose le grimdark : c'est le syndrome GRR Martin ! La planète est le royaume du mal, l'homme est un loup pour l'homme, et tout le monde est en guerre contre tout le monde, chacun pour sa gueule et il faut être exploiteur pour ne pas être exploité : c'est les philosophie de l'hypercapitalisme et la propagande de l'ultralibéralisme que la ploutocratie mondialisé veut nous inculquer et nous imposer et moi je suis un être humain donc je n'en veux pas !!! Les rois sont tous des fous sanguinaires et/ou des tyrans totalitaires (à part peut-être Syagrius le dernier romain, et le roi Wisigoth Alaric II qualifié par ses sujets de « bon roi »), les aristocrates sont tous des pervers narcissiques sociopathes, psychopathes, sadiques, sado-masochistes, pédophiles (rayer les mentions inutiles) et les soldats sont tous des pillards avides de meurtres et de viols (à ça, on a la main lourde sur les scènes de sexe, de violence, et de sexe violent !). On fait profil bas avant de supplanter ses supérieurs hiérarchiques à l'occasion d'une bonne trahison, dans l'espoir évidemment de devenir un jour calife à la place du calife, on terrorise ses subordonnées en châtiant cruellement les plus compétents et les plus incompétents, on élimine ses rivaux, puis ses ennemis, avant de s'en prendre à ses alliés et à sa famille... Clovis se dit animé d'une mission, mais tout n'est que calcul bassement personnels et tout ses beaux discours ne sont qu'un paravent pour ses ambitions qui ressemblent plus à des vices qu'autres choses : lui seul importe, le reste du monde n'est existe que pour le servir lui et ses désirs malsains et délétères de contrôle absolu... Un personnage puant voire répugnant !

Sur le logique interne du récit, je n'ai pas trouvé que le fait que les assassins ne soient pas francs aient apporté grand-chose à l'ensemble. Wyso est Irlandais, et alors ? Il est le fils adoptif du Comte Brent, et alors ? Il aurait eu une caractérisation à approfondir, et un relationship drama à étoffer mais encore une fois on ne sort pas du grimdark (mais peut-être parce que je n'ai pas réussi à véritablement rentrer dedans). le côté "Mission Impossible" est intéressant mais un peut répétitif : on se déguise, on utilise une identité d'emprunt, on observe, on recours aux méthodes de compromission MICE bien connues de services secrets modernes pour placer ses pions, puis in trucide ceux à qui la tête ne revient pas à Clovis, pour que celui-ci ne se salissent pas les mains et puissent se donner le beau rôle à posteriori (mais personne n'est dupe : les morts suspectes sont légions depuis qu'il porte la couronne). Il y a aussi un petit côté fantastique avec le sorcier, ses sorcières démones et ses messagers envoûtés mais comme l'auteur est à chaque étape du récit davantage dans la démystification que dans la mystification... Puis vient fatalement la résolution : remember Keyser Söze ! Achtung spoilers everywhere ^^


Malgré des qualités une lecture en demi-teinte, mais que je peux sans mal recommander.
Lien : http://david-gemmell.frbb.ne..
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Un bouquin absolument fantastique pour apprendre les détails de l'histoire de Clovis.
Comme dit ailleurs "rien ne prédispose ce petit chef barbare parmi tant d'autres à supplanter ses rivaux, plus puissants". Et pourtant, et pourtant, il fera de son petit royaume franc-salien (autour de Tournai, sa ville de naissance) un grand royaume qui ira de son royaume d'origine jusqu'à Toulouse et l'aquitaine, jusqu'à la Bretagne (sauf l'Armorique, qui résiste encore et toujours etc etc..., mdr ! avec laquelle il sera obligé de signer un pacte.), jusqu'à la Provence, jusqu'à la Rhénanie...

