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EAN : 9782916130446
Editions du Chemin de Fer (06/11/2012)
3.5/5   8 notes
Résumé :
" Dès qu'on sut où il était, ce fut la ruée. La foule accourut de très loin. Elle comprit tout de suite qu'il s'agissait d'un sacrifice humain, d'un très vieux rite, et qu'il fallait venir, Miracle ! La terre mange un enfant en direct ! Elle l'a happé de sa bouche vorace, elle est en train de le déglutir tout cru."

Italie. Juin 1981. Non loin de Rome, un enfant de six ans tombe dans un puits et reste bloqué à plus de vingt mètres de profondeur. La fou... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Annie Mignard s'inspire d'un fait divers qui a tenu l'Italie en haleine devant son poste de télévision, pour assister à la mort en direct d'un petit garçon tombé dans un puits.
Gens des environs, médias, politiques, tous se rendent sur le lieu tels des charognards pour prendre leur part du festin. L'auteure montre dans ce livre comment la catharsis se met en place.
En résonance avec les peintures étranges d'Emmanuel Tête, ce texte bouleversant remue les tripes et laisse un goût amer dans la bouche
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Italie, juin 1981. Non loin de Rome un enfant tombedans un puits et reste bloqué à plus de vingt mètres de profondeur. La foule accourt pour assister aux
secours qui pour la première fois sont retransmis en direct à la télévision pendant plus de dix-huit heures d'affilée, faisant entrer l'information dans l'ère du spectacle.

Ce court récit d'Annie Mignard s'inspire librement de ce fait divers, et tisse un conte cruel et juste, où l'espoir s'éteint peu à peu à la sortie de ce puits sans fond et sans espoir. Une lecture éprouvante mais également salutaire pour comprendre un peu mieux la détresse humaine et la puissance des faits divers
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Un texte court illustré de dessins, intéressant, mais un peu sommaire à mon goût. Bien sur, l'essentiel est dit, cette foule avide de sensationnel , sa bêtise et sa superficialité. le récit, tiré d'un fait divers réel, raconte un enfant qui meurt en direct. Mais la concision du texte le rend un peu académique, comme le constat froid d'un dysfonctionnement de notre société qui parait presque une évidence. J'ai attendu presque deux mois ce livre commandé sur internet et ai été frustré d'une lecture si rapide.
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Un enfant de 5 ans court la campagne, saute tant qu'il peut comme on joue à cet âge et tombe dans un trou, un mince entrefilet dans la caillasse qui semble l'avoir aspiré d'un coup, une dégringolade de vingt mètres en une respiration, pfuit disparu. Mais ses gémissements atteignent le monde, qui s'attroupe et contemple. La rumeur enfle, les médias s'imposent, la foule siège, veut savoir, veut sentir, veut vivre cet événement comme s'il s'agissait du sien. Savoir mais pas trop, vivre sans être tellement concerné, et puis tourner la page comme si de rien n'était.

Annie Mignard s'est inspirée d'un fait divers, l'accident de Vermicino, survenu en Italie en juin 1981.
L'événement tel qu'on le vit dans les premières pages, pourrait au départ sembler cocasse, mais il tourne vite au tragique, lorsque la foule s'aperçoit et comprend, et qu'Annie Mignard nous empoigne avec ses mots si beaux.

En 50 pages tendues, Annie Mignard décrit parfaitement la réaction d'un groupe face à un bouleversement tout juste survenu, le poids de l'assemblée face aux réactions individuelles, le jeu des médias, la société du spectacle. Ce texte est un criant témoignage de la dérive de notre société en matière d'empathie qui tend à devenir nulle. Vivre les événements pour savoir et non s'impliquer, commenter, projeter, et parfois médire. Annie Mignard fait appel à des références qui nous dépassent et à la poésie pour tenter de mettre des mots sur des comportements qui n'ont finalement rien de nouveau. Des références théologiques et artistiques, dans la représentation d'un fait divers dramatique sur lesquels les simples mots ne suffisent pas, pour soulever des thèmes vieux comme le monde tels que la filiation, la survie, le sacrifice. Et puis il y a la situation de cet enfant et le sentiment d'oppression, d'enfermement, d'isolement, qu'il communique très humblement devant cette situation inextricable.

Emmanuel Tête prolonge le texte, le suit, lui colle à la peau, avec des peintures glaçantes de noirceurs, rejoignant ainsi Annie Mignard dans cette fête sauvage qui s'avère aussi gaie que peut l'être une danse macabre.

Un livre étrange, spectaculaire et bestial, dans son humanité, dans son traitement, dans sa poésie.

Les éditions du Chemin de fer ont le souci du beau, dans le texte et dans l'objet. Des textes qui marquent, interrogent, remuent, soulignés par des oeuvres qui font écho très sensiblement. Dans la forme, des cahiers cousus devenus si rares et précieux, bien calés dans une couverture au rabat solide et beau.
Lien : http://casentlebook.fr/la-fe..
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L'objet, déjà : couverture cartonnée à rabat, mise en page extrêmement soignée, papier épais, illustrations...le livre séduit en premier lieu par sa matérialité.
Le texte, ensuite : un conte cruel, une fable sacrificielle où l'Agneau, petite victime innocente, sera immolé sous le regard indiscret d'une foule sans-gêne. Cruauté de la terre qui réclame son dû, avidité des foules, plus voraces finalement que cette faille dans la lande qui avale un petit être.

