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EAN : 9782266156691
Pocket (22/07/2005)
3.92/5   89 notes
Résumé :
Ce n'est qu'un champ de pierres que cette pièce de quatre-vingts ares que l'oncle Malpeyre lègue à son neveu Firmin, pour lui « apprendre à vivre » jamais personne n'a jamais pu cultiver ce coin de causse du Quercy. Bel héritage ? Cependant le jeune homme décide de relever le défi qui lui est lancé : sous les pierres, il y a forcément de la terre, et Firmin commence à dépierrer... Ce travail insensé - dans le village, on le tient pour fou - occupera toute sa vie. Ca... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Dans un petit village un jeune paysan orphelin, Firmin, ne s'entend guère avec son tuteur, qui se trouve être son oncle. Au moment de mourir, par dérision, celui-ci lui lègue une pièce de terre qui porte bien son nom : le champ des roches. Depuis des siècles, tout le village y déverse ses pierres d'épierrage. Pas un brin d'herbe. Que de la poussière et de la caillasse.

Mais notre héros a le sens de l'humour, et il est du genre tenace. Par ironie, par désir de faire la nique au mort, il prend la décision de faire jaillir un verger de ce bout de désert. Quand aux pierres, il les utilisera pour l'entourer d'une muraille. Pas un muret vaguement empilé. Un bel ouvrage, bâtit avec soin dans les règles de l'art. Dans le village, tout le monde le prend pour un fou.

Mais la première guerre mondiale éclate, et l'arrache à son champ. Dans les tranchées, il retrouve son cousin, Edmond. A eux deux, ils réussissent à survivre à la boue, aux rats, aux obus, et même aux Allemands. de retour au village, entêté, une seule chose compte à ses yeux : reprendre la construction de sa muraille…

Devenu le curé du village, le cousin Edmond est le seul qui ne le tient pas pour un dérangé. Il arrive même à en faire son enfant de coeur. Et de la terre lentement débarrassée des pierres qui la recouvraient, lentement émerge de jeunes arbres pleins de vie et de sève…

L'un de ces récits « terre des anciens » qui se mirent à fleurir quand certains intellectuels réalisèrent que la paysannerie française était en voie de disparition rapide. Il y avait un patrimoine à garder, à préserver. Des légendes et des récits, mais aussi des outils, des gestes, des organisations sociales, des systèmes juridiques – bref, des petites civilisations dans la grande, liée à une terre patiemment modelée au fil des siècles.

On serait tenté de le comparer à Giono, mais le style diffère totalement, tout comme le récit et son objectif. On est plus proche de Mario Rigori Stern, lui aussi témoin d'un monde disparu. A lire si les haies qui clôturaient les champs vous manquent, et si quelque chose vous serre le coeur devant le ruisselet de votre enfance caché dans une buse de ciment.
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La Feuille Volante n° 1345 – Avril 2019.

La Grande MurailleClaude Michelet. Pocket.

