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Je connaissais de nom « les procès des sorcières de Salem » mais je ne connaissais pas les tenants et les aboutissants de cette histoire. C'est absolument terrifiant. Les détails de cette affaire se trouvent facilement sur le net.

À la fin du 17e siècle, 20 personnes furent exécutées pour sorcellerie par pendaison pour la majorité (un homme fut étouffé sous des pierres et une femme fut noyée).

Arthur Miller n'a pas totalement respecté l'histoire, mais il veut surtout faire passer un message.

Des jeunes filles sont surprises à danser la nuit dans un bois, dont la fille et la nièce du révérend Samuel Parris. La peur d'un scandale les amène à accuser Tituba, une esclave, à les avoir entraînées contre leur gré dans la pratique de la sorcellerie.

Abigail Williams, la nièce de Parris, va délibérément actionner les rouages d'une terrible injustice. Les accusations vont pleuvoir et l'intolérance religieuse de l'époque ne fera qu'aggraver les choses.

Alors, qu'est-ce qui prouve que vous êtes une sorcière ou un sorcier ? Vous ne connaissez pas par coeur vos 10 commandements, vous lisez des livres, vous labourez votre champ le dimanche au lieu d'aller à l'église, … Et comment échapper à la pendaison ? Avouer bien sûr, mais surtout donner des noms (voilà qui fait penser à une autre chasse aux sorcières de la moitié du 20e siècle aux États-Unis).

« DANFORTH - (…) Quand le Diable est venu vers vous, qui avez-vous vu avec lui ?
PROCTOR – Je ne souillerai pas d'autre nom que le mien.
HATHORNE – Proctor, le fait de dissimuler ces noms signifie que vous êtes encore attaché à Satan. »

Selon sa page Wikipédia, Abigail Williams (1680-1697) a dénoncé 57 personnes dont 15 ont été condamnées à mort et d'autres sont mortes en prison. A l'époque des faits elle avait 11-12 ans, c'est vraiment perturbant (elle est cependant plus âgée dans la pièce).

C'est le premier livre de l'auteur que je lis et j'ai beaucoup aimé son style. Je pense que je lirai plus tard son recueil de nouvelles « Présence ».





