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sur 832 notes

°°° Rentrée littéraire 2022 #4 °°°

Lorsqu'on referme ce premier roman, on ne peut qu'être estomaqué par l'incroyable maturité littéraire, émotionnelle et romanesque dont fait montre Leila Mottley, dix-neuf ans seulement ( dans les notes finales, elle dit même l'avoir démarré à dix-sept ans ! ). C'est d'autant plus remarquable qu'elle ne se complait pas dans un récit autofictionnel déguisé mais propose une fiction dont la matrice est inspirée d'un scandale qui a secoué la ville d'Oakland en 2015 : la lettre de suicide d'un policier a lancé une enquête impliquant plusieurs services de police corrompues, accusées d'exploitation sexuelle d'une prostituée mineure. A partir de ces grandes lignes, l'auteure imagine la vie d'une jeune afro-américaine de dix-sept ans, Kiara Johnson, emportée dans une spirale descendante dès qu'elle commence à se prostituer.

Kiara rejoint mon panthéon des héroïnes anglo-saxonnes inoubliables : Duchess ( de Chris Whitaker ), Turtle ( My favorite darling, Gabriel Tallent ), Tracy ( Sauvage, Jamey Bradbury ) et Lady Chevy ( de John Woods ). Leila Mottley développe un exceptionnel degré d'empathie auquel adhère immédiatement le lecteur, et pas seulement parce que la vie de Kiara est précocement brisée : père décédé juste après son retour de prison, mère oscillant entre prison, dépression et centre de réhabilitation sociale, frère aîné refusant de travailler pour tenter de percer dans le rap malgré une absence de talent évidente ; misère la poussant à arrêter le lycée pour accumuler les petits boulots ; avis d'expulsion en cours. Et puis la prostitution qui lui semble être un choix économique rationnel pour payer ses factures avant qu'elle ne se retrouve totalement piégée. Nous la regardons, impuissants face aux décisions qu'elle prend et qui la conduisent dans les rues sombres de la ville.

Pourtant, Arpenter la nuit ne raconte pas l'histoire d'une jeune fille qui s'effondre. Kiara est un être résolu avant d'être en chute. L'auteure donne un accès direct à cet esprit, ce corps, ce coeur qui gère le chaos intérieur et extérieur avec une candeur flamboyante, porte d'entrée rare à la méditation des impuissants. Jamais elle ne dérive du point de vue de Kiara. L'abandon lyrique de l'écriture sait aussi bien dire la violence que la beauté brute, offrant à Kiara une voix impossible à quitter, de nombreux passages sont éblouissants et résonnent très fort tant elle parvient à insuffler de la poésie dans la laideur du monde de Kiara ( bravo à la finesse de la traduction de Pauline Loquin ) :

« Il creuse ma chair et c'est exactement comme on m'avait dit que ce serait, et je suis tellement triste que ça ait l'air si normal. C'est juste une nuit comme les autres, pas vrai ? Il y a énormément de façon de marcher dans la rue et moi je suis juste une fille recouverte de chair. »

« Le plus souvent, je me dis que je ne crois en rien, sauf que la façon dont la nuit met des couleurs sur tout me donne envie de croire. Pas à l'au-delà, ni au paradis, ni à aucune de ces conneries. Ça, c'est juste des trucs qui nous font sentir mieux par rapport à la mort et moi je n'ai aucune raison de craindre la mort. Je crois simplement que les étoiles pourraient s'aligner et atteindre un autre monde. Pas la peine que ce soit un monde meilleur parce que ça, ça n'existe sûrement pas. Je pense que c'est autre chose, un quelque part où les gens marchent un peu différemment. Si ça se trouve, ils parlent par vibrations. Ou alors ils ont tous le même visage, ou pas de visage du tout. Quand j'ai le temps de fixer le ciel, j'imagine avoir assez de chance pour apercevoir ce quelque chose. Mais je finis toujours par être ramenée sur cette planète. »

Ces passages de catharsis émotionnelle ravagent le lecteur autant que les scènes traumatisantes d'une noirceur extrême, sans pour autant désespérer totalement. Malgré tout ce qu'elle subit, Kiara est encore capable d'aimer et d'apprécier les petits bonheurs de la vie. Ainsi sa relation avec son petit voisin de neuf ans, abandonné par sa mère toxicomane au crack, illumine tout le roman, son instinct maternel inébranlable constituant une bouée. Dans ce monde brutal gangréné par le racisme et le sexe tarifé, où les jeunes femmes noires pauvres sont particulièrement vulnérables et invisibilisées, Leila Mottley révèle à quel point l'amour se trouve dans les liens profonds d'une famille choisie.