Moi qui n'avais qu'un vague souvenir de collège de tout ça, voilà que je connais à présent tous les détails de ses conquêtes, assassinats compris, de ses alliances à géométrie variable, ruses et trahisons diverses, car P. McSpare a suivi scrupuleusement le détail de ce qu'il nous en reste.

Il va même jusqu'à nous expliquer à la fin que, comme ce sont les vainqueurs qui écrivent L Histoire, l'historien prêtre catholique fera en sorte que quelques événements deviennent contemporains (notamment de son baptême), ou soient plus éloignés que dans la réalité, afin que l'immense duplicité de Clovis, notre roi fondateur, n'apparaisse pas trop dans toute sa splendeur, et qu'il faut que cette Histoire écrite, ne réapparaisse qu'après la mort de tous les contemporains de Clovis, afin que plus personne ne puisse en contester la véracité.

Plus rien ne m'échappe de la conquête du petit reste d'empire romain de Syagrius, de la fuite de celui-ci vers Toulouse, fief d'Alaric II, roi des Wisigoths, qui devra plus tard se replier vers son royaume d'Espagne. du détail des éliminations de sa propre famille. de son mariage avec la fille Clotilde du roi des Burgondes, Chilpéric II. de sa grande méfiance envers Théodoric, roi des Ostrogoths (les barbares occupent l'Italie depuis le sac de Rome par Alaric I, roi des Wisigoths, en 410. Barbares qui descendent du nord sous la pression de l'invasion des Huns, je le rappelle au passage...), auquel il marie une de ses soeurs. Bon je vais pas tout vous re-écrire, c'est juste pour dire que malgré la pléthore de personnages historiques, l'auteur arrive brillamment ici à nous emmener aux côtés des assassins de l'ombre de Clovis afin que nous suivions tout du début à la fin de ces conquêtes impressionnantes.

Car des assassinats, il y en eut, et beaucoup, et qu'il fallait bien qu'il y ait un service secret de sa majesté pour s'en charger, comme il y en a également dans les excellents romans historique de Doherty, qui se passe plus de 500 ans plus tard. C'est très bien écrit, très vivant. Sombre, brutal, bourré de violence et de scènes crues, de combats très visuels, mais ces temps-là n'étaient pas plus tendres que le nôtre, qui n'est déjà pas si tendre qu'on veut le croire. Les personnages sont sympa à suivre, pas très cohérents psychologiquement (de mon point de vue), on ne s'attache pas vraiment à eux, mais comme ce n'est pas le propos du livre, on s'en fiche. Ce sont des hommes et femmes d'action, essentiellement, et j'avoue que même parfois leurs atermoiements illogiques m'ont un peu dérangée, mais rien de bien grave. Et il y a un petit côté fantastique, très bien distillé, qui ajoute au plaisir de lecture.

Et comme ces assassinats, c'est une réalité que même les "historiens" de Clovis n'ont pu contourner, je ne vois pas en quoi c'est gênant. Au contraire, il est important de savoir que dans le fond, rien ne change vraiment. Et qu'on n'évolue pas (l'être humain "en général"), voire qu'on régresse.
Mon avis, c'est que du coup, on ne fait pas ce pour quoi on est là, et qu'un jour où l'autre ça nous retombera sur le pif, mais ça, c'est que mon avis, bien sûr.

Et comme j'adore les bouquins qui me permettent de re-apprendre L Histoire avec bonheur, bah coup de coeur, voilà, paf !!! (surtout que je lis en parallèle un bouquin qui m'ennuie au plus au point, et il bénéficie de l'effet en retour, lol).
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Chronomobile parée, on décolle dans cinq minutes, direction la Belgique seconde en l'an 481. Rendez-vous avec Clovis Ier, LE Clovis, notre Clovis national si on aime donner dans le cocardier (en occultant que le bonhomme est un Germain…).
Oublie le fier guerrier tout en muscles et moustache, capable de savater de l'Alaman à la douzaine, on parle d'un gamin de quinze ans qu'a à peine du poil au menton. Il est beau, le rex Francorum…
Un môme qui règne sur la région de Tournai et va bientôt faire valser les têtes et les royaumes lors du fameux “Tournai manège”.


