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Citations sur Le Calvaire (10)

Le boulevard était désert. Un grand silence s’appesantissait
sur la ville. Seules, les fenêtres des tripots luisaient, pareilles à des yeux de bêtes géantes, tapies dans la nuit.
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Juliette ne bouge pas. Mais je sens son haleine plus faible
que l’haleine de la fleur, son haleine toujours si fraîche, où se
mêle en ce moment, comme une petite chaleur fade, son haleine
toujours si odorante, où pointe comme une imperceptible odeur
de pourriture.
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- Comment vous appelez-vous ?
- J'm'appelle la femme Riboulleau.
- Riboulleau ... Riboulleau ! C'est possible ... Voyez dans le tas, là.
L'infirmier, qui faisait griller son boudin, tourna la tête.
- Riboulleau ? ... dit-il. Mais il est mort, il y a trois jours ...
- Comment qu'vous dites ça ? cria la paysanne, dont la figure hâlée, tout à coup pâlit ... Où ça qu'il est mô ? ... Pourquoi qu'il est mô, mon p'tit gâs ? ...
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Mon livre ne vaut rien ; le style en est torturé, la conception enfantine : une déclamation violente, une phraséologie absurde y remplacent l'idée.
Parfois j'en relis des passages applaudis par la critique, et j'y retrouve de tout, de l'Herbert Spencer et du Scribe, du Jean-Jacques Rousseau et du Commerson, du Victor Hugo, du Pöe et de l'Eugène Chavette.
De moi, dont le nom s'étale en tête du volume, sur la couverture jaune, je ne retrouve rien ...
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Ah ! combien d'enfants qui, compris et dirigés, seraient de grands hommes peut-être s'ils n'avaient été déformés pour toujours par cet effroyable coup de pouce au cerveau du père imbécile ou du professeur ignorant ...
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Et dans mon esprit égaré, Juliette s'impersonnalisait ; ce n'était plus une femme ayant son existence particulière, c'était la Prostitution elle-même, vautrée, toute grande, sur le monde ; l'Idole impure, éternellement souillée, vers laquelle couraient des foules haletantes, à travers des nuits tragiques, éclairées par des torches de baphomets monstrueux...
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Ah ! comme elle s'envola vite, cette nuit-là ! Comme les heures s'enfuirent, effarées sans doute d'entendre hurler l'amour avec la voix maudite des damnés.
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D’une absolue insignifiance d’esprit, d’un cœur tendre, bien qu’il semblât indifférent à tout ce qui n’était pas ses vanités locales et les intérêts de son étude, prodigue de conseils, aimant à rendre service, conservateur, bien portant et gai, mon père jouissait, en toute justice, de l’universel respect. Ma mère, une jeune fille noble des environs, ne lui apporta en dot aucune fortune, mais des relations plus solides, des alliances plus étroites avec la petite aristocratie du pays, ce qu’il jugeait aussi utile qu’un surcroît d’argent ou qu’un agrandissement de territoire. Quoique ses facultés d’observation fussent très bornées, qu’il ne se piquât point d’expliquer les âmes, comme il expliquait la valeur d’un contrat de mariage et les qualités d’un testament, mon père comprit vite toute la différence de race, d’éducation et de sentiment, qui le séparait de sa femme. S’il en éprouva de la tristesse, d’abord, je ne sais ; en tout cas, il ne la fit point paraître. Il se résigna. Entre lui, un peu lourdaud, ignorant, insouciant, et elle, instruite, délicate, enthousiaste, il y avait un abîme qu’il n’essaya pas un seul instant de combler, ne s’en reconnaissant ni le désir ni la force. Cette situation morale de deux êtres, liés ensemble pour toujours, que ne rapproche aucune communauté de pensées et d’aspirations, ne gênait nullement mon père qui vivant beaucoup dans son étude, se tenait pour satisfait s'il trouvait la maison bien dirigée, les repas bien ordonnés, ses habitudes et ses manies strictement respectées; en revanche, elle était très pénible, très lourde au cœur de ma mère.
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Et dans le troupeau des avortés, combien de jeunes espoirs ont succombé sous les serres de la bête de proie ! Comptez-les donc, les lamentables, les effarés, les éclopés, ceux-là qui avaient des ailes, et qui se traînent sur leurs moignons ; ceux-là qui grattent la terre et mangent leurs ordures ! Vous même, tout à l'heure... cette Juliette, vous la regardiez avec extase... vous étiez prêt à tout, pour un baiser d'elle...
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Je comprenais que la loi du monde, c’était la lutte ; loi inexorable, homicide, qui ne se contentait pas d’armer les peuples entre eux, mais qui faisait se ruer, l’un contre l’autre, les enfants d’une même race, d’une même famille, d’un même ventre. Je ne retrouvais aucune des abstractions sublimes d’honneur, de justice, de charité, de patrie dont les livres classiques débordent, avec lesquelles on nous élève, on nous berce, on nous hypnotise pour mieux duper les bons et les petits, les mieux asservir, les mieux égorger. Qu’était-ce donc que cette patrie, au nom de laquelle se commettaient tant de folies et tant de forfaits, qui nous avait arrachés, remplis d’amour, à la nature maternelle, qui nous jetait, pleins de haines, affamés et tout nus, sur la terre marâtre ?… Qu’était-ce donc que cette patrie qu’incarnaient, pour nous, ce général imbécile et pillard qui s’acharnait après les vieux hommes et les vieux arbres, et ce chirurgien qui donnait des coups de pied aux malades et rudoyait les pauvres vieilles mères en deuil de leur fils ? Qu’était-ce donc que cette patrie dont chaque pas, sur le sol, était marqué d’une fosse, à qui il suffisait de regarder l’eau tranquille des fleuves pour la changer en sang, et qui s’en allait toujours, creusant, de place en place, des charniers plus profonds où viennent pourrir les meilleurs des enfants des hommes ? Et j’éprouvai un sentiment de stupeur douloureuse en songeant, pour la première fois, que ceux-là seuls étaient les glorieux et les acclamés qui avaient le plus pillé, le plus massacré, le plus incendié. On condamne à mort le meurtrier timide qui tue le passant d’un coup de surin, au détour des rues nocturnes, et l’on jette son tronc décapité aux sépultures infâmes. Mais le conquérant qui a brûlé les villes, décimé les peuples, toute la folie, toute la lâcheté humaines se coalisent pour le hisser sur des pavois monstrueux ; en son honneur on dresse des arcs de triomphe, des colonnes vertigineuses de bronze, et, dans les cathédrales, les foules s’agenouillent pieusement autour de son tombeau de marbre bénit que gardent les saints et les anges, sous l’œil de Dieu charmé !
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