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Critique de ATOS


« Il s'est passé la chose suivante : des humains ont pensé tirer parti du commerce d'autres humains. Et des humains ont souffert l'arrachement des leurs, la violence de leurs voisins. Voilà ce que propose La saison de l'ombre : le point de vue subsaharien sur une des nombreuses défaites de l'humanité, mais aussi, sur les fragiles triomphes de l'humanité. Une histoire de mort, de vie après la mort. de façon métaphorique, cette histoire est celle d'une grande partie de l'Afrique subsaharienne, depuis cinq cents ans environ. » Léonora Miano
Il s'agit de mémoire, d'écoute et de regard. La beauté de ce texte est saisissant. C'est effectivement comme le rappelle l'auteure, un récit afro-centré. Qui étaient ces peuples avant que la saison de l'ombre, cette longue saison d'obscurité et de larmes ne vienne ensevelir leur histoire ? . La « traite des noirs » au profit des blancs. Voilà une vision euro-centrée. Ces peuples sont multitude. le rapport de la race, de la couleur, étaient pour ces populations subsahariennes des concepts totalement inconnus. Chaque clan, chaque village avait sa vision, son rapport au monde extérieur, à son propre monde, à cet autre monde au-delà du village, au-delà de ses terres.
Connaîtrons nous un jour toute la diversité, toute la richesse, de l'immensité de cette Afrique pré-coloniale ?
C'est une vision incroyablement belle et forte que nous apporte l'esprit de l'écrit de Léonora Miano.
Comment un tel cataclysme a t il été vécu par ces peuples ? Comment était il venu percuté de plein fouet leur rapport aux mondes qui les entouraient. Une état de conscience brutal, une réalité qui venait bouleverser à jamais leurs vérités.
Tous ces disparus de l'ombre, qui furent emportés, déportés, déculturés, ne méritent pas l'anonymat. Leur art, leur chant, leur Histoire, , leur spiritualité, des milliers d'années de civilisation ne peuvent être ignorés. C'est à cette «  voix intérieure » qu'il faut tendre l'oreille.
« Ce n'est pas uniquement au-dessus de la case de celles dont les fils n'ont pas été retrouvés, que l'ombre s'est un temps accrochée.L'ombre est sur le monde.L'ombre pousse des communautés à s'affronter, à fuir leurs terres natales. Lorsque le temps aura passé, lorsque les lunes se seront ajoutées aux lunes, qui gardera la mémoire de toutes ces déchirures ? A Bebayedi, les générations à naître sauront qu'il avait fallu prendre la fuite pour se garder des rapaces.On leur dura pourquoi ces cases érigées sur les flots .On leur dira : La déraison s'était emparée du monde, mais certains ont refusé d'habiter les ténèbres.Vous êtes la descendance de ceux qui dirent non à l'ombre ».
« C'est d'être nommé qui fait exister ce qui vit ».
« La saison de l'ombre » de Léonora Miano est un très grand roman, mais il va bien au-delà. Il est un véritable bâton de parole. Parce qu'un être ne peut être réduit à sa qualité de victime, parce que c'est à la son état d' Être qu'il faut le ramener pour qu'il puisse quitter la saison de l'ombre.
Bâton de parole, mais également bâton de marche. Parce qu'il s'agit de se mettre en marche et d'avancer pour sortir de l'opacité de l'ombre.

Astrid Shriqui Garain
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