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Critique de boudicca


Considéré comme LE chef d'oeuvre de Michael Moorcock (auteur pourtant davantage réputé pour son célèbre « Cycle d'Elric »), « Mother London » est un roman incontestablement ambitieux puisqu'à travers le récit de la vie de trois personnages, l'auteur entreprend de nous livrer un véritable portrait de la ville de Londres des années 1940 à 1980. le lecteur est donc invité à suivre la route de Mary Gasalee, David Mummery et Josef Kiss, trois protagonistes atypiques souffrants de troubles psychologiques qui se manifestent par des voix inconnues résonnant sans arrêt dans leur tête. Mais sont-ils vraiment fous ? Et si ces voix n'étaient pas le fruit de leur imagination mais les échos de la ville elle-même et des habitants qui la peuplent ? Dès les toutes premières pages, Moorcock déstabilise son lecteur qui a bien conscience qu'il va devoir redoubler d'attention et de patience pour bien comprendre là où veut nous emmener l'auteur. Et pourtant, même ces efforts ne suffisent parfois pas. Car si j'ai effectivement apprécié cette lecture, j'ai parfaitement conscience d'être passée à côté de la majorité du roman. Moorcock y tisse en effet une toile incroyablement complexe dans laquelle les personnages ne cessent de se croiser et de se recroiser, souvent sans qu'on ne s'y attendent, parfois sans qu'on y ait prêté attention avant qu'un détail ne vienne ne nous le rappeler. Il faut dire aussi que l'auteur accentue la difficulté en optant pour une construction complètement décousue chronologiquement qui rend les personnages souvent difficiles à suivre. Les références à l'histoire et à la géographie de la ville de Londres sont quant à elles trop nombreuses, trop pointues et seul un lecteur qui connaîtrait la capitale anglaise comme sa poche pour l'avoir arpentée depuis des années serait, à mon sens, à même de bien saisir la profondeur et l'ingéniosité du tableau que nous peint ici Moorcock.

Car il s'agit incontestablement d'un magnifique portrait qui est ici brossé de la ville de Londres que l'on regarde changer et évoluer bien davantage que les protagonistes eux-mêmes. L'auteur souligne notamment l'importance des conséquences du Blitz, non seulement les destructions matérielles mais aussi le traumatisme psychologique qu'il a entraîné chez la plupart des Londoniens après la fin de la guerre. Les chapitres consacrés à cette période sont d'ailleurs ceux qui m'ont le plus captivée, sans doute parce que je n'ai pu m'empêcher de penser alors aux romans de Connie Willis consacrés eux aussi à cette période spécifique de l'histoire de l'Angleterre. J'ai également été particulièrement sensible aux passages dédiés aux méthodes avec lesquelles nos trois protagonistes ont pu être traités tout au long de leur vie pour leur « folie ». Fonctionnement des asiles, médicaments prescrits et leurs effets parfois dramatiques, condescendance des médecins envers leurs patients, expérimentations douteuses envisagées..., les détails dont fourmillent l'ouvrage témoignent là encore du colossal travail de recherche qu'a du entreprendre l'auteur afin de donner pleinement vie à sa création. Car au-delà des sujets déjà évoqués, l'auteur aborde également avec une minutie incroyable la question de l'évolution des styles musicaux dans les années 60-70, l'immigration et le racisme lattant dans certains quartiers, mais aussi la place des femmes ou encore les rapports entretenus entre les Londoniens et leurs souverains. Mais ce sont surtout des lieux que l'on découvre, des rues, des quartiers, des édifices et surtout des pubs qui possèdent chacun leur propre personnalité et dans lesquels Moorcock nous entraîne en fonction de l'humeur des personnages ou de l'importance de la scène qui va se jouer.

Michael Moorcock rend avec « Mother London » un magnifique hommage à cette ville de Londres qui, de décor, en vient à assumer le rôle de véritable protagoniste du roman. Difficile cela dit de toujours bien suivre l'auteur qui nous entraîne dans une toile complexe que je n'ai, pour ma part, pas toujours réussie à bien comprendre. Une lecture exigeante. Peut-être un peu trop...
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