Annie Mignard a parfois de belles fulgurances poétiques, elle travaille la langue comme on travaillerait de la glaise. Un beau texte, un beau petit bijou.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
C'est l'essence du théâtre sacré, les psalmodies, les répons, la foule invente et se souvient, improvise, copie. Les yeux cherchent avidement les personnages. La mère ?
"Qu'est-ce qu'elle fait la mère ? Elle est où ?
- Elle s'évanouit, on dirait ...
- Ah non... Elle se penche...
- On la soutient ? Clelia, raconte-moi, je vois rien, elle crie ? Est-ce qu'elle se lamente ?
- Une Pietà, je te jure...
- Efroia, ici je t'ai dit ! reste avec maman, donne la main. Clelia, tu la vois, toi, comment est son visage au moins ?
- Une Pietà penchée sur son fils dans les ténèbres...
- Elle pleure, alors ?
- Mais c'est trop loin, moi, qu'est-ce que tu veux que je te dise !
- Bon, pousse-toi, Clelia, que je la voie, tu me caches tout. Ah ! malédiction, ce que c'est d'être une mère. Efroia, arrête de gigoter, tu vois un peu ce que c'est d'être une mère, disgraziata ? Jésus Marie ! Mon coeur va lâcher de ces émotions, ça m'élève l'âme. Prions la Madone ! A genoux ! Efroia, mets-toi à genoux à côté de moi, joins les mains et prie ! Prepotenta ! Et tiens-toi tranquille ou je te jette dans le trou"
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On raconte que sa voix résonnait si proche dans le conduit que là-haut ils riaient de soulagement (« On t’entend ! On t’entend ! On est là ! »). Il est tombé dans ce terrier abandonné, un trou de renard, on va l’extraire, le hisser en lui tendant la main, une perche, une corde. Amenez la torche par ici. Et ils amenèrent la torche. Mais au fond de l’isthme, ils ne le voyaient pas. Où est la sonde ? Amenez la sonde. Et ils firent aller la sonde, et à mesure que les mètres défilaient ils changeaient de visage, une suée leur venait, et aussitôt : comment le sortir ?, casse-tête, ils lâchaient un mot ou deux sans se regarder. Ils commencèrent par descendre une petite lumière jusqu’à lui, parce qu’il disait « j’ai peur dans le noir », et un biberon parce qu’il disait « j’ai faim », dont la bouillie était mêlée d’analgésiques parce qu’il disait « j’ai mal », menus viatiques humains pour son voyage aux enfers. Cela suffit à le rassurer. Et la voix de sa mère qui le rassura plus que tout. Et même on l’aurait fait rire au début, à ce qu’on rapporte, pendant que des équipes d’hommes là-haut, hors de sa vue, fourbissaient leurs armes pour venir le sauver. « C’est maman, trésor, je suis là. Tu n’es plus seul. On va te sauver. » « On vient te chercher, petit bonhomme, ce ne sera pas long. On va te remonter parmi nous. » Il riait.
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Alors la terre, personne n’y a cru. Les parents, les voisins, les carabiniers imaginèrent un fait divers. Ils supposèrent : enlèvement, rançon, pédophile, un chauffard l’a écrasé sur la route, un pervers sexuel le séquestre et l’épouvante – des histoires au ras des hommes, des histoires de maintenant. Ils cherchèrent partout le petit garçon perdu. On raconte qu’ils le cherchèrent tout le soir, toute la nuit. Le lendemain tôt, dans le matin brumeux, léger, doré, quand tout dormait encore, ils entendirent sa petite voix forte, fraîche, sortir des plantes, comme s’il était très près et nulle part.
Il paraît qu’il criait. Il criait, la face levée.

Dès qu’on sut où il était, ce fut la ruée. La foule accourut de très loin. Parce que si les parents, les voisins, les carabiniers avaient cru au siècle d’aujourd’hui, la foule, elle ne s’y trompa pas. Sa mémoire remonte à la nuit du monde. Elle comprit tout de suite qu’il s’agissait d’un sacrifice humain, d’un très vieux rite, et qu’il fallait venir. Miracle ! La terre mange un enfant en direct ! Elle l’a happé de sa bouche vorace, elle est en train de le déglutir tout cru.
Les gens de la foule se pressent. Ils arrivent à pied, ils descendent des bicyclettes, des vespas, ils sortent des camionnettes, des cabriolets de luxe, des voitures qui ne trouvent plus où se garer, des autocars. Ce sont des familles avec leurs gosses, des vieilles en tablier, des paysans, des bourgeois des villes voisines, des reporters en moto. Ils viennent de partout. Ils se parlent dans un fouillis de langues, ils envahissent tout en un désordre chaotique d’appels, de cris, d’odeurs fétides. On soulève un enfant pour le faire pisser au-dessus d’un petit buisson. Tout le monde pleure dans un échange d’accolades, il y a des vendeurs de saucisses et de beignets, on dirait le pays de cocagne, quelqu’un est en train de vomir.
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Et la foule, là-haut, se jetait à genoux dans des messes improvisées et on ouvrait les pique-niques. C’est le grand divertissement de l’envie de vivre. Les images de l’affluence qui sont passées à la télévision comme un appeau ont fait affluer d’autres curieux. Maintenant ils sont des milliers. Un écran géant les accueille en bordure du terrain pour tenter de les retenir à distance du centre. Il montre en gros plan le trou fascinant où l’enfant a disparu et où il doit forcément réapparaître. Les badauds s’arrêtent, s’attroupent devant l’écran, prêts à être fascinés. Ils contemplent l’image : les broussailles, l’orifice presque invisible dans le sol bosselé. Ils attendent. Rien ne se passe. Il n’y a rien à voir. Ils sont déçus. Ce n’est pas ça qu’ils voulaient. Ils maugréent : « C’est bien la peine de nous montrer, il n’y a rien qui se passe. »
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Il remuait sans cesse les jambes comme fait un enfant vivant. Il n'arrêtait pas de marcher dans le vide.
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