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EAN : 9782757899151
240 pages
Points (10/02/2023)
3.51/5   75 notes
Résumé :
Écrivain au succès modeste, libraire à ses heures, Elias Torres vit à Toulouse avec Camille et leurs enfants. Un certain mois de mars, tout se resserre autour d’eux : ils n’ont plus le droit de quitter le pays, leur ville, puis leur quartier. Elias s’inquiète pour sa fille, Maud, qui ne décolère pas contre l’inaction des dirigeants face à la crise climatique, et à qui la situation coupe toute perspective d’avenir. Il doit aussi prendre soin de son ami, le vieux poèt... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (27) Voir plus Ajouter une critique
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Roman délicat, sensible, à la fois personnel et universel, d'une intimité désarmante, Les années sans soleil finit de me convaincre du grand talent d'écrivain de Vincent Message.
Découvert grâce au Prix Orange du Livre 2016 avec Défaite des maîtres et possesseurs, Vincent Message m'avait convaincu dans un genre très différent avec Cora dans la spirale. Ici, Les années sans soleil m'ont ramené en 2020, au tout début de cette catastrophe planétaire, cette pandémie qui a bouleversé et bouleverse encore la vie du monde, même si l'auteur, très habilement, n'écrit jamais son nom.
Tout commence à l'aéroport de New York où le narrateur, Elias Torres, jeune écrivain français (43 ans), débarque pour faire la promotion de Hibernation, son premier roman traduit en anglais qui vient de paraître aux États-Unis. D'ailleurs, Emily Kent, la traductrice, l'attend.
Hélas, rien ne se passe comme prévu. Après un contrôle de police très énigmatique, le revoilà dans l'avion avec une bonne partie des passagers du vol aller, pour un retour à Paris.
Elias vit à Toulouse avec Camille et ils ont deux enfants : Maud (17 ans) et Diego (2 ans et demi). Avant de me balader dans sa ville, le long de la Garonne et du Canal du Midi, Elias, Camille, Maud et Diego s'offrent une belle escapade dans les Corbières avec une visite de l'abbaye de Fontfroide qui me rappelle d'agréables souvenirs.
Puis, c'est Toulouse et la pression qui s'accentue même si Elias travaille encore dans la petite librairie de son ami Marcus, jusqu'au moment où tout ferme.
Comme Camille est employée dans un magasin d'alimentation, Elias se retrouve seul avec Maud et Diego, un désir d'écrire et toutes les difficultés qui l'accompagnent. Quoi ? Quand ? Comment ? Où ?
Les années sans soleil regorgeant de références poétiques, littéraires, artistiques, historiques, je ne vais pas me risquer à les citer toutes. Sur internet, Elias commence à chercher les pires années vécues sur Terre. Cela ne manque pas comme cette grippe espagnole qui fit plus de morts que la première guerre mondiale enfin terminée. La peste noire, de 1347 à 1392 et les horribles famines, sans oublier les chambres à gaz, les atrocités commises par les nazis, le goulag soviétique, les camps chinois, les génocides et les régimes totalitaires qui continuent de sévir, la liste n'est pas exhaustive.
Mais notre écrivain en recherche d'inspiration s'arrête sur les années 535-536 qui paraissent oubliées mais que l'historien britannique, Michaël McCormick a sorties de l'oubli. Jamais véritablement expliquées, ces années sans soleil ont causé des dégâts humains considérables entraînant des mouvements de population d'un continent à l'autre. Ce ciel voilé constamment ou presque par un immense nuage de poussière sûrement causé par une ou plusieurs éruptions volcaniques - plutôt que par un astéroïde géant s'étant écrasé sur notre planète - comme les poussières retrouvées dans les glaces remontant à cette époque lointaine le prouvent.
Elias lit beaucoup : Peter Drysdale, enseignant à Chicago, Procope de Césarée qui raconte les guerres de Justinien, ce qui l'amène à retrouver un vieil ami : Igor Mumsen qui habite près de chez lui. Ce poète a une bibliothèque précieuse et Elias peut en consulter les ouvrages qui l'intéressent.
