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Marc-Henri Arfeux (Préfacier, etc.)
EAN : 9782266152167
128 pages
Pocket (23/06/2005)
3.58/5   2547 notes
Résumé :
Molière

L'École des femmes


De conception traditionnelle, cette collection a le mérite d'aborder l'œuvre intégrale sous des angles diversifiés. Outre le résumé détaillé des différentes parties et les commentaires composés qui le complètent, chaque ouvrage propose une synthèse littéraire assez riche : il y est question de l'auteur, des personnages, de la genèse et de l'architecture de l'œuvre mais aussi de ses particularités styli... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (114) Voir plus Ajouter une critique
3,58

sur 2547 notes
Arnolphe, dit M. de la Souche, désespère de pouvoir trouver un jour son bonheur sur le plan conjugal. Il considère les femmes comme des êtres frivoles, dénuées de bon sens. Il a peur d'être cocufié. Il pense ainsi que la meilleure solution serait d'en épouser une ne connaissant rien au monde et à ses perversions. L'ingénue est toute trouvée puisque sa pupille, Agnès, a été élevée dans un couvent. Mais bien évidemment, rien ne se passe comme prévu. Agnès n'éprouve absolument rien pour lui et s'est entichée d'Horace, le fils d'un ami de son tuteur, Oronte.

Si cette pièce a obtenu un franc succès, on peut également imaginer à quel point elle a dû choquer. Car sous des dehors naïfs, la petite Agnès cache un autre caractère. Une scène (acte II, sc. 5) montre à quel point elle peut faire tourner Arnolphe en bourrique. Lorsqu'il lui demande quelles sont les nouvelles, elle lui dit que le petit chat est mort. Bon, certes, c'est bien malheureux pour la pauvre bête, mais elle se garde bien de lui dire qu'elle a vu Horace. Arnolphe est obligé de lui tirer les vers du nez car elle ne répond que par de petites phrases. Peur d'en dire trop ? Et puis, il y a ce passage, fabuleux, lorsqu'elle lui annonce, toujours aussi naïvement (mon oeil ! ) qu'elle a vu Horace et qu'elle ne comprenait pas lorsque la voisine disait qu'elle l'avait blessée. Elle voulut aussitôt réparer sa faute :


Agnès.

Voilà comme il me vit, et reçut guérison.
Vous-même, à votre avis, n'ai-je pas eu raison ?
Et pouvois-je, après tout, avoir la conscience
De le laisser mourir faute d'une assistance,
Moi qui compatis tant aux gens qu'on fait souffrir
Et ne puis, sans pleurer, voir un poulet mourir ?

[...]

Arnolphe.

Non. Mais de cette vue apprenez-moi les suites,
Et comme le jeune homme a passé ses visites.



Agnès.

Hélas ! si vous saviez comme il était ravi,
Comme il perdit son mal sitôt que je le vi,
Le présent qu'il m'a fait d'une belle cassette,
Et l'argent qu'en ont eu notre Alain et Georgette,
Vous l'aimeriez sans doute et diriez comme nous...


Arnolphe.

Oui. Mais que faisait-il étant seul avec vous ?


Agnès.

Il jurait qu'il m'aimait d'une amour sans seconde,
Et me disait des mots les plus gentils du monde,
Des choses que jamais rien ne peut égaler,
Et dont, toutes les fois que je l'entends parler,
La douceur me chatouille et là dedans remue
Certain je ne sais quoi dont je suis toute émue.


Arnolphe, à part.

Ô fâcheux examen d'un mystère fatal,
Où l'examinateur souffre seul tout le mal !
(À Agnès.)
Outre tous ces discours, toutes ces gentillesses,
Ne vous faisait-il point aussi quelques caresses ?


Agnès.

Oh tant ! Il me prenait et les mains et les bras,
Et de me les baiser il n'était jamais las.


Arnolphe.

Ne vous a-t-il point pris, Agnès, quelque autre chose ?
(La voyant interdite.)
Ouf !


