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Hélène Michoux (Traducteur)
EAN : 9791038701779
192 pages
Zulma (09/03/2023)
4.29/5   66 notes
Résumé :
Roman d'aventures et de passion couronné par le prix « Vivre Livre des lecteurs de Val d’Isère* ».

L’on y retrouve la force et la simplicité des récits racontés à la veillée, voire la force d’une tragédie grecque qui nous plonge dans les relations sociales d’une contrée, juste avant la guerre civile d’Espagne, dans les Pyrénées aragonaises. Et qu’arrive-t-il quand l’amour, malgré le travail exténuant, naît chez l’un de ces déshérités. Cet amour est p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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Paru en 1998 et récemment réédité par les très belles éditions Zulma, « Du givre sur les épaules » est un court roman qui évoque un conte d'autrefois narrant l'épopée chevaleresque de son héros sans peur ni reproche.

L'action se situe au coeur des années 20, il y a un siècle à peine, dans les Pyrénées espagnoles. Un siècle qui ressemble à une éternité tant le mode de vie des modestes bergers des lieux évoque bien davantage le Moyen-Âge que notre XXIe siècle ultra-connecté.

Un article paru dans l'« Heraldo de Aragon » consacré aux évènements survenus dans un petit village pyrénéen déclenche l'ire de ses habitants. le narrateur, qui est aussi l'instituteur du village, se voit confier la tâche de rédiger une réponse destinée à rétablir la vérité travestie par les errements d'un journaliste mal informé.

Après avoir collecté les dires parfois contradictoires et toujours intéressés des parties concernées, l'instituteur en fin de carrière décide de nous livrer sa version des faits, qui n'est évidemment pas celle de la petite communauté montagnarde.

Ramón est encore un jeune adolescent lorsqu'il tombe amoureux fou d'Alma, l'unique héritière de la plus riche famille du village. Un coup de foudre incandescent. Une impasse aussi. le jeune berger sans le sou n'a en effet aucune chance d'obtenir la main de la jeune fille la plus convoitée des lieux.

Ramón ne se décourage pas si facilement et mène sa rude tâche de berger avec un zèle stupéfiant dans l'espoir un peu fou d'acquérir la respectabilité nécessaire pour demander la main de celle qu'il aime de tout son coeur. Las. Don Mariano, le père d'Alma, devine l'idylle naissante entre le beau berger et sa fille aux traits délicats. Madré et sans pitié, le riche propriétaire congédie devant témoins le jeune homme qui était à son service et interdit à ses confrères de faire appel à ses services.

Ramón jure devant la foule de rassembler le montant de la dot et se fait contrebandier. Il va devenir Desperado, l'homme du peuple qui sillonne les Pyrénées entre la France et l'Espagne, et se dresse contre les puissants.

À travers l'épopée intemporelle de son héros, Lorenzo Mediano nous propose tout à la fois une épopée, un conte populaire et une fable politique. En défiant les propriétaires de la région, Ramón devient la figure iconique des gens de peu, de ceux qu'un système patriarcal moyenâgeux a condamné à une vie sans saveur. Sa rébellion contre Don Mariano et ses riches acolytes est évidemment une métaphore de la révolution qui se profile.

À travers un récit intemporel, qui évoque davantage un conte d'antan qu'un roman social situé au XXe siècle, l'auteur appréhende avec brio le ressentiment des opprimés envers l'entre-soi des maîtres de ce monde. Derrière une histoire d'amour archétypale qui voit un jeune berger courtiser une « princesse », derrière la révolte épique d'un jeune homme refoulé par les puissants, se dissimule le véritable enjeu du roman : Lorenzo Mediano aborde la fin à venir d'une société patriarcale travaillée par des inégalités trop manifestes, où il est impossible de s'élever socialement, sauf à prendre le maquis à ses risques et périls.

« Parce qu'ils étaient pour moi comme une fleur dans le désert, une promesse qui nous réjouit par sa seule présence, un message d'espoir qui me disait que dans le monde il existe autre chose que des maisons, du bétail, des terres, de la faim et de la haine. »

La beauté de l'amour invincible entre Alma et Ramón redonne une forme d'espoir à l'instituteur ainsi qu'aux villageois qui entrevoient la possibilité d'un ailleurs, d'une vie qui ne se réduit pas à un dur labeur sans récompense. L'existence d'une transcendance.

S'il dénonce l'injustice ontologique du patriarcat qui règne sur les montagnes depuis des siècles, « Du givre sur les épaules » est aussi une déclaration d'amour aux habitants du village, ces montagnards durs au mal, ces paysans peu éduqués qui ne rechignent jamais à la tâche et nous paraissent tout droit sortis du Moyen-Âge. Une fois n'est pas coutume, je laisserai donc les mots de l'auteur conclure cette chronique.