Tout se déroule dans cette ville de Toulouse et la Garonne que chantait merveilleusement Julos Beaucarne, attire Elias. Il habite un peu trop loin du fleuve mais tant pis, il y va ! S'il se trouve bien sur ses rives, une femme attire sa curiosité mais un contrôle tatillon de la police met fin brusquement à son escapade.
Au cours de ma lecture, j'ai aimé apprendre, me souvenir de tous ces malheurs qui ont frappé régulièrement la Terre de quelque source qu'ils viennent. Si, en ce moment, c'est une pandémie, une autre menace est bien plus inquiétante encore : le réchauffement climatique contre lequel aucune mesure vraiment sérieuse n'est prise.
En attendant, Elias apprécie un certain retour à la liberté mais une répression policière féroce, lors d'une fête improvisée sur le port de la Daurade, bouleverse la vie familiale puisque Maud, présente avec les jeunes de son âge, en ressort absolument traumatisée physiquement mais surtout psychologiquement.
Vincent Message, au travers des confidences, des impressions relatées par Elias, a bien fait ressortir toutes les conséquences familiales et intimes après ce qu'a subi Maud, suite aux violences policières. Il évoque Antonin Artaud qui avait été interné à Rodez où Maud est soignée.
Avant de mettre un point final à son histoire, Elias Torres me ramène au Japon grâce à Aiko Ogiwara, une cuisinière de grand talent. Vincent Message sait parfaitement faire venir l'eau à la bouche du lecteur que je suis, ignorant presque tout des subtilités de la cuisine japonaise.
Les années sans soleil est à la fois un roman plein de délices, d'érudition, de moments tendus, délicats, violents, ne négligeant pas un peu d'érotisme, de découverte de la nature et des animaux.
Bref, une fois de plus, Vincent Message m'a régalé et je ne peux que remercier vivement Babelio et les éditions du Seuil pour cette nouvelle lecture d'un écrivain qui compte beaucoup pour moi.

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Vincent Message, dont le dernier roman Les années sans soleil, titre faisant référence aux années 535 – 536, où le brouillard a obscurci le ciel et masqué le soleil pendant presque deux ans, tente d'appréhender ce que nous vivons maintenant, depuis deux ans, sans toutefois jamais le nommer, le Covid 19.
Elias Torres, un écrivain modeste, vivant à Toulouse avec Camille, sa compagne et leurs deux enfants Maud et Diego, se rend à New-York pour la promotion de son quatrième roman, le premier traduit en anglais. À son arrivée à l'aéroport, après un contrôle incompréhensible, il est renvoyé illico, sans explication, vers la France par le même vol, comme une grande partie des voyageurs.
Fort déçu, il rejoint les siens dans un petit village situé dans les premiers contreforts des Corbières, où ils passent quelques jours à visiter notamment l'abbaye de Fontfroide. Lors du retour sur Toulouse, ils tombent sur des contrôles de police, de véritables barrages à l'approche de la ville. Un justificatif de domicile leur est demandé : aucun problème, ils ont le droit de rentrer. « Nous venions de vivre sans le savoir nos dernière heures de liberté ».
Comme le dit très bien Elias, le narrateur, « chacun d'entre nous se souvient où il était quand ça a commencé, ou plutôt quand il a compris que ça n'était pas anodin, que ça ne toucherait pas que les autres, que c'était parti pour durer et que ça allait changer nos vies ».
Lorsque tout a fermé, le lycée de Maud, la crèche de Diego, la librairie où il travaille depuis vingt ans, un jour sur deux, la plupart des commerces, Elias Torres sent tout de suite la difficulté que sera d'affronter cette épreuve avec les enfants.
De plus, si Diego, le bambin de deux ans et demi prend cela comme des vacances, monotones certes, il n'en va pas de même pour Maud qui, à dix-sept ans, se retrouve, coupée de tout ce à quoi elle tient, arrachée à ses amis, son copain…, Maud, qui ne décolère pas contre l'inaction des dirigeants face à la crise écologique.
Des violences policières vont aussi singulièrement éprouver la famille et le cadre familial est mis à rude épreuve.
Ainsi, Elias se retrouve désarmé devant l'inattendu, impuissant, et va nous faire partager son cheminement intérieur pour encaisser, endurer, ne pas baisser les bras pour préserver cette cellule familiale, pas facile… .