Le Ve siècle, une période qu'on verrait propice à un récit plein de batailles épiques et de castagne XXL… et où McSpare tente le pari du feutré. du feutré barbare, hein, on se dézingue à la hache, mais en loucedé. Un roman historique d'espionnage sous le règne de Clovis, idée maligne ou je ne m'y connais pas. Parce que oui, à l'époque on guerroie à fond de train mais pas que. Avant et après chacune de ces bastons en rase campagne, il se signe moult traités d'alliance et de partage des dépouilles, il se complote intrigues de (maire du) palais, magouilles, mariages arrangés, assassinats de parents encombrants pour la succession ou de chefs de guerre à la loyauté douteuse. du pain bénit pour les diplomates, espions et autres tueurs de l'ombre. du Mission:Impossible avant l'heure.


Période riche donc complexe : il naît et meurt un royaume par semaine, une kyrielle de noms germaniques et latins à retenir, des dates comme s'il en pleuvait, pas toujours précises par-dessus le marché. Les grandes invasions obligent à un effort conséquent de mémorisation, tu m'étonnes qu'elles soient mal aimées. En prime la chute de l'Empire romain, ZE modèle… Donc les barbares, pas glop dans l'imaginaire collectif. Rien que le terme “barbares”, dans le genre vendeur…
Je ne me suis pas amusé à vérifier chaque détail historique du roman – l'idée n'étant de chercher à tout prix à prendre l'auteur en faute –, en tout cas, rien ne m'a donné envie de cogner la tête de l'auteur avec une brique jusqu'à ce que mort s'ensuive. de mes souvenirs de la période (et des recherches que j'ai effectuées, parce que je n'ai pas pu m'empêcher), le contexte, l'ambiance, les faits historiques tiennent la route. Pas d'anachronisme aberrant ou de contresens majeur. Quant aux libertés prises avec l'Histoire, elles tiennent de la licence poétique, de la logique, de la fiction maîtrisée, pas du grand n'importe quoi.
Un cadre historique aussi fouillé et précis demande du boulot, tant en recherches brutes qu'en compréhension. Et là, y a deux écoles : les bosseurs et les foutriquets. McSpare appartient à l'évidence à la première. On y croit, à son monde romano-barbare.
Et en plus, c'est bien fait. Pas d'exposé assommant dans le corps du texte ou en note, les éléments historiques sont distillés dans le récit et passent tout seuls sans casser le rythme narratif. Mention spéciale à la violence de l'époque, très bien rendue, sans excès bourrin gratuit.
Mérovingiens s'impose comme un des meilleurs romans historiques que j'aie pu lire, aussi bien pour le travail de recherches que dans la façon d'intégrer son matériau en finesse. Un roman du niveau d'un Furor (Fabien Clavel) ou d'un Enjomineur (Pierre Bordage).
Patrick, tu m'as bluffé et j'aime autant te dire que sur la veine historique, c'est vraiment, mais alors vraiment, pas donné à tout le monde.


