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Critique de benifabs


Un titre recommandé par Olivia de Lamberterie. Bonne pioche ! Car sans cela je n'aurais peut-être pas choisi cette lecture qui est devenue un coup de coeur.
Un homme âgé de 88 ans, Tomas Kiss dit Tomi dans le récit raconte et témoigne d'une vie où les malheurs de la seconde guerre mondiale ont fait des ravages dans sa famille. Ce n'est certes pas le premier livre sur les horreurs subies par les Juifs durant cet holocauste. Ce n'est pourtant qu'une cousine (Véronique MOUGIN) qui va mettre des mots sur les maux racontés et subis par son cousin Tomi. Lui aurait préféré « enfouir ses souvenirs » et croit aux « vertus carapaces du silence ».
Tout jeune il apprend le jour de sa Bar-mitsva que sa mère n'est pas celle qu'il croyait car elle est décédée au premier jour de sa vie et veut s'enfuir. Il est élevé en Hongrie par son père "tailleur pour homme" qui veut lui apprendre le métier. Lui n'en a que faire. Il rêve d'Amérique. La guerre va forger son éducation.
Ce livre décrit la cruauté des nazis dans toute son horreur. Il existe déjà des livres publiés, mais là le niveau dépasse l'entendement. Certains passages sont épouvantables à lire. Oui la mémoire doit être rafraichie mais en l'occurrence on peine à imaginer autant d'horreurs. Nous verrons même que les prisonniers sont transformés en bourreau et deviennent plus méchants que les nazis par crainte de représailles. Est-il nécessaire d'écrire ces descriptions insoutenables ? Peut-être !
Ils sont libérés par les américains mais doivent rester en quarantaine dans le camp, ils sortent du camp et copiant leurs bourreaux allemands fondent sur des fermières voisines pour les piller et pourquoi pas les agresser. Parfois la cruauté s'apprend et se copie.
Une description de la vie quotidienne dans les camps de concentration où en quelques secondes des vies pouvaient être ensevelies pour un simple regard. D'autres romans l'ont fait, ici nous allons découvrir les ruses qui ont permis à Tomi de revenir de l'enfer et nous apporter son témoignage. Son père sera tantôt son protecteur, puis son protégé. Des liens étroits leur permettront de rester en vie puis après d'oublier et avancer dans leur nouvelle vie ailleurs, puisqu'il y a toujours un ailleurs pour se reconstruire. Un récit sur la complicité dans toutes les situations entre le père et le fils.
Le dernier tiers du livre situé à Paris dans le milieu de la Haute Couture nous fera vivre cette belle époque de l'après-guerre avec ses insouciances et les bonheurs du jour. Tomi grâce à son opiniâtreté va réussir à réaliser ses rêves tout en n'oubliant jamais ce qu'il a vécu. le milieu particulier de cette profession est bien décrit et met en valeur les petites mains de ses métiers.
L'écriture fait souvent référence aux termes de la couture même lorsqu'il s'agit de description de situations hors du contexte de la couture. Beaucoup de ces expressions de notre langage se trouvent ainsi liées au texte :
« Il regardait fixement la lune en croissant posée sur le toit du bordel quand son front s'est déplissé d'un coup, comme s'il venait de passer sous le fer » (Page 279)
« Tu la boucles, avec le geste de l'aiguille sur les lèvres….bouche cousue » (Page 301)
« de fil en aiguille » « le temps de se faufiler » etc……Véronique Mougin « file » la métaphore.
Beaucoup de chapitres sont précédés en italique de l'opinion personnelle d'un personnage qui intervient ensuite dans l'histoire. Ce style narratif nous permet tout simplement d'accrocher l'action à la pensée.

Le dernier chapitre raconte l'entretien final entre le vieux cousin(Tomi) et la jeune cousine(Véronique), l'expérience d'une vie en regard de la jeunesse. « Tu leur diras ça aux gens, dans le bouquin, que du même point peuvent naître le meilleur et le pire, que la vie est retorse, tortueuse, inextricable, qu'elle te rend fou de chagrin, qu'elle te remplit de joie, en vérité c'est du fil la vie, tu comprends ? du fil, tout simplement, et contrairement à ce que dit le proverbe on ne sait jamais, jamais, entends-tu, où passera l'aiguille. »
Un livre qui a répondu à mes attentes, une multitude de citations à relever au travers d'une histoire certes dure, mais très enrichissante. J'ai pu lire par ailleurs l'histoire d'une résilience que Véronique Mougin aurait pu transformer en « refilience ».
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