Mes seules petites réserves concernent la longueur du roman, il aurait pu être un tout petit peu plus resserré pour éviter quelques répétitions sans perdre pour autant ni en densité ni en intensité. La romance débutante avec son amie Alé est par exemple sous-développée et n'apporte rien de plus au récit. Ce qui est sûr, c'est qu'une formidable écrivaine est définitivement née et que ce roman puissant et déchirant va laisser une empreinte éclatante dans le coeur de nombreux lecteurs.
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Un roman coup de point, qui nous renvoie dans la réalité de la vie, nous sommes loin de la part de fiction de cette histoire, c'est un roman d'une noirceur extrême, l'auteure avec une grande dextérité nous dépeint la dureté de la vie, le quotidien d'une vie avec son lot de malheur, un univers nauséabond. L'auteure entraîne ses lecteurs ,dans ce monde où la misère est l'élément précurseur, C'est l'histoire de Kiara, jeune fille de 17 ans , qui n'est pas née avec une cuillère en argent, mais dans un milieu loin de la normalité , elle subit la mort de son père, une mère emprisonnée,et un frère qui vie dans ses rêves, devenir un star reconnue. Là voila seule avec Marcus, comment faire face à cette grande précarité, sur le point d'être expulsé, Son frère ne semble pas remarquer ce désastre,
Kiara , trouve le moyen , peu respectable, mais qui peut ouvrir une porte de sortie dans son malheur, elle décide de vendre son corps , Elle subit violence, manipulation, tous les aléas de la vie nocturne. Elle se lie d'amitié de Trévor, âgé de 9 ans, qui est livré à lui même, sa mère le laisse seul, et à d'autres priorités dans la vie, Il devient le rayon de soleil, une source de bonheur pour la jeune fille
Elle se voit devenir la marionnette, des forces de l'ordre, qui abusent d'elles , elle n'a pas le choix et doit accepter, aucun moyen pour elle de se sortir de ce carcan,Rien ne lui est épargnée. Nous assistons à sa descente dans les méandres de la folie, de la destruction physique et psychologique.
Une jeune femme noire, âgée de 17 ans , prostituée, tout pour l'enfoncer, tout pour l'humilier, une rage de ma part, des hommes sans état d'âmes qui sortiront blanchis, suite à un procès.
L'auteure décrit en profondeur la psychologie de Kiara, un personnage attachant, dégageant de l'empathie, une envie de rallumer la flamme qui s'est éteinte,, la reconduisant dans cet univers anxiogène, glauque, oppressant , angoissant,Un histoire qui m'a chamboulée, Un roman qui peut-être une ode à la vie à l'amour, un espoir que nous gardons au plus profond de notre âme, L'auteure nous a attiré dans son monde du début jusqu'au final, une fin imprévue, et qui m'a pris aux tripes,
Un premier roman, magistrale.
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C'est en compagnie de Kiara Johnson, une jeune afro-américaine de dix-sept ans, que le lecteur va arpenter la nuit, même en plein jour, dans les rues d'East Oakland en Californie. Depuis le décès de son père et l'emprisonnement de sa mère, elle vit seule avec son frère Marcus dans un quartier déshérité avec vue sur une piscine ou flottent des merdes de chien. Comme son grand frère passe ses journées à rapper en studio dans l'espoir de devenir aussi célèbre que leur oncle Ty, c'est elle qui se démène pour payer le loyer de leur appartement. L'augmentation de ce dernier combiné aux nombreux refus d'embauches vont pousser l'adolescente vers l'argent facile… le début d'une longue descente aux enfers, surtout lorsque les flics s'en mêlent !

S'inspirant d'un fait divers réel qui a secoué la ville d'Oakland en 2015, Leila Mottley dénonce l'exploitation sexuelle de jeunes femmes noires par des représentants des forces de l'ordre. En se glissant dans la peau d'une jeune fille de son âge, l'autrice développe un niveau d'empathie immense envers cette héroïne qui ne laissera personne indifférent. Partageant l'impuissance de cette gamine face à l'engrenage qui vient détruire son innocence, le lecteur se prend claque sur claque et ressort totalement KO de cette lecture absolument bouleversante.

