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Critique de gill


Hubert Juin, dans la préface de l'édition 10/18 de ce livre, dit des "vingt et un jours du neurasthénique" qu'ils fusent de l'esprit de Mirbeau dans un admirable désordre de colère et de tendresse mélangées.
Il aurait pu y ajouter un avertissement en guise de préambule : Vous qui avez le coeur sensible, et la lecture délicate, vous qui déjà tremblez et frissonnez aux "polémiquettes" de nos auteurs contemporains, ne pénétrez sous aucun prétexte dans ce livre ...
Vous y perdriez au passage du mot une bonne part d'innocence et un peu de sensibilité.
Pourtant, n'écoutez pas ce que je dis, il faut lire ce livre !
Il est splendide et fort !
Mais l'horreur y est parfois tapie au coin de la page comme dans ce conte sordide que Mirbeau aurait pu intituler : "la Bretagne, le douanier et les bigorneaux" !
Ce roman est une galerie de portraits ...
On y rencontre un tas de canailles qui, cependant, ne sont souvent pas de "mauvais diables".
On y croise quelques pitoyables victimes de l'injustice.
C'est plein d'expressions savoureuses et cruelles, de descriptions outrées, de pensées saugrenues et de réactions caricaturales en diable.
C'est un livre qui va de la tendresse au Grand-Guignol !
Georges Vasseur se rend en villégiature dans la ville d'eau d'X.
Georges Vasseur n'aime pas la montagne.
Il s'y sent écrasé.
Octave Mirbeau va donc en profiter pour lui faire rencontrer toute une ribambelle des plus représentatifs tenants de sa révolte d'auteur engagé bien sûr, mais aussi de ses apitoiements les plus sincères.
Comme ce pauvre vieux père Rivoli qui s'est pendu au grand noyer de son clos d'avoir été pris entre l'agent municipal et la préfecture ...
Comme cette pauvre créature qui, pour survivre, tente d'attirer un homme et, ne se sentant pas si sûre du pouvoir de sa séduction, va jusqu'à lui proposer une fillette à peine sortie de l'enfance ...
On sent bouillir Mirbeau derrière la ligne.
Mais Georges Vasseur, trouvant des excuses à tous et à toutes, semble, lui, bien imperturbable.
Ne serait-il pas un peu neurasthénique ?
Névrose ! Névrose ! Tout est névrose !
Allez ... Zola chez les fous !
Octave Mirbeau professe ici l'acte de foi du danger social.
Il ira dire à Rome que le peuple de Paris et les paysans qu'il aime ne veulent plus de l'Église.
Et aux rois, aux empereurs, et au républiques, il dira que c'en est fini de leurs armées, de leurs massacres.
Et, à tous les riches, et à tous les heureux que "le bonheur, c'est autre chose que la richesse, c'est même, croit-il, le contraire" !
Ce livre est éminemment anarchiste.
Mais octave Mirbeau sait le pouvoir limité de la littérature.
Il en fait des tonnes, en rajoute des caisses.
Mais au fond, il sait que tout cela est vain, que l'idée dort dans les livres.
La vérité et le bonheur, nous dit-il, n'en sortent jamais !
Dans ce livre, il y a tout Mirbeau en substance, dans ses outrances et ses étincelles de génie littéraire.
Et il se peut qu'à sa lecture, un buste de plâtre d'Hugo se soit un jour brisé en mille éclats de rire ... ou de désespoir ...

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