Il va , pour relativiser cette détresse du présent mener des recherches pour savoir quelles ont été les pires années de l'histoire de l'humanité, les années meurtrières sont hélas nombreuses, mais pour lui, cela ne fait pas de doute, ce sont les décennies qui ont suivi 535 – 536, où le soleil a cessé de briller près de dix-huit mois et dont l'hypothèse la plus probable est une série d'éruptions volcaniques. S'en sont suivies des famines, des pestes dues à des phénomènes climatiques brutaux amenant à d'importantes crises de civilisation. La comparaison alors, avec la situation actuelle semble assez pertinente.
Vincent Message, par l'intermédiaire de son quasi alter-ego, excelle à raconter le métier d'écrivain avec ses difficultés mais surtout la joie d'exercer cette activité où il se sent libre et souverain et dont il aime toutes les phases de l'écriture. Il développe également avec brio la jubilation que peut apporter la lecture et il montre comment la littérature devient un des antidotes possibles aux angoisses qui nous habitent, tout comme l'art ou la poésie.
Il n'oublie pas d'évoquer le sort des librairies durement touchées lors de ce confinement avec pour certaines d'entre elles, comme ici dans le roman, l'obligation de mettre la clef sous la porte.
Le récit vivant de cet homme confronté, comme nous-même l'avons été, à une situation anxiogène jamais rencontrée m'a touchée. Les sentiments qu'il ressent et les solutions qu'il expérimente, sans forfanterie sont convaincantes.
En nous faisant vivre le quotidien de cette famille dans cette époque troublée, avec un regard lucide, réaliste, un ton juste et une réelle douceur, ce roman qui aurait pu se révéler ravageur, est plutôt apaisant et est une véritable ode à la littérature et à sa puissance.
Les années sans soleil est un roman humain qui met en exergue nos inquiétudes, nos doutes, nos désarrois et aussi nos impuissances, devant cet avenir incertain face aux impacts du réchauffement climatique, un roman qui m'a procuré beaucoup d'émotions, sans jamais me lasser.
Après Défaite des maîtres et possesseurs et Cora dans la spirale, deux romans de Vincent Message que j'avais fortement appréciés, grâce à Babelio et aux éditions du Seuil, j'ai pu, avec un immense plaisir découvrir et me passionner pour Les années sans soleil. Je les en remercie très sincèrement.

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De Vincent Message, j'avais aimé « Cora dans la spirale » et j'ai eu le plaisir de retrouver son écriture ciselée, aux accents poétiques dans son dernier roman.
Le narrateur, Elias Torres, est un écrivain qui n'a pas encore connu le succès. Il narre sa mésaventure : refoulé des États Unis où il venait présenter son roman, cette rebuffade annonce quelque chose de plus grave, qui n'est pas précisé mais qui oblige la population à se confiner. Cette menace est d'autant plus inquiétante qu'elle n'est pas nommée, juste suggérée à travers le dérangement climatique.
« Ça commençait à devenir long. Chacun chez soi, jour après jour… Les murs des pièces se rapprochaient. L'étau se resserrait autour de nos tempes »
A cette situation de déjà vu, l'auteur mêle des réflexions sur le réchauffement climatique. le thermomètre s'emballe et la vie entre quatre murs dans un centre-ville déserté où les libertés sont restreintes se complique. le quotidien de sa famille aussi est touché, avec sa femme, leur petit garçon remuant et Maud, adolescente écolo révoltée par l'inertie des dirigeants et des adultes. Elias n'a plus son travail de libraire puisque les librairies ont baissé le rideau et, avec cette fermeture, il a perdu le contact avec les autres et les discussions, les fêtes à pas d'heure avec ses potes qui se passionnent pour l'art et le combat d'idées. Désoeuvré, Elias va se tourner vers l'écriture, rechercher cette inspiration qui lui échappe. Il y a bien la cave, pour s'isoler, mais écrire sur quoi ? Heureusement, la littérature est toujours là pour nous consoler, et nous nourrir dans ces périodes de disette. de ses visites à son vieil ami et poète, Igor Mumsen, il va se passionner pour l'oeuvre de l'historien byzantin Procope de Césarée qui a chroniqué le règne de l'empereur Justinien. L'historien évoque ce petit âge glaciaire, période qui va de 536 à 547, où la perturbation du climat a entraîné des famines et des épidémies catastrophiques. On sait depuis peu que cette période climatique plus froide a été la conséquence de trois éruptions volcaniques majeures qui ont voilé le soleil.