En dressant le portrait d'une ville où il ne vaut mieux pas être noir et pauvre, tout en abordant des thématiques d'une noirceur extrême, tels que la prostitution juvénile, le racisme, la corruption, la pauvreté, les communautés opprimées et la condition des jeunes filles noires, Leila Mottley livre certes un premier roman particulièrement sombre, mais également assez lumineux grâce à la force extraordinaire de cette héroïne encore capable d'embrasser tous les petits bonheurs de la vie. Kiara a beau progressivement se noyer dans cette piscine remplie de merdes de chiens, qui sert admirablement de métaphore à la vie et au désespoir dans lesquels elle baigne, elle trouve néanmoins la volonté et le courage de s'accrocher à une bouée de sauvetage nommée Trevor. Ce petit voisin de neuf ans, délaissé par une mère toxicomane, lui offre une raison d'exister et illumine les pages de ce récit. Un peu de tendresse dans ce monde débordant d'injustice !

Oeuvre engagée, abordant des thématiques sombres avec grand brio, « Arpenter la nuit » prend aux tripes tout en livrant des moments de beauté particulièrement émouvants. Ayant entamé l'écriture de ce premier roman à seulement 17 ans, Leila Mottley fait cependant preuve d'une maturité incroyable, tout en proposant une écriture poétique sublime. Je suis fan !

Mon premier gros coup de coeur de cette rentrée littéraire !
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Depuis la mort de leur père et l'internement de leur mère, Kiara, dix-sept ans, et son frère aîné Marcus vivent d'expédients, seuls dans leur appartement miteux d'un quartier noir défavorisé d'East Oakland, sur la côte californienne. Pendant que Marcus, caressant le doux rêve de percer dans le rap, s'échine avec quelques comparses sur un projet d'album qui ne verra jamais le jour, la jeune fille cherche désespérément le moyen de payer leur loyer et d'éviter l'expulsion. Faute de trouver le moindre emploi, elle finit par se résoudre à arpenter la nuit et ses trottoirs, et se retrouve rapidement sous la coupe de policiers véreux qui l'exploitent sexuellement en échange d'une vague protection. de passes furtives en soirées gang bang, sa descente aux enfers la mène droit au coeur de la tourmente médiatique et judiciaire qui se déchaîne lorsque le scandale éclate.


Inspiré de faits réels survenus à Oakland en 2015, le récit se nourrit de la proximité de l'auteur avec son personnage, une fille noire du même âge et de la même ville en qui elle se projette avec une profondeur de ressenti et un réalisme impressionnants - lui prêtant beaucoup d'elle-même et jusqu'à une compagne calquée sur la sienne propre -, pour nous plonger dans une narration puissante, intelligente, sublimée par le naturel sobre et direct et par la poésie d'une plume si parfaitement mature et maîtrisée que l'on s'ébahit de ses même pas vingt ans et d'un talent déjà si éclatant.


Sans colère ni amertume, mais avec une lucidité désabusée qui en dit long sur la désespérance afro-américaine dans ces quartiers où la vie semble sans issue, Leila Mottley prête une voix et un visage à toutes ces femmes noires, en butte à des violences sexuelles en plus des persécutions policières habituelles, et qui, oubliées des mouvements comme Black Lives Matter – nés pour la défense de victimes jusqu'ici masculines -, demeurent désespérément invisibles. Loin de la représentation diabolisante et réductrice entretenue par les médias, son meilleur argument est l'empathie qu'elle suscite pour une poignée de personnages très jeunes et attachants, dont la profonde détresse ne vient jamais assombrir la lumineuse tendresse, pour un frère, pour un enfant, pour une amante.


Si, avec ce premier roman confondant de maturité, Leila Mottley n'a pas remporté le prestigieux Booker Prize dont elle était la plus jeune sélectionnée depuis que ce prix littéraire existe, gageons que ce n'est que partie remise et que cette magnifique nouvelle plume fera encore parler d'elle. Coup de coeur.

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Leila Mottley est une jeune autrice qui a publié son premier roman "Arpenter la nuit" l'année dernière, à l'âge de vingt ans tout rond. Maintenant que je viens de le terminer, je ne peux que lui espérer une belle carrière en tant qu'autrice, j'aurais plaisir à lire ses prochains romans.

"Arpenter la nuit", à la fois fiction urbaine, roman social et roman noir, est un ouvrage dont les événements se déroulent à Oakland en Californie à la fin des années 2010. Nous faisons la connaissance de Kiara, jeune fille de 17,5 ans qui vit seule avec son frère et dont le passé familial est complexe. le père est mort peu de temps après sa libération de prison, la mère croupit en prison depuis sa tentative de suicide. Marcus, le frère, ne travaille plus et passe ses journées dans un studio à enregistrer ses morceaux de rap. Parce qu'elle est mineure et n'a aucun CV à présenter, Kiara ne trouve pas d'emploi. Pourtant, les factures s'accumulent, le loyer augmente et puis, il faut bien manger aussi...

