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EAN : 9782020006187
244 pages
Seuil (01/10/1973)
3.79/5   144 notes
Résumé :

"Tout ce qui existe dans l'Univers, disait le philosophe grec Démocrite, est le fruit du hasard et de la nécessité."

Grande figure parmi les pionniers de la biologie moléculaire, le Prix Nobel Jacques Monod (1910-1976) montre la fécondité de cette dualité pour comprendre les grandes problématiques de la biologie - origine de la vie ou évolution des espèces - et saisir les enjeux de la génétique moderne.

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Ce livre suscite en moi des sentiments contrastés. J'y trouve à la fois la défense d'idées (en biologie, en sciences, et en philosophie « tirée » des sciences naturelles) avec lesquelles je suis en accord, comme le matérialisme, et l'affirmation du rôle majeur du hasard dans l'évolution des espèces, mais pour autant, je trouve qu'il apporte une grande confusion à ces idées, que certaines affirmations de ce livre sont au mieux péremptoires, et au pire, malhonnêtes (et peut-être pire encore...)
Dans ce livre, tout d'abord, Jacques Monod propose de « lever » le paradoxe entre l'objectivité de la nature, qui est soumise au hasard et n'est donc gouvernée par aucune « finalité », et le fait, dit-il, que les organismes vivants soient dotés d'un « projet » : ce qu'il appelle la téléonomie. le problème, est que c'est lui-même qui crée la paradoxe en reprenant cette idée de téléonomie à son compte.
Bon. Soit. Il s'agissait à l'époque de mener un combat, et il s'agit peut-être d'une manière d'en discuter. Mais l'autre problème du livre, et c'est plutôt là que se situe le paradoxe, c'est que le combat à mener (et qu'il mène) était contre une vision trop mécaniste du « programme génétique » excluant le hasard, mais Monod se positionne justement comme un partisan de la vision mécaniste (contre une vision dialectique), et pourtant, il affirme avec force la place du hasard dans l'évolution ! Bien que son livre soit supposé éclaircir le rapport entre le hasard et la nécessité, pour moi, son propos y ajoute de la confusion !
Notons aussi que l'idée de « téléonomie » a complètement disparue du vocabulaire de l'évolution, car aucun organe ni aucune fonction ne nécessite d'explication de nature « téléonomique ». (Lamarck était sorti par la porte des premières tentatives d'explication de transformation des espèces, avec la téléonomie, il revenait en quelque sorte par la fenêtre...).
Par contre, sa manière de s'en prendre au raisonnement dialectique, est extrêmement malhonnête, je trouve : il attribue à Marx et Engels des choses qu'ils n'ont jamais écrites (en gros, « la finalité de l'évolution, c'était l'homme ») pour dire que « le matérialisme dialectique a failli ». Petit problème, Mr Monod : ni Marx ni Engels ne se sont jamais définis comme « matérialistes dialectiques ».
D'ailleurs, il avoue lui-même que cette appellation et ses développements ultérieurs sont le fait des « épigones », c'est-à-dire, le fait du stalinisme (qui, entre autres dégâts incommensurables, à fait du marxisme un dogme autoritaire), et puis, encore mieux, il dit même « qu'on peut trouver dans les écrits de Marx et Engels le contraire »... des propos qu'il leur prête !
Je m'interrogeais sur ces procédés et sur le pourquoi de la chose (d'ailleurs, peu argumentée) quand j'ai découvert que Jacques Monod avait été membre du PCF. Ah ! Un règlement de compte avec ses anciens camarades « matérialistes dialectiques » ? (voir page 59, où il a l'air d'avoir en travers de la gorge les propos de Mr Althusser « dans son sévère commentaire de ma leçon inaugurale au Collège de France » !) En tous cas, ce n'était pas la peine de jeter le bébé avec l'eau du bain...
Monod défend donc une conception matérialiste, mais mécaniste, « cartésienne ». « La cellule est une machine », dit-il. (Pour son collègue François Jacob, co-récipiendaire du Nobel, au contraire, le vivant fonctionne de manière dialectique... il y a dû avoir des discussions très animées entre eux !). Cela dit, dans tous ces passages où Monod se recentre sur le sujet de la biologie moléculaire (le rôle des enzymes, les rétro-actions, le rôle du hasard, etc.), là, ok, le livre est très intéressant (relativement aux connaissances de l'époque, et bien que la plupart des biologistes aujourd'hui y lisent bien un fonctionnement dialectique et non purement mécanique).
Mais attention, passé les deux tiers du livre, ça re-déconne !