Challenge livre historique 2021
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Nous sommes au printemps de l'année 1692, dans la petite ville de Salem ( Massachusetts).
Un fait divers somme toute anodin va déclencher une "chasse aux sorcières" sans précédents.
Cette petite ville va connaître " l'enfer ", pas celui dont on accuse les habitants d'être des dévots, mais celui importé par les juges venu de l'extérieur. A partir de là, la mécanique diabolique va démarrer pour ne plus s'arrêter. Par lâcheté ou bien par intérêts, sur des souvenirs approximatifs, voir ridicules, les uns et les autres vont se dénoncer auprès des autorités.La bassesse humaine n'aura pas de limites, on veut voir le sang coulé, les corps pendus aux gibets. Les juges veulent se faire "un nom" sur cette affaire tombée du ciel, ou remontée des enfers,,,La justice est piétinée, la folie règne.
Arthur Miller semble avoir pris l'exemple de ce procès pour dénoncer celui des années cinquante à Hollywood ( liste noire). Enclenché par le sénateur Mc.Carthy ( comme tremplin pour la présidence) avec Hoover en " coulisse" et qui dénonçait l'infiltration communiste dans le milieu du cinéma.
Citoyens, méfiez-vous de vos lectures d'aujourd'hui...Demain, celle-ci pourraient vous être reprochées.
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Ce qui est "terrible" lorsqu'on entend aujourd'hui l'expression "chasse aux sorcières", c'est qu'on pense immédiatement à cette rhétorique vidée de son sens initial par des Trump ou des Marine le Pen pour lesquels L Histoire peut être revisitée, manipulée, dévoyée et récupérée à leur profit.
La pièce de théâtre d' A. Miller suscite suffisamment de frustration, d'indignation et d'exaspération face à l'ignorance crasse, à la mauvaise foi, au mensonge, à la malhonnêteté, à l'hypocrisie, à la bêtise et au fanatisme, que lorsqu'on voit ces instillateurs de haine se transformer en victimes à partir des mêmes procédés, des mêmes ingrédients qui envoyèrent naguère à la potence, sur la chaise électrique ou poussèrent des innocents au suicide, on se sent plus mal encore, parce que le mal est toujours là mais qu'il a su s'adapter au cerveau de certains humains contemporains imprégnés d'un "puritanisme" moderne aux allures de réseaux dits sociaux, de fake news, de théories complotistes, nouveaux totems d'une nouvelle religion.
Il n'est qu'à penser aux QAnon pour s'en convaincre.
Salem dans le Massachusetts fut en 1692 le théâtre (la vie n'est que ça...) d'une chasse aux sorcières historique, qui fit 19 victimes innocentes, innocence qui fut reconnue quelques années plus tard. Les malheureuses furent réhabilitées... mais on ne put pas leur rendre la vie.
C'est cet évènement historique qui a inspiré au dramaturge sa célèbre pièce, écrite en 1953 ( date de ma naissance... mais là, pour le coup, ça n'a rien à voir avec le sujet... juste une digression auto-dérisoire...)... en plein maccarthysme, époque de terreur américaine connue sous le nom de " Peur rouge " et justement qualifiée de chasse aux sorcières.
A. Miller et ses amis en furent victimes, et ne pas lire et comprendre sa pièce sous ce prisme ( mais pas uniquement ) est, à mon sens, une mésinterprétation.
Le révérend Parris, homme cupide, tout entier voué à Mammon, surprend sa fille Betty, sa très belle nièce Abigaïl et d'autres jeunes filles dansant nues le soir dans les bois accompagnées de Tituba la servante noire du révérend.
S'ensuit pour Betty une crise "cataleptique" qui va, par l'opportunisme et la manipulation d'Abigaïl se transformer en hystérie collective et en règlements de compte en tous genres.
Car Abigaïl, jeune et belle femme peu farouche, a été la servante de John Proctor, un fermier, et de sa femme Elisabeth.
John n'a pas pu résister aux charmes de la belle Abigaïl. Les amants surpris par l'épouse, la jeune maîtresse est renvoyée.
Amoureuse, orgueilleuse et revancharde, Abigaïl saisit l'occasion qui se présente pour, aidée par de jeunes filles "pures" et sous son emprise, convaincre "l'inquisition et ses juges" que Salem est devenue l'antre du Diable.
Usant de tous les subterfuges dont elle dispose, elle va profiter de la superstition ambiante, de l'ignorance des uns, de la faiblesse des autres, du fanatisme des gens de pouvoir et de leurs lois, pour dénoncer ... des innocentes.
L'engrenage est en marche. Rien, sinon la potence, ne pourra l'arrêter.
Je ne veux pas en dire plus ; le décor est posé, à vous de lire la pièce !
Ce qui fait que de telles oeuvres sont "grandes" ou moins... ou pas, c'est qu'en plus du fond, elles véhiculent des personnages qui ont du corps, de la consistance, de l'épaisseur... bref, une présence. Et en l'occurrence, dans - Les sorcières de Salem -, c'est plus que le cas.
En dehors des protagonistes déjà cités, j'ai une véritable tendresse pour Gilles Corey ( je l'adore ! ), pour Rebecca Nurse ( une très très belle personne ), une sympathie empreinte d'amertume pour le révérend John Hale, et une farouche détestation pour Danforth.
La pièce se lit facilement. Quand vous êtes dedans, vous ne la lâchez plus.
Elle est vivante, actuelle, frustrante ( je l'ai déjà dit ), passionnante et fort émouvante.
Elle nous parle, nous interpelle et nous met en garde.
Une oeuvre qui, dans le contexte actuel, n'a jamais été aussi nécessaire, voire salutaire ( ? ).
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Révélations mensongères, délations, faux aveux... Les Sorcières de Salem rapellent tout ce qui, partout rélève, aujourd'hui d'une « Chasse aux Sorcières »

”Si les gens ont peur c'est qu'ils sont coupables.”

« Ce que nous savons, c'est qu'en chacun de nous il y a prise aussi bien pour Dieu que pour le Diable. Dans nos âmes, les routes du bien et celles du mal se coupent et se recoupent à l'infini. » Arthur Miller, Les Sorcières de Salem



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Ce fut une courte période et pourtant le sénateur McCarthy a laissé une empreinte brulante comme un fer rouge dans l'histoire contemporaine des Etats-Unis. Durant deux années, 1953 et 1954 une commission,présidée par le sénateur, traque et soumet à des enquêtes et des interrogatoires des milliers de citoyens américains.

