Citations sur Fortune de France, tome 2 : En nos vertes années (16)
Qu'on soit papiste ou huguenot, la morale s'arrête, effarouchée, sur les degrés du pouvoir.
p.452
Ha certes ! Si enflammé que je fusse à galoper en ce mois de juin avec mon gentil frère Samson et notre valet Miroul par les montées et les dévalades des grands chemins de France, cependant j'avais, par bouffées, le coeur mordu de laisser si loin derrière moi dans le Sarladais la baronnie de Mespech.
Peu s'en fallait que, chevauchant, ne me vint larme à l'oeil chaque fois que je me ramentevais le grand nid crénelé où j'avais éclos et mis mes plumes, protégé des troubles du temps par ses remparts, mais plus encore par la bravoure de mon père, de l'oncle Sauveterre, de nos soldats, car notre dicton périgordin dit vrai :
- Il n'est bons murs que de bons hommes -.
(extrait du chapitre premier)
N'est-il donc point de bachelette en cette belle ville à qui un honnête drôle peut confier son nephliseth désoccupé, sans perdre pour autant son poil et sa denture ? Vais-je vivre ici affamé à table comme chien, escouillé au lit comme ermite en sublimant moi aussi mon solide corps dans les aigres vapeurs de la chasteté ? Mais quoi , comment y tenir ? C'est clore trop durement l'aludel et tant il est opprimé de fumée sans issue qu'à la fin il éclate !
Mais l'avenir est comme une toile roulée sur soi qui ne se découvre que par le déroulement des jours...
Un renard prend du plaisir à voir passer une poule, même s'il ne peut pas l'attraper.
La foule sur la place, à ce que je pus en deviner (...) était immense, et je sus, sans le voir encore, que Cabassus apparaissait quand une huée s'éleva, qui fut tant forte, stridente et sauvage qu'elle me glaça et que je fus un moment avant d'entendre les mots qui étaient hurlés avec tant de haine par des milliers de bouches
- Brûle, Athée, brûle!
-Ha! dit Fogacer, fort pâle et me saisissant la main,qui a dit que l'homme est un loup pour l'homme? Ce dicton n'a qu'un tort, il diffame le loup. (p.439)
Qui a dit que l'homme est un loup pour l'homme ? Ce dicton n'a qu'un tort : il diffame le loup.
Ha, pensai-je, quel monde nouveau est-ce là, qui doit commencer par le massacre de ceux qui, à la fin, ont le même dieu que nous, quand même ils l'adorent d'une autre guise? (p489)
[...] les écoles de médecins et comme des légistes abusent par tout le royaume de ces festins ruineux qui pourtant ne laissent rien le lendemain qu'un tas de bren aux latrines, alors que les pécunes qu'ils coûtent seraient mieux employés à fournir les studieux en livres.
Hors le fer et l'arquebuse, occire un homme n'est pas une affaire à fatiguer l'imaginative. La plus simple machine y suffit : trois bouts de bois en équerre, le plus grand fiché en terre, le plus petit soutenant une corde, et au bout d'y celle voilà notre pendu qui danse, tandis que son juge se remplit le ventre en attendant de passer lui-même devant notre juge à tous, et d'aller pourrir dans la terre, au lieu de folâtrer dans les airs : chétive différence, et ne justifiant point tant d'honneurs à l'un ni tant de disgrâce à l'autre.