Lorsque j'ai acquis ce recueil de textes de Henri Michaux, il y a quelques années, j'étais emballé par ma découverte. Une lecture en diagonale avait suffi à motiver mon achat. Puis, le temps a passé et lorsque j'ai repris ce recueil pour le lire intégralement, j'avais changé entre temps d'idée sur son auteur. Il me semblait alors qu'il était un écrivain difficile à lire et destiné aux lecteurs les plus sophistiqués.
Quand j'ai commencé à lire ce recueil, je me suis aperçu que tous les termes abordés m'intéressaient presque par magie. Michaux a cette manière d'écrire sur ce qui nous interroge intérieurement. Tous ses thèmes captivent et pourtant, quand je le lis, ma curiosité initiale devient sans objet et presque une énigme dont son écriture est certainement responsable. Peut-être est-ce la conséquence d'un style d'écriture moderne, expérimental, imaginatif. Il y a là, malheureusement, quelque chose pou moi qui faiblit et qui a tout avoir avec l'inspiration surréaliste de Qui je fus. Je perçois parfois l'écriture qui joue sur l'automatisme de la pensée comme étant plus ennuyante, elle nous pousse à décrocher de notre lecture.
Par ailleurs, il y a de l'humour chez Michaux : « Charlie ne peut voir d'un homme ses longues oreilles, sans avoir envie d'y accrocher sa canne./ Il allume ses allumettes sur le crâne chauve d'un musicien, l'éteint dans son nez, et se débarrasse de ses gants dans l'ouverture du cor d'harmonie. » J'insiste, de nombreux passages font rigoler. Il y a aussi de la profondeur dans ses textes: « Je suis habité; je parle à qui-je-fus et qui-je-fus me parlent. Parfois, j'éprouve une gêne comme si j'étais étranger. Ils font à présent toute une société et il vient de m'arriver que je ne m'entends plus moi-même. »
En somme, je risque de relire Michaux dans ma vie, mais il ne s'agit pas pour moi d'un auteur dont la lecture des textes m'est absolument essentielle et c'est bien dommage.
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LE GRAND COMBAT
Il l'emparouille et l'endosque contre terre ;
Il le rague et le roupéte jusqu'à son drâle ;
Il le pratéle et le libucque et lui baroufle les ouillais ;
Il le tocarde et le marmine,
Le manage rape à ri et ripe à ra.
Enfin il l'écorcobalisse.
L'autre hésite, s'espudrine, se défaisse, se torse et se ruine.
C'en sera bientôt fini de lui ;
Il se reprise et s'emmargine... mais en vain
Le cerveau tombe qui a tant roulé.
Abrah ! Abrah ! Abrah !
Le pied a failli !
Le bras a cassé !
Le sang a coulé !
Fouille, fouille, fouille,
Dans la marmite de son ventre est un grand secret.
Mégères alentours qui pleurez dans vos mouchoirs;
On s'étonne, on s'étonne, on s'étonne
Et on vous regarde,
On cherche aussi, nous autres le Grand Secret.
« Papa, fais tousser la baleine », dit l'enfant confiant.
Le tibétain, sans répondre, sortit sa trompe à appeler l'orage
et nous fûmes copieusement mouillés sous de grands éclairs.
Si la feuille chantait, elle tromperait l'oiseau.
(Qui je fus Gallimard, 1927)
Mais le double n’est jamais une projection de l’intérieur, c’est au contraire une intériorisation du dehors. Ce n’est pas un dédoublement de l’Un, c’est un redoublement de l’Autre. Ce n’est pas une reproduction du Même, c’est une répétition du Différent. Ce n’est pas l’émanation d’un JE, c’est la mise en immanence d’un toujours autre ou d’un Non-moi. Ce n’est jamais l’autre qui est un double, dans le redoublement, c’est moi qui me vis comme le double de l’autre : je ne me rencontre pas à l’extérieur, je trouve l’autre en moi.
Je suis habité : je parle à qui-je-fus et qui-je-fus me parlent. Parfois, j'éprouve une gêne comme si j'étais étranger. Ils font à présent toute une société et il vient de m'arriver que je ne m'entends plus moi-même.
M E S O C C U P A T I O N S
Je peux rarement voir quelqu'un sans le battre. D'autres préfèrent le monologue intérieur.
Moi non. J'aime mieux battre.
Il y a des gens qui s'assoient en face de moi au restaurant et ne disent rien, ils restent un certain temps, car ils ont décidé de manger.
En voici un.
Je te l'agrippe, toc.
Je te le ragrippe, toc.
Je le pends au portemanteau.
Je le décroche.
Je le repends.
Je le décroche.
Je le mets sur la table, je le tasse et l'étouffe.
Je le salis, je l'inonde.
Il revit.
Je le rince, je l'étire (je commence à m'énerver, il faut en finir), je le masse, je le serre, je le résume et l'introduis dans mon verre, et jette ostensiblement le contenu par terre, et dis au garçon: «Mettez-moi donc un verre plus propre.»
Mais je me sens mal, je règle promptement l'addition et je m'en vais.
Les rêves et la jambe
La spécialisation détruisit la tour de Babel, chacun parlait une langue spéciale.
C'est notre époque.
Chimistes, financiers, marins, industriels, chanoines, critiques d'art, philosophes, ont chacun leur argot.
Charabias !
Il n'y a plus que les va-nu-pieds pour se faire entendre de tout le monde.
Sacha Guitry, Victor Hugo, Henri Michaux, Raymond Devos... Tous ces noms furent les auteurs de textes illustres, qu'André Dussollier convoque et ressuscite sur la scène des Bouffes parisiens depuis le 18 janvier. Rencontre avec cet acteur à trois césars et récompensé du Molière du comédien.
#theatre #cinema #andredussollier
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