AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

France Camus-Pichon (Traducteur)
EAN : 9782070443437
144 pages
Gallimard (06/05/2011)
3.09/5   11 notes
Résumé :
Un professeur d'université américain raconte sa vertigineuse descente aux enfers, le temps d'un été, au sortir d'une rupture amoureuse, dans l'isolement d'un appartement londonien. Avide de paix et de solitude, il ressent comme une agression la visite de courtoisie de son étrange voisine, Ridlev Wandor. Elle est laide, ingrate, quelconque. Un récit obsessionnel et fort de Claire Messud, une des voix majeures de la littérature américaine contemporaine.

>Voir plus
Que lire après Les ChasseursVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Professeur d'université américain, le narrateur des « Chasseurs » raconte comment, au sortir d'une douloureuse rupture amoureuse, il s'est installé pendant les trois mois d'été dans un appartement d'un quartier miteux de Londres afin d'effectuer des recherches sur le grand livre dont il a le projet, « une analyse sur l'idée de la mort au XVIIIe siècle ». Un thème plutôt funèbre qui lui vaut le surnom de « Docteur La Mort » par ses collègues universitaires…
C'est donc seul, triste et partiellement déprimé, qu'il entame une retraite solitaire, hermétique et austère, se complaisant de façon morbide dans un état de « non-vie » agréable car dépourvue d'émotions.
La visite impromptue de Ridley Wandor, la voisine du dessous, dans son univers clos, constitue alors pour le reclus volontaire une agression impardonnable. « Je l'ai haïe dès que j'ai posé les yeux sur elle et n'ai jamais souhaité qu'une chose, qu'elle n'existât point ».
Mais si tout le révulse et le répugne chez cette femme sans âge, au physique ingrat, au corps informe, à l'aspect douteux, à « l'apparence mongoloïde »…si tout l'irrite et l'exaspère, Ridley Wandor, de manière totalement irraisonnée et paradoxale devient aussi son obsession et sa hantise.
Pour quelle raison la mère de Ridley ne sort-elle jamais de chez elle ? Pourquoi les personnes âgées dont elle est l'aide-à-domicile, passent-elles si rapidement de vie à trépas ?
Dès lors, échafaudant mille scénarios et se perdant en conjectures et en spéculations sur les agissements de sa pitoyable voisine, le narrateur confesse qu'entre deux recherches pour son livre, il n'eut plus d'autres occupations que celles d'épier Ridley Wandor, sombrant de jour en jour dans un état de voyeurisme malsain et coupable.

Considérée comme l'un des auteurs nord-américains les plus prometteurs de sa génération, la romancière Claire Messud a élaboré cette histoire d'obsession avec un art certain de la manipulation.
Les multiples interrogations qu'elle suscite chez le lecteur, ne sont pas loin de générer la même avidité de savoir que chez le personnage principal, irrationnellement obnubilé par sa voisine.
Aux questionnements qu'on se pose bien naturellement sur Ridley Wandor puisqu'elle est la cause de l'obsession du narrateur, se greffent des interrogations sur le narrateur lui-même, sur ce comportement confinant quasiment à la monomanie, mais aussi sur son identité sexuelle.
Car l'ingéniosité de la romancière consiste justement à garder le secret tout au long du récit sur le sexe de son personnage.
On a donc la confession, longue, intime, confidentielle, d'un individu peignant méticuleusement son propre portrait psychologique, une personne se livrant à une introspection profonde d'elle-même, qui analyse pour nous ses moindres sentiments et impressions, mais dont au final on ne connait absolument rien du genre sexuel qui la définit !
Homme ? Femme ? Au lecteur de faire son choix avec la sensibilité qui lui est propre.

Après ces trois mois passés dans un état de morbidité frisant la pathologie, l'aveu d'un changement d'orientation sexuelle ainsi que la naissance d'un nouvel amour (dont nous ne saurons pas le sexe bien évidemment), donnent lieu à de nouvelles spéculations.
On peut ainsi se demander jusqu'à quel point l'animosité à l'égard de Ridley - qui n'a finalement commis d'autres fautes que celles d'être laide et stupide, un peu comme une pauvre enfant arriérée - on peut donc se demander jusqu'à quel point ce rejet de l'autre n'est pas la dernière défense d'une conscience qui s'éveille à une sexualité nouvelle, les dernières réactions défensives d'une personne s'apprêtant à se départir de son ancien moi sexuel pour en intégrer un autre ?

