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Dominique Bellec (Traducteur)
EAN : 9782369355304
144 pages
Le Passager Clandestin (20/10/2022)
3.69/5   13 notes
Résumé :
En 1986, une jeune biologiste découvre qu'elle est séropositive et, renonçant à une brillante carrière de chercheuse, se réinvente en tant que professeure discrète dans une petite ville de Pennsylvanie. Récit à la première personne, cette longue nouvelle révèle ce qu'aurait pu être une vie avec le VIH et relate le refus intemporel d'accepter la défaite.
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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En 1989, l'épidémie de VIH bat son plein, notamment dans la communauté gay qu'elle décime. Judith Moffet, inquiète pour ses proches amis, extériorise son angoisse dans cette novella, intitulée Tiny Tango, et qui a été pressentie pour les prix Hugo, Locus et Nébula, récompensant toute trois des oeuvres de science-fiction. Si ce récit d'anticipation a presque quarante ans, il reste étrangement intemporel, tant pour les sujets traités que dans la perception sociétale que décrit l'autrice.

« Tiny Tango » se déroule dans l'Amérique de la fin des années 1980. Une jeune biologiste découvre qu'elle a été infectée par le virus du sida, ce qui anéantit sa vie, brise net son ambition de faire carrière dans la recherche scientifique. En effet, le virus, dans cette Amérique de fiction, mais pourtant étrangement crédible (on pourrait faire un parallèle avec les cliniques actuelles procédant à des avortements), effraie la population au point de créer des émeutes, des chasses à l'homme contre les personnes infectées. La narratrice échappe par chance à ces purges, et décide de mener une vie discrète, incognito, marquée par une extrême solitude, sentimentale comme sexuelle, tant elle souhaite, pour survivre le plus longtemps possible dans l'attente d'un traitement, s'épargner tout stress et toute implication émotionnelle. Heureusement, elle est soutenue par son groupe de discussion entre personnes contaminées, ce qui lui permettra d'entretenir quelques liens avec d'autres personnes, mais rien de vraiment nourrissant, ce qui lui donne l'impression décourageante de vivre en morte-vivante. C'est pourquoi, après quelques années passées à construire une vie stable mais à la monotonie quasi-monacale, elle cherche à donner un sens à cette vie en suspens : ce sera, dans un parallèle curieux mais compréhensible, dans la recherche d'un croisement de melons destiné à les rendre résistants au virus transmis par la chrysomèle rayée du concombre.

Ce roman d'anticipation imagine ainsi comment la recherche va évoluer, même si l'autrice a choisi l'option pessimiste, celle d'un vaccin plutôt que d'un traitement, évolution qui protège les personnes non infectées mais continue d'ostraciser les personnes qui le sont. A travers cette histoire frappée par le fléau du VIH, fondée sur la vraie trajectoire de ce virus et de la recherche, mais marquée forcément par un certain défaitisme, en premier lieu celui de la narratrice qui se sait condamnée malgré tous ses efforts, Judith Moffet me semble porter une critique de la société consumériste et individualiste d'alors – celle de Ronald Reagan – qui sépare les hommes les uns des autres, mais surtout de la nature qui est asservie dans une optique productiviste, et contre toute logique écologique (dont on paye le prix de nos jours).

Roman d'anticipation ne va pas toujours avec science-fiction, mais ici celle-ci fait irruption d'une manière assez étrange et mal ficelée : les Hefn, des extra-terrestres, vont et viennent sur Terre (les conditions dans lesquelles ils le font n'est pas tellement explicitée), non pour envahir cette dernière, mais plutôt pour la sauver, elle qui sera frappée, après la maladie, par une catastrophe supplémentaire. Sans révéler de quoi il s'agit, ça commence à faire beaucoup, même si on comprend sa symbolique. Si cette orientation science-fictionnelle est plutôt légère, je ne l'ai pas tellement comprise et m'a semblé arriver comme un cheveu sur la soupe. Cette novella n'en avait pas vraiment pas besoin, et cela ne m'a pas convaincue. Je suis assez peu portée sur ce type de récits, justement en raison du resserrement narratif qu'il impose et qui ressort comme une imperfection quand c'est mal fait, comme c'est le cas ici : il y a beaucoup d'ellipses, de faits que le lecteur doit accepter comme telles, si par chance elles sont détaillées plus tard : qui sont les Hefn ? Pourquoi sont-ils là ? La fin de la novella est donc traitée assez rapidement, ce qui a été frustrant.

