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Le jeune Sébastien Roch est envoyé par son père, quincaillier à Pervenchères et avide de reconnaissance sociale, à l'école des jésuites à Vannes, surtout fréquentée par des nobles. Il va y être en butte aux mauvais traitements de ses camarades en raison de son origine sociale, et va y apprendre à connaître la noirceur de l'âme humaine. ● La caricature du petit bourgeois commerçant est savoureuse et plus puissante encore que celle des nobles. Voyez par exemple ce portait de Joseph-Hippolyte-Elphège le quincaillier : « M. Roch était gros et rond, soufflé de graisse rose, avec un crâne tout petit que le front coupait carrément en façade plate et luisante. Le nez, d'une verticalité géométrique, continuait, sans inflexions ni ressauts, entre des joues, sans ombres ni plans, la ligne rigide du front. Un collier de barbe reliait de sa frange cotonneuse les deux oreilles, vastes, profondes, inverties et molles comme des fleurs d'arum. Les yeux, enchâssés dans les capsules charnues et trop saillantes des paupières, accusaient des pensées régulières, l'obéissance aux lois, le respect des autorités établies, et je ne sais quelle stupidité animale, tranquille, souveraine, qui s'élevait parfois jusqu'à la noblesse. Ce calme bovin, cette majesté lourde de ruminant en imposaient beaucoup aux gens qui croyaient y reconnaître tous les caractères de la race, de la dignité et de la force. Mais ce qui lui conciliait, mieux encore que ces avantages physiques, l'universelle estime, c'est que, opiniâtre liseur de journaux et de livres juridiques, il expliquait des choses, répétait, en les dénaturant, des phrases pompeuses, que ni lui, ni personne ne comprenait, et qui laissaient néanmoins, dans l'esprit des auditeurs, une impression de gêne admirative. » La dénonciation des collèges jésuites, et, plus largement, de la religion catholique et de ses hypocrisies est implacable. ● Le style est certes éblouissant, avec d'innombrables fulgurances, des images inouïes, des mots rares, mais il est à mon goût beaucoup trop travaillé, relevant de l'esthétique « fin de siècle » (le roman est publié en 1890) et rappelant Huysmans ou les frères Goncourt. Ce style magnifique, mais exhibant trop de traces du labeur qu'il a fallu déployer pour le faire exister, englue l'histoire qui se meut au ralenti et augmente inconsidérément le nombre de pages. Il nuit aussi, à mon avis, à l'efficacité argumentative du récit.
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C'est une tragédie à bas bruit que la courte vie de Sébastien Roch, garçonnet sensible envoyé chez les Jésuites pour la gloire de son quincailler de père cherchant par cet investissement sur son fils à asseoir sa place dans le monde, rejeté par les autres élèves car n'appartenant pas comme eux à l'aristocratie, manipulé et durablement souillé par un père jésuite démoniaque cachant sa perversion pédophile sous l'onctuosité de paroles culpabilisantes. de ce fait sordide, Sébastien, renvoyé de l'école, repoussé par son père à qui il ne sert plus, incapable ni d'aimer ni de vivre, ne se remettra jamais.
Comme avec Journal d'une femme de chambre, je suis sidérée par la rage et l'audace d'Octave Mirbeau qui à la fin de ce 19ème siècle corseté envoie du lourd, du très lourd en dénonçant à haute voix et d'une plume pourtant extrêmement sensible la pédophilie dans l'église en même temps que l'hypocrisie délétère d'un milieu au seul service des puissants. Les valeurs mesquines et matérialistes de la petite bourgeoisie en prennent aussi pour le grade à travers le personnage du père de Sébastien, ridicule et borné.
Il me tarde de découvrir encore la voix de cet auteur habité qui par l'audace des thèmes qu'il aborde préfigure le siècle à venir.
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Elevé lui-même chez les Jésuites, Octave Mirbeau a, sans nul doute, dû entendre ces horribles histoires de pédophilie et de viols. Peut-être eut-il cette connaissance par un proche ou fut-il lui-même victime d'un de ces prêtres maudits. On ne peut s'imaginer à quel point ce livre fit scandale et fut honni par le clergé, scruté par la Justice lorsqu'il sortit en feuilleton.
