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EAN : 9782830915945
176 pages
Labor et Fides (23/03/2016)
3.83/5   9 notes
Résumé :
Comment investir la dimension politique de nos vies lorsqu'on est héritier d'échecs et de désillusions ? Peut-on séparer radicalement vie spirituelle et vie politique ?
(...) Marion Muller-Colard nous plonge au coeur de la pensée politique d'Hannah Arendt et revient sur les prophètes bibliques, Elie en tête, dont le complexe est celui de se sentir incapable de faire mieux que ses pères
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Marion Muller-Colard, née en 1978, est une théologienne protestante; elle est alsacienne. J'ignorais son existence jusqu'à ce qu'on me propose de lire "Le complexe d'Elie". L'auteure nous livre ses réflexions personnelles sur l'engagement politique. Alors qu'elle a quitté la ville pour s'installer avec sa famille en montagne, elle est interpellée par un homme politique plutôt original: Joseph Spiegel, maire d'une petite ville alsacienne, qui veut réinventer l'engagement citoyen. Dans son livre, elle s'interroge longuement sur la relation entre l'activité politique (au sens noble) et le message évangélique. Marion Muller-Colard est amenée à se rapprocher de la société civile et à renoncer à une vie qui serait contemplative. Elle s'intéresse à l'action citoyenne qui devrait tisser un lien "horizontal" entre tous les hommes, comme Jésus en a donné l'exemple. Ainsi, faire de la politique (vraiment) autrement, ce serait mettre en pratique les préceptes chrétiens.
Pour que ça marche, chacun devrait se guérir du complexe d'Elie: ce "complexe" consiste à prétendre qu'on n'est personnellement ni motivé, ni surtout qualifié pour se mettre dans l'action. La démarche préconisée reprend à son compte - dans le domaine de l'engagement citoyen - un concept fascinant et étrange qui fut évoqué maintes fois par Jésus, celui du Royaume de Dieu: ce Royaume ne serait pas ailleurs, il ne serait pas à venir; il serait déjà parmi nous et il ne tiendrait qu'à nous d'y appartenir dès maintenant.
J'avoue que j'ai eu beaucoup de mal à suivre l'auteure dans la direction qu'elle indique, même si l'idéalisme de Marion Muller-Colard ne semble pas a priori farfelu. Mais mon réalisme me rend très sceptique. Certes, la participation active de tous est réellement possible à l'intérieur de petits groupes de personnes partageant les mêmes valeurs. Mais elle ne me parait pas envisageable dans des sociétés géantes et complexes comme la notre. Hélas, je crois que la nature humaine - telle qu'elle est réellement - conduit au dévoiement de la démocratie et aux impasses politiques. C'est pourquoi je ne chercherai pas à me guérir de mon "complexe d'Elie" personnel. D'ailleurs, la démocratie directe a-t-elle jamais fonctionné correctement ? je crains que non. L'exemple d'Athènes, souvent donné en exemple, ne me parait pas vraiment probant, pour des raisons qu'il serait trop long de développer ici.
Donc, j'ai considéré avec beaucoup d'attention les idées de Marion Muller-Colard, mais sans y adhérer. J'ajouterai que je n'ai pas particulièrement apprécié la manière d'écrire de l'auteure. L'ouvrage se présente moins comme un exposé cohérent que comme une suite spontanée et assez désordonnée de réflexions et de méditations très personnelles, qui ne m'ont pas toujours séduit.
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J'ai fait la connaissance de Marion Muller-Colard dans la revue Panorama dont elle est l'une des chroniqueuses et j'apprécie bien ses textes assez toniques. Dans ce livre elle nous offre une réflexion encore plus profonde et riche, partant de la vie quotidienne et nous entraînant vers des horizons plus élevés.
Le coeur de cet ouvrage, c'est les rencontres entre une théologienne protestante, Marion Muller-Colard elle-même, et un homme politique alsacien, Jo Spiegel. Ils auraient du reste pu se croiser en Alsace puisque Marion y a fait des études de théologie, mais c'est grâce à la télévision qu'ils se sont rencontrés, après un débat qu'elle a eu avec Emmanuel Carrère. Durant près d'une année, ils se sont vus chez l'un ou chez l'autre pour échanger sur les connexions possibles entre la politique et la religion. Durant ces quatre saisons de rencontres, Marion nous livre aussi des réflexions sur sa vie quotidienne et sur les choix de vie qu'elle a faits avec son époux ; elle nous fait rencontrer Hannah Arendt, Simone Weil, Levinas, Emmanuel Carrère, Colette Nys-Mazure, Etty Hillesum ou même Bob Dylan ! Elle nous offre surtout sa connaissance de la Bible, du monde juif et du Christ.