Il n'y a rien de telle qu'une succession pour jeter la zizanie dans une famille. Firmin vient d'hériter de son oncle et tuteur une vaste pièce de terre au détriment de ses autres cousins Émile, Edmond et Leonie. Cette parcelle avait beau n'être qu'une grande étendue incultivable où tout le monde, depuis des années déverse son surplus de pierre, Émile souhaite la lui racheter, ne serait-ce que parce qu'il estime que cela fait partie de son héritage naturel et non de celui de Firmin. Chacun au village conseille à ce dernier d'abandonner cette parcelle simplement parce qu'elle ne lui rapportera jamais rien et qu'il se fatiguera en pure perte mais lui, Firmin qui est célibataire et qui n'a rien d'autre qu'une pauvre maison, décide de la cultiver autant pour embêter son cousin que pour tenter quelque chose d'insensé : faire pousser des arbres fruitiers dans ce désert minéral. Il utilisera les pierre pour délimiter sa propriété en érigeant un mur. Résultat au village tout le monde le prend pour un fou !
La Grande guerre arrive et Firmin retrouve son cousin Edmond dans les tranchées où ils survivent ensemble dans la boue, la mitraille et les rats… Revenu au village il reprend la construction de sa muraille et les arbres et la vigne qu'il a plantés se mettent à donner des fruits parce que sous la pierre il y avait de la terre fertile qui, travaillée et amendée, s'est révélée productive. C'est devenu sa passion, son unique raison de vivre et peut-être un signe du destin qui a fait de lui le propriétaire de ce qu'il n'aurait jamais imaginé pouvoir posséder, à moins bien sûr qu'il n'ait décidé de faire la nique, par delà la mort, à cet oncle qui avait bien conscience de lui faire ainsi un cadeau empoisonné ! le rempart qu'il érige est ici plus qu'un symbole. Ça dépasse l'obligation légale de se clore. Il y a la volonté de se protéger contre la jalousie, voire de la nourrir, de ceux qui le prenaient pour un fou et qui seront bien obligés de constater la réussite de la persévérance et de l'effort. C'est en effet une constante chez les hommes d'envier, et même de détester, ceux qui réussissent là où d'aucuns ne veulent même pas s'engager. C'est le culte de l'effort, du travail bien fait qui s'inscrit dans un terroir rural, une sorte de manière de s'approprier cette terre ingrate au départ en l'apprivoisant. Après tout, ce pauvre orphelin, qui était sans doute différent des autres de la fratrie, recueilli par un oncle qui en a fait son héritier, aurait pu vendre cette terre stérile à son cousin ou simplement la laisser en l'état de broussaille caillouteuse, mais il a préféré la cultiver pour affirmer son côté rebelle et montrer qu'après avoir défendu son pays dans les tranchés il allait poursuivre différemment son effort. L'oeuvre de Michelet s'inscrit d'ailleurs en grande partie dans l'amour et le travail de la terre et de la condition des petits agriculteurs face à la modernité.
Ce récit m'a rappelé le roman de Jean Giono « L'homme qui plantait des arbres » (La Feuille Volante n° 1124). Certes le style est différent mais néanmoins fort agréable à lire, mais l'histoire est à peu près la même. C'est un peu une parabole où un homme seul décide de se battre pour son idée, même si le projet est fou et que chacun tente d'y faire échec. C'est à la fois absurde, utopique mais c'est le sens qu'il donne à sa vie. Il y a cependant une différence importante à mes yeux. Celui de Giono s'inscrit dans un contexte laïc. Il s'agit d'un homme pauvre qui décide s'ensemencer avec des glands une étendue désertique qui ne lui appartient pas et qui deviendra une forêt. Ici Michelet met sa fiction dans le contexte sociologique de l'époque, celle de l'appartenance au catholicisme où l'église était, plus que la Mairie sans doute, le centre du village. Son cousin Edmond devient prêtre et après la guerre qu'il a faite avec Firmin, il revient comme curé de leur village, son cousin devenant son sacristain, son enfant de choeur, même s'il n'est pas très catholique ! Edmond n'a aucun intérêt à posséder du bien sur terre et donc à le transmettre, c'est ici l'alliance non plus du « sabre et du goupillon » qui a petit à petit vidé nos églises, mais celle au contraire de l'effort humain que le clergé populaire accompagne et soutient, de la dimension religieuse de l'action de l'homme sur terre, ce qui évoque pour moi la figure de son père Edmond Michelet.
Il y a chez Firmin cette volonté de s'affirmer face aux autres tout en se coupant du monde, de fuir ses semblables, qui d'ailleurs le lui rendent bien, à l'exception d'Edmond devenu curé, une amitié finalement assez atypique. Il puise sa joie dans la nature généreuse, dans le travail bien fait et cela lui suffit.
C'est le premier roman de Michelet que je lis et il m'a bien plu.