Claire Messud entrecroise adroitement les thèmes de la solitude et du voyeurisme à la perte d'identité et à l'analyse psychologique.
Son récit, mâtiné de suspense hitchcockien où se combine tension et humour, nous fait naviguer en eaux troubles avec une belle adresse, au gré des interprétations et des hypothèses.
Le final viendra renforcer l'idée que l'on n'a jamais toutes les cartes en mains et que les suppositions élaborées à partir de certaines situations relèvent bien plus souvent du fantasme que de la réalité.

Dans un style vivace et coulant, qui n'est pas sans rappeler celui des écrivains du nord des Etats-Unis (Mc Inerney, Philip Roth), ce court roman extrait du recueil « Une histoire simple » est un bon préambule à l'oeuvre de Claire Messud dont l'un des romans, « Les enfants de l'empereur », a été sélectionné parmi les dix meilleurs livres de l'année 2006.
Commenter  J’apprécie          290
Vous avez dit bizarre...?
Effectivement, une bien étrange nouvelle.
Qui est cet énigmatique narrateur : "Docteur la mort"?
Un homme ? Une femme ?
Ce que l'on sait, c'est qu'il a rencontré quelqu'un d'autre, ou plutôt revu quelqu'un d'autre ; qu'il avait d'ailleurs déjà fréquenté, bien que de loin, et dans un tout autre contexte. En tout cas, cette personne, n'est ni du même âge, ni du même sexe que la précédente qui elle, lui avait réduit sa vie à néant.
C'est clair, non ?...
Merci pour toutes ces précisions Dr. La mort.
Reprenons...
Un homme ? Une femme ? Un universitaire analyste ? Un dépressif ? Un parano ? la malheureuse victime, persécutée le temps d'un été par sa voisine du dessous ?
Et il y a la grotesque, infâme "Ridley".
Et elle... Qui est elle au juste, cette fameuse "Ridley Wandor"?
Est-ce une vieille fille de 40...voir 50 ans, vivant toujours avec maman ? Et d'ailleurs... Existe t-elle vraiment maman ?
Ou bien, est-elle une aide à domicile à tendance psychopatique ? C'est courant dans le "paramédicale" :
Des infirmières qui étouffent leurs patients ; des doses mortelles dans les solutions intraveineuses ; des planté de seringues dans des veines en lambeaux...

Alors, ce récit...
Est-ce un huit-clos avec sortie autorisée dans l'attrayant quartier de "Kilburn"? (profitez-en pour aller flâner le long du canal de " Little Venice"... Sérénité assurée)
Un cauchemar ?
Une enquête démoniaque ? une hallu ?
Qui est In ? Qui est Out ?... (merci Serge !)
Des questions.. Encore des questions.. Toujours des questions.

de rebondissements en fausses pistes (y'en a t-il des vraies ?), vous allez vous faire salement bringuebaler.
Dans le monde de Claire Messud, chaque mensonge passe pour une vérité, chaque vérité pour un mensonge. Vous voilà bien avancé !

Commenter  J’apprécie          10
Un professeur d'université américain raconte sa vertigineuse descente aux enfers, le temps d'un été, au sortir d'une rupture amoureuse, dans l'isolement d'un appartement londonien.
Avide de paix et de solitude, il ressent comme une agression la visite de courtoisie de son étrange voisine, Ridlev Wandor. Elle est laide, ingrate, quelconque. Un récit obsessionnel et fort de Claire Messud, une des voix majeures de la littérature américaine contemporaine.

C'est un récit terriblement énigmatique et vraiment très fort. On se demande si le narrateur s'invente une histoire dramatique ou si il est vraiment confronté au comportement plus que suspect d'une étrange voisine. L'écriture est superbe et le récit laisse toujours le lecteur en attente d'une explication ou d'une péripétie qui n'arrive jamais mais qui, curieusement, n'apporte aucune frustration.
C'est un roman obsessionnel qui raconte la solitude, le refoulement et peut-être l'hallucination. Il pose beaucoup d'interrogations et compense ce qu'il pourrait avoir d'angoissant par un humour discret mais omniprésent.
J'ai beaucoup aimé ce court roman.
Commenter  J’apprécie          20
Un professeur d'université américain raconte sa vertigineuse descente aux enfers, le temps d'un été, au sortir d'une rupture amoureuse, dans l'isolement d'un appartement londonien.
Avide de paix et de solitude, il ressent comme une agression la visite de courtoisie de son étrange voisine, Ridlev Wandor. Elle est laide, ingrate, quelconque. Un récit obsessionnel et fort de Claire Messud, une des voix majeures de la littérature américaine contemporaine.

