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Critique de frandj


L'action de cette pièce de théâtre se déroule à la fin du XVIIème siècle, dans le Massachusetts. L'ambiance générale de cette époque est profondément influencée par le puritanisme. John Proctor, un fermier honnête, est tombé amoureux d'une jeune fille, Abigaïl, qui était servante dans sa maison; il a entretenu une liaison avec elle. Mais l'épouse, Elizabeth, a chassé la jeune fille et John est rentré dans le "droit chemin". Pour se venger d'Elizabeth, Abigaïl se livre à des pratiques de sorcellerie. Mais quelqu'un l'a vue dansant nue dans la forêt, avec quelques autres. le pasteur de la ville et un de ses collègues commencent alors une enquête minutieuse, pour confondre tous ceux qui se seraient rendus coupables de sorcellerie. Très habilement, l'accusée (Abigaïl) s'arrange pour devenir aussitôt l'accusatrice. Les enquêteurs, trop contents de débusquer partout le "péché", lui prêtent une oreille (trop) complaisante. D'accusations en accusations, un bon nombre d'habitants de Salem sont dénoncés par d'autres. Des personnes honorablement connues sont ainsi mis en cause, perdent leur honneur et se retrouvent en prison. Parmi eux, John Proctor. Celui-ci n'a aucun doute sur l'ignoble "comédie" d'Abigaïl et veut dénoncer ses mensonges. Soumis à de très fortes pressions, il persiste à résister aux enquêteurs qui veulent le faire avouer. Cependant, il pourrait sauver sa peau mais il préfère finalement ne pas se renier et accepte la mort comme un martyre.

Il est évident que l'exemple de Salem est représentatif de situations dramatiques auxquelles sont confrontés les individus dans de nombreux pays. C'était le cas des Etats-Unis au temps de MacCarthy (peu avant que A. Miller a écrit cette pièce) et, beaucoup plus encore, dans tous les pays totalitaires. L'auteur montre extrêmement bien l'engrenage diabolique du totalitarisme. le juge est d'avance certain que l'accusé est coupable; son rôle est de l'obliger (par tous les moyens) à se plier à sa conviction pré-existante. Pour arriver à ses fins, l'enquêteur utilise une arme fatale contre son "client": celui-ci, comme tout être humain, a nécessairement quelque chose à se reprocher: une vétille, une vieille "casserole" qu'il a peut-être oubliée - ou voulu oublier - et qui n'a probablement rien à voir avec l'objet de la procédure. Il suffit de fouiller dans sa vie antérieure et on trouvera certainement le point faible. Et, puisqu'elle a fait un écart par rapport à la loi civile ou morale, la personne incriminée se retrouve en position de faiblesse et toute sa défense s'en trouve fragilisée. Dans ces conditions, elle va devoir choisir entre deux possibilités qui sont également inadmissibles: ou bien résister stoïquement aux enquêteurs (mais jusqu'à quand pourra-t-il tenir ?), ou bien avouer son crime et surtout dénoncer d'autres soi-disant complices. Et c'est ce qui se passe, en vérité, avec sans doute 90% des personnes "cuisinées". La réaction en chaîne est alors amorcée, la machine s'emballe et c'est ainsi que - par exemple - on peut envoyer des millions de citoyens russes au Goulag…
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