Sur la forme et la construction, rien à redire. McSpare déploie un récit au passé simple et à la troisième personne, centré pour la majeure partie sur le personnage de Wyso. Un bon choix de point de vue qui permet d'en utiliser d'autres sans incohérence (y a rien qui m'énerve plus qu'un roman à la première personne qui s'offre des scènes à la troisième alors que le je-personnage – donc le lecteur – n'est pas censé savoir ce qui se passe ailleurs).
Et le passé simple, bien vu aussi, même si j'ai eu peur au début. J'avoue avoir de plus en plus de mal à supporter ce temps archaïque chez les auteurs du XXIe siècle. A l'heure actuelle, personne n'utilise plus cette forme antédiluvienne à part les romanciers. Temps de l'artifice par excellence qui torpille l'immersion dans un bouquin. Ici, il passe très bien, donnant au récit un côté chronique à l'ancienne, roman d'aventures de quand j'étais gamin, sans pour autant puer la naphtaline ou la prétention littéraire. Fi du passé simple pépère en mode XVIIIe, le style est très dynamique, moderne dans sa rythmique.
Quant à l'intrigue, pour ne pas déflorer le suspense, je ne révèlerai pas que le coupable est le maire du palais Moutardic avec le scramasaxe dans la salle du trône.
Plutôt que délayer une seule mission sur 500 pages en brassant assez d'air pour enrhumer le lecteur, McSpare reste dans la veine historique et s'installe dans le temps long (enfin, quinze ans en Histoire, c'est court, mais en termes romanesques, la durée s'apparente à du temps long). 481-496, voilà qui laisse de la marge… et fait la part belle aux ellipses narratives. Là, tu vas me dire que c'est un peu facile d'évacuer des mois voire des années à coups de “bien plus tard”. Oui mais non, mine de rien, ce n'est pas évident de savoir quand ne rien dire alors que le travail d'écriture consiste à exprimer. Je préfère de loin un raccourci à un chapitre qui tire à la ligne en n'ayant rien à raconter. Ici, on ne s'ennuie pas et tant mieux.


Mérovingiens, mélange des genres réussi, à cheval entre histoire et fiction, entre thriller, espionnage, cape et épée, entre Antiquité tardive et Moyen Age naissant. Avec de la fantasy dedans… ou pas. Quelques éléments de merveilleux fleurissent çà et là, sans qu'on sache trop s'il s'agit de “vraie” magie ou d'une énième manipulation qui tire parti des croyances de l'époque. Je rappelle qu'on se situe au Ve siècle : dans la tête de 99,9% de la population, la magie est une réalité, les dieux existent et se manifestent, les prodiges sont monnaie courante (cf. les tours de passe-passe de certains martyrs chrétiens qui cartonneraient aujourd'hui à Vegas).
De fait, McSpare livre un roman très contemporain. A l'heure où les gouvernements rivalisent d'imagination pour balancer à leurs ouailles chiffres fantaisistes et bobards plus énormes que l'organe de Siffredi, où les grands groupes contrôlent l'information et/ou traficotent à qui mieux-mieux (lasagnes au boeuf/cheval, voitures qui ne polluent pas mais en fait si…), où je sens que je vais avoir un mal fou à terminer cette phrase à rallonge que je vais stopper là comme ça hop. Et pendant ce temps, vas-y qu'il fleurit des fake news prises pour argent comptant, des visages du Christ sur des tartines de pain grillé, des abductions extraterrestres, des complots Illuminati, des activités paranormales auto-suggérées et j'en oublie. Faut avouer que manipuler les masses n'a rien de bien difficile quand on voit à quoi icelles consacrent leur intelligence (sic). Pas à dire, on a beaucoup mûri dans nos têtes depuis les Francs…
Mention spéciale au portrait de Clovis, sans doute plus proche de la réalité que la version édifiante de Grégoire de Tours. Sanguinaire par la force des choses, avide de pouvoir, manipulateur, calculateur, opportuniste, prompt à renier sa parole, “pragmatique” diraient nos politiques d'aujourd'hui, le roitelet du Ve siècle ne dépareillerait pas sous la Ve République.
Mérovingiens, c'est ça, l'air du temps, cette faculté à placer derrière chaque fait, même le plus minuscule, un grand plan connu de quelques initiés. A ceci près que le roman tient beaucoup mieux la route que les théories délirantes de complots reptiliens. Et c'est aussi sur le temps long un rapport au pouvoir qui n'a pas changé depuis qu'on a inventé le concept. On attend toujours l'avènement du philosophe-roi pour remplacer les boulimiques de pouvoir, grands sacrificateurs de pions (donc de gens) depuis que le monde est monde.
Lien : https://unkapart.fr/meroving..
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Avec Mérovingiens, Patrick McSpare nous offre un nouveau récit de fantasy historique, son genre de prédilection, en s'attaquant cette fois au règne de Clovis. Très peu de récits historiques retracent la vie du premier roi des Francs, s'attachant à en dépeindre un portrait glorifiant loin d'être exhaustif. L'auteur en profite pour s'engouffrer dans les trous laissés par l'Histoire et l'arranger à sa sauce : il crée trois agents secrets qui interviendront dans l'ombre et permettront à Clovis de devenir le roi des Francs. Et c'est une réussite !

