Notre vulnérabilité face à des “pestes” est au coeur de la vision de Camus, qui voyait nos vies comme fondamentalement à la limite de ce qu'il appelait “l'absurde”.
Mais le fait de regarder en face l'absurde, et de le reconnaître comme faisant partie de nos vies, ne doit pas nous conduire au désespoir, mais plutôt nous permettre d'adopter une perspective “tragi-comique” sur nos vies.
Comme les habitants d'Oran, avant la peste, nous partons du principe qu'il est normal d'être bien-nourri, bien portant. Que nous avons “droit” au respect, à des aides, des allocations, des logements, l'éducation et la santé gratuites, et bien sûr à des traitements efficaces, des vaccins, en cas d'épidémie.
Tout accident est vécu comme une chose injuste, toute agression comme une atteinte intolérable à nos droits fondamentaux. Les Droits de l'Homme ne sont pas pour nous une chance, mais un dû, qui nous est accordé en vertu de notre naissance - bien que nous sachions que des milliards d'autres êtres humains, qui n'ont pas eu la chance de naître au même endroit que nous, en sont privés.
Cette vision naïve de l'existence entraîne des comportements que Camus détestait : dureté de coeur, obsession de la réussite, refus de la joie et de la gratitude, tendance à juger et à moraliser.
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