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EAN : 9782020291552
166 pages
Seuil (01/01/1997)
  Existe en édition audio
3.66/5   184 notes
Résumé :
Patrick Modiano
Remise de peine
" Faut-il préciser que Remise de peine est une toute nouvelle merveille de la littérature contemporaine ? "
Jean-François Josselin, Le Nouvel Observateur " A la rencontre du temps perdu, Modiano nous donne le meilleur. "

Michèle Gazier, Télérama

Source : Seuil
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Critiques, Analyses et Avis (23) Voir plus Ajouter une critique
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Quand un artiste se retrouve à la une de l'actualité, lauréat d'un titre ou au coeur d'un drame, sa carrière prend un nouvel élan. La curiosité de ceux qui ne le connaissaient pas est éveillée. Et c'est bien parce que Patrick Modiano vient de recevoir le Nobel de Littérature que j'ai fait l'effort de lire un de ses ouvrages. Surtout que pour une fois, la presse, "l'élite" (heum, c'est qui, ça, au fait ?) et les lecteurs modestes semblent unanimes : Modiano est à la fois talentueux et abordable.

"Remise de peine" est une auto-fiction, l'auteur s'y met en scène sous les traits de Patoche, garçon d'une dizaine d'années confié avec son frère à quatre femmes pendant quelques mois, le temps d'une tournée à l'étranger de leur mère actrice. Quelques personnages gravitent autour de ces femmes.
Les occupations de cette poignée d'individus et leurs relations sont aussi opaques pour le lecteur qu'elles semblent l'être pour ces deux enfants, ballottés deci delà selon les besoins des adultes. On devine des activités nocturnes plus ou moins licites, des affaires louches, des liens créés autour de trafics pendant l'occupation allemande. On n'en saura pas plus. En préface de cette édition, Olivier Adam l'exprime bien, soulignant que l'auteur ne donne que des "indices, pièces éparses, signes partiels et souvent indéchiffrables".
Ne tarissant pas d'éloges sur la plume de Modiano, O. Adam loue dans cette même préface le "mystère d'une phrase au son incomparable, mélancolique et légère, et pourtant si simple, sans caractéristique apparente, sans effet, sans signe extérieur de richesse." J'approuve chacun de ces termes. Mais je n'en vois que l'aspect négatif. Pour moi ce genre de livre sent l'ennui, la poussière, l'encaustique et la naphtaline, me colle le bourdon aussi sûrement que les dimanches après-midis passés lorsque j'étais enfant chez des vieillards inconnus, lors desquels il eut été malvenu de refuser une gaufrette ramollie à la vanille...
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Après mon premier Modiano, j'en ai lu un second, puis un troisième, puis... Passons. Ce que je veux dire, c'est qu'après avoir lu plusieurs de ses oeuvres, j'ai cette impression diffuse qu'il faudrait presque tout lire, ou du moins une grande partie de ce qu'il a écrit, pour bien approcher l'auteur, qu'il faudrait connaître l'ensemble pour aborder un seul élément de cet ensemble jouant sur des infinités de variations. Mais bon, il faut bien commencer quelque part, et me voilà partie pour Remise de peine, un roman de 1988, après L'Horizon.


J'ai trouvé très touchante cette histoire d'un homme revenant sur un épisode de son enfance qui semble avoir constitué à la fois un traumatisme et un souvenir à chérir. C'est surtout la recherche - encore et toujours - d'un passé envolé, et c'est d'autant plus émouvant qu'on sait que ce roman est en grande partie autobiographique et que le frère de Patoche / Patrick Modiano, mourra quelques temps plus tard.

Les parents de Patoche et de son frère - on notera que le prénom du petit frère n'est jamais donné - se sont débarrassés d'eux en les confiant à des amis, qui forment une famille de substitution assez marginale, tournant autour de trois femmes. Or, cette famille cache des secrets. Patoche surprend des pleurs, entend des paroles dont il ne comprend pas le sens, voit son entourage aller et venir dans une atmosphère curieuse. On a l'impression que les deux enfants se sentent bien avec leur nouvelle famille, mais que celle-ci semble receler quelque chose de corrompu, qu'elle est comme infectée.


