Citations sur La Vallée (163)
Un bruit insistant s’insinua dans son esprit, et il mit quelques
secondes à comprendre ce que c’était.
Son téléphone – il l’avait laissé sur la table de chevet.
Il retourna rapidement dans la chambre. La sonnerie avait réveillé Léa,
qui, dans le lit, se tournait à présent vers lui, dans le coaltar.
Sur la table de chevet, le téléphone continuait de se plaindre et de
réclamer son attention comme un enfant qui a faim.
1 h 30.
Quand un téléphone sonne au beau milieu de la nuit, c’est rarement
pour de bonnes nouvelles, se dit-il.
Le cœur battant, il marcha jusqu’à l’appareil, consulta l’écran : il ne
connaissait pas le numéro.
— Tu aurais au moins pu mettre une musique, plaisanta Léa, les
cheveux en désordre, le visage bouffi de sommeil.
Elle souriait – mais la tension perçait dans sa voix. Il hésita. Elle le
regarda, sourcils levés.
— Bon, alors, tu réponds ou pas ?
Il fit glisser le bouton vert, colla l’appareil à son oreille.
— Martin ! Martin, tu es là ?
Cette voix… Il tressaillit.
Il remarqua à peine que Léa l’observait. Cette voix… Il ne l’avait pas
entendue depuis huit ans, et pourtant il la reconnut immédiatement. Comme
si c’était hier la dernière fois. Le temps aboli, les années envolées, le passé
qui ressurgit comme une comète dans la nuit.
Il s’assit au bord du lit, ferma les yeux.
C’était impossible.
La révolution, c'est un rêve d'artistes, d'acteurs, de chanteurs, d'écrivains, d'idéologues - des gens qui vivent de leurs illusions, qui ne font rien d'autre que rêver, et qui n'ont pas à aller trimer chaque jour pour nourrir leur famille : ceux-là, ce sont des solutions qu'ils attendent, pas des conneries. On n'est pas dans un film.
La nuit débordait d'étoiles. Un poudroiement qui envahissait tout le ciel au-dessus du ruban rectiligne de l'autoroute et de la campagne obscure, comme une poignée de sable scintillant jetée par un dieu semeur.
Alors, faites un effort. Travaillez. Creusez. Ne vous contentez pas des premières vérités qui vous viennent à l’esprit. Allez plus loin. Par la souffrance la joie, comme disait Beethoven. Ou comme disent les coaches sportifs : no pain no gain.
Il s’enfonçait petit à petit dans la brume qui sépare le réel de la confusion mentale.
… les foules aimaient les réponses simples. Les mots comme « justice », «liberté ». Les slogans. Elles préféraient l’irréel au réel, les croyances aux faits, la désobéissance à l’autorité, la colère à la raison, la simplification à la complexité. Les revendications d’une foule pouvaient être légitimes […] et elles l’étaient souvent- mais les travaux de Le Bon, de Freud, de Festinger, de Zimbardo sur la psychologie des masses avaient établi que la plupart des individus présents dans une foule ont beau être des gens sensés, raisonnable, dès qu’on les plonge dans un collectif ils perdent non seulement leurs inhibitions, mais aussi leur sens commun, leur indépendance d’esprit et bien souvent leurs valeurs personnelles. En psychologie sociale, on appelait çà la désindividuation de groupe. [….] La conséquence […] c’était que les foules aimaient le sang : les guillotines, les incendies, les lapidations, les lynchages, les destructions, les boucs émissaires, … […] les réseaux sociaux plongeaient les individus naguère autonomes et autoconscients dans une désindividuation permanente, un bain de faits et de fantasmes constamment alimenté par le ou les groupes avec lesquels ils restaient connectés.
Il faut croire que l’homme ne peut s’empêcher d’inventer de nouvelles croyances, de tuer et de détruire en leur nom, vous ne pensez pas ?
L’inégalité, l’injustice sont la règle au sein de la nature comme au sein de l’espèce humaine.
Les femmes qui réussissent dans les métiers où les hommes dominent sont la cible de dix fois plus de critiques que ces mêmes hommes. Les femmes qui marchent dans certaines rues de certains quartiers sont harcelées, insultées, alors que les hommes ne le sont pas. De tout temps, les femmes ont été dépréciées, rabaissées, moquées, agressées, violées… Et aujourd’hui les lignes de cette culture d’oppression des femmes commencent à bouger, les mecs comme toi ont du mal à l’accepter…
Toute cette sagesse millénaire. Que pesait-elle aujourd’hui ? Dans un monde où, d’un côté, on uniformisait l’opinion, on abolissait la vérité, on hygiénisait la pensée et où, de l’autre, on encourageait la haine et on laissait se produire les crimes les plus monstrueux, qu’elle place y avait-il encore pour une quelconque forme de sagesse et d’autonomie ?