Cela commence par une affirmation selon laquelle, pour les australopithèques (qu'à l'époque on appelle Australanthropes), le projet de tuer de grosses proies « aurait exigé l'emploi d'un langage » (p.170) Ah bon ? Les loups ou les lionnes nécessitent-ils et elles un langage pour chasser ? Non. (Bien qu'il s'en défende, c'est la conclusion logique de son histoire de téléonomie, au bout du compte, on en revient à Lamarck : la fonction crée l'organe ! )
Plus loin (p.206 à 209), attention, ça décoiffe, là on a carrément droit à des propos qui frisent l'eugénisme : il évoque « les dangers de dégradation génétique dans les sociétés modernes », il utilise le terme de « quotient d'intelligence », et cela, comme un caractère qui serait transmissible... (Ah ? Depuis quand l'intelligence serait-elle héréditaire ?) Il parle aussi de la sélection naturelle qui « défendait l'espèce contre la dégradation », et termine ce passage par une magnifique prédiction sur les manipulations du génome : « l'échelle microscopique du génome interdit pour l'instant et sans doute à jamais de telles manipulations ».
Pas mal pour un prix Nobel !
Bon, je préfère abréger. Dommage qu'un « essai sur la philosophie naturelle » se termine en telle eau de boudin...
En tous cas, j'ai compris avec ce livre pourquoi on parle peu de Monod dans les essais ultérieurs sur l'évolution ou sur les idées philosophiques que l'on peut tirer de l'histoire naturelle, et pourquoi les chercheurs préfèrent en général citer François Jacob quand il s'agit d'évoquer leur apport collectif (très important) à la biologie.
« Avec chaque niveau d'organisation, apparaissent des nouveautés, tant de propriétés que de logiques. (…) Une dialectique fait s'interpénétrer les contraires et s'engendrer la qualité et la quantité. »
François Jacob dans « La logique du vivant »
Ah... un peu de dialectique... ça va mieux !
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Biologiste et prix Nobel de médecine en 1965, Jacques Monod était aussi philosophe et ami intime d'Albert Camus. Dans cet ouvrage de référence en vulgarisation scientifique et connaissance du monde, il révèle sa conviction « que la vie et l'évolution sont dépourvus d'un but ultime ». L'auteur y développe le postulat selon lequel la nature est objective et non projective, et démontre que les facteurs de régularité et de répétition qui qualifient d'ordinaire les objets artificiels, s'appliquent aussi à l'échelle microscopique, au sein des organismes vivants.
Certains on contesté lors de la parution de ce livre un point de vue extrémiste. Jacques Monod, athée convaincu, est allé au bout de ses idées matérialistes en refusant toute part de divin dans la création du vivant et du monde qui nous entoure. Des scientifiques prendront d'autres chemins, comme par exemple Trinh Xuan Than dans La mélodie secrète. Ce livre est très bien écrit, il se veut sans doute plus philosophique que scientifique. Même si il est parfois très complexe à suivre et nécessite des bases solides en biologie moléculaire, il est à recommander pour comprendre l'impact qu'il a suscité lors de sa sortie en 1970, en prônant une vision du monde et de l'humain purement matérialiste, généralisant et extrapolant les conceptions darwiniennes de l'évolution.
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Ayant redécouvert par hasard un vieil exemplaire de cet ouvrage, j'ai voulu le relire. J'en avais gardé un souvenir ébloui. Je l'avais lu à l'adolescence, probablement vers la fin des année 70. A la relecture j'ai retrouvé la plume lisible et claire de Jacques Monod qui a un vrai talent de vulgarisateur scientifique. La plupart des connaissances biologiques dont il parle était à l'époque peu, voire pas du tout connues du grand public. Il a su les rendre tout à fait accessible. L'auteur a la conviction « que la vie et l'évolution sont dépourvus d'un but ultime » et cherche à démontrer que la nature est objective et sans projet, que l'on retrouve dans le vivant, à l'échelle microscopique, des facteurs de régularité et de répétition comme dans les objets artificiels. Son raisonnement m'avait paru éblouissant à l'époque. C'est sur ce point que j'ai été fortement déçue au point d'abandonner ma relecture, même si je partage son point de vue. Son raisonnement philosophique m'a paru fortement affaibli par des exemples pas très bien choisis (en plus il m'a semblé qu'il n'était souvent pas très difficile de trouver mieux). du coup cet essai m' a semblé bien moins fort et percutant que dans mon souvenir. Quel dommage !
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Mais quelle bourde ! Mais quelle gourde !
J'ai confondu Jacques Monod avec Théodore Monod, auteur de
« Méharées », livre que j'avais beaucoup apprécié.
Pour ma défense, je n'avais pas lu la quatrième de couverture, toute contente de ma découverte...
Alors, dans ce livre, je comprends tous les mots ( ou presque ), mais aucune des phrases !
Cet auteur , un des fondateurs de la biologie moléculaire, a reçu le prix Nobel de médecine en 1965.
