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EAN : 9782715224728
639 pages
Le Mercure de France (30/10/2003)
3.96/5   12 notes
Résumé :

De 1879 à 1939, l'abbé Mugnier a tenu un journal soixante ans de vie sacerdotale et mondaine de celui qu'on a pu appeler le " confesseur des duchesses ". Dans les salons parisiens les plus huppés, l'abbé Mugnier offrait pourtant l'aspect déconcertant d'un curé de campagne, avec ses gros souliers carrés et sa soutane élimée. Il s'était imposé par les qualités les moins faites pour réussir dan... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
L'abbé Mugnier n'était pas un grand littérateur mais il en a connu. Son journal, tel qu'il est présenté dans cette édition, avec des choix d'extraits orientés vers la vie publique et littéraire, est plutôt fait pour les amateurs de littérature curieux, avides d'anecdotes.
Il a bien connu Huysmans, Anna de Noailles et Jean Cocteau. Il a croisé ou rencontré Mallarmé, Proust, Barrès, Céline, Gide, Valéry, et tant d'autres ! Il rapporte des anecdotes de premières mains sur Flaubert, Hugo, Zola, Maupassant, Rimbaud, Verlaine. Il a commencé avec le naturalisme et fini avec le surréalisme. de la Commune à la deuxième guerre mondiale, il a vu l'achèvement de la monarchie en France et l'avènement de la république. Bref, il a vécu l'une des périodes de l'histoire de France et de sa littérature les plus excitante, ou du moins les plus excitée.
Toutes ces anecdotes sur les écrivains et propos rapportés ont l'effet de démystifier les hommes. Il y a beaucoup de jalousie, de mesquinerie, dans les jugements des uns sur les autres, rarement de l'estime. L'abbé Mugnier ne faisait que noter les propos, sans toujours les commenter, même s'il les réprouvait, il ne prenait pas toujours le temps de donner son avis. Toutefois, il n'y a pas de doute à avoir sur ses idées : il était un « curé de gauche ». Indigné par l'antisémitisme, les violences des catholiques, l'Action Française, les bellicistes, il était aussi à des années-lumière des idées de Huysmans sur la religion ; il n'aimait pas le latin et préconisait de le supprimer des offices. Il lui arrivait même de se sentir gêné au milieu du renouveau catholique des années 1920.
J'ai trouvé intéressant de lire tout ce qu'il écrivait à propos des juifs et des homosexuels. L'antisémitisme était quelque chose de répandu à l'époque, tout le monde faisait des blagues sur les juifs. Même les juifs se complaisaient dans cet antisémitisme ; étonnante la visite du baron de Rothschild à l'abbé Mugnier pour obtenir son soutien pour des élections, et où il lui avoue qu'il est le véritable ministre des finances en France.
Quant à la sexualité, je crois que l'obsédé Huysmans a joué un certain rôle dans l'intérêt qu'y portait l'abbé. En 1916, peu après avoir entendu parler de Freud, il écrivait : « Je crois que l'instinct sexuel est l'explication de tout, puisque tout en vient. La psychologie doit sortir de là, de cette double étreinte. Mais qui donc approfondit nos origines ? La sotte pudeur ou la sotte luxure empêchent toute étude sérieuse. »
Enfin, il y a un autre aspect de l'abbé à retenir, c'est son côté mondain, surtout lorsque il fréquentait Anna de Noailles. Il a passé beaucoup de temps dans les dîners de la haute société ; il détaille les menus raffinés (il découvre le caviar pendant la première guerre mondiale) et les fleurs qui ornent les tables (cet amour des fleurs le rapprochait de Proust).
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La lecture du journal de l'abbé Mugnier nous fait prendre conscience, s'il en était encore besoin, de la nécessité de dissocier l'écrivain de son oeuvre. Nous apprenons, grâce à l'abbé, une foule de petits détails sur la vie de beaucoup d'entre eux, qui ne sont pas toujours à leur avantage, bien au contraire.Ayant fréquenté un collège de Jésuites durant toutes mes études secondaires, j'ai retrouvé avec amusement dans ces pages tous les auteurs qui avaient les préférences de nos chers éducateurs. Je pense en particulier à Péguy, Claudel, Maritain, Montherlant et Teilhard. Mon Dieu, si nous avions su tout ce qui se cache derrière ces écrivains.
Après avoir lu le journal littéraire de Paul Léautaud (choix de pages) qui a rencontré à plusieurs reprises l'abbé à la Vallée aux Loups, j'ai trouvé intéressant de croiser leurs appréciations réciproques de ces rencontres.
Une lecture très enrichissante.
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Aucune critique du Journal de l'abbé Mugnier sur Babélio ? Réparons cette lacune, en conseillant vivement la lecture de ce document littéraire de première main, plein de fraîcheur et d'acuité, où l'on se promène dans les intérieurs des personnalités les plus huppées de la belle époque et de l'entre deux guerres. L'excellent abbé, vif d'esprit (ce qui lui ouvrit les portes des salons à la mode) avait le don, indiscutable, d'associer avec profit sa mission sacerdotale et les mondanités (cf le mot de Forain: "on vous enterrera dans une nappe!"). Il laissera à sa mort en 1944 ce journal (paru dans les années 80) en forme d'exercice d'admiration, où l'on croise durant une soixante d'années les célébrités de l'époque, sans qu'à aucun moment le bon abbé se laisse duper par un milieu dont la frivolité n'est pas le moindre défaut. A lire sans modération !
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Citations et extraits (27) Voir plus Ajouter une citation
14 Juin 1911
Quand pourrais-je mettre de l'ordre en moi, au plus profond de moi-même ? Impossible ! la vie est confusion, oscillation, complication.
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Il ne faut pas céder une première fois à la tentation charnelle car il n'y a pas d'assouvissement.
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Le 29 juillet 1914.

