Citations sur Les accords silencieux (27)
Je me sens terriblement vieille, comme si ces deux dernières années avaient été deux décennies. Comment être jeune en pleine guerre, quand l'insouciance est une offense ?
La pianiste est allée chercher dans les profondeurs de son être des notes si délicates qu'elles m'ont semblé posées à l'extrême pointe du cœur, là où la joie et la tristesse se rencontrent pour atteindre une vérité sincère, là où l'expression la plus intime éclôt pour libérer le chant d'une âme, prête à pousser un souffle plus grand qui embrase, console , porte vers la lumière.
Sur la banquette en face d’elle, une fillette dans sa robe d’uniforme à col Claudine tient, serré contre son buste frêle, un étui à violon. À côté d’elle, son père pianote sur son téléphone portable. L’écolière ne sourit pas, ses yeux sont cernés par la fatigue, une profonde lassitude se lit dans son regard. Où est la joie de l’enfance sur ce visage déjà usé par la pression parentale ? s’interroge Xià. Réussir, il n’y a pas d’autre chemin en ce monde et l’apprentissage de la musique fait partie de cette marche uniformisée vers l’excellence. Parmi tous ces petits soldats armés de leurs instruments, combien seront touchés, au plus profond de leur être, par le mystère de la musique ? Xià a envie de souffler à l’oreille de l’enfant de chérir son violon comme son meilleur ami, car peut-être détient-elle entre ses mains le secret de son harmonie au monde mais elle désire tout autant la mettre en garde contre le danger de pénétrer dans cet univers intense, riche en émotions et plein de promesses de liberté.
Seule dans le noir, Tillie guette les derniers rayons du soleil. Ils sont les rares visiteurs de sa maison de Happy Valley, les compagnons de ses interminables journées. Elle aimerait aussi accueillir le vent, sa caresse, ses murmures mais ici, il est sauvage et ne vient qu’en rafales alors les fenêtres restent closes pour éviter que les portes ne claquent et se referment sur sa solitude.
Dans ce flot, le jeune pianiste finit par disparaître, et seule subsista la musique de Beethoven, sa souffrance, son déchirement, sa colère, sa persévérance et, au-delà de la suffocation insoutenable, sa foi dans la rédemption.
Dans la nuit de son existence, il prit conscience qu'il y avait toujours eu une lumière, celle d'un amour infini qui lui avait appris à être par la musique et qui s'était révélé sous des traits aimés. Cet amour absolu qui anime, inspire, sublime, console, pardonne et porte l'espoir, était celui qu'il avait voulu mettre au centre de sa musique et de sa vie avec toutes les limites de son humanité mais avec une sincérité inaltérable. Cette révélation fulgurante embrasa son cœur. p. 166
Le sol, couvert des innombrables portées de notes qui l'avaient maintenu à la surface ces dernières semaines, se mit à vaciller.
Il avait le téléphone en horreur, parce qu'il trompait l'instant par l'illusion de la présence et laissait un vide que seuls les mots écrits pouvaient combler.
La lecture de ces poèmes dirigera peut-être vos pensées vers moi, les miennes resteront tournées vers la lune.
« Chaque mois la lune essaie en vain
De peindre votre portrait ;
Échouant à saisir votre grâce,
Elle détruit son œuvre et recommence. »
Nimbée d'une lumière ocre, floutée par l'ombre dansante des arbres, la silhouette de cet ami venu de loin épousait les formes de ce paysage si familier et dansait entre ciel et terre, dans un espace affranchi de tout temporalité. D'un autre monde.