©Hervé Gautier.
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Il y a bien longtemps que j'avais lu quelques livres de Claude Michelet, des grives aux loups et autres romans de terroirs, bien écrits, documentés et fort intéressants.
À court de livres pendant cette période de repli, je suis allée voir dans la boîte à livres de mon village et y ai trouvé La grande muraille, que j'ai lu en une petite journée.
L'histoire est prenante, on se laisse porter par le courant de cette vie qui passe à toute vitesse, racontée avec juste les mots qu'il faut, sans superflu. Et c'est là justement tout l'art de l'écriture de Michelet, et ce que j'apprécie beaucoup dans un roman, c'est d'amener le lecteur à réfléchir et à comprendre tout ce qui n'est pas dit.
Ici par exemple, on comprend à quel point l'horreur de la guerre (de 14-18) vécue par de jeunes garçons de 20 ans a pu provoquer comme dégâts irréversibles sur des êtres déjà fragiles et peu gâtés par la vie.
Ensuite, on réfléchit sur la folie, qui peut changer de sujet suivant de quel point de vue on se place.
Enfin, qu'en est-il d'un projet fou, un projet titanesque, mené par un homme seul, un seul homme durant toute sa vie et quel sens cela a-t-il ?
Et encore d'autres questions, très intemporelles et universelles, même si l'histoire commence en 1914.
À lire absolument.
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Tel un dernier baroud d'honneur, Alfred Malpeyre lègue à Firmin, ce neveu orphelin qu'il a élevé avec les siens, un morceau de champ où ne poussent que les cailloux, sûrement pour le punir de son tempérament frondeur et enfin, à sa mort, avoir le dernier mot . Prenant ce legs comme un défi, le jeune homme choisit de l'épierrer, pour accéder à la terre fertile qu'il recèle. Devant les tas qui s'empilent, Firmin décide alors de construire l'oeuvre de sa vie : bâtir avec les pierres enlevées une muraille autour de son domaine, une oeuvre aussi belle qu'inutile. La guerre va interrompre son projet mais, grâce à cette obsession enfouie dans un coin de sa tête, il reviendra en vie de la boucherie de 14-18.
A son retour, Firmin poursuit son ouvrage qui va devenir l'unique justification de son existence, une passion que ceux qui l'entourent vont assimiler à de la folie. Au contact de la nature, il s'isole des villageois, ne parlant plus qu'à lui-même et à son âne. Mais voilà qu' Edmond, ce cousin qui a mal tourné puisqu'il est entré tout jeune au séminaire et avec lequel il a partagé l'horreur des tranchées est nommé curé du village...
Magnifique histoire sur l'entêtement d'un homme libre pour qui "donner un sens à sa vie" ne signifie pas la même chose que les autres. Récit authentique sans complaisance où le thème de l'absurde, cher à Camus, revisité par la plume de Michelet prend des accents de terroir.
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Je n'avais pas lu de livre de Claude Michelet depuis bien longtemps. Pourtant je garde un très bon souvenir des Promesses du ciel et de la terre que m'avaient fait découvrir ma mère et ma grand-mère.
J'ai découvert ici l'un des premiers romans de cet auteur prolifique et, même si l'intrigue est assez épurée, je ne me suis aucunement ennuyée. J'ai passé un bon moment dans la campagne du Quercy aux côtés de Firmin dans la mission qu'il s'est donné et qui le fera passer pour fou aux yeux de beaucoup des autres villageois. J'ai même trouvé assez poétique, assez artistique, cette vocation de bâtisseur poursuivie, toute une vie durant, avec une telle obstination.
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
- Du plaisir ? dit-elle incrédule en le scrutant attentivement. Qu'est-ce que tu racontes ? Y a pas de plaisir à ramasser des pierres, c'est ennuyeux et fatigant et si c'est valable dans les terres, ici, ça sert à rien.
Elle n'était pas loin de penser que Firmin avait reçu dans les jours précédents quelque méchant coup de soleil et que la fièvre l'avait pris subitement.
- Mais si, assura-t-il, ça sert ! C'est du travail, donc ça sert.
Il ne voulait pas sortir de là, il ne voulait surtout pas reconnaître que ce qu'il entreprenait était inutile. Il sentait, sans pouvoir encore l'expliquer, que l’œuvre qu'il voulait faire lui était désormais aussi indispensable que l'air, le pain ou le vin. Certes, il se savait toujours libre de poursuivre ou d'abandonner, mais il était certain que dans ce dernier cas, sa vie entière serait marquée par cet abandon.
- De toute façon, reprit-il, ce qui compte c'est de faire quelque chose, n'importe quoi, mais quelque chose.
Elle haussa les épaules puis se frappa la tempe avec l'index de sa main droite.
- Maintenant, dit-elle, je suis sûre que tu es fou ! Un homme normal ne s'amuse pas à ramasser des cailloux pour le plaisir.
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Tout à l'heure, peut-être, ce serait Edmond qui, avant de partir, prendrait un éclat dans le ventre ou une balle dans la tête. Demain ou tout de suite, ce serait lui, Firmin, qui sentirait le coup mortel du projectile qui frappe.