Ses écrits ne sont pas du tout à ma portée...
Dommage pour moi !
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J'adore ce genre de petit livre, très dense et très synthétique, écrit par un grand scientifique ; celui ci m'a été suggéré par Babelio dans la rubrique suggestion, suite au classement du livre de Schrödinger (qu'est-ce que la vie?).
Bonne pioche !
A condition de lire lentement, en utilisant les schémas, sans hésiter à revenir en arrière et en prenant des notes, c'est particulièrement intéressant : il s'agit des fondamentaux de la biologie par les mécanismes chimiques entre molécules qui régissent tout le métabolisme de la construction du vivant, sur la base de 24 objets chimiques. C'est vertigineux !
Monod y fait part également, dans un style tres didactique, de sa position philosophique, résolument évolutionniste mais non déterministe.
Un grand pas pour la science française à l'époque (1970).
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Citations et extraits (24) Voir plus Ajouter une citation
« La pierre angulaire de la méthode scientifique est le postulat de l'objectivité de la Nature. C'est-à-dire le refus systématique de considérer comme pouvant conduire à une connaissance "vraie" toute interprétation des phénomènes donnée en termes de causes finales, c'est-à-dire de "projet". [...] Postulat pur, à jamais indémontrable, car il est évidemment impossible d'imaginer une expérience qui pourrait prouver la non-existence d'un projet, d'un but poursuivi, où que ce soit dans la nature. Mais le postulat d'objectivité est consubstantiel à la science, il a guidé tout son prodigieux développement depuis trois siècles. Il est impossible de s'en défaire, fût-ce provisoirement, ou dans un domaine limité, sans sortir de celui de la science elle-même. L'objectivité cependant nous oblige à reconnaître le caractère téléonomique des êtres vivants, à admettre que dans leurs structures et performances, ils réalisent et poursuivent un projet. Il y a donc là, au moins en apparence, une contradiction épistémologique profonde. Le problème central de la biologie, c'est cette contradiction elle-même, qu'il s'agit de résoudre si elle n'est qu'apparente, ou de prouver radicalement insoluble si en vérité il en est bien ainsi »
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C'est peut-être une utopie. Mais ce n'est pas un rêve incohérent. C'est une idée qui s'impose par la seule force de sa cohérence logique. C'est la conclusion à quoi mène nécessairement la recherche de l'authenticité. L'ancienne alliance est rompue ; l'homme sait enfin qu'il est seul dans l'immensité indifférente de l'Univers d'où il a émergé par hasard. Non plus que son destin, son devoir n'est écrit nulle part. A lui de choisir entre le Royaume et les ténèbres.
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Il faut ajouter enfin, et ce point est d’une très grande importance, que le mécanisme de la traduction est strictement irréversible. Il n’est ni observé, ni d’ailleurs concevable, que de "l’information" soit jamais transférée dans le sens inverse, c’est-à-dire de protéine à ADN.

Cette notion repose sur un ensemble d’observations si complètes et si sûres, aujourd’hui, et ses conséquences en théorie de l’évolution notamment, sont si importantes, qu’on doit la considérer comme l’un des principes fondamentaux de la biologie moderne.
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LES DEMONS DE MAXWELL
Ce célèbre théorème est l'une des sources des conceptions modernes relatives à l'équivalence entre l'information et l'entropie négative. Ce théorème nous intéresse ici en ce que les enzymes exercent précisément, à l'échelle microscopique, une fonction créatrice d'ordre. Mais cette création d'ordre, comme nous l'avons vu, n'est pas gratuite ; elle a lieu aux dépens d'une consommation de potentiel chimique. Les enzymes en définitive fonctionnent exactement à la manière du démon de Maxwell corrigé par Szilard et Brillouin, drainant le potentiel chimique dans les voies choisies par le programme dont ils sont les exécutants.
Retenons la notion essentielle développée dans ce chapitre : c'est grâce à leur capacité de former, avec d'autres molécules, des complexes stéréospécifiques et non-covalents, que les protéines exercent leurs Fonctions « démoniaques »...
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“ Mais, comme chacun sait, l'anticorps qui reconnait éléctivement une substance donnée, par exemple un motif stérique particulier à une certaine espèce bactérienne, n'apparait dans l'organisme (pour y demeurer pendant un certain temps) qu'après que celui-ci en a fait, au moins une fois l'expérience (par la vaccination, spontanée ou artificielle)... (...) Or il est établi aujourd'hui que la structure de l'anticorps ne doit rien à l'antigène : au sein de l'organisme des cellules spécialisées, produites en grand nombre, possèdent la propriété – unique – de jouer à la roulette sur une partie, bien définie, des segments génétiques qui déterminent la structure des anticorps. »
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