Véritable tribunal d'inquisition, chaque accusé doit prouver qu'il est un bon américain, c'est à dire ni communiste, ni homosexuel et bon chrétien. C'est dans ce contexte délétère qu'Arthur Miller écrit “Les sorcières de Salem”.

Le dramaturge s'empare d'un épisode le plus terrible de l'histoire de la Nouvelle-Angleterre pour attaquer de front Joseph McCarthy. Salem 1692 dans cette petite commune sans histoire des centaines de personnes sont accusées de sorcellerie et vingt d'entre elles seront condamnées à mort au terme de procès sordides. Métaphore à peine déguisée de la politique du sénateur cette pièce eut un succès foudroyant et contribua à une prise de conscience générale dans le pays.



Et cette pièce n'a pas pris une ride. Dans un monde actuel gouverné par Trump ; ses fakes news et autres mensonges éhontés, cette pièce reste terriblement d'actualité.

Une pièce écrite en 1953 et pourtant étrangement d'actualité.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Cette pièce de théâtre s'ouvre sur une scène familiale inquiétante. Betty, la fille du révérend Parris est en proie à une étrange fièvre. Après qu'elle a été aperçue dansant nue dans la forêt en compagnie d'autres jeunes filles, les rumeurs vont bon train. Or l'une de ses amies, Abigail, maitresse éconduite d'un fermier de la région, est à l'origine de ces rituels prohibés, qu'elle initie pour évincer l'épouse de son ex-amant.

L'affaire n'en reste pas à un simple règlement de compte de voisinage. Une folie collective s'empare de Salem et les accusations de sorcellerie sont portées devant la justice. Les méthodes d'investigation pourraient faire rire si elles ne menaient pas à la condamnation d'une trentaine de jeunes femmes.

Ecrite en 1953, La pièce semble évoquer une époque lointaine où l'ignorance et la crédulité faisait des ravages dans la population féminine, vite pointée du doigt soupçonnée de sorcellerie, à la moindre incartade ou originalité. Pourtant, Arthur Miller fait référence à ce qui se produit aux États-unis dans les années cinquante, alors que la chasse au communisme, aussi appelée chasse aux sorcières et dont il a été victime.

Quand la folie s'empare de la justice, le danger est universel et n'épargne personne.



256 pages Robert Laffont 18 Août 2022
Première parution en 1953
Traduction Marcel Aymé

Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Des quatre pièces d'Arthur Miller que j'ai lues jusqu'à présent, Les sorcières de Salem est celle qui m'a parue la moins convaincante. Sa lecture fut même une belle déception après celle de Mort d'un commis voyageur. Il y a eu quelque chose qui m'a dérangée assez vite, c'est le parallèle fait systématiquement entre le maccarthysme et l'affaire des sorcières de Salem de 1691-1692 , qui semble aller de soi depuis la création de la pièce. Ça me semblait une facilité de la part de Miller, et pas si pertinente que ça. Mais ce n'est pas ce qui m'embêtait le plus. Et quelques temps après la lecture des Sorcières de Salem, j'ai lu ce qu'en disait l'auteur dans l'Introduction à son Théâtre (1958).

Je pense qu'il est bon de revenir aux sources de la pièce. Miller a bien été inspiré par le maccarthysme, mais il n'a pas eu l'intention de faire de sa pièce une métaphore de ce qu'on appelait la chasse aux sorcières dans les États-Unis des années cinquante. Il visait plus haut, si je puis dire. Peut-être avons-nous été induits en erreur par ses autres pièces, qui parlent de la société contemporaine, et sans doute qu'une longue tradition d'interprétation "maccarthyste" nous a trompés également. Miller a déploré qu'aucun critique n'ait compris de quoi traitait la pièce à sa création, parce que si son sujet apparent - et réel, tout de même - était le maccarthysme, le sujet principal n'était pas là. Peut-être que c'est en partie de sa faute, après tout, si on n'a pas saisi quel était le thème sous-jacent et profond de la pièce, peut-être qu'il n'a pas réussi à faire passer son message. Reste un gros malentendu sur Les sorcières de Salem.