Un soir, un malentendu va lui ouvrir une porte de sortie et lui permettre de gagner un peu d'argent. Vendre son corps, elle va y voir là le seul moyen de sortir un peu la tête de l'eau. Mais un soir, des flics véreux l'arrêtent et Kiara est précipitée dans un tourbillon qui la noie petit à petit...

Autant prévenir tout de suite, rien n'est rose dans le quotidien de Kiara. Sa relation avec son frère se fracasse. Elle se retrouve seule à assumer leurs dettes. Arpenter la nuit devient son quotidien, son corps un outil de travail. Misère sociale, prostitution, exploitation sexuelle et violences policières sont au coeur de ce roman. Tout est noir et sans espoir (comme le dit la chanson), et pourtant quelques étincelles de lumière arrivent parfois à passer. Je pense notamment à la relation toute particulière entre Kiara et Trevor, son petit voisin de neuf ans négligé par sa mère accro à la drogue. Je pense également à l'amitié forte entre Kiara et Alé, sa seule véritable amie. Je pense aussi au soutien que Marsha apporte à Kiara dans la dernière partie du roman.

Kiara est un personnage que l'autrice a travaillé aux petits oignons, façonnée par le milieu dans lequel elle a été élevée, par les choix qu'elle a dû faire (quand choix il y a eu), qui ne tente pas de vivre mais seulement de survivre et pour elle c'est déjà pas mal. On n'aime pas la voir "arpenter la nuit" mais on l'aime, elle, tout court, on la comprend et on souhaite de tout coeur la voir sortir de cet enfer tout en appréhendant les conséquences.

"Arpenter la nuit" est un roman fort alors que très facile à lire, grâce à la belle plume de l'autrice qui a su faire preuve de beauté et de lumière malgré la noirceur des événements, malgré le milieu sombrement dépeint dans lequel les protagonistes évoluent, malgré leur avenir miséreux déjà tout tracé.

Pour son premier roman, Leila Mottley tape dur et j'ai beaucoup aimé. Une autrice à surveiller, à coup sûr.
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Kiara, presque 18 ans, et son frère, Marcus, de 3 ans son aîné, vivotent et se démènent comme ils peuvent depuis le décès de leur père et le placement en maison de redressement de leur mère. Depuis le succès d'Oncle Ty, Marcus ne rêve que d'une chose : sortir un disque de rap. Aussi a-t-il abandonné son ancien job et passe son temps dans le studio d'enregistrement de fortune de son meilleur ami, Cole. Kiara, elle, a abandonné les études et essaie de trouver des petits boulots, tout juste de quoi pouvoir manger et payer le loyer qui, malheureusement, va augmenter. Heureusement que sa meilleure amie, Alé, est là pour la soutenir et que les rires de Trevor, un petit voisin âgé de 9 ans, dont elle s'occupe parfois, sa mère étant bien trop occupée à se droguer, sont là pour égayer ses journées. Par un malencontreux hasard, alors qu'elle a passé une partie de la soirée dans un bar de striptease, un homme la prend pour une fille facile, l'entraine sur un toit, fait sa petite affaire et lui file deux billets. L'idée germe alors dans sa tête : vendre son corps...

