A la simple évocation du nom de
Lovecraft, nous viennent en tête une foule de représentations aussi oniriques que monstrueuses. La mythologie lovecraftienne que l'on célèbre pour sa singularité a marqué les esprits autant que son auteur pour la complexité de sa pensée. le cosmos, la genèse des astres, la religion, la civilisation, la place de l'homme dans l'univers, la science, tous ces thèmes chers à l'auteur, sont disséqués dans cet essai passionné de
Cédric Monget. Ce dernier entend démontrer que le puritanisme de
Lovecraft tire son origine d'une réflexion philosophique puisée dans l'athéisme et le matérialisme. Cette étude se veut en effet, une "fenêtre ouverte sur ce point particulier de la pensée d'un auteur qui a tant donné à ses lecteurs." (extrait de l'introduction, p.7). S'appuyant sur les oeuvres de
Lovecraft, ses essais mais aussi sur ses correspondances et pour une grande part sur les études de
S.T. Joshi (
H.P. Lovecraft : a life et I am Providence the life and times of
H.P. Lovecraft),
Cédric Monget précise que son livre "ne s'attarde pas à condamner de façon anachronique, et pour se donner le beau rôle, certains traits jugés aujourd"hui déplaisants de la personnalité et de la pensée de
Lovecraft." (p.7). Non : celui qu'il décrit comme étant le dernier puritain avait développé, n'en déplaise à ses lecteurs, une philosophie très personnelle qui méritait certains approfondissements...
Toute subjective qu'elle soit, cette analyse s'intéresse à une facette méconnue de la pensée du gentleman de Providence. Ainsi, la "philosophie lovecraftienne" définie par
Cédric Monget repose t-elle sur quatre idées principales : primo, le matérialisme de
Lovecraft est l'un des fondements de son athéisme. Deuxio, son matérialisme n'est pas la raison unique de son athéisme (son rejet des religions en est aussi la cause). Tertio,
Lovecraft est un "puritain athée" (malgré son refus de la religion, il se soumet à la tradition). Quarto, l'attrait pour la fiction lovecraftienne découle de cet athéisme qui imprègne toute son oeuvre. Souhaitant par ailleurs mettre un terme à la légende tenace selon laquelle
Lovecraft aurait abandonné son conservatisme raciste en faveur du socialisme,
Cédric Monget s'efforce de rendre justice à l'écrivain américain en replaçant "l'athéisme de
Lovecraft dans son contexte biographique et sa dynamique intellectuelle." (extrait de la conclusion, p. 71). Court mais dense,
Lovecraft, le dernier puritain se destine particulièrement à un public initié : les multiples références aux correspondances et aux récits de
Lovecraft ainsi que les thèses étayées par
Cédric Monget (ex. le darwinisme lovecraftien inspiré de Haeckel ou le nitezschéisme lovecraftien) exigent de bonnes connaissances sur
Lovecraft et son oeuvre ainsi que quelques notions de philosophie pour une bonne appropriation de texte. Si ce n'est pas mon cas, cette lecture m'a tout de même apporté un regard différent sur l'homme et sa création, notamment par rapport au recueil
Les autres dieux et autres nouvelles que je n'avais probablement pas apprécié à sa juste valeur. L'univers et la philosophie de
Lovecraft étant complexes, l'athéisme de HPL ici démontré, participe pour beaucoup selon moi d'une meilleure compréhension de son travail. Contrairement à
Masques dans le miroir de
William Schnabel qui m'avait agacé puis ennuyé malgré une thématique d'étude prometteuse (le double lovecraftien), l'ambition de cet essai me parait louableet le regard de
Cédric Monget apporte une réflexion éclairée sur la philosophie lovecraftienne. Lecture recommandée aux inconditionnels de
Lovecraft et autres curieux.
Lien :
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