Après le négoce de pierres précieuses et de trafic d'armes, notre personnage se met en tête de transporter et vendre du hachich.
Nous voila partis dans un voyage singulier fait de mers déchainées, de voleurs, de corruption et de magouille.
Encore une fois les paysages sont magnifiques, on ressent la chaleur, on respire la poussière, on sent les fleurs et on goute les fruits.
La plume est toujours aussi élégante et le récit détaillé.
Un voyage du dèbut du 20ème siècle, farfelu et dépaysant.
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Il faut lire Monfreid. Tout lecteur pour qui le mot aventure fait se dilater sa pupille, battre des paupières et froncer les sourcils, doit lire Monfreid, archétype de l'aventurier aux mille facettes, conteur d'histoires ou ses propres expériences composent souvent la trame de fond. Ici, dans la croisière du hachich, Monfreid est dans son élément, car les lois qu'il respectait étaient surtout les lois non écrites, les lois de la mer entre autres.
Dans cette aventure de mer, Henry de Monfreid entreprend de passer de Grèce à Suez un important chargement de chanvre. On le suit dans cette histoire de contrebande, depuis l'achat du hachich jusqu'à son retour à Djibouti, qui fut un de ses nombreux ports d'attache. Source d'inspiration pour Hugo-Pratt, Henry de Monfreid compte parmi les derniers aventuriers de la mer, un peu pirate, aux multiples talents.
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Je n'ai pas le coeur à déguster mon café et la splendeur du soleil levant, ce tapis d'or et de rose qui, chaque matin, se déploie sur le désert et les montagnes me semble une cruelle ironie pour le deuil et la tristesse que je porte en mon coeur.
Le soleil est maintenant installé dans le ciel. La mer s'étend, calme et brillante, désespérément unie dans le champ de ma jumelle, sans rien qui ressemble à la tête d'un nageur...
Je ne puis croire, cependant, à une fin aussi bête pour Abdi. Lui, mourir noyé ? Mais c'est absurde. Il est bien resté une fois cinquante-six heures dans l'eau, sans trouver la chose extraordinaire. Nous nous rassurons mutuellement en examinant toutes les chances qu'Abdi peut avoir ; et puis, l'activité du jour, la vie intensive de la rade autour des vapeurs, tout cela fait diversion...
(extrait du chapitre XXVIII " On croise le fer")
Stavro a beau m'être sympathique, se dire contrebandier chevaleresque, homme de parole, après tout, il est d'abord un homme d'argent... un homme tout court, cela suffit. L'aubaine serait trop belle et la tentation bien dangereuse s'il avait en son pouvoir un stock de marchandises aussi important. Il ne faut jamais tenter le diable... Et puis... je crois avoir trouvé la brèche, la fissure par où je pourrai m'évader. Je viens d'avoir une idée...
Je suis à l'extrême avant du navire pour ne rien voir de lui, de son odieux modernisme, pour ne rien sentir de la puanteur qu'il laisse après lui, avec la fumée du charbon et les détritus des souillardes. Je vois seulement l'étrave fendre ce tapis de soie bleue dans des rouleaux d'écume blanche, tout comme le faisaient les trirèmes antiques, et cette eau profonde est si pure qu'elle semble sacrée.
Le tabac est défendu à ces malheureux. Je leur jette les paquets, je sais qu'ils se les partageront, car les êtres humains captifs se sentent frères dans la commune misère.
C'est seulement dans l'enfer d'un bagne, quand l'homme a laissé tout espoir d'exploiter, d'asservir, ou d'opprimer les autres à son profit, c'est alors seulement qu'il pense à la fraternité : elle lui apparaît comme le remède à sa détresse, car en donnant peu il recevra beaucoup.
Vidéo de Henry de Monfreid