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Critique de AnnaDulac


«Il ne s'était rien passé.»C'est par cette phrase que se conclut ce roman de plus de sept cents pages... Rien vraiment?En effet, aucun des participants au colloque scientifique qui est le cadre du roman n'a peut-être remarqué le véritable calvaire intérieur vécu par Philipp Pearlmann, éminent linguiste allemand et organisateur de cette longue conférence de cinq semaines. Fragilisé par la mort de sa femme, il arrive dans ce palace italien de la côte ligure, dans la lumière automnale du sud, et très vite se rend compte qu'il lui est impossible d'écrire quoi que ce soit. Malgré les litres de cafés ingurgités, les centaines de cigarettes, les médicaments, rien ne lui vient. Rien.Pour ne pas perdre la face, Pearlmann envisage de s'approprier le texte d'un collègue russe qui n'a pas obtenu son visa. Mais à la dernière minute, le Russe débarque ... Que faire? Se suicider? Disparaître dans la mer ? Assassiner l'intrus?Pascal Mercier, dont c'est ici le premier roman, paru en 1995 mais traduit seulement aujourd'hui en français, met en place un véritable suspense psychologique. Même si le récit est le fait d'un narrateur extérieur omniscient, le lecteur devient Philipp Pearlmann. Ses angoisses sont les siennes. Ses migraines aussi.Au-delà de cette trame narrative, le roman soulève de nombreuses questions. Comme David Lodge, mais sans sa dérision, Pascal Mercier, lui-même professeur d'université, démonte les mécanismes de ce «petit monde». Les rivalités, l'obligation de «publish or perish», la nécessité de se composer un personnage.Pascal Mercier parle aussi longuement du sentiment d'imposture, du plagiat. le thème même du colloque sur les liens entre langage et mémoire est également passionnant. Comment se forge-t-on ses souvenirs? En les racontant neles invente-t-on pas?Comme dans «Train de nuit pour Lisbonne», Pascal Mercier met en scène un intellectuel en quête de son identité, quitte à tout envoyer promener. C'est un roman extraordinaire sur le ressassement et la vanité
de toutes choses. Un roman long et difficile peut-être, mais qui ouvre tant et tant de perspectives qu'il vaut la peine de se laisser entraîner.

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