J'ai apprécié que cette histoire, sur laquelle Patrick Modiano reviendra plus précisément dans son roman Un Pedigree, ne soit qu'esquissée, dans le ton sobre qui est devenu au fil des années celui de l'auteur. On ressent un chagrin sans appel, une nostalgie qui ne prendra jamais fin, mais tout en délicatesse et pudeur.


Patoche, devenu adulte, vagabondera inutilement à la recherche de cette période de sa vie. Vous aurez compris que ce roman est un roman - eh oui, encore ! - de la mémoire. Avec l'écriture se reconstruisent de façon imparfaite, morcelée, quelques mois de la vie d'un enfant à qui on a jamais rien expliqué et qui tente encore et toujours de comprendre ce que signifient ces moments perdus.
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L'enfance,
Qui peut nous dire quand ça finit
Qui peut nous dire quand ça commence...
......
L'enfance
Qui nous empêche de la vivre
De la revivre infiniment
De vivre à remonter le temps
De déchirer la fin du livre...."

Remise de peine, un émouvant roman sur l'enfance de notre grand Patrick Modiano.
Je sais que tout le monde ne partage pas mon avis sur cet auteur, mais, à la lecture des critiques sur Babelio ou ailleurs, force est de constater que cette diversité d'opinion sur les romancier-e-s est la règle. Je suis persuadé que, mis à part les mauvais auteurs, hélas nombreux, je veux dire celles et ceux qui écrivent mal et/ou nous racontent des inepties, notre appréciation des "bons auteurs" est toujours subjective. Cela dépend de tant de choses: notre profil psychologique, notre âge, nos expériences vécues et notre histoire culturelle, voire même notre humeur du moment.

Le roman de Modiano prend la forme d'une auto-fiction issue d'événements réels vécus par Patrick et son frère Rudy (qui ne sera jamais nommé) alors qu'il avait 7 ans et son frère 5, lorsque tous deux furent confiés par leur mère, partant en tournée théâtrale, à une amie résidant à Jouy-en-Josas. Les faits réels sont relatés dans Un Pedigree, où l'on apprend que cette amie Suzanne appartenait au monde de la petite délinquance, recevait beaucoup de femmes chez elles, et finirait par être arrêtée, ce qui obligerait le père à venir reprendre ses enfants en 1953.
Mais pour notre plus grand plaisir, cette histoire vraie se transforme en un merveilleux roman dans lequel notre héros, âgé cette fois de 10 ans, est, avec son frère, entouré d'êtres de fiction, des femmes énigmatiques et souvent tendres, Annie, Mathilde, la mère d'Annie, la petite Hélène, ancienne écuyère de cirque, Blanche-Neige, et d'autres hommes et femmes de passage.

Je tente une hypothèse pour ce récit. Je me demande si Modiano n'a pas recomposé cet épisode marquant de son enfance pour tenter d'y donner du sens, de récréer, au delà de l'énigme, une certaine forme de douceur dans une enfance chaotique marquée par l'abandon des parents, surtout la privation de l'affection d'une mère.
Car, ce qui m'a frappé, hors la dureté de Mathilde, la mère d'Annie, c'est la tendresse et la bienveillance de toutes et tous à l'égard de ses enfants, Annie surtout, mais aussi la petite Hélène, Blanche-Neige, et même les hommes qui gravitent autour de ces femmes, Roger Vincent, Jean D, dit Buck Danny. Qu'il s'agisse des cadeaux faits aux enfants, des promenades dans la voiture américaine de Roger Vincent, ou sur la moto de Jean D., on sent que pour ces adultes, ces enfants comptent, sont importants, alors qu'ils ont si peu compté pour leurs parents, et ont été si mal considéré par leurs enseignants.

Cependant, en dépit de leur gentillesse, tous ces adultes de la maison du Docteur Guillotin ont des activités bien étranges et des comportements bien difficiles à déchiffrer. Que font-ils dans ces soirées où ils se rassemblent? Pourquoi Annie pleure-t-elle si souvent? Que va-t-elle faire le soir et la nuit à Paris? Que fait-on dans ces garages où les emmène Annie? Modiano, avec son art extraordinaire, nous plonge au plus profond dans ce monde de l'enfance face aux mystères du monde des adultes. Et plus encore, nous fait ressentir l'incertitude, la sensation de flottement de ces enfants déracinés, qui trouve son sommet dans la disparition de tous les locataires de la maison à la fin du roman.