Mérovingiens est un roman original et passionnant qui permet une découverte du Vème siècle de notre ère. C'est, à ma connaissance, une période peu exploitée en fantasy. L'auteur n'en est pas à son coup d'essai et son travail sur le background est une fois de plus conséquent et impressionnant. Il donne envie de vérifier chaque nom, chaque mort, chaque événement et, si vous êtes aussi curieux que moi, vous constaterez qu'il est difficilement pris en défaut. M'attendant à un récit somme toute classique, j'ai été agréablement surprise de ne pas trouver en Clovis le personnage principal. Nous voilà la suite de Valesta, Gunthar et Wyso, trois agents secrets sous les ordres du mystérieux sorcier Daga Wulf. Ainsi, Patrick McSpare évite de tomber dans une retranscription linéaire de la vie du roi et nous offre un récit neuf, des personnages imprévisibles et un point de vue inédit sur les événements. Mérovingiens est donc bien l'histoire de Clovis, mais celle qui fut cachée, parfaitement résumée par le titre : Les royaumes naissent de l'ombre.

Nous voilà donc partis à l'aventure auprès des agents secrets, trois personnages complexes et déchirés qui travaillent pour le mystérieux Daga Wulf. Nous rencontrons d'abord Wyso, un jeune guerrier forcé de devenir manipulateur et assassin contre son gré. C'est son point de vue qui sera majoritairement emprunté au cours du récit. Valesta ensuite, qui s'annonce comme le personnage cliché de la femme assassin aussi belle que sans coeur, mais qui devient rapidement bien plus consistante et intéressante. Gunthar enfin, assoiffé de vengeance, plus mystérieux encore que la jeune femme. Ce sont trois personnages nuancés, mus par des motivations diverses qui peuvent sembler légitimes …ou non. Tout comme ils peuvent être attachants et devenir répugnants quelques pages plus loin. Patrick McSpare arrive brillamment à donner de la consistance à ses héros et à les faire s'imposer dans un récit historique. Ils sont aussi réalistes de par leurs attitudes et leur psychologie que grâce à l'habileté avec laquelle l'auteur les imbrique dans toutes les machinations et les zones d'ombres laissées par l'Histoire.

Patrick McSpare nous offre ici un roman complexe et travaillé, mais surtout très crédible. Les personnages réels ou créés par l'auteur évoluent ensemble et leurs destins s'entremêlent parfaitement pour raconter l'histoire telle qu'elle est, faisant presque oublier que Mérovingiens est une fiction. le tout est conté d'une écriture fluide et efficace, qui ne laisse guère de place à l'imagination du lectorat qui doit s'attendre à des scènes de violences parfois assez graphiques, mais qui sait aussi mettre en image l'évolution psychologique de ses personnages avec talent. Un roman ambitieux, passionnant et instructif !
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Une récit historique tout simplement coup de coeur ! Ce roman se propose de révéler les coulisses de la naissance du royaume de France, rien de moins… Bluffant et réaliste ! L'auteur prend le parti de l'aventure et nous suivons donc Wyso, contraint de devenir espion du roi Clovis, dans ses périlleuses missions.