Agnès.

Hé ! il m'a...


Arnolphe.

Quoi ?


Agnès.

Pris...


Arnolphe.

Euh !


Agnès.

Le...


Arnolphe.

Plaît-il ?


Agnès.

Je n'ose,
Et vous vous fâcherez peut-être contre moi.


Arnolphe.

Non.


Agnès.

Si fait.


Arnolphe.

Mon Dieu, non !


Agnès.

Jurez donc votre foi.


Arnolphe.

Ma foi, soit.


Agnès.

Il m'a pris... Vous serez en colère.


Arnolphe.

Non.


Agnès.

Si.


Arnolphe.

Non, non, non, non. Diantre, que de mystère !
Qu'est-ce qu'il vous a pris ?



Remarquez à quel point elle le fait attendre, à quel point ses paroles sont ambiguës. Tous les sous-entendus peuvent se percevoir, ce qui induit le barbon en erreur. Et après, on me fera croire que cette Agnès est une ingénue ? Je pense que Molière a joué justement avec cela. Et c'est bien d'ailleurs ce qui lui vaudra le courroux de ses détracteurs (vous me direz, quand on veut trouver quelque chose à redire, on trouve toujours) qui estimaient que les bienséances n'étaient pas respectées, qu'il y avait trop d'obscénités. Bref, pour revenir à notre Agnès, elle finit quand même enfin par lâcher :



Agnès.

Il m'a pris le ruban que vous m'aviez donné.
À vous dire le vrai, je n'ai pu m'en défendre.


Arnolphe, reprenant haleine.

Passe pour le ruban. Mais je voulais apprendre
S'il ne vous a rien fait que vous baiser les bras.


Agnès.

Comment ? est-ce qu'on fait d'autres choses ?



"Est-ce qu'on fait d'autres choses ," ose t-elle répondre !!! Allez, je sais bien qu'elle a été élevée dans un couvent mais quand même ! Ah, il est fort ce Molière, très fort ! Et sous une apparente simplicité se cache là quelque chose de mordant, de féroce. Qu'on vienne après me dire que Molière, "c'est trop gnan gnan !"

Lien : http://www.lydiabonnaventure..
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Bilan rapide : qu'avais-je lu de Molière avant L'École des Femmes ?
- Les Fourberies de Scapin au collège,
- Dom Juan au lycée,
Autant dire rien.
Il était temps de me réveiller et de combler la lacune. Que dis-je ? le fossé, le ravin, le canyon, le gouffre !
Et pour commencer, cette pièce bien divertissante qui, si j'en crois la préface, apporte la nouveauté de la satire sociale qu'elle mélange à la farce pour créer la Comédie classique. Grands Dieux, voilà un départ intéressant !
Satire et farce sont en effet habilement mélangées pour faire rire et pour agacer. Les moments marrant sont nombreux. Par exemple quand Georgette et Alain, les serviteurs d'Arnolphe, s'envoient des alibis de surbooking parce qu'ils ont la flemme d'aller ouvrir la porte à leur maître et se précipitent à coup de « prems » et « moi d'abord » quand ce dernier les menace de leur couper les vivres.
La satire, c'est avant tout sur le personnage d'Arnolphe qu'elle tombe comme le marteau de Thor sur l'enclume de la stupidité. le gars a une vision de la place de la femme dans la société probablement assez commune à l'époque (et probablement assez commune de nos jours si on regarde sous les tapis de tous les peuples) : en gros la meilleure femme est une nouille inculte qui « réfléchit » trois jours avant de répondre « bonjour », qui fabrique et gère les mômes, et qui obéit au doigt et à l'oeil comme un bon toutou à son seigneur et maître de mari (en faisant où on lui dit de faire par-dessus le marché).
Le mec, qui veut se marier, a donc prévu son coup de longue date. Il a fait élever Agnès, celle qu'il a unilatéralement désignée comme sa promise, comme une oie blanche pas fut fut qui ne voit jamais personne pour éviter les tentations.
Mais le destin va se charger de remplir le cerveau vide par l'intermédiaire de l'expérience immédiate, l'amour du bel Horace servant de catalyseur. Les capacités innées d'Agnès sont suffisantes pour que son cerveau prenne les bonnes décisions, au grand dam d'Arnolphe qui n'a de cesse de la cloîtrer et de lui seriner ses devoirs.