Cent ans avant la marée noire des révélations en chaîne des actes de pédophilie commis par les prêtres, Mirbeau dénonçait déjà l'horreur, décrivait avec une étonnante justesse psychologique le second viol qui anéantit l'âme pure des petites victimes, la manipulation du clergé, le rachat pervers des consciences…
Tout était là, tout était dit et pourtant tout a continué.
Triste constatation des menées d'un mal absolu, introduit au coeur de l'Eglise, polluant les corps et les consciences de ceux qui devaient le combattre, les transformant en monstres, incitant leurs supérieurs à taire ce qu'ils dénoncent par ailleurs avec véhémence.

Grand roman, courageux et fort, réellement inspiré qui classe Octave Mirbeau comme un de nos plus grands écrivains et l'une de nos plus belles consciences.
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Un père vaniteux, à l'esprit étriqué, quincaillier et maire de la petite commune de Pervenchères (Orne), réussit, après des démarches obstinées, à envoyer son fils Sébastien dans un collège jésuite huppé de Vannes. L'enfant, transplanté dans un univers inconnu, est rapidement victime de discriminations : les jeunes nobles pour qui l'établissement est une sorte de chasse gardée rejettent aussitôt "le quincaillier". Cependant, une amitié tacite rapprochera Sébastien de Bolorec, un fils de médecin, bourru et renfermé, qui, lui aussi, subit passivement les avanies des fils de bonnes familles. Sébastien ira néanmoins au bout de la dégradation : le Père de Kern subjugue l'enfant, le viole, puis le fait renvoyer ignominieusement. De retour à Pervenchères, il reprend lentement une vie désabusée et finit par connaître l'amour, jusqu'à ce que la guerre soit déclarée, en 1870...
Roman sombre, âpre, désespéré, dont le style m'a rappelé un certain Zola, mais aussi l'Abel Hermant naturaliste du "Cavalier Miserey". De très belles pages, et une dénonciation sans concessions d'une société fondée sur le mensonge, l'hypocrisie et le crime.
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En 1862, à Pervenchères, petit village de l'Orne, Monsieur Roch est un quincaillier bien pensant relativement prospère. Veuf et n'ayant qu'un fils unique, Sébastien, il a de grandes ambitions pour lui. Elève assez médiocre, l'enfant ne s'intéresse guère aux études, il préfère de loin courir la campagne avec ses petits copains campagnards. Mais son père l'inscrit au prestigieux collège Saint François Xavier de Vannes, tenu par les Jésuites. Il espère que son fils lui fera honneur et qu'il pourra s'introduire dans les milieux aristocratiques d'où seront issus la plupart de ses camarades de classe. Malheureusement, rien ne se passe comme prévu. Sébastien est rejeté par toute sa classe à l'exception d'un certain Bolorec, élève silencieux, voire mutique car rejeté lui-même pour sa laideur. Un brillant jésuite, le père de Kern finit par s'intéresser au cas « Sébastien Roch ». Va-t-il lui venir en aide ou aggraver son sort ?
Ecrit en 1889, ce roman psychologique et social reste étonnamment d'actualité par les thèmes qu'il aborde : la discrimination sociale, l'ambiance délétère des internats de garçons, la pédophilie (et l'homosexualité, mais de façon plus diffuse) sans oublier le pacifisme et une certaine forme d'anarchie. Octave Mirbeau, auteur un peu oublié de nos jours, mériterait de sortir au plus vite de son purgatoire tant son oeuvre, écrite de façon magistrale, dans un français impeccable, limpide, et agréablement lisible, est celle d'un précurseur et d'un visionnaire. Une histoire touchante et lamentable qui s'achève en drame. Un jeune héros dont la démarche est finement analysée du point de vue psychologique côtoie des personnages secondaires tout aussi intéressants même s'ils sont nettement moins positifs. Un ensemble proche du petit chef d'oeuvre, dans la veine d'un Maupassant ou d'un Dickens...
Lien : http://www.etpourquoidonc.fr/
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Avec ce roman, Mirbeau aborde le rejet et l'agression sexuelle d'un enfant pour qui son père espérait une ascension sociale. Ça se passe chez les Jésuites. Dans une institution où sont envoyés les fils de riches. Inutile de dire que le petit Sébastien, fils d'un petit notable de province, va y subir les pires outrages et vite retourner chez lui, suscitant l'incompréhension de son père. C'est une critique virulente de la société comme souvent chez Mirbeau. Ça se lit encore très bien. Malgré peut-être quelques longueurs. Il me semble que c'est d'ailleurs toujours d'actualité, lorsqu'on sait que les élèves des Grandes Écoles françaises viennent pour la plupart des milieux extrêmement aisés. Surtout ne pas laisser le pouvoir aux gueux !