Ça n'est pas toujours évident de suivre le cheminement de la pensée de Miller à propos de cette pièce, mais ce qu'on peut en retenir de façon globale, c'est qu'il a été stupéfié, pendant le maccarthysme, de voir l'apparition d'une espèce de mystique collective qui, de plus, était insufflée de l'extérieur, c'est-à-dire par MacCarthy et ses sbires. Il était également étonné qu'une campagne politique qu'il jugeait grotesque, menée à renforts de gros sabots et de grosses ficelles, puisse être avoir un impact aussi fort sur les citoyens américains - je dois dire que j'ai vu là une espèce de naïveté à l'américaine, vu que le monde entier sortait d'une guerre particulièrement atroce, et que l'hystérie collective, le lavage de cerveau, et les gros sabots, entre autres, avaient joué leur rôle pendant des années. Toujours est-il que, malgré le fait que la pièce soit née de réflexions de Miller liées au maccarthysme, le thème principal est fondé sur la "lucidité morale", sur le fait que certaine personnes soient capables de garder la tête froide et des valeurs morales intactes au milieu d'une foule infectée, pour ainsi dire, par une terreur collective et choisissant la soumission sociale, à cause d'un sentiment de culpabilité (ne pas être assez de droite dans le cas du maccarthysme, être un candidat potentiel à la possession démoniaque, dans le cas de Salem). Je laisse bien entendu à Arthur Miller la paternité de ce point de vue.

Miller s'était déjà intéressé à l'affaire des sorcières de Salem, il s'est replongé dedans à cette occasion, lisant toutes les minutes du procès. Il a remarqué que la petite Abigaïl Williams (qui avait 11 ans en 1691) avait dénoncé Elizabeth Proctor mais jamais John Proctor. La tournure de la pièce lui est apparue en conséquent : il a fait d'Abigaïl une adolescente de 16-17 ans, qui, servante chez les Proctor, a eu une liaison avec le mari et a été chassée de la maison par l'épouse trompée, et cherchant à se venger de l'épouse en question par la pratique d'une sorcellerie de pacotille, puis par la dénonciation. On est donc très loin de la véritable affaire des sorcières de Salem, où des enfants furent certainement manipulés par des adultes, et qu'on explique aujourd'hui par diverses hypothèses (intoxication à l'ergot de seigle, qui contient une substance dont est dérivé le LSD, conflits sociaux entre la communauté de Salem Village et celle de de Salem Town, maltraitance d'enfants, vengeance familiale, pratiques divinatoires ayant dérapé, angoisse collective liée aux attaques régulières des Indiens, etc.) Miller a donc fait un choix dramatique très fort en s'éloignant des faits historiques, même s'il a regretté de ne pas être allé assez loin : il s'en est voulu d'avoir représenté un ecclésiastique, Danfort, comme relativement ouvert et réfléchi, alors que les minutes du procès montrent que le véritable Danfort, ainsi que tous les autres juges, n'a pas fait preuve d'une once de compréhension, de réflexion ou de clémence. Je serais assez d'accord avec Miller sur ce point. La pièce aurait peut-être gagné en force si tous les ecclésiastiques avaient été montrés aussi implacables et, disons-le, délirants et cruels, que lors des faits historiques. Mais je trouve surtout que le personnage-phare de Miller, son martyr de la "lucidité morale", selon les propres termes de l'auteur, est raté.

Car il me paraît difficile de comprendre que le but de la pièce est de mettre en avant une rigueur morale intacte lorsqu'on utilise un John Proctor baisant sa domestique dans tous les coins, maltraitant la domestique qui la remplace, et se montrant infect avec sa femme. le type s'est tapé la servante et la traite ensuite de putain sans relâche, mais fait acte de contrition en disant qu'il est un débauché. Les deux mots n'ont sensiblement pas la même valeur, et si une gamine de seize ans est censée être une putain , que doit-on dire de l'homme d'âge mûr et marié qui couche avec elle ? Qui est la première putain de la pièce ? Alors oui, tout ça est censé se passer au XVIIème, et donc la domination masculine et la façon dont on traite les domestiques, c'est raccord avec l'époque. Mais choisir et construire ce genre de personnage comme chantre de la vertu morale, c'est un curieux choix dramatique. John Proctor m'a gâché en bonne partie la pièce.