Et aussi, il nous fait saisir merveilleusement l'enfance et son imaginaire, ses mystères, ses terreurs, ce château voisin et son propriétaire "fantôme", le Marquis de Caussade, et le projet des enfants, toujours reporté, de s'y rendre la nuit.

En définitive, j'ai trouvé un mélange de tendresse et de souffrance dans ce roman, et, comme toujours, ce don magique qu'a Modiano de nous emmener en voyage dans son univers incertain fait d'ombre et de lumière.

En guise de post-scriptum: j'ai vu à la TV il y a quelques jours un excellent documentaire sur la vie de Charlie Chaplin. Toutes proportions gardées, quelle étrange similitude entre les enfances de Chaplin et Modiano. de ces enfances chaotiques, sans amour parental, naîtront des oeuvres de génie marquées toutes deux d'une profonde humanité.
"J'ai pris de ta boue et j'en ai fait de l'or."
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Remise de peine : cabane à chagrins au fond du jardin des souvenirs.
Je connais peu l'oeuvre de Patrick Modiano, mais je comprends par ce livre qu'elle va consister à revenir souvent pousser la porte de cette cabane, et fouiller dans les ruines en clair obscur d'une mémoire errant entre mélancolie, traumatisme et nostalgie.
Je comprends mieux aussi, à travers cette évocation d'une page d'enfance plongée dans un univers interlope où l'amour parental fait défaut, la tonalité dérangeante et presque violente qui m'avait perturbée dans "La place de l'étoile" : il y a donc des sources où Modiano le "petit enfant qui a les cheveux blancs" comme chante Diane Dufresne, est venu puiser ses troubles.
Des troubles de l'enfance évoqués avec une infinie justesse et un fond de tristesse bouleversant.
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Je lis Patrick Modiano depuis longtemps et je ne me lasse pas. Si je trouve qu'il mérite son prix Nobel de littérature j'apprécie surtout l'univers dans lequel il me transporte. C'est le cas une fois de plus avec "Remise de peine" publié en 1988.
Il réussit à introduire dans ses souvenirs d'enfants sa prise de conscience qu'il se passe des choses graves dans le monde des adultes.
Alors que ses parents vivent à l'étranger, Patoche et son frère habitent une maison près de Versailles où il a été confié à la petite Hélène, une ancienne écuyère qui a eu un accident. Rue du Docteur-Dordaine vivent aussi la mère et la fille avec qui elle formait un trio de cirque, Mathilde et Anne la marraine de Patoche.
Blanche beige qui les accompagne à l'école complète cet environnement de femmes qui vivent à l'écart du village.
L'enfant aime se souvenir des nombreux invités qui fréquentaient la maison et dont les conversations étaient mystérieuses. Pourtant Patrick va se rappeler de nombreux détails.
Cela sonne tellement juste!
C'est l'époque où les enfants écoutent des émissions à la radio, lisent des illustrés et ne vont pas à l'école le jeudi après-midi.
Plus tard, à Paris, lorsqu'il fait ses débuts d'écrivain c'est avec une pointe Bic qu'il écrit. Sa jeunesse le hante comme le souvenir de son père qui a vécu l'occupation.
J'aime beaucoup les auteurs qui réussissent à se renouveler en permanence alors qu'ils tournent toujours autour de la même histoire. Pour Patrick Modiano c'est celle de l'après-guerre, du souvenir et de la perte. Un style unique !