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Mirbeau, par son style si limpide que j'apprécie tant, transforme la tragédie de cette histoire en une rivière qui emporte et retourne tout sur son passage...
La souffrance de cet enfant, malmené par la vie, par ses pairs et "ses pères" s'exprime de l'intérieur et c'en est d'autant plus bouleversant.
L'obscurantisme religieux, les relations familiales, l'injustice sociale, l'éducation des enfants, la pédophilie, la guerre, etc... autant de thèmes abordés avec discernement et clairvoyance, avec tellement de modernité aussi ...
Je ressors de cette lecture marquée, remuée; la fin pourtant tragique se révèle comme une délivrance, pour le héros et... la lectrice que je suis.
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On a du mal à comprendre qu'un roman d'une telle audace et d'une telle originalité soit demeuré si longtemps introuvable. Il doit y avoir une raison, qui n'est sans doute pas d'ordre littéraire. Octave Mirbeau (1848-1917) est de ces écrivains qui dérangent, de ceux qui, comme disait Jean Cocteau, ne savent pas « jusqu'où on peut aller trop loin ».
Nous sommes dans une petite ville de l'Orne, pendant ces années 1860 où la France a juste commencé à basculer dans l'industrialisation. le père de Sébastien Roch, quincailler, veuf et petit notable local, est servile à l'égard des nobles et méprisant avec les faibles. Son fils unique, double de l'auteur, se retrouve transplanté brutalement par la vanité paternelle dans un collège de Jésuites à Vannes. Il y est l'objet de toutes les moqueries.
Au croisement du subjectif et de l'objectif, au point de rencontre entre l'intimité du lecteur et celle du narrateur, il y aura l'indicible : le viol. Sébastien Roch est un roman précurseur.
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Sébastien Roch /Octave Mirbeau
« de tous les pays bretons, le taciturne Morbihan est demeuré le plus obstinément breton, par son fatalisme religieux, sa résistance sauvage au progrès moderne, et la poésie, âpre indiciblement triste de son sol qui livre l'homme, abruti de misères, de superstitions et de fièvres, à l'omnipotente et vorace consolation du prêtre. »
C'est donc vers Vannes, dans le Morbihan, que M. Joseph - Hippolyte - Elphège Roch, quincaillier à Pervenchères, petite ville du département de l'Orne, osa concevoir l'orgueilleuse pensée d'envoyer, chez les Jésuites, son fils Sébastien qui venait d'avoir ses onze ans, afin de lui offrir une éducation de haut rang, religieuse et mondaine tout à la fois. C'est sur l'école Saint François Xavier que dirigeaient les pères Jésuites que M.Roch jeta son dévolu, une institution en 1867 au faîte de sa renommée.
Sébastien était un bel enfant, docile, frais et blond, qui aimait grimper aux arbres, guetter les poissons au bord de la rivière et pour qui la nature était un perpétuel champ de récréation. Son père, absorbé tout le jour par les multiples détails d'un commerce bien achalandé, n'avait pas eu le temps de semer en cet esprit vierge les premières semences de la vie intellectuelle .
M.Roch, marguillier au village et détenant une certaine fortune, étonnait souvent par son éloquence : il ne savait s'exprimer que par de solennelles harangues. Mais il n'avait pas compris qu'en infusant à son fils la semence d'une vie nouvelle, ce brusque viol de sa virginité intellectuelle lui infusait aussi le germe de la souffrance humaine. La paix de sa conscience était détruite, ses sens perdaient de la simplicité de leurs perceptions.
La tante de Sébastien avait une fille, Marguerite, du même âge que lui, et les deux enfants s'étaient depuis longtemps liés d'une amitié assez vive. Quoique réservé et silencieux, Sébastien éprouvait un soulagement réel en la société de sa petite amie, cousine en vérité. La vue de Marguerite le rassérénait et celle-ci, moins timide que lui abruti par les prêches de son père, plus audacieuse de gestes et de caresses, lui ressuscitait le repos et le bonheur qu'il avait perdu.