Les multiples plans d'Arnolphe qui tombent en quenouille sont terriblement amusants. Tout au plus ai-je senti un peu de patinage à l'acte IV. La satire sur le genre de personnage qu'Arnolphe incarne tape juste, suffisamment pour que la pièce ait provoqué à l'époque de sacrés remous. Premier tir de Molière : touché, sous-marin coulé. Au navire suivant. Ce faisant, Molière défend l'idée de la femme érudite (et sexy je suppose, tant qu'à faire) qui rend la vie de l'homme incroyablement plus intéressante. Je crois que Molière aurait aimé les Salons du 18ème siècle.

Molière termine sa pièce par un coup de théâtre à base de coïncidence impossible, et tout finit bien. Mais l'essentiel est passé. L'essentiel est la caricature Arnolphe, tout comme dans l'Avare, l'essentiel est Harpagon lui-même.
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On ne dresse pas une jeune fille ou une femme comme un chien ;
Molière nous le fait savoir, tous les Arnolphe de la Terre sont des impertinents, des malotrus, des « machos » et le mot est faible.
.
« ARNOLPHE (à Agnès):
Votre sexe n'est là que pour la dépendance:
Du côté de la barbe est la toute-puissance.
Bien qu'on soit deux moitiés de la société,
Ces deux moitiés pourtant n'ont point d'égalité:
L'une est moitié suprême et l'autre subalterne;
L'une en tout est soumise à l'autre qui gouverne « 
.
Molière est le premier féministe !
.
.Le 26 décembre 1662, la troupe crée L'École des femmes, quatrième grande comédie de Molière, dans laquelle il bouscule les idées reçues sur le mariage et la condition des femmes.
Arnolphe est un vieux célibataire qui a peur d'être cocu s'il épouse une femme ; donc il a placé sa filleule Agnès dans un couvent pour qu'elle ne soit pas trop informée des choses du sexe, afin de pouvoir la manipuler, de l'épouser sans inconvénients, et de lui inculquer les règles entre époux à son goût à lui.
Mais survient un jeune homme qui fait la cour à Agnès.
C'est alors que Molière tourne le vieux grigou en ridicule en utilisant ses armes favorites : la farce et le quiproquo.
.
Que veut montrer Molière dans son art, au XVIIè siècle ?
.Avec L'École des maris (1661) et plus encore L'École des femmes (1662), Molière se moque des tyrans domestiques et plaide en faveur de l'éducation des femmes, d'où « L'école des femmes » ; c'est un féministe avant l'heure.
Cette pièce soulèvera des commentaires de la part des spectateurs offusqués et des précieuses, et Molière y apportera une belle réponse dans une autre pièce :
« La critique de l'école des femmes ».
.
Sans être « libertin » au sens moderne du mot ni porteur d'un système philosophique précis, Molière apparaît comme un homme qui « s'est affranchi des règles de la société et de la tutelle de l'Eglise.
.
Je trouve que la pièce « patine » dans la scène 1, mais s'envole ensuite : une bonne leçon à tous les machos de France et de Navarre, à commencer par le roi Louis, dont la pauvre Marie-Thérèse, qui fut cocue à souhaits, et dont on n'a jamais entendu l'opinion.
Mais Molière a toujours les faveurs du roi ; comme quoi, sous forme humoristique, beaucoup d'idées arrivent à s'exprimer !
.
A quatre siècles d'intervalle, oserai-je une comparaison ?
On peut rapprocher le théâtre de Mouawad ( « L'Incendie ») de la position de Molière dans « L'école des femmes » ;
Même si l'un a lieu en occident en 1662, l'autre en orient en 1975.
La femme soumise en France au XVIIè siècle peut-elle être comparée à la femme soumise en orient au XXè siècle ?
Même si les conditions sont différentes, on peut répondre par l'affirmative.
En effet, en France au XVIIè siècle, la femme est constamment sous tutelle ;
