J'écoute la mer, j'écoute le vent, j'écoute les voiles qui parlent avec la pluie et les étoiles dans les bruits de la mer et je n'ai pas sommeil.
C'est toute la vie que je contemple, le soleil, les nuages, la mer, le temps qui passe et reste là. C'est aussi, parfois, cet autre monde devenu étranger, que j'ai quitté depuis des siècles. Ce monde moderne artificiel où l'homme a été transformé en machine à gagner de l'argent pour assouvir de faux besoins, de fausses joies.
Je continue sans escale vers les îles du Pacifique, parce que je suis heureux en mer, et peut-être aussi pour sauver mon âme .
J’avais un tel besoin de retrouver le souffle de la haute mer, il n’a avait que Joshua et moi au monde, le reste n’existait pas, n’avait jamais existé. On ne demande pas à une mouette apprivoisée pourquoi elle éprouve le besoin de disparaître de temps en temps vers la pleine mer. Elle y va, c’est tout, et c’est aussi simple qu’un rayon de soleil, aussi normal que le bleu du ciel.
Un second faisceau s'élève à côté du premier. Puis un troisième. Bientôt il y en a une dizaine comme un gros bouquet de lumière surnaturelle dans le sud. Et je comprends maintenant que ce n'est pas l'arche maudite. C'est une aurore australe, la première de ma vie, peut-être le plus grand cadeau que m'aura donné ce voyage.
Et hier, alors que le vent avait molli à force 4, j'en ai profité pour envoyer par dessus bord un tas de petites choses sacrées dont la liste m'aurait fait bondir deux mois plus tôt.
Pour les grands voiliers d’autrefois,le pot-au-noir représentait de longs jours épuisants à manœuvrer les lourds phares carrés sous une chaleur moite et un ciel plombé,pour profiter des moindres variations de la brise,avec des virements de bord continuels.Pour nous autres,petits yachts,le pot-au-noir est simplement un moment très énervant à passer,mais sans plus,car les virements de bord ne posent aucun problème et la zone sera en principe assez vite traversée.Cela n’empêche qu’un marin abordera le pot-au-noir avec mauvaise conscience.
si chaque homme plantait ne serat-ce qu'un arbre dans sa vie, ça ferait des milliards de choses belles en plus sur notre terre, tout le monde deviendrait plus gentil... plante ton arbre !...
Message envoyé par Moitessier au Sunday Times pour signaler son abandon de la course: "Je continue sans escale vers les îles du Pacifique parce que je suis heureux en mer, et peut être aussi pour sauver mon âme."
L'eau, dans un coup de surf, ce n'est plus de l'eau, c'est de la roche.