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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
La vierge néerlandaise de Marente de Moor traduit par Arlette Ounanian est mon premier livre lu dans la bibliothèque néerlandaise des belles éditions Les Argonautes et c'est un coup de coeur absolu.

Il se dégage de ce roman un charme foudroyant obsolescent qui m'a complétement captivée tout au long de ma lecture. Sur fond d'histoire et de drames, j'ai appris quelques règles d'escrime et surtout l'existence d'Hélène Mayer à laquelle je me suis intéressée.

Dans un huis-clos dramatique, j'ai été touchée par ses personnages pris dans les sangles de l'Histoire mais follement épris de l'instant même le plus évanescent.

En 1936, Janna âgée de 18 ans quitte Maastricht pour Aix la Chapelle afin de parfaire son apprentissage de l'escrime auprès de l'illustre grand maître, le baron allemand Egon von Bötticher.
Jacq, le père de Janna et Egon se sont connus pendant la première guerre mondiale au cours de laquelle Egon grièvement blessé et défiguré a été soigné par Jacq, médecin au front mais ils ne se sont plus revus depuis 20 ans.

Comme j'aime autant les personnages que le décor et les lieux, j'ai été immédiatement séduite par la demeure de Raeren à la fois austère et majestueuse, vieille gardienne solitaire du code chevaleresque à l'image de son hôte le baron Egon.

L'auteure Marente de Moor en seulement deux saisons, l'été et l'automne, les couleurs du roman, nous fait entrer dans un monde sensoriel, palpable et vivant qui se confronte aux secrets scellés des vieilles lettres dans les tiroirs d'une chambre fermée à clef.

La demeure comme ses habitants, Janna, Egon et le couple de domestiques Heinz et Léni vivent les derniers moments d'une époque sertis dans l'odeur de la cire, le parfum de la clématite enjambant le portail, le bruit des casseroles dans la cuisine enfumée.

L'écriture de l'auteure et narratrice tout en poésie et finesse, saisit l'instant voluptueux avant qu'il ne devienne souvenir, abandon. Destruction.
J'ai aimé le romantisme exacerbé de Janna, tout autant que sa droiture dans les jeux de la passion et de l'escrime.

Les bouleversements de l'histoire s'immiscent graduellement et presque sournoisement dans la demeure de Raeren servis par une galerie de personnages extérieurs inquiétants et réalistes.

Je me souviendrai longtemps de Janna, la jeune fille au fleuret, et d'Egon, le dernier baron de la cavalerie.

Ce roman d'une désuétude douceur irremplaçable m'a enveloppé de son charme magnétique qui traverse le temps par la magie de l'écriture de Marente de Moor.

J'ai hâte de lire la prochaine traduction aux éditions les Argonautes.


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Quelle atmosphère dans ce roman! Cela faisait longtemps que je n'avais pas lu quelque chose d'aussi troublant, à la fois onirique et comme ralenti, dans ce huis-clos campagnard où le monde extérieur parvient de manière assourdie, presque cotonneuse. Marene de Moor a une puissance d'imagination qui nous emporte très loin du réel, ce qui est déjà en soi vraiment plaisant. Dans le même temps, ce réel est évoqué avec la précision d'une lame: qu'elle parle d'escrime, de corps, de botanique, de nourriture, de vaches ou de chevaux, tout fait mouche, tout est sidérant de justesse.

Et puis il y a cette tension érotique entre Jana et son maître d'armes qui nous tient en haleine ! L'escrime, "l'art de ne pas être touché", la nourrit de manière très efficace. Cet ensorcellement sensuel où les amants s'expriment fleuret au poing m'a fait penser au "Bonheur dans le crime" de Barbey d'Aurevilly. On y retrouve le même romantisme noir, la même sensualité qui défie les lois d'une société décadente. Sauf qu'ici, c'est une très jeune fille palpitante et innocente qui est placée dans l'aventure et que c'est une femme qui écrit - ce qui rend le récit beaucoup plus touchant, à mon sens.