en orient au XXè siècle aussi.
Une femme qui sort du cadre sous Louis XIV est jugée péjorativement ;
Une femme qui sort des traditions au Liban moderne peut même être lapidée.
.
Avec ces constats, que peut-on dire que, sur la condition de la femme par rapport à la religion ?
Les musulmans ont-ils, sur ce plan, quatre siècles de retard sur l'occident ?
Au XVIIè siècle, la religion catholique était en pleine possession de ses moyens :
Molière se moquait des dévots, et qui là, critique humoristiquement l'enfermement dans un cloître d'Agnès, s'est même fait interdire provisoirement quelques pièces malgré l'appui du roi.
Chez Mouawad, on constate que les us et coutumes musulmanes ne sont pas en faveur de la femme.
La religion en général, semble être pour beaucoup dans la déconsidération de la femme !
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Lorsque Molière fait représenter l'Ecole des femmes en 1661, les spectateurs sont littéralement déroutés car ils n'avaient jamais vu une pièce de cette forme. Il faut savoir qu'à leur époque, la comédie était surtout composée de farces avec des plaisanteries grossières, du comique de situation ou encore la commedia dell'arte avec des personnages stéréotypés et beaucoup d'improvisation. Ainsi, pour la première fois, le public découvre une comédie en cinq actes et en alexandrins. Avec cette pièce, Molière veut donner à la comédie ses lettres de noblesse : il veut en faire un genre sérieux qui porte une réflexion morale et sociale. Pour répondre aux critiques, Molière décide alors d'écrire une petite comédie en un acte : la Critique de l'Ecole des Femmes.
Bien qu'elle fasse partie des premières oeuvres de Molière, l'École des femmes est sans conteste l'un des meilleurs ouvrages de l'auteur. Préfigurant en quelque sorte le vaudeville à travers les mésaventures cocasses d'Arnolphe et ses deux valets, la pièce est, comme toujours, un plaidoyer à l'amour sincère et non intéressé, non pas financièrement mais bien physiquement ici, ce qui en fait une des pièces les plus sexuelles de Molière. C'est surtout de la comédie pure et dure, même si en vers, quand Arnolphe tente par tous les moyens d'empêcher l'union de sa protégée avec un jeune homme - et, par extension, facilitant leur rapprochement plutôt que leur éloignement. Mené à un rythme effréné, avec cette pointe de critique des mariages arrangés qu'affectionnait Molière, L'École des femmes est un vrai moment de plaisir parfaitement équilibré et emblématique d'une oeuvre qui a su traverser les époques à titre méritoire.
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Ce qui me fait peur du mariage sont les femmes mariées! Une réflexion d'un homme moderne, Alfie (interprété par Jude Law) qui prolonge cette peur du mariage et de la femme infidèle que sentait cet autre héros moliéresque.

Comment choisir sa femme, sans devenir un cocu après? Arnolphe (bizarre, c'est comme une version grotesque du nom d'Alfie) a cru savoir la bonne solution: élever une fillette jusqu'à l'âge mûr puis se marier avec elle! Une idée que certains, et même à notre époque, ont tenté d'exécuter!

Personnellement je considère L'école des femmes comme la première grande pièce de Molière, elle marie farce et grande comédie (au sens classique). Molière exploite tous les types de comique: de situation (le tuteur et l'amant se confient l'un à l'autre), de mots (beaucoup de jeux de mots et de mots à double sens...), de gestes (issu de la farce). En tout cas, on éclate de rire avec tous les quiproquos et le sérieux d'Arnolphe dans les situations les plus hilarantes, les serviteurs niais...