« Il est vrai qu'ils sont durs, voire cruels ; vindicatifs, ignorant le pardon ; parfois, la pauvreté même du lieu en fait des misérables. Certes, les lois anciennes qui les gouvernent sont dures, asphyxiantes, impitoyables. Mais ces montagnards sont aussi tenaces, loyaux, frugaux, endurants. Ce mélange de qualités et de défauts, de superstition et de savoir, leur a permis de survivre depuis un millénaire. Et si parfois ils se haïssent et s'entre-tuent, au moins ils se haïssent et se tuent de manière personnelle et toujours pour des raisons concrètes : un morceau de terre, une femme, une offense. Ils ne tueront pas quelqu'un parce qu'il est d'une autre race ou parce qu'il n'est pas d'ici ou encore parce qu'il parle une autre langue ou a d'autres idées, comme le font les gens civilisés. »

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Un article parait dans un journal et met en émoi un village perdu de l'Aragon . Les villageois, pour la plupart analphabètes, veulent un droit de réponse et demandent à l'instituteur de recueillir leurs témoignages avant de contacter le journal. L'instituteur va tout nous raconter. Et nous offrir un beau moment de lecture.


Très belle histoire , sous forme de conte, qui dépeint les Pyrénées aragonaises et la vie , extrêmement dure , qui pouvait y être menée dans les années 30, à un moment où l'histoire de l'Espagne allait basculer.

La hiérarchisation de la société y est très bien décrite , ainsi que la beauté des paysages et la rudesse du climat.
Mais cette hiérarchisation va vaciller , ou tout au moins pourrait le faire . Un berger se rebelle , par amour, lui qui est mal né et n'a que ses bras pour trimer et ses yeux pour pleurer. Pour autant, il veut suivre les règles et gagner suffisamment d'argent pour arracher son amour des bras d'autres prétendants plus fortunés . Sauf que sa hardiesse dérange.

Et donc en plus d'être instructif, ce livre nous sert une très belle histoire , faite de givre , de brebis, de trafic, de jalousie , d'opportunisme mais aussi d'amour et d'abnégation.

