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Critique de frandj


Rigoberta Menchú, citoyenne guatémaltèque appartenant à une ethnie indienne (maya), est très connue depuis qu'elle a reçu le prix Nobel de la paix en 1992. Mais, en réalité, ce qui fait toute la valeur de "Moi, Rigoberta Menchu", c'est qu'il a été publié à une époque où elle était encore inconnue. Exactement au même moment, une épouvantable guérilla opposait l'armée à une rébellion indienne: c'était la lutte du pot de terre contre le pot de fer. Elizabeth Burgos a rédigé ce livre, à partir d'entretiens réalisés avec Rigoberta Menchù qui, alors âgée de 23 ans seulement, séjournait en Europe. La date de publication est 1983.
Il ne s'agit pas seulement d'une biographie. Certes, le parcours personnel de Rigoberta Menchú présente de l'intérêt, mais il évoque surtout la vie extrêmement difficile de son peuple, brimé de tout temps par les "Ladinos" (métis) et massacré par l'armée au moment même où elle-même donnait son témoignage. Les premiers chapitres, particulièrement passionnants, décrivent en détails les us et coutumes des Quichés, son ethnie. En découvrant ce livre, j'ai été frappé par l'immense respect des Indiens envers la nature, leurs moeurs pacifiques et leur culture complexe et respectable. C'était vraiment la première fois que j'avais accès à un tel témoignage de première main, et cela m'a ouvert les yeux sur la richesse de la culture des ethnies autochtones.
Mais peu à peu le lecteur comprend que ce n'est pas tout: l'oppression que les Indiens subissent est aussi économique et politique. Un fossé les sépare du reste de la société guatémaltèque; adultes et enfants doivent travailler dur sans espoir de sortir de l'extrême pauvreté. Dans ces conditions, Rigoberta Menchú acquiert très tôt une conscience politique, notamment sous l'influence de son père Vicente qui joue un rôle important dans la résistance. La guerre civile devient terrifiante. En 1980, Vicente Menchù et d'autres protestataires sont brûlés vifs par l'armée dans les locaux de l'ambassade d'Espagne, qu'ils avaient occupée. L'année suivante, sa fille adhère au CUC (Comité d'Unité Paysanne) et doit quitter son pays. Mais son exil n'est pas un échec: il lui permet de délivrer ce témoignage exceptionnel, qui attirera l'attention du monde entier sur l'extrême violence qui sévissait alors au Guatemala.

"Moi, Rigoberta Menchu" a été critiqué et sa personne même a été décriée par divers détracteurs, au moment de la publication et, plus tard, lors de l'attribution du prix Nobel. Même s'il existe des inexactitudes dans le livre (ce qui ne parait pas prouvé), cette lecture est passionnante. Maintenant le spectre de la guerre civile s'est éloigné dans le temps, mais la condition de tous les Indiens d'Amérique Latine a très peu évolué depuis 1982. Donc, le témoignage de R. Menchù reste d'actualité et mérite absolument d'être lu.
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