En outre, la froideur et le détachement de la narratrice, même s'ils sont compréhensibles, ne m'ont pas permis de m'attacher à celle-ci, et le vernis de science-fiction qui a été passé par la narratrice m'a désagréablement surprise : le VIH était un sujet grave à l'époque où le texte a été écrit, et suffisamment marquant. Pourquoi le dénaturer avec des extra-terrestres ? La vérité doit être ailleurs…

Merci dans tous les cas à Babélio et aux éditions le passager clandestin pour cet ouvrage reçu dans le cadre de la Masse critique Mauvais genres.
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Aujourd'hui je vous présente un roman d'anticipation qui se passe dans les année 80 😉😆
Voilà un roman qui m'a été conseillé par Eva la libraire des mots à la bouche, la librairie LGBTQIA+ de Paris. Alors qu'elle portait un tee-shirt floqué ACT-UP, je lui ai fait la remarque que cela me rappeler de bons mais aussi de funeste souvenirs. Elle en a déduit que ce roman était fait pour moi.
Et Eva ne s'est pas trompée.
Mais que nous raconte ce « Tiny tango«
En 1986, une jeune biologiste de 22 ans découvre qu'elle est séropositive et, renonçant à une brillante carrière de chercheuse. Pour échapper à la sérophobie ambiante, elle décide de tout quitter et elle se réinvente en tant que professeure discrète dans une petite ville de Pennsylvanie. Là elle va suivre les conseils de ses médecins lui intimant de mener une vie saine sans stress. Aussi notre ex chercheuse va-t-elle s'éloigner du monde et limiter ses interactions sociales. Avec un groupe d'ami, elle va se mettre à la permaculture. Prendre conscience que cette pandémie est un nouveau mal humain. Un de plus …
Judith Moffett nous offre là un récit engagé, un récit d'anticipation là où la science-fiction raconte le sida. Nous avons là, disons-le d'emblée un texte précurseur.
Ce court roman est écrit en 1987, alors que l'épidémie du sida est terrible. Elle laisse des tas de mort derrière elle et alors qu'elle n'a pas encore atteint son apogée.
La narration est à la première personne, ce qui lui confère à cette novella un coté totalement intimiste. Car nous avons bien entre les main un roman introspectif. L'autrice y met tout son coeur mais aussi son intelligence. Elle imagine un monde meilleur. Un monde ou la pandémie serait stoppée et où le monde aurait enfin pris conscience des désastres environnementaux que génère les humains sur notre bonne vieille Terre. Judith entremêle dans ce récit utopiste ses émotions, ses peurs, ses angoisses avec ses espoirs et ses désirs, la guérissons, une vie meilleure… Il est question aussi ici de solitude, de désir, d'acceptation, de combat.
Elle imagine ce qu'aurait pu être une vie avec le VIH, si cette maladie n'avait pas suscité tant de fantasmes, tant d'intolérance voire de haine. Pour les personnes ayant mon âge, rappelez-vous, certain voulait des sidatoriums pour y enfermer tous les malades du Sida. L'Amérique et d'autres pays fermaient leurs portes aux touristes séropos. Certains autres auraient souhaité que les personnes porteuses de la maladie « honteuse » soient stigmatisées. On pourrait faire comme pour les homos ou les juifs durant la seconde guerre mondiale… Vous savez l'étoile jaune ou le triangle rose… Bref les plus bas instinct d'une certaine frange, (fange) de la population a voulu récupérer tout cela à des fins politiques. Les migrants, les sidéens même combat !