Le complexe d'Elie qui donne son nom au livre, c'est notre difficulté à faire mieux que ceux qui nous ont précédés. En effet, le prophète Elie clame « Je ne suis pas meilleur que mes pères !» Marion Muller-Colard pense même que pour sa génération ou la mienne, ce complexe est double : ne pas pouvoir faire mieux que nos parents, enfants du baby boom, mais surtout ne pas pouvoir être heureux, après eux.
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L'auteure a été interpellée par une rencontre avec un homo politicus: Joe Spiegel. Elle fait le parallèle entre la désaffection du religieux et celle du politique pour nombre de nos contemporains.
En parlant de sa conversion à une autre politique qui met de côté les partis et le système, Joe Spiegel déclanche en elle une réflexion. Pour Marion Muller-Colard, c'est l'infantilisation qui est la source de ce désintérêt. Parfois c'est bien pratique car cela nous arrange de laisser l'autre décider à sa place. Aujourd'hui, il y a un sursaut et on ne supporte plus que cela soit le prêtre ou le pasteur qui nous dit qui est Dieu ou l'homme politique qui nous désigne le programme idéal. Ces systèmes hiérarchiques basés sur des "spécialistes" ne tiennent plus la route. Ces deux domaines doivent revenir aux croyants de bases et aux citoyens plus ou moins éclairés.
Sa pensée s'appuie sur une bonne connaissance d'Annah Arhendt.
On y trouve donc un développement sur la démocratie participative et le tsim-tsoun (kabale), où Dieu doit se retirer pour que quelque chose d'autre que Dieu puisse advenir. de même, ce n'est pas parce qu'on est élu qu'on a la vérité toute entière. du coup il va monter un agora, même si c'est difficile à mettre en oeuvre.
Elle retrouve le goût de la disputatio, c'est-à-dire le fait de ne pas être d'accord, mais d'argumenter sur ses positions. Cela demande de sortir de soi.
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L'auteur a le privilège de vivre en pleine nature dans les Vosges . S'agit-il d'un refuge protecteur, d'une citadelle, d'un havre de paix ? . Entrant en dialogue avec un homme engagé en politique, Marion Muller Colard nous partage ses réflexions mais aussi son quotidien, ses rencontres . Voilà encore un délicieux moment passé à la lecture de cette auteur pleine de talent !
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Et qu'est-ce qui nous voue à l'intranquillité permanente ? L'autre. L'autre vraiment autre. Pas celui avec qui je bricole une mythologie commune, mais celui qui me raconte une autre histoire. Pas celui qui se glisse tout naturellement dans mes codes et mes langages, mais celui qui parle une autre langue. Pas celui qui me conforte, mais celui qui me dérange. Pas celui que je tolère parce que nous travaillons d'arrache-pied à une connivence basée sur l'illusion du même, mais celui pour qui j'entretiens le désir de la différence.
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(A propos de Jésus et la femme adultère)
C'est son petit côté Maître Yoda : on lui pose une question, il répond à côté. On pense qu'il a mal compris. On peut se dire cela toute une vie concernant cet homme. Mais on peut aussi, à un moment donné, admettre qu'on pose peut-être les mauvaises questions. Et devinez, dans ses réponses, quelle était la juste question à se poser.
(...)
Ce qui est touchant, si on y pense, c'est la haute estime qu'il a de l'humain. Il nous croit capables de cela : supporter de réécrire la loi à mesure des jours, dans la singularité de la rencontre.
The answer, my friend, is blowin'in the wind...
Et tu n'as jamais fini de l'entendre, jamais fini de la comprendre, jamais fini de l'interroger.
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(Le lendemain des attentas de Paris)
Dans les rues de Paris, le symptôme le plus flagrant du choc sera le vide. Des rues anormalement désertes. Plus de marée humaine, mais quelques individus promenant un chien, un enfant, marchant vite ou au contraire, très lentement. Je ne fendrai pas de foule, mais je croiserai des gens. Bien moins qu'en un samedi ordinaire, quelques dizaines d'abord, quelques centaines au final. Et une par une, chaque personne suscitera en moi la reconnaissance : des centaines de personnes dont je peux croiser la route sans qu'elles me tuent. Cela réclame d'être dit : nous sommes si nombreux à ne pas tuer.
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(A propos de la rencontre d'Elie avec Dieu, dans le Livre des Rois)
Un son doux et subtil. Ou la voix d'un léger bruissement.
Certains vont jusqu'à traduire : la voix du silence. Oxymore pour dire une présence d'autant plus éloquente qu'elle n'est pas là, nécessairement, où on l'attend.
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Simone Weil affirme tranquillement : "Le Christ aime qu'on lui préfère la vérité, car avant d'être le Christ , il est la vérité. Si on se détourne de lui pour aller vers la vérité, on ne fera pas un long chemin avant de retomber dans ses bras." je suis tentée de plagier : "Le Christ aime qu'on lui préfère les autres. Si on se détourne de lui pour aller vers les autres, on ne fera pas un long chemin avant de retomber dans ses bras." (Entendre par là non pas les autres quantitativement, mais la qualité même de l'altérité.)
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