Toujours plus que jamais des bruits de guerre. Hier, je me suis endormi difficilement, l'imagination reprise par les souvenirs de 1870. Reverrons-nous ces temps lugubres ? Qu'est-ce que le clergé a fait depuis pour rapprocher les individus et les peuples ? Rien. Toujours l'aigre rappel des principes, l'esprit combatif, une religion faite pour les cloîtrés, et en même temps des manifestations qui remplacent la vie intérieure, tout le Génie du christianisme ramené au Sacré-Coeur, à l'Eucharistie, à Lourdes, au pape. Aucune main tendue à l'incroyant. Des anathèmes faciles, obstinés. La charité oubliée. Rien d'élevé, de généreux. Le zèle dans le rite, dans la sacristie. Je ne regrette pas d'être étranger maintenant à cette administration sans génie et sans entrailles.
Les jurés ont acquitté Mme Caillaux. Ah ! Comme les conservateurs, comme les catholiques vont crier, protester ! Ils aiment tant à anticiper le jugement dernier, à décréter, à inaugurer les sanctions ! Aucune indulgence, aucune grandeur dans le pardon. Il faut expier, disent-ils. Cette bonne comtesse Armand me disait, dimanche dernier, à propos de la guerre : " Nous avons besoin d'un châtiment. " Ce besoin de châtier qui est dans le sang des croyants... Ils communient, ils montent au Sacré-Coeur et ces hosties, ces bénédictions, ces amendes honorables leur inspirent le désir du mal, la condamnation, l'amour du dieu vengeur. Ah ! Ce n'est pas beau...
L'Autriche a déclaré la guerre à la Serbie.
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Le 7 octobre 1884.
Je viens de présenter mes respects au Révérendissime abbé [de la Trappe]. Dom Etienne a un beau front, barbe et moustaches noires. Il est méridional. Il m'a dit que Saint-Sulpice était tout-puissant à Rome. Il m'a dit que Monsieur de Rancé était janséniste comme on est libéral aujourd'hui. Dans cent ans, m'a dit l'abbé, on parlera du libéralisme comme du jansénisme. La Vie de Rancé par Chateaubriand est un misérable roman, m'a-t-il dit ! Il m'a dit encore que depuis la Révolution, il y a une telle fièvre dans les esprits "qu'on ne sait plus se taire", que "quand on a une idée on veut la dire", et que, par conséquent, le vent ne souffle plus aux ordres contemplatifs. On veut agir. Dans l'antichambre du Père abbé, j'ai vu et lu un sonnet par Monsieur de Rancé, abbé de la Trappe, qui se termine par ce vers : " Vivre, sans vivre en saint, c'est vivre en insensé."
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11 mai 1906

Causé, ce soir, avec Huysmans des élections de dimanche dernier : "Nous sommes foutus, m'a-t-il répété, je ne croyais pas les catholiques aussi honnis."
Il s'étonne que les bourgeois redoutent si peu le socialisme grandissant. Et il répète son mot favori : "Nous avons embêté tout le monde."
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Video de Arthur Mugnier (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Arthur Mugnier
J'ai bien souvent de la peine avec Dieu - correspondance, de Marie Noël et l'abbé Mugnier
>Histoire, géographie, sciences auxiliaires de l'histoire>Biographie générale et généalogie>Chefs et penseurs religieux. Religieux (220)
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