Aussi, ce court roman nous raconte-t-il un parcours de vie où l'espoir dans la tourmente est au rendez-vous. Ce récit c'est aussi la volonté de s'accomplir malgré les embuches. C'est le refus de sombrer dans le paranoïa ambiante, l'acharnement qu'il faut pour combattre les idées reçus, l'entêtement à croire à un avenir meilleur quitte à confier notre destiné à des forces qui nous dépassent.
L'éditeur parle d'un refus intemporel d'accepter la défaite, c'est exactement ça. Et Judith Moffett nous offre ici un texte fort et déterminé, je dirai, militant mais aussi altruiste, lumineux et sensible et féministe… Ce qui m'a aussi marqué c'est que bien qu'écrit dans les années 80 nous avons là un texte visionnaire.
Bref ce court roman a réellement réveillé beaucoup de chose en moi !
Lien : https://collectifpolar.blog/..
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Récit d'anticipation et premier grand format dans la collection "Dyschroniques" du Passager Clandestin, Tiny Tango, est une histoire écrite en 1989 mais qui ne voit le jour en français que maintenant.
Dystopie intimiste ayant pour thème principal le sida, Judith Moffett imagine une ère où un vaccin voit le jour pour combattre le sida mais qui enferme les personnes atteintes dans une case à part, eux les infectés..
L'héroïne de cette histoire essaye de vivre avec sa maladie, avec son groupe d'amis atteints également, elle cherche sa place dans le monde avec cette peur et cet espoir vis-à-vis de sa situation.
Bien-sûr le thème du sida est au premier plan mais il y a aussi les relations sociales, les choix de vie, l'envie d'aider, puis il y a ces entités venues d'ailleurs, pourront elles faire quelque chose ?
Le monde, lui, continue sa course, les catastrophes nucléaires s'en mêlent.
L'entraide, l'inquiétude pour les proches et les humains en général, l'angoisse, la compassion, la sensibilité, les faux espoirs et le besoin d'amour, de tendresse, se font ressentir et on tourne la dernière page en ayant cette certitude d'avoir lu un texte important et visionnaire à la plume douce et acérée à la fois.
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Ce très court roman pourrait être sous-titré :De la culture du melon & du voyeurisme pour lutter contre la dépression, ce qui vous laisse imaginer comme il prend des directions inattendues !
Écrit au début de l'épidémie de VIH, ce texte prend évidemment une direction différente, l'auteur ne pouvait pas deviner exactement comment ça allait tourner, mais ce n'est pas seulement une uchronie, c'est réellement de la science fiction puisque la terre aura droit à son premier contact au fil des décennies que nous raconte la narratrice.
La narratrice, donc, jeune biologiste pleine d'avenir, voit ses plans bouleversés quand elle contracte le VIH. Pendant des années, elle se coupera du monde, avant que , par la culture des melons étonnamment, elle laisse sa vie bien réglée et bien triste s'ouvrir enfin.
Très étonnant, ce petit texte, plein de surprises et vraiment sympa.
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Avis dans le cadre de la masse critique