En écrivain curieux, Elias Torres établit un parallèle entre cette période glaciaire oubliée et le dérèglement climatique de notre époque. Et là, il tient son sujet, pense-t-il.

Le roman navigue entre les expériences, les mésaventures du narrateur qui s'interroge sur sa vie qu'il ne maitrise plus et sur ces incursions dans la littérature et les catastrophes du passé. Deux époques mais une même menace climatique.
Le chapitre 16 débute ainsi « Vous le connaissez un peu, maintenant, Elias Torres. Je suis une voix qui a votre voix dans votre tête »
Oui, après lecture, j'ai l'impression de le connaitre, ou tout du moins de l'avoir croisé dans quelque librairie toulousaine, cet écrivain qui se confie avec sincérité, et avec lequel j'ai déambulé dans Toulouse. C'est ma ville que j'ai aimé redécouvrir et vivre sous la plume de Vincent Messager alias Elias Torres. Il sait si bien la raconter. Oui, je me suis inquiétée pour lui et sa famille, et j'ai été curieuse d'en savoir plus sur ce petit âge glaciaire. Et, je dois l'avouer, j'ai été triste de laisser ce personnage attachant et son projet de roman à la page 254. Car oui, j'aurais aimé que ce roman captivant soit plus long.


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L'entame est accrocheuse, elle capte immédiatement l'attention avec les armes du thriller alors que Les années sans soleil n'a rien du polar ou du roman à suspense. Si le récit a pour cadre la pandémie actuelle et ses multiples confinements, c'est pour nous refiler en contrebande un roman intimiste sur le désarroi d'un narrateur écrivain qui voit son cercle relationnel_famille, amis et collègues_fragilisé par les restrictions et les violences de toutes sortes.

Le roman séduit par l'élégance de son style, l'écriture adoucit délicatement les affects mais l'axe narratif se perd un peu au fil des pages. Vincent Message tente d'exploiter tous les signaux les plus bruyants qui occupent notre quotidien mais peine à établir un lien fort et obsessionnel entre tous les éléments constitutifs de l'intrigue.
Ce qui s'annonçait pour moi comme un récit montrant un écrivain à sa table de travail dans un contexte social anxiogène s'effiloche rapidement, les idées ne trouvent pas de cheminement intellectuel solide auquel se cheviller. Elle paraissent comme abandonnées au vent faute d'être arrimées à quelque chose d'ancré, comme si l'auteur ne construisait pas mais regardait ce qui s'offrait à lui dans une chronique du quotidien mouvante et indéterminée. Si c'était le projet de Vincent Message, il m'a clairement manqué quelque chose de l'ordre du scalpel caché de l'écrivain qui fait son miel d'un coeur entrouvert, ou les divagations aériennes d'un narrateur enclin à l'introspection.

Malgré des qualités de style évidentes, je referme Les années sans soleil avec le sentiment d'avoir lu un récit un peu vain, un peu superficiel, dans lequel on se contente de contempler son reflet dans le miroir.
Ça ne va pas abolir mes réticences concernant les fictions sensées capturer l'hyper contemporain : on a la sensation que tout cohabite mais tout se périme aussi vite qu'il est apparu. Finalement c'est le genre de roman qui conforte un peu plus la conviction qui est mienne : pour faire oeuvre de littérature, le réel a besoin de temps.
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Une famille confinée à Toulouse

Vincent Message raconte le quotidien d'un écrivain confiné avec son épouse et ses deux enfants à Toulouse. Pour se rassurer, il va chercher dans les livres les pires périodes de l'Histoire. Et trouver une belle matière à réflexion au milieu du chaos.