Les autres aspects, ésotérique, historique, m'ont moins attirée car je les trouve un peu emberlificotés sur la fin mais peu importe, le charme magnétique de ce roman a agi puissamment sur moi.
A lire absolument!
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Ce livre est de grâce et de gravité. L'immensité d'une littérature sans rivalité, tant son pouvoir est grandiose.
Janna est une jeune fille de dix-huit ans qui vit à Maastricht avec son père. Ce dernier envoie sa fille en Allemagne en Rhénanie-du-Nord à Aix-la-Chapelle afin de se perfectionner dans sa passion d'escrimeuse.
Janna est missionnée d'un pli de son père, afin de le remettre en main propre à Egon von Bötticher, maître d'armes.
Ces deux hommes se connaissent bien, trop même. Entre eux, le tumulte de la première guerre mondiale. le père de Janna était médecin durant la guerre. Il a soigné Egon. La cicatrice sur la joue de ce dernier est sa signature.
On ressent au travers de la missive, un double langage. Les non-dits résurgence, les effluves des tranchées ensanglantées. Les regards baissés, un blessé qui s'abandonne en confiance, dans les capacités d'un chirurgien. Réparer le visible, abolir les souffrances, soulager l'enfant redevenu.
Egon, épée en main foudroie ce passé qui le dévore subrepticement. Son visage est le reflet des tourments vifs encore, et de ses troubles du comportement.
Deux hommes qui se retrouveront au préalable en janvier 1915.
« L'image idyllique que je me faisais de mon maître avant de le rencontrer s'est vite effondrée. Elle s'était formée à partir de notre album de famille. Deux hommes, l'un l'air sévère, l'autre agité. C'est moi, avait dit mon père en pointant le doigt vers l'homme sévère. Et l'autre, dont on ne distinguait que la vieille capote déboutonnée et le chapeau en fourrure, lui, c'est ton maître. »
Von Bötticher est malgré ses démons intérieurs, un homme avec des convictions et au libre-arbitre avéré. Il organise dans la grande salle immense et glacée de son domaine, des combats de Mensur, pourtant interdits par le régime totalitaire. On ressent comme un pied de nez à l'adversité. Un contre-pouvoir dans l'antre même de Raeren. Janna prend ses marques dans cet espace à la masculinité très forte. Elle s'entraîne souvent seule. Avec son maître d'armes et professeur, d'une façon très perfectionniste comme si l'enjeu même d'un combat réel était de mise. Un face à face qui va la troubler et décupler ses qualités de combattante. Elle progresse, se jette corps et âme dans l'arène. Elle glane aussi dans cette vaste demeure éloignée de tout, le mystère qui magnétise cet antre. Il y a un secret. Janna n'est pas ici par hasard. Elle est le bouc-émissaire, mais de qui ? Janna est attirée par Egon. Elle pressent une part d'ombre à apprendre de lui. Ce qui le lie à son père. le corps enivré de désir, elle marche sur un fil ténu, sans aucune provocation, naturelle et spontanée, divinement féminine. L'initiation à l'amour peut-être, ou bien l'inaugural commencement de son aura de femme révélée.
Le récit à tiroirs est bouleversant et prenant. L'atmosphère, le magnétisme, cette capacité hors norme de produire un kaléidoscope, mouvementé et sentimental, historique et profondément humain.
Janna est troublée et déterminée dans sa gestuelle d'escrimeuse. Une guerrière-née, avide d'exutoire. Elle cherche dans chacune de ses postures d'escrimeuse à recoller les morceaux d'un puzzle dont son père tient en main la pièce maîtresse.
Ce roman est comme un film au ralenti. On aime les ombres qui se profilent et qui annoncent la teneur de ce grand livre. D'une maîtrise inouïe, on est de suite en plongée dans l'idiosyncrasie de l'entre deux-guerres, dans le réel d'une femme-enfant qui découvre l'émoi des maturités masculines. L'escrime est un rituel, une formidable passation des pouvoirs. L'identité d'un homme qui cherche la réponse à l'énigme de sa blessure. Lui, Egon qui a offert toute sa connaissance de maître d'armes pour les scènes de crime dans « Les Trois Mousquetaires ». Cet homme aux multiples facettes, dont le père de Janna le trouble encore dans cet infini des rappels pavloviens. Que vaut une cicatrice contre une blessure de l'âme insondable ?
« Ton père n'a jamais compris que mon esprit ne pouvait trouver la paix que dans la guerre. Il s'est penché pour cueillir une fleur sur la terre durcie. »
« Qu'est-ce- que c'est, un chez-soi ? »
Ce livre brillant, dévorant de perfection et de maîtrise, est tout en mouvement et pétri de sentiments. On aime les séquences, les arrêts sur image, les signaux de Marente de Moor autrice de renom. Sensuel et magnétique, une page d'Histoire, encore vive et méfiante. Cette jeune fille en métamorphose, rebelle dans sa splendeur et encore innocente. Elle, jetée peut-être en pâture, dans une histoire de grandes personnes qui ne peuvent assumer ce qui fût de ce temps de guerre. Magistral. « La Vierge néerlandaise » est traduit du néerlandais par Arlette Ounanian. Publié par les majeures Éditions Les Argonautes.

