Immersion totale dans le monde particulier des passionnés de tango (en Europe). Il s'agit du premier roman de l'excellente auteure belge
Caroline de Mulder, qui se distingue par un style de langage qui renforce harmonieusement le contenu.
J'avais découvert
Caroline de Mulder avec «
Manger Bambi », qui m'avait enthousiasmé (voir mon commentaire du 13/11/2021) et rendu impatient de goûter d'autres ouvrages de cette auteure. J'ai donc continué avec son premier ouvrage «
Ego tango », récompensé du Prix Rossel en 2010, l'un des prix les plus importants en Belgique francophone.
Nous sommes ici plongés dans l'univers particulier du tango, en Europe. Historiquement, le tango tire son origine des bas fonds. Nous n'en sommes plus là, bien entendu, mais
Caroline de Mulder nous fait percevoir le monde du tango comme un univers particulier, avec ses lieux, ses codes, ses passionnés. On y vit entre soi, on se connaît sans se connaître, on s'aime, on se déteste, on s'envie, on se jalouse, on se dispute les amants ou les maîtresses. On s'échappe de la réalité en se perdant dans la danse, parfois aidé par l'alcool ou la drogue. Ce n'est pas un plaisir de joie, je dirais, mais plus une sorte de plaisir mélancolique.
L'immersion dans cet univers particulier est ce qui m'a principalement envoûté dans ce roman; c'est l'aspect pour lequel je vous le recommanderais chaudement.
Il y a une intrigue, autour de la disparition d'une femme, mais j'avoue m'y être un peu perdu, sans y attacher trop d'importance. C'était un premier roman et le jury du Prix Rossel a eu le nez fin en encourageant son auteure. «
Ego tango » m'a ravi, mais «
Manger Bambi », son dernier opus au moment où j'écris, m'a ravi davantage, me paraissant plus abouti.
Dans ces deux romans,
Caroline de Mulder se distingue par des styles particuliers, qui soutiennent l'univers de chaque roman. J'avais été impressionné par la langue des jeunes des cités dans «
Manger Bambi ». Dans «
Ego tango », le style est elliptique, parsemé de phrases incomplètes, comme celles de ceux qui commencent à parler pour vite se perdre dans d'autres pensées et oublier de terminer leurs phrases. Là aussi, j'ai été impressionné par la technique, mais je reconnais que j'ai eu des difficultés à m'y habituer (sans doute une réaction de défense de mon inconscient, mes proches me reprochant souvent de ne pas terminer mes phrases!).
Caroline de Mulder sort de l'ordinaire ! Encore une auteure belge qui mérite de figurer dans votre pile de lecture ! Pour l'instant, je vous recommanderais plutôt «
Manger Bambi », mais j'ai déjà sur ma table de chevet son «
Nous les bêtes traquées », je vous en parlerai donc bientôt.