Il y a quelques événements dans la vie d'un pays qui marquent tous les habitants ou presque. le jour de la chute du mur de Berlin, le 11 septembre, la victoire en finale de la coupe du monde de football ou plus récemment le confinement. C'est cet événement qui sert de fil rouge au nouveau roman de Vincent Message. Son narrateur, l'écrivain Elias Torres, se souvient très bien où il était quand les restrictions ont été décidées. À l'aéroport de New York pour y rencontrer son éditeur et sa traductrice, car l'un de ses romans devait paraître aux États-Unis. Mais après les nouvelles mesures de restrictions sanitaires décidées à la hâte devant la progression de l'épidémie, il ne quittera JFK que pour repartir d'où il était venu, laissant derrière lui ses illusions et un livre quasiment mort-né.
Ayant retrouvé son épouse et ses enfants, il ne se doute pas qu'ils vivent leurs dernières heures d'insouciance. Revenus d'une escapade dans les Corbières, ils retrouvent leur appartement toulousain. «Et aussitôt après, tout a fermé. le lycée de Maud, la crèche de Diego, la librairie, la plupart des commerces. Les rideaux de fer et les stores se sont baissés pour ne plus se relever, comme si on était entrés dans la stase d'un dimanche infini, ou qu'il faisait nuit en plein jour et que le soleil était une autre forme de lune.» Alors, il faut expliquer aux enfants une situation dont on a soi-même de la peine à appréhender les tenants et les aboutissants. Alors il faut faire bonne figure en se doutant que ce ne serait pas simple. «En temps normal déjà, nous sommes quatre personnes avec des besoins très distincts, pas évidents à concilier, avançant cahin-caha, d'un compromis frustrant à l'autre, mais face aux événements en cours, ce serait pire, aucun de nous ne serait libre et n'aurait ce qu'il voulait.»
Alors pour conjurer la peur, chacun cherche à s'occuper. D'abord à parer au plus pressé, même si cela est un peu irrationnel. Faire le plein de courses pour ne manquer de rien au cas où. Elias va jusqu'à commander des jerrycans pour faire des réserves d'eau. Achat qui s'avérera inutile mais va le pousser à ranger sa cave pour trouver de la place aux conteneurs. Après ce tri lui vient l'idée de creuser le sujet qui les préoccupe tous, essayer de connaître les pires moments que la terre a traversé. L'occasion de rendre visite à Igor Mumsen, un vieil érudit qui possède des livres de Procope de Césarée relatant l'ère de Justinien, les guerres et les catastrophes endurées par le peuple. «Je tenais avec cette oeuvre de quoi m'occuper des semaines. Je ne savais pas encore ce que je pourrais en faire, si c'était du travail ou une lecture sans but, mais cela produisait sur moi l'effet exact que je cherchais. J'étais ailleurs, dans un autre espace-temps, à partager les préoccupations et les vicissitudes d'un historien, d'un général et d'un empereur qui n'étaient plus que poussière depuis mille cinq cents ans. Je lisais avec avidité ces histoires de massacres, de villes assiégées et pillées, de revirements d'alliances, d'assassinats qui faisaient passer les années 1970 pour un bal des débutantes, et je relativisais un peu nos malheurs de Modernes, et je respirais mieux.»
Vincent Message ne nous cache rien des tourments de son personnage, des difficultés psychologiques au sein de la famille, du degré de saturation que la situation engendre. Sa fille de dix-huit ans qui s'éloigne toujours un peu plus de lui, sa femme qui n'en peut plus de tenir le ménage à bout de bras. Mais le romancier nous offre aussi les clés pour s'affranchir de cette période très pénible à vivre. Avec les livres, avec la poésie d'Hölderlin, avec des projets d'écriture, avec les rencontres qu'il va faire.
Après Cora dans la spirale qui nous confrontait, à la complexité de la vie d'une femme soumise à une société de la performance et à la violence du management, Vincent Message se penche, tout au long de cette chronique d'une année particulière – durant laquelle tous les repères sont brouillés – sur une France de plus en plus dure, une jeunesse opprimée et un avenir incertain face aux enjeux climatiques. Et semble s'interroger sur les prochaines années sans soleil.


