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EAN : 9782378561673
160 pages
Verdier (23/03/2023)
3.77/5   84 notes
Résumé :
Les deux Beune est le roman que forment La Grande Beune, paru chez Verdier en 1996 dans une première version, et La Petite Beune, inédite.
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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La grande écriture de Pierre Michon sublime un texte qui aurait pu se trouver limité à une parade érotique entre un jeune homme et une femme plus mûre, s'il eût été écrit par certains écrivaillons d'aujourd'hui peu capables d'exprimer la quintessence des émotions du désir.

Le jeune instituteur nommé à l'automne de l'année 1961 dans le bourg de Castelnau, en Dordogne, est très vite en proie à un fantasme, né de la vision quotidienne d'une buraliste trentenaire, à la peau blanche, qui va traumatiser ses sens jusqu'à l'accomplissement toujours différé, mais enfin assouvi, de son désir contenu.

Plusieurs centres d'intérêts émanent de cette courte lecture : la saison automnale puis hivernale décrite avec un style magistral par Pierre Michon, l'atmosphère paléolithique avec la caverne aux gravures disparues, la pêche à la truite, la carpe, le brochet, la friture, et, surtout, la toute puissance du désir, la tentation suggérée par la femme, dans cette ambiance saturée de testotérone, le tout avec une certaine lenteur qui emporte paisiblement le lecteur.

La réunion des deux rivières, Grande Beune et Petite Beune, sous le titre Les deux Beunes, présente la première publiée en 1996, la seconde en 2023 que l'auteur parvient à intégrer comme la suite aboutie de la première. Tout est beau dans ce livre, la nature, les femmes -- elle sont trois --, les hommes, pêcheurs, routiers, les écoliers, l'ensemble dans un véritable roman d'atmosphère, de perceptions, d'émotions, de véritable littérature.



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Il faut se laisser emporter par le courant de cette langue un peu surannée, souvent poétique, furieusement libre et tumultueuse. Pierre Michon écrit avec jubilation, tout à son affaire : l'expression d'un désir juvénile et souverain. Qui mieux qu'un vieil homme aguerri pouvait en raconter l'emprise ? Yvonne occupe son âme (« Elle ne souhaitait pas faire l'amour, elle voulait le commettre. Elle aimait ce comble de la civilisation »).
Son image fantasmée est déclinée à tous les temps et sous tous les angles, tel un chef d'oeuvre dont l'exégèse jamais ne lasse. Des paysages de fable, des enthousiasmes puérils, des saillies irréelles, d'infinies concupiscences, il y a quelque chose d'émouvant à voir l'écrivain, au crépuscule de sa vie, en raviver les souvenirs les plus ardents. L'histoire en devient accessoire : un jeune homme obsédé par une femme plus âgée que lui, soumise à des rivaux, aux flancs d'une rivière, à l'orée d'une grotte oubliée dont les fresques rupestres, brutes et mystérieuses, crient les origines de l'humanité.
Pierre Michon célèbre l'éternel féminin, aux confins des lettres, concédant sans ciller qu'une incandescente beauté surpassera à jamais les autres préoccupations, et qu'il est vital de s'y conformer pour faire triompher la vie et la vérité.
Bilan : 🌹🌹
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Une suite à la Grande Beune comme si les décennies n'étaient pas passées.
"Le présent se rencontrait enfin."
Dans la Petite Beune, l'atmosphère reste intacte, Yvonne si belle et toujours séductrice sort le narrateur de l'ombre.
Et toujours le même plaisir immense pour moi de retrouver le style et la densité de l'écriture de Pierre Michon.
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Les deux Beune rassemble deux courts romans, La grande Beune paru en 1996 et La petite Beune paru cette année 2023. La petite fait suite à la grande et le tout fait 151 pages

Livre un.
Je dirai volontiers que l'histoire n'a aucune importance. Bien sûr, je suppose que Pierre Michon n'est pas en terre inconnue, et que ses personnages sont peut être inspirés de ces voisins de paliers.
La grande Beune vaut surtout, mon point de vue , par le style et les émotions qui par les jeux de mots et de phrases feront vibrer en vous je ne sais quoi de résonnant et de raisonnant.

Le narrateur instituteur prend donc son premier poste dans un village du Périgord. Rapidement il est ébloui par la buraliste 30-40 ans et tel un ado d'antan, ceux d'aujourd'hui sont gavés d'internet plus ou moins porno, cet ado d'antan a donc du mal à contrôler ses pulsions du bas ventre dès que des effluves d'Yvonne à ses narines frétillent sous carpe.

P 11. Début du livre en fait. C'est à Castelnau que je fus nommé, en 1961 : les diables sont nommés aussi je suppose, dans les Cercles du bas ; et de galipettes en galipettes ils progressent vers le trou de l'entonnoir comme nous glissons vers la retraite.
Aïe. Pas compris. Sont ce les cercles de Dante et à 20 ans glisser déjà vers la retraite. Qu'y a t il derrière cette phrase, et derrière bien d'autres dont je fais l'impasse à la compréhension.
En parallèle, les grottes préhistoriques, les peintures rupestres, les pêches truite carpe et autres brochets pas vu pas pris, et des locaux que je vous laisse découvrir.