Tout dans les actions et les discours de son père le désenchantait et le blessait.
le grand jour est arrivé pour Sébastien, angoissant et triste. Accompagné par un religieux de l'école de Vannes, il découvre son nouvel univers et peu à peu il éprouve une impression d'abandon, d'exil, la sensation douloureuse d'être arraché à des habitudes qui faisaient son bonheur. Il subit rapidement les insultantes moqueries de la part de ses condisciples et notamment de Guy de Kerdaniel, chef de file d'un petit groupe de nobles fiers et hautains. Pas un seul visage pour le secourir, il reste seul à l'écart craignant les rebuffades et finit par se résigner à sa nouvelle existence. Lui viennent des idées de suicide, désespéré par les propos acerbes et acescents des autres, la mort lui paraissant comme un refuge. Sébastien finit par se résigner à sa nouvelle existence et acquiert dans le travail une sorte de paix. C'est grâce à Jean de Kerral, un de ses condisciples, un garçon bienveillant aux manières alliciantes, que Sébastien retrouve la confiance et une certaine hardiesse.
le temps passe et l'attitude de Jean de Kerral le déçoit. Sébastien devient paresseux et passe rapidement pour le cancre du groupe. Ce qu'on le force à apprendre ne correspond à aucune de ses aspirations. Il devient dur, entend faire respecter son père qui est quincailler et ses souvenirs intouchables. Sa nouvelle passion est la musique : quand il entend de la musique, il comprend mieux, il aime mieux…
Les premières vacances dans la famille sont une déception, une période intolérable en raison des assauts perpétuel de son père et ses exhortations et philippiques grotesques. le retour à Vannes est paradoxalement le bienvenu.
Les années passent et Sébastien a pris de l'assurance, se contrôle mieux et revit grâce aux cours de musique du père Marel. Hélas, cela ne dure qu'un temps, le père Marel étant appelé à d'autres fonctions. C'est vers le dessin que Sébastien se tourne alors et y trouve un aliment à ses ambitions. La poésie également l'attire et Victor Hugo est son idole, y découvrant l'illumination du verbe.
L'épisode trouble suscité par le père Kern au regard douteux l'épouvante tout en l'attirant curieusement. Sébastien sent naître en lui et s'agiter des troubles physiques d'un caractère anormal qui l'inquiète. Un poison au goût peccamineux est en lui qui parcourt toute sa chair…
le renvoi du collège suite à une conspiration ourdie par le père de Kern est un drame pour Sébastien qui détient un secret pesant et étouffant qu'il ne veut divulguer dans un premier temps…
Des années plus tard, en 1870, alors qu'il a vingt ans, Sébastien erre en solitaire et mène une vie vide de tout sens. Il écrit un journal pour exprimer tout ce qu'il ressent, la haine et la rancoeur qui l'animent :
« J'ai horreur du prêtre, je sens le mensonge de la morale qu'il prêche, le mensonge de ses consolations, le mensonge du Dieu implacable et fou qu'il sert; je sens que le prêtre n'est là, dans la société, que pour maintenir l'homme dans sa crasse intellectuelle, que pour faire, des multitudes servilisées, un troupeau de brutes imbéciles et couardes…Et une sorte de pitié irritée me vient contre cette humanité, tapie là, dans ses bauges, et soumise par la morale religieuse et la loi civile à l'éternel croupissement de la bête. Y a - t - il quelque part une jeunesse ardente et réfléchie, une jeunesse qui pense, qui travaille, qui s'affranchisse et nous affranchisse de la lourde, de la criminelle, de l'homicide main du prêtre, si fatale au cerveau humain…Il est curieux que le peuple ne vibre qu'à ces deux sentiments : le sentiment religieux, et le sentiment militaire, qui sont les plus grands ennemis de son développement. »
Sa relation avec Marguerite va prendre un tour étrange avec tout à la fois une répulsion physique, une haine et une impossibilité de se passer d'elle.
La guerre de 1870 éclate et Sébastien est contraint de partir se battre…
Dans ce beau et courageux roman au style éblouissant publié en 1890, Octave Mirbeau se livre avec talent à une vive critique des Jésuites et des moeurs provinciales en même temps qu'il décrit avec subtilité la lente soumission de l'esprit qui conduit au viol physique. Octave Mirbeau qui fut lui-même élève des Jésuites, ose dans ce livre dénoncer déjà la pédophilie dans l'église ainsi que les manipulations du clergé et le rachat pervers des consciences. C'est à bas bruit que la tragédie s'installe au cours du récit.