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critiques presse (2)
Telerama
13 mars 2023
Dans ce quatrième roman, Vincent Message, 38 ans, réussit pourtant les deux à la fois. Non seulement il imagine le très réaliste quotidien de la ville de Toulouse, aux prises avec une crise climatique qui secouera toute la France
Lire la critique sur le site : Telerama
LeMonde
24 mars 2022
En 535-536, un brouillard a obscurci le ciel : une métaphore des menaces actuelles pour un roman engagé.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (75) Voir plus Ajouter une citation
Je sentais néanmoins depuis des années que la dégradation était trop rapide pour que l’on ait le temps de s’y adapter, mais trop progressive également, trop graduelle pour que les discours d’alerte nous fassent battre le cœur. Un dixième de degré en plus ; le taux de concentration d’un gaz s’élevant de quelques parties par million : trop techniques ces mesures-là, ça ne nous parle pas. Ou bien des arbres qui tombent à chaque seconde, mais hors de notre champ de vision et loin des caméras. Ou bien une espèce animale que les locaux observent de plus en plus rarement, mais qu’on ne sait pas reconnaître, voire dont on apprend l’existence le jour où la mort de son dernier représentant est annoncées dans les médias. Trop loin de nous, tout ça. Tant que le désastre n’est pas sur nos têtes… tant qu’il ne nous frappe pas en personne… Toutefois je savais aussi que la science nous prédisait des accélérations, des événements extrêmes de plus en plus violents et fréquents – et surtout de l’inattendu. Eh bien voilà. Nous y étions, peut-être.
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Je sentais néanmoins depuis des années que la dégradation était trop rapide pour qu’on ait le temps de s’y adapter, mais trop progressive également, trop graduelle pour que les discours d’alerte nous fassent battre le cœur. Un dixième de degré en plus ; le taux de concentration d’un gaz s’élevant de quelques parties par million ; trop techniques, ces mesures-là, ça ne nous parle pas. Ou bien des arbres qui tombent à chaque seconde, mais hors de notre champ de vision et loin des caméras. Ou bien une espèce animale que les locaux observent de plus en plus rarement, mais qu’on ne sait pas reconnaître, voire dont on apprend l’existence le jour où la mort de son dernier représentant est annoncée dans les médias.
(pages 34-35)
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J’avais le plus important : des preuves en vidéo. Sans vidéo, ce n’était pas la peine d’essayer : devant un tribunal, les témoignages de manifestants paraissaient de parti pris, en quelque sorte biaisé d’avance, tandis que les fêtards avaient l’esprit trop embrumé pour être pris au sérieux. Sans vidéo, ce qui a eu lieu n’a pas eu lieu. Sans vidéo, tous les manifestants sont des gauchistes invétérés, tous les gauchistes détestent la police et ne vivent que pour la calomnier, les flics n’ont fait que leur travail, tout le monde a rêvé, il ne s’est rien passé.
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J’avoue que j’aime les situations de crête, la hauteur de vue, les paysages assez ouverts pour que l’œil se perde dans les lointains. Pourtant j’ai reconnu aussitôt le charme qu’avait ce vallon, la grande douceur d’être lové entre les collines, l’habileté de ce choix des cisterciens qui élisaient des sites où ils pourraient sans trop d’effort se procurer du bois, des pierres de construction, et où il y aurait de l’eau, surtout, l’eau murmurante de tous les ruisseaux qui se frayaient un chemin dans le massif de Fontfroide.
(page 28)
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Les gens tolèrent plus ou moins bien les conditions extrêmes. Il y a ceux que la canicule rend apathiques, et ceux qui vaquent à leurs affaires comme si de rien n’était. Tout le monde n’avait pas compris, à ce stade. Dans les conversations, on continuait à espérer le beau temps et à maudire la pluie. Mais au milieu de l’après-midi, les rues étaient presque aussi vides que pendant le grand enfermement, ce qui attestait tout de même que cette chaleur n’était pas pour nous , et que le soleil à qui nous devons la vie et ses agréments indéniables était dorénavant plutôt en train de préparer notre mort.
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Videos de Vincent Message (28) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Vincent Message
Vincent Message vous présente son ouvrage "Les années sans soleil" aux éditions Seuil. Rentrée littéraire janvier 2022.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2596235/vincent-message-les-annees-sans-soleil
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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