Bien évidemment, le talon d'Achille pour Molière, c'est le dénouement (c'est ce qu'on dit), mais chez ce grand dramaturge, ce qui importe c'est le déroulement de la pièce.

La première que j'ai lue de Molière et celle qui m'a poussé à lire toutes les autres grandes pièces de Molière.
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Citations et extraits (130) Voir plus Ajouter une citation
ALAIN:
C'est que la jalousie... entends-tu bien, Georgette,
Est une chose... là... qui fait qu'on s'inquiète...
Et qui chasse les gens d'autour d'une maison.
Je m'en vais te bailler une comparaison,
Afin de concevoir la chose davantage.
Dis-moi, n'est-il pas vrai, quand tu tiens ton potage,
Que si quelque affamé venait pour en manger,
Tu serais en colère, et voudrais le charger?

GEORGETTE:
Oui, je comprends cela.

ALAIN:
C'est justement tout comme:
La femme est en effet le potage de l'homme;
Et quand un homme voit d'autres hommes parfois
Qui veulent dans sa soupe aller tremper leurs doigts,
Il en montre aussitôt une colère extrême.

(Acte II, scène 3)
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Je suis lycéenne et je ne comprends pas pourquoi depuis le collège, on nous abreuve de Molière.
Étudier une œuvre pour la culture, pour avoir un aperçu... D'accord, mais pourquoi tous les ans une pièce de Molière est-elle comprise dans le programme de français? Et vraiment tous les ans! Est ce que nos vieux barbons qui font les programmes de français connaissent autre chose?
Car, malheureusement l'humour employé laisse les jeunes de marbre, trop différent de ce que l'on voit tous les jours à la télé. Pour les petits lecteurs, c'est assez "lourd" à avaler, beaucoup de mots compliqués ou qui ont changés de sens.
Aujourd'hui Molière a plus tendance à dégoutter les jeunes de la lecture. Ce serait plus utile d'essayer d'intéresser les jeunes à la lecture (au collège surtout) avec des œuvres plus facile d'accès pour ensuite pouvoir faire étudier les classiques.
Une réalité: dans ma classe (35 élèves + parmi tous les gens que je connaissais), j'étais la seule à lire des livres. Pour mes camarades, la lecture consistait à lire les œuvres au programme, ou le résumé sur internet pour les moins motivés. En dehors de l'école, aucun livre, et très très peu de magazine avec du texte (science et vie junior, je bouquine, phosphore). Par conséquent, essayait d’intéresser des petits lecteur qui n'ont pas le cinéma dans la tété avec Molière ne marche pas. Ou alors que pour les gosses qui vont au théâtre toutes les semaines et au musées tous les mois, ce genre là.

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AGNÈS.
Il m'a pris le ruban que vous m'aviez donné.
À vous dire le vrai, je n'ai pu m'en défendre.

ARNOLPHE, reprenant haleine.
Passe pour le ruban. Mais je voulais apprendre
S'il ne vous a rien fait que vous baiser les bras.

AGNÈS.
Comment ? Est-ce qu'on fait d'autres choses ?

ARNOLPHE.
Non pas.
Mais pour guérir du mal qu'il dit qui le possède,
N'a-t-il point exigé de vous d'autre remède ?

AGNÈS.
Non. Vous pouvez juger, s'il en eût demandé,
Que pour le secourir j'aurais tout accordé.

ARNOLPHE.
Oui, c'est un grand plaisir que toutes ces tendresses,
Ces propos si gentils et ces douces caresses ;
Mais il faut le goûter en toute honnêteté
Et qu'en se mariant le crime en soit ôté.

AGNÈS.
N'est-ce plus un péché lorsque l'on se marie ?

ARNOLPHE.
Non.

AGNÈS.
Mariez-moi donc promptement, je vous prie.