À partir de sombres affaires qui ont défrayé la chronique, à partir de 2015 et suite au suicide de l'un d'eux, accusant certains membres de la police d'Oakland et plusieurs services de police de la baie de San Francisco soupçonnés d'exploitation sexuelle sur une jeune femme, Leila Mottley donne la parole, à travers le personnage de Kiara, à toutes celles, victimes de violence de la part de la police, qui n'ont pas eu/pu la possibilité de s'exprimer. Dès lors, l'auteure s'imagine ce que peut être la vie de ces jeunes filles. Par manque d'argent, délaissée par sa mère, Kiara voit en la prostitution un moyen facile et rapide d'en gagner. Un moyen qu'elle croyait sans nul doute indolore jusqu'à ce qu'elle tombe sur ces policiers corrompus, abusant de leur pouvoir. de sa plume riche, parfois poétique, parfois écorchée, Leila Mottley nous entraine dans les bas fonds d'Oakland, une ville que l'on ressent chère à son coeur, où la misère suinte, où la violence s'immisce, où les coeurs se fêlent et où, pourtant, l'amour transparait par vagues qui nous emportent, où l'air iodé permet de reprendre son souffle entre deux asphyxies, où les matins clairs font oublier pour un temps les nuits sombres, où les caresses apaisent ces corps écorchés et où un rire permet de sécher quelques larmes. Kiara est de ces jeunes héroïnes inoubliables, dont les épreuves témoignent de sa force, de son courage, de sa foi en la vie, bien qu'elle ait côtoyé la noirceur humaine. Autour d'elle, l'on n'oubliera pas non plus l'amitié indéfectible d'Alé, le soutien infaillible de Tony, la fougue de Marcus et les rires et l'innocence de Trevor.
Un premier roman remarquable, tout à la fois émouvant et déchirant...
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Kiara a dix-sept ans. C'est aussi l'âge de l'autrice au moment où elle a commencé à écrire ce roman.
Kiara vit sous la menace d'une expulsion, elle gagne peu d'argent dans les petits boulots qu'elle trouve occasionnellement, son colocataire de frère a des ambitions artistiques qui le tiennent à distance d'une activité alimentaire. Pour compléter le tableau un gamin de neuf ans que sa mère est incapable d'élever passe le plus clair de son temps dans l'appartement.

La situation est terrible et Kiara presque sans s'en rendre compte en vient à vendre son corps, puis à faire de très mauvais choix, qui la mettront en danger.

Inspiré d'un procès qui a réellement eu lieu en Californie il y a quelques année, ce roman met en lumière la descente aux enfers de cette toute jeune fille pour qui les coups durs se succèdent, alors qu'elle n'est pas armée pour se faire une place dans cette société impitoyable.

Sans complaisance, avec une pudeur qui correspond bien à la naïveté de Kiara, Leila Mottley décrit avec un ton juste l'environnement sans concession qui ne peut conduire qu'au pire, malgré la volonté de la jeune fille de s'en sortir, pour elle, pour son frère, pour sortir de ce cercle vicieux que les erreurs de ses parents ont tracé autour d'elle.


Avec détermination et maturité, Leila Mottley devrait rejoindre le groupe des autrices américaines à suivre.

416 pages Albin-Michel 19 Août 2022

Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Elle a tout d'une grande… Non, il ne s'agit pas d'un remake pour une marque de voiture, mais de Leila Mottley. Leila Mottley a commis un époustouflant roman de 397 pages, alors qu'elle n'avait que dix-sept ans, qui sonne comme une bonne claque.
Comme Leila, son héroïne de papier Kiara, est une jeune fille noire de dix-sept ans. La comparaison s'arrête là. Kiara va être obligée de se prostituer pour payer les factures du loyer qui s'amoncellent et que son frère aîné ne prend plus la peine de payer, occupé à faire du mauvais rap toute la journée, et à partir petit à petit à la dérive, mêlé à des affaires louches. Kiara se retrouve alors très seule, son père étant décédé et sa mère en centre de réinsertion (le lecteur en découvrira plus tard le motif).
Kiara sacrifie sa jeunesse et son innocence sur le trottoir, dans l'indifférence de son frère et de sa mère. Ce qui la fait tenir, au-delà de la peur de se retrouver à la rue, c'est Trevor, le fils de Dee, la voisine. Dee est toxico, et elle laisse de plus en plus souvent Trevor, 9 ans, se débrouiller tout seul. Alors, Kiara devient une grande soeur pour Trev, lui donne ce qui lui reste de sa part d'enfance, le chérit, le nourrit, paye aussi son loyer.

Quelle maturité, quelle maitrise pour le premier roman d'une si jeune femme. A la fin du livre, l'autrice déclare s'être basée sur des faits réels survenus dans sa ville d'Oakland dans la baie de San Francisco ; un scandale impliquant une jeune prostituée noire mineure abusée sexuellement par plusieurs membres de la police. Hantée par ce fait divers pendant plusieurs années, Leila Mottley a souhaité dénoncer, à travers l'écriture de ce roman, le fait que dans les affaires mettant en cause les policiers, les violences sexuelles arrivent en deuxième position après les coups et blessures, et concernent majoritairement des femmes de couleur.
Également, elle a voulu se révolter contre le fait qu'elle avait été élevée dans la croyance que son devoir de femme noire était de protéger les hommes de son entourage (père, frère, …) « leur sécurité, leur intégrité physique, leurs rêves ». Apprenant par la même occasion que sa propre personne n'est que secondaire, qu'il n'y a personne pour la protéger, elle.
Un premier roman déchirant écrit par une jeune femme bourrée de talent, illuminé par la superbe relation qui unit Kiara à Trevor. Une très jeune autrice, à suivre…
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« Arpenter la nuit » est le premier livre que je lis pour cette nouvelle rentrée littéraire, dans le florilège des nombreuses parutions qui, comme chaque année, se bousculent au portillon une fois le 15 août passé. Et waouaw, quel roman coup de poing ! Première lecture et premier coup de coeur direct pour ce roman sombre mais ô combien puissant, porté par une plume que je qualifierais tout simplement de sublime !