P 41. elle avait sur la droite ainsi découverte, épargnant le grain de beauté mais le poignant au plus plein, largement bourgeonnant au cou, fleurissant plus bas sous le carrick et effleurant la joue d'un pétale abjecte, la marque épaisse, boursouflée de sang noir et plus meurtrie qu'un cerne, plus mâchée que ses lèvres, que laissent avec éclat les fouets.
Lisant vite, je ne comprends rien. Relecture lente, pas clair. Re re lecture, peut être une griffure près de son grain de beauté.
Et le narrateur qui tombe en pamoison. Pauvre ado.

Livre deux.
Sur mes gardes, je prends le temps de lire. 35 ans ont passé. Disons le vite, c'est plus limpide, attention néanmoins certaines phrases sont longues et digressantes, le fil du rasoir est vite perdu si vous avez sauté un poil trop loin.
De plus Pierre Michon se concentre aux dépens des truites et des grottes, un peu trop sur la relation narrateur-Yvonne.

P142. Je me souvins d'un autre temps, quand moi même à tâtons m'appliquais à cliquer les pinces des subordonnées sur la chair de la phrase, à enfiler des désinences sur l'hameçon du verbe ; à tailler les silex du sens.
Ouf malgré l'âge, 87 ans, l'auteur n'a rien perdu de son style qui enchante mes oreilles et auquel je n'y comprends goutte du moins en première lecture.

Obsédé, obsession, des reprises du livre un sous le jour du livre deux laisse à croire qu'Yvonne était de braise également et qu'en ces temps incendiaires faire attention est la moindre des choses.

Les deux Beune.
Un état d'esprit qui a évolué avec le temps. Un vieux Monsieur-narrateur qui peut être souhaite conclure pour une dernière fois. Un style ardu tout aussi qu'ardent. Les temps ont aussi changé et les femmes potiches, c'est terminé. Quant à l'avenir des impétrants, il n'y en a pas. Et fallait il consommer.

La phrase de la fin ainsi que j'aime à les citer. C'était du lait.
Chaud, froid, de vache de brebis d'amendes ou de coco, nature ou chocolat, nuage pour ma noisette bref à vous de goûter.
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Ce livre regroupe « La petite Beune » paru en 1996 et « La grande Beune » texte plus récent, un additif ou une suite comme on voudra. le narrateur, tout jeune instituteur, est nommé dans un petit village du Périgord. Très vite il fait la connaissance d'Yvonne, pour qui il ressent un immense désir charnel. C'est la montée de ce désir qui nous est contée là et son accomplissement. Autour de ce couple en train de se faire peu à peu, gravitent quelques personnages et règne une nature et une histoire omniprésentes.
L'intérêt du livre se résume essentiellement au style et aux images fulgurantes qu'il charrie. On peut trouver cela trop écrit et artificiel. Tout dépend de ce que le lecteur cherche. Ce livre ne fait que 150 pages, et franchement cela vous lave les pupilles : une cure de style de temps en temps peut s'avérer nécessaire après tant de lectures plates, grossières et provocantes ou au français saccagé.
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critiques presse (7)
LesEchos
17 mai 2023
Quatorze ans après « Les Onze », l'écrivain revient en librairie avec « Les deux Beune ». Une reprise et une continuation d'un texte marquant paru une première fois en 1996. On traverse ses cent cinquante pages, passant du brouillard à la lumière, comme magnétisé.
Lire la critique sur le site : LesEchos
SudOuestPresse
16 mai 2023
Pierre Michon donne une suite éblouie et éblouissante à « La Grande Beune », un fragment brut et rutilant sur le désir amoureux.
Lire la critique sur le site : SudOuestPresse
Marianne_
25 avril 2023
Directrice de la rédaction de « Marianne », Natacha Polony a lu « Les Deux Beune », le dernier livre de Pierre Michon. De sa lecture exigeante, elle tire un hommage passionné à ce grand écrivain, désormais tout à la fois – privilège des maîtres en littérature – novateur et classique.
Lire la critique sur le site : Marianne_
LaCroix
14 avril 2023
Avec Les deux Beune, Pierre Michon donne une conclusion à son récit de 1995, La Grande Beune, et une intensité nouvelle à cette rêverie érotique et mythologique.
Lire la critique sur le site : LaCroix
LeFigaro
27 mars 2023
L’écrivain creusois livre, vingt-sept ans après La Grande Beune, une extension magique.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LeMonde
24 mars 2023
Cet affrontement entre « civilisation » et animalité est au cœur du livre, comme il est au cœur du désir de « monsieur Pierre » (on finit par connaître le nom du narrateur) pour Yvonne. Les dernières pages apportent une forme de résolution à ce que l’on pourrait appeler l’intrigue.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeMonde
23 mars 2023
Pierre Michon rêvait de donner une suite à La Grande Beune (Verdier, 1996). « La Petite Beune » surgit près de trois décennies après « La Grande », avec laquelle il est publié sous le titre Les Deux Beune. Et ce qui frappe est un miracle : il parvient immédiatement à relancer la tension érotique presque hallucinée qui porte le premier texte.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (36) Voir plus Ajouter une citation
Au-dessus de ces trous pendant des années innombrables des rennes transhumèrent, qui de l’Atlantique remontaient au printemps vers l’herbe verte de l’Auvergne dans le tonnerre de leurs sabots, leur immense poussière sur l’horizon, leurs andouillers dessus, la tête morne de l’un appuyée sur la croupe de l’autre ; et là, dans le goulet crapuleux que forment s’embrassant la Vézère, les deux Beune, l’Auvézère, on les attendait avec des limandes, des becs-de-perroquet, des haros ; et les mangeurs de lichen de loin entendaient les tambours, voyaient des feux si c’était la nuit et le jour voyaient la fumée, mais sans dévier ils prenaient vers les tambours, s’étiraient dans les étroitures au bord de l’eau, tremblants ; ils y allaient tout droit ; car si les rennes avaient pu concevoir un dieu ou un démon ils l’auraient prié et pensé là, calendérique et imparable, chaque mois d’avril se levant partout à la fois sur les crêtes, déchaîné sans cause comme sont les dieux, apparaissant dans un corps multiple animé de la volonté unique de les rendre fous, dans des cliques à grandes gueules, des hommes tout en haches, des fosses avec des pieux dedans ; et ils auraient pensé que ce dieu était clément, car après tout ils n’en laissaient jamais là qu’un tiers, et le restant tout l’été jouissait des lichens d’or sur les basaltes, du soleil qui se couche derrière les doux volcans ronds quand le temps est beau et qu’on rumine l’herbe du jour.
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Je grimpai le raidillon à toute allure, je fus sur la place ; en bas de la place plutôt, et le tabac est à l'autre bout, tout en haut : je ne le voyais pas, on n'y voyait pas à dix mètres, ces dix mètres étaient le monde, le diamètre du monde, qu'on trimballait avec soi en marchant, ou qui attendait là avec vous, autour de vous, bien docile, quand on s'arrêtait comme je venais de le faire. Je m'étais arrêté en effet, et ce n'était pas pour reprendre mon souffle, pas davantage pour mesurer le diamètre du monde ; ce n'était pas non plus pour reconnaître cet amas bleu roi de poutrelles et d'écrous, de ligatures et d'énormes troncs fraîchement coupés, sur quoi j'avais failli buter, et qui était le trente-huit tonnes Berlier de grumes : c'est que j'entendais à vingt mètres, peut-être dix, hors du monde, dans l'invisible, des talons aigus fouler le pavé de la place et venir vers moi.