ARNOLPHE.
Si vous le souhaitez, je le souhaite aussi,
Et pour vous marier on me revoit ici.

AGNÈS.
Est-il possible ?

ARNOLPHE.
Oui.

AGNÈS.
Que vous me ferez aise !

ARNOLPHE.
Oui, je ne doute point que l'hymen ne vous plaise.

AGNÈS.
Vous nous voulez, nous deux...

ARNOLPHE.
Rien de plus assuré.

AGNÈS.
Que, si cela se fait, je vous caresserai !

ARNOLPHE.
Hé ! La chose sera de ma part réciproque.

AGNÈS.
Je ne reconnais point, pour moi, quand on se moque.
Parlez-vous tout de bon ?

ARNOLPHE.
Oui, vous le pourrez voir.

AGNÈS.
Nous serons mariés ?

ARNOLPHE.
Oui.

AGNÈS.
Mais quand ?

ARNOLPHE.
Dès ce soir.

AGNÈS, riant.
Dès ce soir ?

ARNOLPHE.
Dès ce soir. Cela vous fait donc rire ?

AGNÈS.
Oui.

ARNOLPHE.
Vous voir bien contente est ce que je désire.

AGNÈS.
Hélas ! Que je vous ai grande obligation,
Et qu'avec lui j'aurai de satisfaction !

ARNOLPHE.
Avec qui ?

AGNÈS.
Avec..., là.

ARNOLPHE.
Là... : là n'est pas mon compte.
À choisir un mari vous êtes un peu prompte.
C'est un autre, en un mot, que je vous tiens tout prêt, Et quant au monsieur, là. Je prétends, s'il vous plaît,
Dût le mettre au tombeau le mal dont il vous berce,
Qu'avec lui désormais vous rompiez tout commerce ;
Que, venant au logis, pour votre compliment
Vous lui fermiez au nez la porte honnêtement ;
Et lui jetant, s'il heurte, un grès par la fenêtre,
L'obligiez tout de bon à ne plus y paraître.
M'entendez-vous, Agnès ? Moi, caché dans un coin,
De votre procédé je serai le témoin.

AGNÈS.
Las ! Il est si bien fait ! C'est...
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ARNOLPHE (à Agnès):
Votre sexe n'est là que pour la dépendance:
Du côté de la barbe est la toute-puissance.
Bien qu'on soit deux moitiés de la société,
Ces deux moitiés pourtant n'ont point d'égalité:
L'une est moitié suprême et l'autre subalterne;
L'une en tout est soumise à l'autre qui gouverne
(Acte III, scène 2)
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Chrysalde
(...)
Quoi qu'on en puisse dire, enfin, le cocuage
Sous des traits moins affreux aisément s'envisage;
Et, comme, je vous dis, toute l'habileté
Ne va qu'à le savoir tourner du bon côté.

Arnolphe
Après ce beau discours, toute la confrérie
Doit un remerciement à Votre Seigneurie;
Et quiconque voudra vous entendre parler
Montrera de la joie à s'y voir enrôler.

Chrysalde
Je ne dis pas cela, car c'est ce que je blâme;
Mais, comme c'est le sort qui nous donne une femme,
Je dis que l'on doit faire ainsi qu'au jeu de dés,
Où, s'il ne vous vient pas ce que vous demandez,
Il faut jouer d'adresse, et, d'une âme réduite
Corriger le hasard par la bonne conduite.

Arnolphe
C'est-à-dire dormir et manger toujours bien,
Et se persuader que tout cela n'est rien.

Chrysalde
Vous pensez vous moquer; mais à ne vous rien feindre,
Dans le monde je vois cent chose plus à craindre,
Et dont je me ferais un bien plus grand malheur
Que cet accident qui vous fait tant de peur. (...)
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MOLIÈRE – Variations sur les fêtes royales, par Michel Butor (Genève, 1991) Six cours, parfois coupés et de qualité sonore assez passable, donnés par Michel Butor à l’Université de Genève en 1991.
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