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Citations sur Rue des rigoles (20)

[...] rien ne m'émeut plus que les larmes des autres. Les larmes sans destination de ces hommes ou ces femmes qui, parfois, sanglotent dans le métro ou à la terrasse d'un café sans que quiconque puisse deviner l'objet de leur tristesse, ni tendre la main à leur malheur. (p. 15)
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Aujourd'hui, c'est terminé. Il n'y a plus de marchandes de quatre-saisons dans la rue des Pyrénées. Les vieux vous diront qu'il n'y a plus de saisons non plus. Il n'y a plus que des marchands. (p. 46)
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Le XIXème puait mais, finalement, je crois que je préfère la sincérité de cette puanteur à l'hypocrisie déodorante du XXème siècle.
La merde qui sent la merde est moins pénible à renifler que la merde parfumée.
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Le billard n'était pas mon seul sport.
Étant moi-même un peu frappé, j'ai toujours eu l'esprit frappeur. C'était écrit que, jeune homme, je fasse de la boxe française, de la savate et de la canne d'assaut. Cela me valut de voir Penna monter sur le ring avec un collant de sa sœur. Cruelle erreur. Le boxeur français ne se produit jamais avec les jambes gainées de noir ajouré d'un motif à fleurs. Il ne se produit pas non plus sans slip sous le collant, comme Pater l'apprit à ses dépens.
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Conter fleurette , c'était bien beau , mais , quitte à étudier la botanique , j'était impatient d'effeuiller la marguerite et de cueillir la rose de la vie avant qu'un autre la cueille avant moi.
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Qu'est que vous voulez que j'y fasse ?si vous la trouvez trop dur, vous n'avez qu'a mettre du white spirit pour la diluer !
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Avant tout, l'école offre aux élèves deux biens inestimables: des copains d'école et, grâce au corps enseignant, un spectacle vivant de qualité, une troupe d'amuseurs dont le souvenir reste à jamais gravé dans les mémoires...
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Mes parents se déchiraient. Je n’en pouvais plus des portes closes, des cris, des pleurs, du corps à corps des douleurs, des nuits de garde, des tranchées de silence. Je pris l’habitude de dormir au bord du lit, sur le qui-vive, prêt à sauter dans mes habits. A gicler hors de chez moi. Chaque matin, une main d’angoisse me saisissait de l’intérieur et m’étranglait jusqu’au soir. Je n’avais pas la comprenette difficilette, mais l’école ne m’intéressait pas. A quoi bon apprendre à compter, puisque un plus un ne faisait pas deux mais trois malheureux. A quoi bon apprendre à lire si les livres ne disaient que guerre et guerre comme père et mère. Je décidai de m’absenter, de faire la bleue, d’explorer le grand nulle part, certain d’y être plus heureux que dans le noir où je vivais. (p 73)
C’est aérien, le vélo, musical. Il suffit de pédaler pour faire chanter la chaîne : vélo d’amour lové, ô vol vélo volé, el vélo ô love, que comprendre à ma parole ? Il faut qu’elle fuie et vole ! (p 186)
Le vrai cycliste n’en a rien à faire d’arriver. Il ne roule pas pour aller quelque part, il roule pour rouler. Pour résoudre l’équation entre puissance et souplesse, saisir l’instant magique où l’homme, la machine, la route, le vent s’arrachent à la pesanteur pour connaître la vitesse pure semblable à l’immobilité. La grâce, à vélo, n’est ni la force ni l’endurance, c’est la vélocité. Le vélo, c’est une esthétique. Il faut croire aux mots quand on fait du vélo. Le vélo, c’est la métaphore parfaite de l’écriture. Sur la route, comme sur la page, c’est la même perfection que l’on cherche en repassant sans cesse sur la même trace. L’équilibre, le rythme, la scansion ne sont que la conjugaison du plateau et du pignon, de l’imparfait et du passé simple. Rouler, c’est écrire en lettres invisibles. C’est repasser sur sa propre trace autant de fois que l’écrivain revient sur ses mots qui roulent en peloton dans les romans, poèmes, essais, dictionnaires, encyclopédies. (p 187)
Geneviève Serreau m’a appris à écrire. Sans elle, je n’aurais jamais dépassé le B.A.-BA. Geneviève avait un côté Giacometti. Il s’agissait d’enlever tout ce qu’il y avait de trop. Il fallait éradiquer l’ornement, la fanfreluche, les perles de rhétorique et le sucre glacé des mots d’auteur. Ecrire, c’était toucher l’os, le nerf, s’écorcher. Elle concassait, pressurait, passait chacun de mes poèmes au feu de sa lecture avec une impitoyable ténacité. Elle avait aussi un côté protestant. Pas question de confesser sa peine à qui que ce soit et d’attendre l’absolution. L’écriture ne pardonne pas. Il faut cracher le morceau, se déboutonner et ne rien espérer. (p 193)
Je ne crois pas que j’assisterai à mon enterrement. Ça tue, ce genre de cérémonie. C’est trop triste. Tous ces yeux humides, ces nez rougis, ces figures de six pieds sous terre ; ces hommes, ces femmes qui s’étreignent dans un silence de mort… Très peu pour moi. […] Je ne supporte pas non plus les hommages funèbres. Les belles paroles prononcées par les parents, les amis, les curés, les pasteurs, les rabbins jurant, contre l’évidence, que le mort n’est pas mort, qu’il nous voit, qu’il nous entend, les apostrophes aux cieux, les interpellations lyriques de l’au-delà, les souvenirs joués au trémolo ne sont pour moi que de la mise en boîte. (p 202-203)
Parfois, lorsque je souris, je sens que mon père sourit en moi, je sens ses lèvres, le froncement de son nez, le plissement de ses yeux dans mon propre corps. Je pense : il est là. C’est lui qui marche, pas moi. Je sens ses enjambées, son allure chaloupée, ses gestes durs. Il est là comme dans un habit à sa mesure ; à l’aise, naturel. Mon père vit en moi une mort légère. (p 210)
Au milieu de quelques lettres administratives, j’aperçois soudain la carte postale que j’avais envoyée à ma mère de Vancouver. Trois phrases en anglais au dos d’un paysage semblable à celui qui décorait sa chambre d’hôpital. Le courrier n’a pas suivi… Ça me scie. Je dois m’asseoir. Tenir cette carte, c’était comme tenir le corps inerte de ma mère entre mes doigts. C’est la voir mourir une seconde fois. J’étais incapable de détacher mon regard de ce « love & kisses » qui ne lui était jamais parvenu. La dernière chose qu’elle aurait pu lire. La dernière chose qu’elle aurait dû lire… Ces mots perdus étaient trop lourds pour moi… La carte m’a échappé des mains. Elle a glissé sous la table, sur le Gerflex en damier noir et blanc. Je n’ai pas fait un geste pour la ramasser. Je la fixai comme hébété, tandis qu’un ciel d’orage obscurcissait la pièce. (p 212)
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C'est vrai que je me suis souvent senti merdeux devant les filles , devant leur générosité , leurs largesses , l'éclat de leur yeux où le ciel se reflète , alors que dans les miens n'expriment que la mélancolie d'être ce que je suis .
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Avoir des amis est un art délicat et sévère dont les règles sont plus fortes que les liens du sang. Pas besoin de contrat, de serment, de témoin jurant n'importe quoi sur l'honneur qu'il n'a pas. Une seule question compte: celle-là, celui-ci, sera-t-il prêt le jour où on aura besoin de lui ? Ou manquera-t-il à ses amis ?
Manquer, il n'y a pas de plus grand crime.
Celui qui manque est plus que mort, il n'a jamais existé.
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