Dans la mesure où le règne de Clovis n'est connu qu'à travers le récit hagiographique L'Histoire des Francs de Grégoire de Tours, de nombreuses zones d'ombres demeurent : Clovis fit assassiner beaucoup de gêneurs, mais comment ? Patrick Mc Spare se livre ici à un exercice de haut vol : en respectant les faits tenus pour certains, imaginer tout le détail des missions des espions. C'est jouissif, et l'on n'a de cesse de vouloir vérifier les éléments historiques. On est dans une histoire plus réelle et palpable que la version officielle.
L'époque choisie est en soi passionnante : le début du Haut Moyen-âge ! C'est un bouillon d'où va émerger notre civilisation actuelle : fin de l'empire romain, dont seul l'empire d'Orient et quelques places fortes comme Soisson demeuraient, Royaumes de « barbares » Wisigoth ou Ostrogoth bien plus structurés que l'on a tendance à le penser, manigances des « évèques » pour imposer le pouvoir temporel de l'Eglise. C'est une période plus fascinante que ne le conçoit habituellement l'imaginaire collectif qui a tendance à rabaisser indument l'ère médiévale.

Ensuite la narration étalée dans le temps, le temps long de la politique, nous fait apprécier autrement la valeur du contexte historique. Et permet de déployer l'évolution psychologique des personnages ! Parlons tout d'abord de Wyso, un héros qui se pense guerrier avant tout mais se trouve à l'aise dans la peau d'un manipulateur, d'un maître espion, en raison d'un chantage. Il passe par tous les stades : colère, déni, résignation, mort intérieur, rage de nouveau. Sans réellement s'attacher à lui on éprouve une grande compassion pour sa personne. Par contre j'admire Valesta, froide meurtrière et personnage secondaire au début du roman qui prend de l'ampleur tout au fil du récit. Quant à Gunthar, il reste le plus mystérieux de la bande d'espions, et ne semble animé que par la vengeance. Théodoric le Grand, roi ostrogoth qui se sent devenir fou ou encore Alboflède, bouillante soeur de Clovis m'ont particulièrement plu. Si vous avez aimé la galerie de personnages de Game of thrones, vous serez conquis par ces personnalités ambigües et complexes que l'on aime détester.

En plus de toutes les missions d'assassinat et de manipulation des trois agents, le fil conducteur du récit est l'énigme que doit résoudre Wyso : qui a enlevé Guénolé ? Où est détenue leur fille ? Pourquoi le tordu Daga Wulf prétend-il ne pas être le responsable de leur disparition, mais entretient-il le chantage pour faire manoeuvrer Wyso à son gré ? Est-il sorcier, démon ou simple mortel ? La conclusion du roman devrait vous surprendre. Pour ma part je n'ai rien vu venir… Entre indications données au compte-goutte et fausses pistes, qui est le plus manipulateur ? L'auteur sans doute.
La belle langue va de pair avec le récit historique. le style est tout en plein et délié, on aimerait lire ce texte sur un parchemin, gratté à la plume.
De l'action et des trahisons à la louche, une dose d'érotisme, une pincée de fantastique et même un zeste de romance, il y a tout pour plaire au lecteur dans ce récit. Plus que de l'Histoire, une belle histoire…
Lien : https://lireetclaire.wordpre..
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
- Combien de Francs Clovis assisteront-ils au baptême, d'après Clotilde et Geneviève ? s'informa Rémi.
- Trois cents.
- Tu écriras qu'ils étaient trois mille, Grégoire. Ne craignons par la démesure tant qu'elle glorifie Dieu.
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Ces barbares de Francs sont incapables de comprendre l'idée abstraite de l’État sur laquelle reposait l'Empire. Pour eux, la royauté représente un individu et le royaume est un patrimoine familial.
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Découvre que la duplicité gouverne chaque esprit, que nous sommes seuls de la naissance au trépas, que nous devons agir sans états d'âme.
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Le dieu unique et fédérateur constitue l'instrument final de la domination. 
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L'Homme excellait à rebâtir ce que les guerres détruisaient.
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