Challenge Nobel illimité
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critiques presse (1)
Telerama
30 janvier 2013
Désarrois de l'enfance, souvenirs mélancoliques, Remise de peine est, comme le souligne Olivier Adam en préface, à placer en regard d'Un pedigree, comme un premier secret révélé avec une pudeur infinie.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Aujourd'hui, je me dis que le garage où m'emmenait Annie avec mon frère doit figurer sur la liste. C'était peut-être le même que celui de Pagnon. Je revois les feuillages des arbres de la rue, la grande façade beige à fronton... Ils l'ont démoli avec les autres, et toutes ces années n'auront été, pour moi, qu'une longue et vaine recherche d'un garage perdu.
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Je tente aujourd'hui de recenser tous les visages que j'ai vus sous le porche et dans le salon - sans pouvoir identifier la plupart d'entre eux. Tant pis. Si je mettais un nom sur cette dizaine de visages qui défilent dans mon souvenir, je gênerais quelques personnes encore vivantes aujourd'hui. Elles se rappelleraient qu'elles avaient de mauvaises fréquentations.
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Il se taisait. Moi aussi. Son amie était toujours assise sur le fauteuil d'osier et feuilletait un magazine qui traînait sur le lit et qu'elle avait pris au passage. Il valait mieux, au fond, que cette fille soit là, sinon nous aurions parlé, Jean D, et moi. Ce n'était pas facile, je l'ai lu dans son regard. Aux premiers mots, nous aurions été comme des pantins des stands de tir qui s'écroulent quand la balle a frappé le point sensible. Annie, la petite Hélène, Roger Vincent avaient certainement fini en prison...J'avais perdu mon frère. Le fil avait été brisé. Un fil de la Vierge. Il ne restait rien de tout ça...
Il s'est retourné vers son amie et il lui a dit :
- Il y a une belle vue ici... C'est vraiment la Côte d'Azur...
La fenêtre donnait sur l'étroite rue Puget, où personne ne passait jamais. Un bar glauque, au coin de la rue, un ancien Vins et Charbons, devant lequel une fille solitaire faisait le guet. Toujours la même. Et pour rien.
- Belle vue, non ?
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La petite Hélène était une brune d'une quarantaine d'années, avec un front large et des pommettes. Sa très petite taille nous la rendait proche. Elle boitait légèrement à cause d'un accident du travail. Elle avait été écuyère puis acrobate, et cela lui donnait du prestige à nos yeux. Le cirque - que nous avions découvert, mon frère et moi, un après-midi à Médrano - était un monde dont nous voulions faire partie. Elle nous avait dit qu'elle n'exerçait plus son métier depuis longtemps et elle nous montrait un album où étaient collées des photos d'elle en tenue d'écuyère et d'acrobate et des pages de programmes de music-hall qui mentionnaient son nom : Hélène Toch. Souvent, je lui demandais de me prêter cet album pour que je puisse le feuilleter dans mon lit, avant de m'endormir.
Elles formaient un curieux trio, elle, Annie et la mère d'Annie, Mathilde F. Annie était une blonde aux cheveux courts, le nez droit, le visage doux et délicat, les yeux clairs. Mais quelque chose de brutal dans son allure contrastait avec la douceur du visage, peut-être à cause du vieux blouson de cuir marron - un blouson d'homme - qu'elle portait sur des pantalons noirs très étroits, pendant la journée. Le soir, elle s'habillait souvent d'une robe bleu pâle serrée à la taille par une large ceinture noire et je la préférais comme ça.
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Et par dessus tout cette sensation d'abandon un peu effrayante, d'angoisse sourde, d'irréalité même, qui est pour moi synonyme de l'enfance telle que je l'ai ressentie, bâtie sur du sable, filant en permanence entre les doigts, incertaine, sans contour ni centre, terre meuble où l'on s'avance à l'aveugle, ne saisissant que des lambeaux, dans un mélange de présence et d'absence entremêlées vous laissant au sortir de l'adolescence comme tout à fait meuble et imprécis, sans identité ni racine, chien perdu sans collier.

- Préface Olivier Adam
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Vidéo de Patrick Modiano
Avec son dernier roman "La Danseuse", Patrick Modiano parvient-il à nous emporter ? Et que penser de "L'Hôtel des oiseaux" de Joyce Maynard, autrice abonnée aux best-sellers du New York Times, et dont le roman se retrouve au coeur de polémiques sur l'appropriation culturelle aux Etats-Unis ?
Géraldine Mosna-Savpye et Nicolas Herbeaux en parlent avec nos critiques, Elise Lépine, journaliste littéraire au Point, et Virginie Bloch-Lainé, productrice à France Culture.
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Vignette : Maryna Terletska/Getty Images _____________ Livres, films, jeux vidéo, spectacles : nos critiques passent au crible les dernières sorties culturelles par ici https://youtube.com/playlist?list=PLKpTasoeXDrosjQHaDUfeIvpobt1n0rGe&si=ReFxnhThn6_inAcG une émission à podcaster aussi par ici https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-midis-de-culture
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