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EAN : 978B0000DTR1N
Editions Rombaldi (30/11/-1)
3.75/5   6 notes
Résumé :
Sélection de poèmes de la chilienne Gabriela Mistral, prix Nobel de littérature 1945
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Quand le Chili a été choisi pour le dernier mois du challenge @autricesdumonde , j'ai tout de suite pensé à Gabriela Mistral dont j'avais lu quelques textes, il y a longtemps. Il ne me restait plus qu'a trouver un recueil de la poétesse chilienne. Et ça n'a pas été une mince affaire. Je me suis donc retrouvée à emprunter un exemplaire de 1968 tout droit sorti des magasins de la bibliothèque de Caen (l'autre était de 1946, j'ai préféré le laisser bien au frais dans les réserves). Une collection consacrée aux Prix Nobel de littérature, Gabriela Mistral l'a reçu en 1945. A la place de Paul Valery qui était tout désigné mais qui a été fauché par la mort.

Quel grand écart entre ces deux auteurs ! Là où la poésie de Valéry peut être si hermétique, celle de Gabriela Mistral est bouleversante par sa simplicité. Ce sont des poèmes sensibles, sur le lien maternel, le rapport à la nature, de déchirantes complaintes sur l'amour perdu, disparu. Il y a aussi une grande religiosité, ce sont des prières adressées au ciel. Elle est comme une Vierge à l'enfant, et de nombreux textes évoquent cette figure biblique.
Mais, les poèmes tirés du recueil Desolacion sont sûrement ceux qui m'ont le plus touché. Parce qu'ils ressemblent à ceux d'une Louise Labé au désespoir. Sensuels et âpres, amoureux et violents, ils disent tout de la femme blessée et abandonnée. Sans sagesse ni pudeur elle chante sa colère et son désespoir. Une sorte de cri primal. Une rafale de mistral. Et c'est beau.

J'aimerais pour cette dernière chronique du challenge vous inviter à découvrir cette autrice. Mais il est bien difficile de trouver une réédition. Alors c'est le moment de lancer un appel : éditeurs de poésie, unissez-vous et proposez nous une édition bilingue de Desolacion de Gabriela Mistral pour qu'elle soit enfin lue en France. Merci. Bisous.
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
DÉSOLATION

La brume épaisse, éternelle, pour me faire oublier où
m’a rejetée la mer dans son flot saumâtre.
La terre où j'ai abordé n'a pas de printemps :
sa nuit sans fin me couvre comme une mère.

Autour de mon logis, le vent fait sa ronde de sanglots
et de hurlements et, tel un fil de cristal, brise mon cri.
Sur la plaine blanche, à l'horizon sans fin,
je regarde mourir d'immenses couchants douloureux.

Qui pourra appeler celle qui est venue jusqu'ici,
puisque seuls les morts sont allés plus loin ?
Ils regardent une mer muette et glacée
s'allonger entre leurs bras et les bras chéris.

Les bateaux dont les voiles blanchissent le port
viennent de terres où ne sont pas les miens ;
leurs hommes aux yeux clairs ne connaissent pas mes fleuves,
et n'apportent que des fruits pâles, qui n'ont pas la lumière de mes vergers.

La question qui monte à ma gorge
lorsque je les vois passer, retombe, accablée :
ils parlent des langues étrangères, non l'émouvante
langue que, sur des terres dorées, chante ma pauvre mère.

Je regarde tomber la neige comme poussière dans la tombe ;
je regarde s'épaissir le brouillard comme l'agonisant,
pour ne pas tomber dans la folie, je ne compte pas les instants ;
la longue nuit ne fait que commencer.

Je contemple la plaine figée et en recueille le deuil,
car je suis venue voir les paysages de mort.
La neige est le visage qui regarde à travers mes vitres,
sa blancheur descend sans trêve des cieux.