Leila Mottley, son auteure, a commencé sa rédaction alors qu'elle n'était même pas encore majeure : à l'âge de 17 ans. Pourtant, la force et le caractère de son écriture font qu'on pourrait penser se trouver face à un écrivain plus que confirmé. Alors qu'il s'agit d'un premier roman, le talent de l'auteure est indéniable et vous transporte au fil des mots.

On se trouve en Californie, à Oakland, pas loin de la baie de San Francisco. Pourtant, le monde à paillettes de Los Angeles et des richesses du Golden State sont à mille lieues de l'histoire qui nous est contée. Kiara, une jeune afro-américaine de 17 ans, habite dans un complexe de flats à bas loyers en compagnie de son frère, Marcus. Alors que ce dernier rêve d'entamer une carrière de rappeur, comme leur oncle parti à Los Angeles, Kiara, après avoir arrêté ses études, porte sur ses frêles épaules, leur survie quotidienne. Après le décès de leur père et l'emprisonnement de leur mère, elle essuie de nombreux refus d'embauches, la seule issue qui se présente est de se prostituer, bien malgré elle. le cauchemar commence alors de façon exponentielle.

Par le résumé, on se rend compte que l'histoire ne sera pas forcément gaie et qu'on évoluera dans les bas-fonds de la cité. Malgré la noirceur de ce récit, celui-ci est hypnotisant et intelligemment porté. Très actuel par ses thèmes abordés, ce livre est inspiré d'un vrai fait divers et la façon de l'auteure de retranscrire les sentiments égrenants ses protagonistes est saisissante de réalisme.

Je n'ai trouvé absolument aucun grief à ce livre. Tant ses personnages attachants, que ses descriptions aussi bien des lieux que des situations vont marqueront au fer rouge. Vous ne pourrez pas rester insensible à ce que vous lirez, malgré qu'il s'agisse d'une fiction.

Kiara est une héroïne qui m'a marquée et qui restera dans mon esprit pour encore certainement un bon bout de temps. Je souhaite tout le meilleur à ce roman qui mérite très amplement d'être parcouru, lu, découvert pour sa justesse et son intensité chatoyante.

Leila Mottley, un nom à absolument retenir pour les prochaines années car il est certain qu'on est face à l'une des plumes contemporaines américaines en pleine envolée.

Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Un premier roman, une couverture qui attire l'oeil, on a l'impression que cette gamine va relever la tête dans l'instant qui suit et faire voler en arrière ses tresses, des retours en général très positifs, tout cela m'a incitée à lire Leila Mottley.

Je ressors moins enthousiaste que beaucoup de cette lecture. Il m'a fallu du temps pour accrocher, trouvant le début assez peu original et le personnage du frère carrément imbuvable.

Et, ce qui a sauvé ma lecture, qui m'a poussée finalement à enchainer les pages, c'est l'écriture, qui prend parfois l'allure d'un cri, qui crée dans mon esprit en quelques mots des images d'une violence extrême, une écriture efficace et à la fois pleine de poésie par moments, des moments de beauté qui surgissent au milieu de la noirceur.

Il y a aussi bien sur Kiara, l'héroïne, qui lutte comme elle peut, qui ne s'avoue jamais vaincue, qui est là pour tous, et en particulier pour son petit voisin de 9 ans abandonné par sa mère.

Kiara est jeune, noire, pauvre, pas de qualification, 200 dollars gagnés un soir au sortir d'une boite de striptease, première expérience de ce qui est le plus vieux métier du monde. Elle va s'y résoudre, et va devenir victime de la police censée la protéger.

Comme je le disais, je n'ai pas trouvé l'histoire très originale, mais j'ai aimé Kiara, sa vision des choses, sa relation avec les autres. Il a fallu qu'elle devienne adulte trop jeune, et elle rêve encore souvent de retrouver des bras pour la bercer. là, ni son frère, ni sa mère ne sont là pour elle.

Une autrice à suivre.

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