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Critique de Clair_de_Plume


Comment chier dans les bois... une question qu'a priori, on ne se pose pas. Dans l'esprit de tous, il suffit de trouver un endroit tranquille, de se mettre en posture, et quitter les lieux une fois l'affaire faite.
Et c'est ainsi qu'au détour d'un sentier, il n'est pas rare de se trouver face à une rangée d'immondes étrons surmontés chacun – cerise sur le gâteau – d'une petite boulette de papier toilette...

L'auteur, Kathleen Meyer, est américaine. Elle a été plusieurs années guide de randonnée sur la rivière Whitewater. Elle a accompagné des citadins à qui il lui fallut apprendre – ou réapprendre – à éliminer en pleine nature.
Kathleen Meyer traite son sujet à la fois avec humour et sérieux. Elle émaille son récit d'anecdotes cocasses survenues à des campeurs contraints de se soulager en des endroits peu habituels (comment s'y prend quelqu'un en train d'escalader une falaise soudain saisi d'une envie irrépressible ?). Cependant, elle insiste beaucoup sur les répercussions préoccupantes provoquées par l'afflux croissant de campeurs et randonneurs dans la nature.
La mode des activités « naturelles » s'est considérablement développée ces dernières décennies. Les endroits réellement sauvages exempts de toute présence humaine se font bien rares. Cela n'est pas sans conséquences : les scientifiques ont constaté que pratiquement tous les cours d'eau de la planète étaient contaminés par les germes fécaux de la diargiasis et du cryptosporiodis. Avant les années 70, on ne les trouvait que dans certaines rivières très localisées. S'ils sont ingérés, ils provoquent l'apparition de troubles intestinaux parfois graves et qui peuvent devenir chroniques. Bien que ces maladies affectent plusieurs espèces de mammifères, ils semble que les humains soient seuls responsables de leur propagation mondiale.

Kathleen Meyer est convaincue par le fait qu'il faut absolument veiller à ne pas contaminer les cours d'eau au cours de sorties dans la nature. Elle va exposer dans son ouvrage les différentes manières de déféquer au grand air de la manière la plus hygiénique possible.
Selon les règles de l'art, il faut s'éloigner suffisamment de ses congénères, bien sûr, et des cours d'eau. Si possible, s'installer devant un beau point de vue. Se méfier des insectes, des serpents, des plantes urticantes (aux Amériques, elles sembles bien plus coriaces que nos orties !) Et puis, creuser un trou, comme les chats. Ceci, tout d'abord, afin d'éviter que l'objet ne se mette à dévaler une pente pour atterrir où il ne faut pas, et aussi de mettre la fèce en contact avec les bactéries du sol, qui vont contribuer à sa décomposition (toujours garder à l'esprit qu'une déjection humaine, dans les meilleures conditions, met une année à disparaître). Il est des cas où l'on ne peut pas creuser le sol : quand il est trop sec, trop dur ou trop froid, il est de toute façon pauvre en bactéries. Dans ce cas, Kathleen Meyer préconise, et c'est là l'aspect le plus troublant du livre... d'emporter son étron !
Aux Etats Unis, la législation interdit parfois d'installer des toilettes en dur dans des sites remarquables afin de les préserver. Résultat, dans les criques de la rivière Whitewater, il devenait impossible de creuser son trou de chat sans faire une découverte peu ragoûtante... Alors, une nouvelle loi intervint pour défendre de laisser la moindre chose derrière soi après son passage en ces lieux. Fut donc organisé un système de toilettes portables qui accompagnent les randonneurs dans leur périple (à dos de mulet), et qu'il faut vider et nettoyer au retour... On ne peut que ressentir un profond respect devant l'abnégation dont font preuve les personnes chargées de cette tâche.

Quant au randonneur solitaire, tout est prévu pour lui : il peut s'équiper d'un container individuel, voire d'un Tupperware (si !) afin d'emporter ses excréments dans son sac en vue de s'en débarrasser ailleurs, le plus souvent en les jetant dans la cuvette d'une toilette classique.

Kathleen Meyer est une authentique amoureuse de la nature. Elle a réfléchi sérieusement aux conseils précieux à donner aux citadins si peu habitués à se soulager en plein air. Il faut être prêt à accéder aux techniques sophistiquées qu'elle préconise : le « glaçage de rocher » est à notre sens à réserver aux plus téméraires. le baroudeur sensibilisé à la protection de l'environnement et convaincu par ses méthodes s'équipera en conséquence, et sera ainsi fin prêt pour arpenter les sentiers de grande randonnée du Groland.
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