Elle entra dans le monde visible, elle fut sur moi, nous nous vîmes. Elle s'arrêta. Elle ne disait mot. Les grands yeux très ouverts regardaient les miens.

Deuxième partie, La Petite Beune, pp. 111-112
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Entre Les Martres et Saint-Amand-le-Petit, il y a le bourg de Castelnau, sur la Grande Beune. C’est à Castelnau que je fus nommé, en 1961 : les diables sont nommés aussi je suppose, dans les Cercles du bas ; et de galipette en galipette ils progressent vers le trou de l’entonnoir comme nous glissons vers la retraite. Je n’étais pas encore tombé tout à fait, c’était mon premier poste, j’avais vingt ans. Il n’y a pas de gare à Castelnau ; c’est perdu ; des autobus partis le matin de Brive ou de Périgueux vous y larguent fort tard, en bout de tournée. J’y arrivai la nuit, passablement ahuri, au milieu d’un galop de pluies de septembre cabrées contre les phares, dans le battement de grands essuie-glaces ; je ne vis rien du village, la pluie était noire. Je pris pension Chez Hélène qui est l’unique hôtel, sur la lèvre de la falaise en bas de quoi coule la Beune, la grande ; je ne vis pas davantage la Beune ce soir-là, mais par la fenêtre de ma chambre me penchant sur du noir plus opaque je devinai derrière l’auberge un trou.

Première partie, La Grande Beune, incipit, p. 11
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Je me couchais, la lune un instant pénétrait dans ma chambre et très loin dans des clairières perdues caressait des silex que nul ne voit, la pluie furieuse les enfouissait.
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Je m'arrêtais soudain ; j'imaginais sa bouche ; j'imaginais sa gorge ; à la pensée de ses reins je tremblais au-delà de toute convoitise. Te voyant, me disais-je, peut-être elle va sans un mot renverser la tête, trembler comme tu trembles, te saisir là où tu veux la saisir, et les jupes dans ses mains elle se donnera là, contre ce bouleau, dans ces flaques où seront tombés ses sequins, où pétriront ses paumes, où tu verras l'image de ses seins, et plus secouée qu'un arbre dans le vent ses grands cris renversés feront partir les corbeaux.
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