Le délire collectif est pourtant bien cerné et la pièce est parfaitement structurée, nous amenant de l'anecdote au drame, de la rouerie d'une adolescente (Abigaïl n'est pas un personnage positif, c'est le moins qu'on puisse dire) à l'hystérie d'une communauté. le premier moment où Abigaïl se met en scène comme si elle était envoûtée, crachant en cachette sur une croix et montrant le crachat comme preuve de la présence d'une sorcière, dupant son entourage et un ecclésiastique, est extrêmement efficace et convaincante. La façon dont monte l'hystérie dans la communauté est également très maîtrisée et tout aussi efficace : la mise en scène et la duperie sont des armes puissantes... Mais les Proctor restent pour moi le gros point faible de la pièce, Elizabeth n'étant pas un personnage très intéressant, voire assez niais, et John, comme je le disais, défendant paradoxalement tout autant, voire davantage, des valeurs qu'on pourrait qualifier de "négatives" que des valeurs "positives" - et je doute que ce soit dû à une volonté de ne pas se montrer manichéen de la part de Miller.

J'ai pas mal pensé aux histoires de maisons hantées du XIXème en lisant la pièce : parmi les personnes qui ont témoigné qu'un esprit hantait une maison à cette époque, on retrouvait souvent des jeunes filles, domestiques de surcroît. Ce serait lié au moins en partie à des questions de conflit social entre des domestiques corvéables à merci et leurs employeurs. Il y a de ça dans Les sorcières de Salem, ainsi que le sujet de la domination masculine. Miller ne s'est pas intéressé à cet aspect des choses, et pourtant lesdits sujets ressortent bizarrement de sa pièce. Et donc, l'impression la plus forte que m'ait laissée la lecture des Sorcières de Salem, c'est celle d'une misogynie prégnante tout du long...


Challenge Théâtre 2018-2019
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Je n'ai pas eu la chance (pas encore, je ne perds pas espoir !) de voir « La Chasse aux Sorcières » sur les planches. En revanche, j'en ai dévoré l'adaptation cinématographique de 1996 signé Nicholas Hytner. Je devais être au lycée quand l'une de mes cousines, professeur d'anglais, m'a prêté son dvd parce qu'à l'époque, passant de « Harry Potter » aux histoires de sorcellerie plus « réelles », je dévorais tout ce qui me tombait sous la main sur le sujet.
Ainsi pour moi « La Chasse aux Sorcières » c'est avant tout Winona Ryder fascinante et vénéneuse, délicieusement ambiguë, dans le rôle d'Abigaïl Williams. C'est l'intensité du jeu de Daniel Day-Lewis qui m'a faite tomber amoureuse de John Proctor. Ce sont cette musique lancinante, ces décors brumeux et oppressants. C'est cette atmosphère délétère, empoisonnée. C'est le malaise, proche de la peur, provoqué par ce film, vu et revu des dizaines de fois, aussi angoissant que séduisant.
Bien sûr, j'étais vaguement au courant qu'il s'agissait au départ d'une pièce de théâtre, mais étrangement, cela ne m'avait pas parlé plus que cela à l'époque. La preuve en est qu'il m'a fallu des années avant de lire la pièce…
Je me suis longtemps demandé pourquoi et j'en suis arrivée à la conclusion que le film était déjà si fiévreux, si étouffant, si puissant enfin qu'il se suffisait à lui-même. de plus, les personnages convoqués étant des personnages historiques, l'intrigue empruntant tant aux travaux émérites des historiens (je pense par exemple à la théorie des « propriétaires terriens » défendue dans la pièce par Gilles Corey expliquant au juge Danforth que les accusés possèdent tous des terres brigués, comme par hasard, par les accusateurs et qui semble aujourd'hui l'une des pistes pouvant expliquer cette crise d'hystérie collective…) que je pense m'être concentrée sur cet aspect-là plutôt que sur l'aspect dramatique…
Et puis enfin.
L'argument brillamment écrit par Arthur Miller (et tout aussi brillamment mis en scène par Hytner donc) n'est donc pas neuf et prend sa source dans un pan bien obscure de l'Histoire Américaine. Nous sommes à Salem, petite ville de la Nouvelle-Angleterre, en 1692. Un matin de printemps, la fille du révérend Parris, Betty, ne parvient pas à se lever. Elle gît, inerte, sur son lit et personne ne parvient à la tirer de sa léthargie : ni son père, ni Tituba l'esclave de la maisonnée et encore moins sa cousine Abigaïl. Quelques maisons plus loin, il en est de même pour la fille Putnam. La panique s'empare alors de la communauté puritaine, régit par d'innombrables codes et surtout par une quantité invraisemblable de non-dits et de rivalités.
On apprend bientôt que la veille de ce matin funeste, Betty et une dizaine d'autres jeunes filles auraient été aperçues dansant nues dans la forêt : « Sorcellerie ! » crie alors la ville en émoi.
On raconte ensuite que les filles seraient les victimes du démon qu'elles dénoncent à corps et à cri, accusant à tous va ses suppôts.
On murmure qu'Abigaïl Williams mènerait la danse, le Saint Sabbat puritain, parce qu'elle aurait trop aimé John Proctor et qu'elle aurait souhaité la mort de son épouse pour l'avoir enfin.
On dit que Tituba a gardé de sa Barbade des pratiques interdites au parfum de soufre.
On crie, on hurle, on appelle les juges. On condamne, on torture, on dresse les potences. On étouffe, on meurt jusqu'à la vingt-cinquième exécution, jusqu'à ce qu'enfin le sang échauffé s'apaise et que le vent tourne.
La pièce est -mais pouvait-il en être autrement ?- magistrale et haletante, hypnotique tout en étant un parangon de maîtrise et de structure. Tout est à sa place, bien agencé, sans fioritures. La langue, d'un classicisme pur, très épurée, presque austère, contribue paradoxalement à l'atmosphère lourde, parfois hystérique du drame qui se joue.
Drame historique, l'intérêt de « Les Sorcières de Salem » ne réside pas uniquement dans ce contexte-là mais par la dimension contemporaine que lui a conféré Miller, se servant de la tragédie de Salem pour en 1953, date de création de sa pièce, dénoncer les dérives (et le mot est faible !) du maccarthysme, cette autre « chasse aux sorcières » qui ébranla les Etats-Unis. Parallèle troublant, intelligent, convainquant, la pièce est aujourd'hui encore une plaidoirie puissante contre l'hypocrisie, la manipulation de masse, la bêtise, l'obscurantisme, le mensonge et le fanatisme. Elle est encore nécessaire, elle nous interpelle et nous frustre, nous révolte encore. Elle poignarde et émeut encore, et ce n'est peut-être pas si mal.
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Cette pièce est inspirée du procès en sorcellerie qui a défrayé la chronique, à la fin du 17ème siècle, dans la communauté puritaine de la petite ville de Salem, Massachusetts, et dont les annales ont été conservées. Mais sous la plume de Miller, ce drame historique doit se lire aussi comme une dénonciation très contemporaine des procès intentés aux artistes et écrivains tentés par les idées socialistes dans l'Amérique fanatisée par le Mac Maccarthysme...une "chasse aux sorcières" d'un autre genre, qui fit des ravages terribles dans l'intelligentsia américaine des années 50.
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Merci à Flaubauski et à Bookpass de m'avoir proposé cette lecture commune.