C'est un récit terriblement énigmatique et vraiment très fort. On se demande si le narrateur s'invente une histoire dramatique ou si il est vraiment confronté au comportement plus que suspect d'une étrange voisine. L'écriture est superbe et le récit laisse toujours le lecteur en attente d'une explication ou d'une péripétie qui n'arrive jamais mais qui, curieusement, n'apporte aucune frustration.
C'est un roman obsessionnel qui raconte la solitude, le refoulement et peut-être l'hallucination. Il pose beaucoup d'interrogations et compense ce qu'il pourrait avoir d'angoissant par un humour discret mais omniprésent.
J'ai beaucoup aimé ce court roman.
Lien : http://lefantasio.fr
Commenter  J’apprécie          20
Qui est cette Ridley Wandor qui habite juste au dessus de l'appartement londonien de l'universitaire américain qui est le narrateur de ce court roman (ou cette longue nouvelle) ?
Une simple aide-soignante célibataire au physique ingrat qui s'occupe de personnes âgées à leur domicile ? Une femme entre deux âges un peu attardée et qui est retenue contre son grès dans l'appartement qu'elle partage avec sa mère et une foule de lapins (les « chasseurs ») ? Un tyran qui martyrise sa vieille mère invalide – que le narrateur n'a jamais vu – peut-être même jusqu'à ce que mort s'en suive ?
Des années après l'été qu'il passa dans cet appartement, déprimé et solitaire et durant lequel il se sentit importuné jusqu'à l'obsession par cette femme, il revient sur les lieux…

La suite sur le blog :
Lien : http://lepandemoniumlitterai..
Commenter  J’apprécie          30

Citations et extraits (5) Ajouter une citation
J'étais sans attaches. Et cela, cette euphorie spontanée apparemment propre à l'état animal, me paraissait d'ordre divin. Il me semblait bel et bien être Dieu.
Contempler de très haut les mortels autour de moi. J'observais l'angoisse, la rage ou l'espoir sur le visage de mes semblables avec un flot de compassion salutaire ; mais on eut dit que leur expérience de la vie, si remplie d'émotions, si épuisante, si embourbée dans l'encombrement absurde, infini de leur journées, était complètement étrangère à la mienne. La délivrance de toute émotion me donnait, paradoxalement, la sensation de vivre plutôt plus intensément que moins.
La sensation aussi que les autres, tous ceux qui ressentaient des émotions, se laissaient distraire par elles et avaient une vie moins intense que la mienne.
Il me semblait être à la fois un chien et un Dieu, et ce n'était pas des expériences contradictoires.
Commenter  J’apprécie          10
L'oppression ressentie durant mon séjour dans cet appartement n'était ni imaginaire ni malencontreuse : j'en mourais, j'en mouru bel et bien pendant cet été londonien si pesant, si solitaire, et finalement si triste ; simplement, c'était une mort comme dans la religion tibétaine, où au tarot, une mort impliquant une renaissance, une obscurité nécessaire au-delà de laquelle brille la lumière.
Commenter  J’apprécie          30
Je n'avais nul besoin de demander d'où pouvait venir cette rage, ni contre quoi elle était dirigée : j'en avais moi-même fait l'expérience, en avais ressenti la brûlure, la chaleur dévorante, et je la tenais pour une force irrationnelle.
Cette rage, je le savais, c'était de la passion pure, plus pure que l'amour ou le désir, plus pure que l'espoir. J'aurais pu la faire surgir devant moi ; qui ne peut faire surgir le diable, avec quelques efforts ?
Commenter  J’apprécie          10
Peut-être parce que ma solitude intensive avait neutralisé ma propre palette d'émotions, j'eus l'impression durant ces semaines que l'état émotionnel des autres émanait d'eux par vagues aussi fortes qu'une odeur animale.
Commenter  J’apprécie          10
Ce répugnant non-bouquet de non-fleurs, ce désastre esthétique sur la table où je dînais, comment vous expliquer qu’il était pour moi « iconiquement » Ridley Wandor ? Comme si elle avait laissé sur la table une photo d’elle me faisant un clin d’œil ; comme si je savais – et je le savais, bien sûr, fût-ce par prémonition ou prédestination – que je ne pourrais lui échapper
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Claire Messud (15) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Claire Messud
Claire Messud: 2014 National Book Festival
autres livres classés : suspense psychologiqueVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (15) Voir plus



Quiz Voir plus

Freud et les autres...

Combien y a-t-il de leçons sur la psychanalyse selon Freud ?

3
4
5
6

10 questions
433 lecteurs ont répondu
Thèmes : psychologie , psychanalyse , sciences humainesCréer un quiz sur ce livre

{* *}