Toujours elle, silencieuse, ainsi que le vaste
regard de Dieu sur moi, toujours ses jasmins sur mon toit ;
toujours, tel le destin égal, présent,
elle viendra me couvrir, terrible, extasiée.
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JOUR (extrait)

Tous les jours semblaient pareils;
Tout à coup mûrit un jour.
Jour pareil aux autres jours,
Comme sont pareils roseaux
Et sont pareils olives
Et pourtant comme Joseph,
Ne ressemblait pas à ses frères

Ayons pour lui un sourire
Parmi tous les autres jours
Et qu'il les dépasse tous,
Comme boeuf de grande taille
Et le char devant les gerbes.

Nul ne le voit ni le nomme,
Fêtons le et nommons-le,
En grâces à qui l'a fait
Et gratitude de sol
Et gratitude de l'air,
Pour sa rivière d'eau vive
Avant qu'il ne tombe en cendre,
En poudre de chaux moulue
Et vers l'Éternel déverse
Son apparence de merveille.

Cousons-le à notre chair,
À nos cœurs et nos genoux
Et que nos mains le pétrissent
Et que nos yeux le distinguent,
Qu'il brille pour nous de nuit
Et nous fortifie de jour,
Tels cordages pour les voiles,
Tels points pour les blessures.
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L'INSTITUTRICE DE VILLAGE (extrait)

La maîtresse était pauvre. Son règne n'est pas de ce monde
(Ainsi pour le douloureux semeur d'Israël).
Elle portait une robe grise,nul bijou à ses doigts
Et son esprit n'était qu'un immense joyau!

La maitresse était gaie,pauvre femme blessée !
Son sourire était une façon de pleurer avec bonté.
Par-dessus la sandale déchirée et rougie,
Ce sourire était insigne de sainteté.

Paysan,dont le fils apprenait de ses lèvres
L'hymne et la prière, jamais tu ne vis l'éclat
De l'astre captif qui brûlait dans sa chair,
Et tu passas sans baiser son cœur en fleur.

Villageoise, te rappelle-tu avoir mêlé parfois
Son nom à quelque commérage brutal ou futile?
Cent fois tu l'a regardée sans jamais la voir,
Mais, dans l'âme de ton fils, il y a plus d'elle que toi.
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LE PENSEUR DE RODIN

Son menton sur sa main rude,
Le penseur se souvient qu'il est chair voué à la fosse,
Chair de fatalité, nue en face du destin,
Chair qui hait la mort, qui a frémi de beauté,
Frémi d'amour, tout le long de son ardent printemps
Et maintenant, à son automne, sent l'envahir le flot de la vérité et de la tristesse.

Sur son front passe le il faut mourir
Du bronze,lorsque la nuit tombe.

L'angoisse sillonne ses muscles tendus,
Chaque creux de sa chair s'emplit de terreur ;
Il se fend,telle feuille d'automne, à la voix du Seigneur
Qui l'appelle dans le bronze... Et il n'y a pas d'arbre tordu,
Sur la plaine au feu du soleil, pas de lion blessé,
Crispés comme cet homme qui médite sur la mort.
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CHOSES (extrait)

Lorsque je rêve de mes Andes,
J'avance par des défilés
Où me parvient un sifflement,
Presque une conjuration.

Je vois à ras du Pacifique
Mon archipel violet sombre,
Avec l'île qui m'a laissé
Une âcre odeur d'alcyon mort.

Un dos, un dos grave et paisible
Au bout du rêve que je fais
Marque la fin de mon chemin ;
Je m'y repose quand j'arrive.

Tronc d'arbre mort ou bien mon père
Est ce vague dos couleur cendre;
Je ne l'interroge ni trouble,
Je me couche à côté et dors.

J'aime une pierre d'Oaxana
Où Guatemala ; j'en approche ;
Fixe et rouge ,elle me ressemble ;
La crevasse en expire un souffle.

Dans son sommeil je la vois nue,
Je ne sais pourquoi la retourne .
Je ne l'ai pas eue peut être ;
C'est mon sépulcre que je vois.
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Video de Gabriela Mistral (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Gabriela Mistral
Gabriela MISTRAL – Éros & Tragédie (France Culture, 1992) Une émission des « Chemins de la connaissance », par Eve Griliquez, diffusée le 12 février 1992. Présences : Orlendo Jimeno-Grendi et Waldo Rojas.
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