Je remercie sincèrement Babelio et les éditions du passager clandestin pour la découverte de cet ouvrage que je n'aurais sans doute jamais lu sans la masse critique.

Écrite en 1987, cette nouvelle de Judith Moffett, lauréate du prix John W. Campbell du meilleur écrivain en 1988, est aujourd'hui traduite et publiée pour la première fois en français par @lepassagerclandestin.editions dont je salue l'initiative car c'est un texte original qui méritait d'être découvert.

En 1987, alors que le public commence seulement à prendre conscience de l'épidémie de Sida, Judith Moffett imagine l'impact de cette épidémie sur la société et les personnes contaminées. C'est d'ailleurs l'une des toutes premières oeuvres de fiction à aborder ce sujet.

C'est un écrit plutôt original. D'une part, car il met en scène une femme séropositive, ce que je n'ai, personnellement, jamais rencontré en littérature. D'autre part, car il mêle habilement recherches médicales et agroécologie.

En effet, l'héroïne, une brillante biologiste, décide, à l'annonce de sa séropositivité, de s'extraire du monde qu'elle connaissait jusque là pour se réinventer un quotidien tranquille et sain, loin de tout stress, en tant que professeure dans une petite ville discrète de Pennsylvanie.
Elle s'adonnera à la permaculture dans son jardin afin de donner un sens à son existence, qu'elle souhaite tourner vers les autres et pas uniquement sur elle-même et sa survie.

Ce postulat de départ permet à l'autrice d'aborder de nombreux sujets : la lutte contre le VIH, contre le nucléaire, le féminisme, la naissance de l'agroecologie et la nécessité de rompre avec un mode de vie contraire aux besoins de la terre et de l'humain, l'importance de la connaissance qui évite l'ostracisme et le rejet engendrés par l'inconnu et l'incompréhension, la nécessaire solidarité.

Des thématiques extrêmement intéressantes mais, et c'est peut-être là le seul bémol à ce texte, traitées de façon trop superficielle, effleurées. Cette nouvelle, selon moi, pâtit de sa brièveté. La postface nous apprend qu'elle s'inscrit dans un cycle plus complet, qu'il serait donc intéressant de pouvoir lire, même si, selon mes recherches, il ne me semble pas encore traduit en français.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Je dépendais entièrement du potager pour mon approvisionnement en fruits et en légumes ; je l’envisageais donc à la fois comme un hobby et comme une pratique d’autosuffisance à la manière des colons du temps de la Frontière. Si une culture ne marchait pas, je savais que je ne mourrais pas de faim. En revanche, comme je n’achetais jamais – mais vraiment jamais – le moindre légume pour ma consommation domestique, si une culture échouait, ça voulait dire presque à coup sûr que je devrais me passer d’un aliment pendant toute une année.
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Détruire les éléments contaminés pour préserver ceux qui sont sains. La chasse aux sorcières provoquée par le Sida à la fin des années 1990, les groupes d’autodéfense qui entraient par effraction dans les centres de dépistage et de traitement de tout le pays pour trouver l’identité des personnes contaminées, tout ça reposait sur un principe similaire : identifier ! détruire ! Ils ne recherchaient pas seulement les gens atteints d’une forme aigüe de la maladie, mais aussi celles et ceux qui avaient été testés positifs au VIH-I, II et/ou III. J’avais eu de la chance, les employés des locaux de la Cellule d’intervention où mon dossier était conservé étaient parvenus à contenir la foule pendant qu’un volontaire mort de peur se démenait comme un forcené pour effacer les archives informatiques et que deux autres brûlaient les archives papier dans le lavabo des toilettes.
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Le virus VIH est lié au système immunitaire. Si vous attrapez la grippe, votre système immunitaire réagit pour combattre le virus de la grippe, et le virus du Sida se multiplie ; donc l’astuce, c’est d’en demander le moins possible à votre système immunitaire pour gagner du temps en attendant que la recherche progresse...
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Mon ami, un Hefn nommé Godfrey, m’a encouragée (comprenez : obligée) à enregistrer ce qui suit. Je ne sais pas trop pourquoi.
C’est censé être l’histoire de ma vie, et franchement, une bonne part de ma vie est plutôt sinistre.
Godfrey me dit que selon lui cette histoire a une valeur pédagogique, mais pour qui et à quelle fin, ça, il ne le dit pas. Comme chacun sait désormais, les Hefn ne pensent pas comme nous.
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Le clinicien du centre de dépistage qui m’annonça la nouvelle me guida ensuite jusqu’à une chaise et dit : «Quand j’ai reçu les résultats, je vous ai pris rendez-vous pour ce soir avec une conseillère. Ça vous aidera bien plus que vous ne pouvez l’imaginer, et je me fiche que vous soyez obligée d’annuler vos autres engagements : soyez-y.» Il nota l’adresse et l’heure sur un bout de papier, et je m’y rendis.
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