- Dis, demanda soudain Firmin, tu ne trouves pas que ton Bon Dieu déconne un peu de laisser faire tout ça ?
- Tais -toi, c'est toi qui déconnes, dit âprement Edmond. C'est toi, c'est moi, c'est tout ceux qui sont là, ici, en face, partout dans le monde, c'est le monde entier qui déconnes ! (La voix d'Edmond s'enfla.) Oui, tout le monde déconne parce que tout le monde est libre de le faire. Tout le monde est libre aussi de ne pas le faire, mais il est plus facile de déconner que de faire le reste ! Alors voilà ce que ça donne, des tas de cadavres. Oui ! Des tas de cadavres avec tout autour des pauvres cons comme moi qui chialent devant leur propre connerie !
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Ce qu'il savait également, et cela le gênait, c'était qu'il allait devoir abandonner, sans doute pour quelques semaines, le gigantesque travail qui lui tenait de plus en plus à cœur. Il allait devoir laisser son chantier tel qu'il était, c'est à dire à peine effleuré, tout juste découvert, presque intact. Certes, les pierres ne s'envoleraient pas en son absence, il retrouverait sa pièce telle qu'il la laisserait, mais l'idée de tout ce temps qu'il allait perdre l'assombrissait.
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Il resta ébahi devant Notre-Dame, ce merveilleux tas de pierres.
Il lui importait peu que des milliers d'hommes aient collaboré à ce chef-d’œuvre. Ce qu'il retint, ce fut qu'un inconnu ait un jour décidé de s'attaquer à cette tâche.
La tour Eiffel, en revanche, l'étonna sans l'émerveiller. Elle était à ses yeux trop simple, ou trop compliquée. Ce n'était que ferraille boulonnée et peinte. Ici, nulle trace de cette nature que l'on sentait dans tous les monuments de pierre et qui leur conférait tant de beauté.
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Firmin avait suivi deux obsèques en quinze jours. C'est au soir des secondes que l'oncle Alfred, frère de son père, l'avait glissé dans sa famille comme on glisse une feuille volante entre les pages d'un livre bien relié. La feuille ne s'était pas confondue avec les autres et, au fil des ans, elle avait de plus en plus dépassé du volume.
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Vidéo de Claude Michelet
L'émission "Le coup de coeur des libraires est diffusée sur les Ondes de Sud Radio, chaque vendredi matin à 10h45. Valérie Expert vous donne rendez-vous avec votre libraire Gérard Collard pour vous faire découvrir leurs passions du moment ! • Retrouvez leurs dernières sélections de livres ici ! • • Elizabeth II (nouvelle édition jubilé de platine) de Jean des Cars aux éditions Perrin https://www.lagriffenoire.com/elizabeth-ii.html • Des grives aux loups de Claude Michelet aux éditions Pocket https://www.lagriffenoire.com/des-grives-aux-loups-tome-1-vol01.html • Guerre de Louis-Ferdinand Céline et Pascal Fouché aux éditions Gallimard https://www.lagriffenoire.com/guerre.html • Mort à crédit de Louis-Ferdinand Céline aux éditions Folio https://www.lagriffenoire.com/mort-a-credit.html • Les Douces Choses de Alice Dekker aux éditions Arléa https://www.lagriffenoire.com/les-douces-choses.html • L'ami impossible: Une jeunesse avec Xavier Dupont de Ligonnès de Bruno de Stabenrath aux éditions Folio https://www.lagriffenoire.com/l-ami-impossible-une-jeunesse-avec-xavier-dupont-de-ligonnes.html • La robe de Jérôme de Verdière aux éditions Cherche Midi https://www.lagriffenoire.com/la-robe.html • le Serment sur la moustache de Samuel Piquet aux éditions de l'Observatoire https://www.lagriffenoire.com/le-serment-sur-la-moustache.html • Nos âmes au diable de Jérôme Camut et Nathalie Hug aux éditions Fleuve Noir https://www.lagriffenoire.com/nos-ames-au-diable.html • Comme un enchantement de Nathalie Hug aux éditions Livre de Poche https://www.lagriffenoire.com/comme-un-enchantement.html • Zéro viande zéro poisson de Jean-François Piège aux éditions Hachette Pratique https://www.lagriffenoire.com/zero-viande-zero-poisson-plus-de-50-recettes-veggie-et-gourmandes-qui-ont-fait-leurs-preuves.html • Ma double vie avec Chagall de Caroline Grimm aux éditions Héloïse d'Ormesson https://www.lagriffenoire.com/ma-double-vie-avec-chagall.html • Une princesse modèle de David Brunat aux éditions Héloïse d'Ormesson https://www.lagriffenoire.com/une-princesse-modele.html • • • Chinez & découvrez nos livres coups d'coeur dans notre librairie en ligne lagriffenoire.com • Notre chaîne Youtube : Griffenoiretv • Notre Newsletter https://www.lagriffenoire.com/?fond=newsletter • Vos libraires passionnés, Gérard Collard & Jean-Edgar Casel • • • #lagriffenoire #bookish #bookgeek #bookhoarder #igbooks #bookstagram #instabook #booklover #novel #lire #livres #sudradio #conseillecture #editionsperrin #editions Pocket #editionsgallimard #editionsfolio #editionscherchemidi #editionsdelobserva
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