Inutile de dire que ce roman fit scandale lors de sa parution !







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Sébastien Roch n'était pas le nom que je m'attendais à installer dans ma bibliothèque, et pourtant, je m'en suis délecté. Il ne s'agit pas de la biographie d'un acteur de sitcom, mais bel et bien d'un titre de la littérature classique et engagée de la fin du XIXème siècle. Je me suis donc laissé tenter, et je ne le regrette pas. Sébastien Roch n'est pas un roman superficiel. Bien au contraire, il dénonce, à travers la plume d'Octave Mirbeau, les atrocités commises par les prêtres au collège de Vannes. A l'époque, la bonne société a crié au scandale d'un livre anticlérical, mais personne n'a pas en considération qu'il s'agissait dans le récit, du pire crime qu'on puisse infliger à un enfant. le viol, par l'abus d'autorité, dans la religion, aura mis plus d'un siècle à être reconnu. le roman était donc en avance sur son temps.

Octave Mirbeau, dans ce troisième roman, utilise une plume très descriptive pour compter l'histoire de ce pré-adolescent. Il le fait néanmoins avec pudeur, et, on imagine qu'il aurait été insoutenable de décrire le viol dans ses moindres détails. L'histoire est crédible et réaliste. le jeune Sébastien est un enfant perdu dans un univers hostile. Par l'éducation, on lui impose de grandir dans un système de valeur qu'il exècre mais contre lequel il ne peut rien. Sébastien est un enfant différent : rêveur, sensible et naïf. Il entre bien trop tôt dans cet univers auquel personne ne l'a réellement préparé mais pour lequel son père ne cesse de rêver pour lui à un avenir meilleur, loin de la quincaillerie familiale. Sébastien a la beauté de sa singularité, comme beaucoup d'enfants victimes de pédophiles. C'est de cette façon que sont décrites les pensées du prêtre après qu'il ait commis son crime. Il cherchera à se dédouaner et y parviendra, et peu importe qu'il ait mal agi. le père de Kern représente le pouvoir et l'autorité. A cette époque, le droit des enfants était une chimère. Toujours se taire, étudier, ne rien remettre en question. Pourtant, dès les premiers enseignements, c'est ce que Sébastien fait. Il tombe de son piédestal concernant l'éducation inculquée. Il était persuadé de la bonté de l'église, mais se retrouvera élève d'une machine à formater les têtes pensantes de la bonne société de l'époque : se raccrocher à sa naissance et asservir les autres. Sébastien n'est pas taillé pour cette existence-là. Il aime rêver, il aime les arts. Ce sont des crimes lorsqu'on n'est pas bien né. Il voudrait rêver et apprendre ce qui lui est interdit. Innocemment, il ne s'apercevra pas du piège charnel dans lequel on le fera tomber.

Outre le viol, je pense qu'il s'agit de l'histoire d'un adolescent pré pubère en quête d'amour de ses camarades. S'il n'est jamais mentionné explicitement l'homosexualité du garçon, on la devine par ses centres d'intérêt, par la douceur avec laquelle il s'attache à ses camarades les moins méchants. On entrevoit aussi ce que nous qualifierions de nos jours de harcèlement scolaire. A cet âge, on ne sait pas encore ce qu'est l'amour et on affectionne. Notre esprit n'est pas encore pollué par le désir. Ça ne nous tourmente pas. Il n'y a rien de bien ou de mal. Et c'est justement par cette naïveté que l'étau se refermera sur lui. Bien évidemment, et, même des années plus tard, il ne parviendra pas à dépasser sa frustration, sa douleur. le livre laisse à penser que le viol subit aura pour fonction d'orienter les préférences de Sébastien. Il sera incapable d'aimer une femme simplement car celles-ci ne l'attirent pas. Il subit aussi le syndrome de Stockholm et prendrait presque du plaisir aux souvenirs des attouchements du Père de Kern. Finalement, le seul moyen pour Sébastien de terminer sa vie de façon normale est encore de mourir à la guerre, en compagnie d'un de ses camarades.

Le sujet traité par ce roman n'a pas pris une ride. Au contraire, il résonne dans l'air du temps au milieu des scandales de l'Église catholique dont on parle enfin sans tabou. A lire absolument.
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