Une très belle surprise, comme le sont souvent les romans édités par Zulma
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Années 1930."Un mensonge s'il est partagé par tous les membres d'une communauté, devient d'abord crédible,puis possible et enfin vérité".
C'est cette vérité, pour "soulager sa conscience", que le narrateur, instituteur miséreux à Biescas de O bago (bourgade d'élevage espagnole aux "coeurs haineux"); fait éclater au grand jour dans du givre sur les épaules.
Le prix "Vivre Livre" des lecteurs de Val d'Isère (2009) attribué à ce roman d'amour,où la passion est plus forte que la mort, couronne un petit chef-d'oeuvre qui prend le lecteur aux tripes.
Vivre Livre, oui, mais Vivre Libre aussi, telle pourrait être la devise du simple berger Ramon, un déshérité dont l'esprit vif a touché son instituteur, qui aime la fille unique et héritière de Maître Mariano Banegas, pour son plus grand malheur,car même si l'attirance est réciproque, le patriarcat prévaut et le manque d'argent empêche les unions malchanceuses.
Lorenzo Médiano, excellent auteur espagnol, oppose dans ce témoignage, le bien et le mal,les humbles et les puissants; décrit la "rudesse de la terre et du climat" qui pousse aux passions et à la déraison; relate le destin écrit d'avance (analphabétisme pour les pauvres, éducation pour les riches);conte les rumeurs qui se propagent et les sobriquets qui en découlent ("le chapon" pour Don Mariano Banegas, qui devenu stérile suite à des oreillons,s'efforce de prouver sa virilité, "Desperado" pour Ramon acculé à devenir contrebandier pour acheter une fille à son père sans toutefois y parvenir);dénonce une époque où les filles sont une simple marchandise offerte au plus argenté ou une prime contre une meurtre prémédité; démontre comment un "symbole" devient une "légende".
Basé sur des faits historiques véridiques (révolution espagnole en branle où les syndicats et les partis de gauche sont friands d'armes passées en contrebande) ce roman d'amour, de haine et d'aventure manie les émotions fortes (colère,indignation,lâcheté,autorité,rébellion, courage,malhonnêteté,cynisme,rancoeurs,possessivité,sensibilité,frustrations,espoirs,folie,trahison,égoïsme,résistance,désespoir....
Lorenzo Mediano brosse un beau portrait d'homme déterminé,intelligent,passionné,obstiné,révolté contre l'injustice,prêt à tout pour obtenir celle qu'il a idéalisée et pour se sortir de sa triste condition.
Que vaut la vie d'un homme? s'interroge-t-on après lecture.Jusqu'où peut-on aller pour satisfaire sa volonté ou son désir?A quelles extrémités pousse le désespoir?Les dés d'une vie sont-ils pipés d'avance? Les différences forcent-elles au rejet d'une communauté?
C'est une lecture SIX étoiles que je recommande car le destin de Ramon est bouleversant et cette tragédie, dont le romantisme rappelle Roméo et Juliette de Shakespeare (bien que différent), reste longtemps en mémoire même après "rien" le mot de la fin car ce "rien" pèse très lourd!
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Parmi les conteurs internationaux, voici un auteur espagnol qui écrit ici sur la vie à la montagne, à la frontière pyrénéenne. Dans ces villages et ces familles habituées à la dureté des hivers et à la caillasse, les règles sont établies par les grands propriétaires, les autres les servant docilement. Jusqu'au jour où un jeune berger tombe amoureux de la fille du patron. Il va être courageux et il veut bien faire pour être à la hauteur, et être autorisée à l'épouser. Mais voilà : le domaine ne doit pas être légué a n'importe qui, et la fille non plus secondement. La situation va dégénérer, et c'est l'instituteur du village qui nous raconte toute l'histoire. Joli conte simple qui a connu un fort succès hors de nos frontières, un Romeo et Juliette version montagnarde.
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Ai-je choisi le livre pour sa magnifique couverture??? Hummmmmm fort fort probable compte tenu des mes intérêts professionnels (et personnels) pour tout ce qui touche aux animaux et à l'élevage. Ai-je dépassé le stade de la magnifique couverture pour apprécier l'histoire! Et oui!
Années 30, cette histoire (dramatique) est racontée du point de vue d'un instituteur miséreux et vieillissant d'un petit village espagnol des contreforts des Pyrénées. L'histoire? Une histoire d'amour impossible entre Ramon, un pauvre berger et Alba, fille d'un "riche" propriétaire (plus riche dans le village mais pas forcément aux vues du reste de la société). le vieil instituteur ne pourra que constater, observer impuissant à leur histoire qui s'enfoncera dans la destinée. Parce que c'est la force de ce récit, c'est de démontrer la société locale de ce petit village et le fatalisme de la vie de chacun des membres de la communauté. Ramon fera tout ce qu'il peut pour avoir le droit de convoler en juste noce.
Roman très intéressant à lire
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Un mensonge s'il est partagé par tous les membres d'une communauté, devient d'abord crédible, puis possible et enfin vérité.

Chapitre 1
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La majorité d’entre nous les hommes, nous travaillons pour continuer à vivre, sans très bien savoir pourquoi nous existons et nous réalisons notre tâche honnêtement mais sans trop de zèle. D’autres travaillent par ambition bien qu’ils aient suffisamment pour survivre, ils souhaitent avoir plus pour surpasser leur voisins, pour ajouter des terres à leur patrimoine, […] ils agissent comme s’ils ne devaient jamais devenir poussière. Ces hommes et ces femmes sont ceux qui construisent des usines, ceux qui bâtissent les villes, ceux qui gouvernent les États.
Cependant il existe une catégorie particulière d’hommes qui sentent au plus profond de leur coeur un irrépressible désir. Une ivresse brouille et en même temps aiguise leur entendement; une force plus puissante que les conventions sociales et que la sage prudence les entraîne à commettre des folies. Ces hommes sont ceux qui perturbent le monde ou bien le sauvent; ceux qui provoquent les révolutions ou les étouffent dans le sang; ceux qui produisent les oeuvres d’art ou ceux qui les détruisent.
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Tout cela nous a montré une partie très sombre de notre vie : la haine des riches contre les pauvres et celle des pauvres contre les riches ; la haine du voisin contre le voisin ; la haine du frère contre le frère. La haine. 
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Dans la ville les sentiments sont comme le blé qui pousse dans un champ mal entretenu,qui doit rivaliser avec une multitude de mauvaises herbes et ne donne alors que quelques boisseaux;par contre,dans ces villages,les sentiments sont comme un arbre fruitier que l'on fertilise,que l'on taille,que l'on soigne afin qu'aucun chardon ne lui vole sa nourriture.
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Le langage montagnard est un mélange de regards et de silences, d’expressions signifiant tout et rien, d’infimes gestes, menaçants ou amicaux, de soupirs qui selon leur profondeur signifient telle ou telle chose. C’est ainsi que se connaissant depuis l’enfance, ils parlent d’amour et de haine, d’amitié et ou de pouvoir, tissent des alliances ou jettent des injures mortelles; travaillent ou laissent reposer les personnes comme si c’étaient des champs en jachère.
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