Largement édifiant. Comment le fanatisme et l'ambition peuvent ôter toute rationalité.

Arthur Miller a écrit cette pièce en plein maccarthysme, mais cela reste d'une criante actualité.

Je recommande chaudement, surtout que cette pièce me paraît davantage à lire qu'à voir sur planches. Vu le très grand nombre de personnages, l'on doit s'y perdre un peu, à moins d'une très grande mise en scène, je suppose.

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J'ai découvert cette pièce un peu par hasard. Je ne savais même pas que c'était du théâtre n'ayant même pas reconnu Simonet Signoret en couverture. C'est le titre qui m'a attirée et la côte de la médiathèque m'a surprise. Et une bonne surprise ! Pendant mes études j'aimais lire du théâtre et j'en lisais souvent. Je n'en lis plus beaucoup.

Arthur Miller a très bien écrit cette pièce, beaucoup de réalisme entre raison et folie. On y retrouve la force avec laquelle l'homme peut broyer l'homme sur la base de témoignages. Comment le fanatisme pousse à la cruauté sans limite.

1692, sur les accusations de jeunes filles, un tribunal se réunit à Salem en Nouvelle-Angleterre, pour juger en sorcellerie et autre diablerie, des citoyens de la ville. Certains seront pendus, d'autres condamnés à la prison.

La pièce est bien rythmée, chacun des quatre actes expose les interrogatoires entre citoyens puis face au tribunal. On y découvre en tant que spectateurs/lecteurs, les mensonges et leurs causes. Mais nous sommes les témoins impuissants de l'injustice et de la folie humaine.
Cette pièce n'est pas seulement le récit de la terrible affaire des Sorcières de Salem mais aussi un puissant exemple d'un fait de société qui se répète à travers l'histoire : la chasse aux « sorcières ».
Une très bonne pièce à découvrir ou re-découvrir.
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