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L' été 1936, Janna est une jeune fille de dix-huit ans passionnée de fleuret, comme la célèbre Hélène Mayer que vous voyez en couverture. Vivacité et détermination caractérisent Janna : elle n'hésite pas à se rendre en Allemagne, de l'autre côté de la frontière néerlandaise pour suivre des cours de fleuret chez un Grand Maître impressionnant et sévère, von Bötticher, avec qui son père a entretenu une correspondance mystérieuse.
Egon von Bötticher vit sur un austère domaine rhénan au milieu d'une nature foisonnante, aime les chevaux, les combats à l'arme blanche et vit selon le code d'honneur des hussards. Janna s'éprend de lui, vit intensément son premier amour pour cet homme qui appartient déjà à un monde finissant.
En lisière de son domaine du Raeren d'autres règles émergent, l'idéologie nazie affermit son emprise malfaisante sur la société en instaurant entre autres le KdF (la force par la joie), en propageant ses doctrines raciales et en interdisant progressivement les combats d'honneur. le code d'honneur si cher à l'ancienne noblesse prussienne coexiste bien mal avec l'assujettissement obligé à la personne du Führer. La Mensur, (duel à l'arme blanche entre jeunes gens, sorte de rite de passage des pays germaniques vers la masculinité) qui permet de montrer son absence de peur sera interdite pour ces raisons.
Ce roman parcourt les lignes de ruptures et de rapprochement : entre la jeune fille et le sombre hussard, entre les Néerlandais neutres et les Allemands combattifs, entre les jumeaux Siegbert et Friedrich qui se recherchent et s'affrontent.
Il en émane un charme particulier dû à cette figure féminine qui accepte la vie et les conséquences de ses choix avec légèreté et sensualité. Marente de Moor crée avec brio une atmosphère de roman gothique en décrivant ce manoir glacial et sépulcral où Janna tente de percer le mystère d'Egon en subtilisant sa correspondance et s'immisçant dans son passé.
Cette première publication de la Maison d'édition les Argonautes est un voyage érudit et captivant dans un temps et un espace proches, cette ouverture vers nos voisins européens, cette « exploration de notre continent » est tout simplement délicieuse.
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Janna, en 1928, découvre l'escrime en même temps que Hélène Mayer, jeune juive allemande médaille d'or, que le IIIème Reich invitera à rejoindre l'équipe allemande aux jeux de Berlin afin de donner une caution aux CIO.
Cette année-là, en 1936, son père, médecin néerlandais, l'envoie parfaire son entraînement auprès d'un maître d'armes allemand qu'il a soigné pendant la première guerre. von Bötticher n'est qu'à 40 km, tout près d'Aix-la-Chapelle, pourtant les deux hommes n'ont pas gardé contact. Janna comprend vite qu'un contentieux les oppose, et se sent partagée entre la loyauté à sa famille, son attirance irrépressible pour son professeur, et son envie de ressembler à son modèle, Hélène Mayer, libre et indépendante.
Sur fond de montée du nazisme, dans une atmosphère rythmée par les leçons d'escrime en compagnie de deux jumeaux infantiles et mystérieux, Janna effectue un voyage sans retour dans le monde adulte, la découverte de la virilité autoritaire, mais aussi dans une sensualité qui englobe ses propres sensations sexuelles comme gustatives et esthétiques. L'effondrement d'un monde accompagne celui de son innocence, pour laisser place à une réalité âpre et sans espoir.
Le style poétique et sensuel de Marente de Moor fait merveille pour nous donner à voir, sentir, palper chaque facette de l'ambiance et des sentiments de Janna. Malgré la dureté parfois escamotée de certaines situations, je suis sous le charme de ce premier ouvrage des toutes nouvelles éditions Les Argonautes !
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