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Geneviève Doze (Traducteur)
EAN : 9782743613341
165 pages
Payot et Rivages (05/11/2004)
3.75/5   36 notes
Résumé :
Les sept nouvelles rassemblées dans ce recueil préfigurent l’immense talent de nouvelliste que, d’œuvre en œuvre, Alice Munro ne cessera de révéler. On y retrouve déjà, traités souvent avec humour, toujours avec élégance, tous ses thèmes de prédilection : les rapports entre parents et enfants, les trahisons, les secrets inavoués, la maladie et le vieillissement, la mort, les occasions manquées… La référence à l’image est fréquente, et ces nouvelles nous donnent l’im... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Cette quinzaine de nouvelles se déroulent dans la campagne de l'Ontario, au Canada, dans les années quarante. Centrés sur des personnages féminins, très souvent une narratrice qui se remémore ses souvenirs d'enfance et de jeunesse, les récits ont un net parfum autobiographique. Les protagonistes en sont des gens ordinaires, pris dans un quotidien plutôt morne où il ne se passe guère d'évènements notables. Plus qu'à l'action, l'auteur s'attache à l'étude psychologique de ses personnages, à leurs rêves et désillusions, à leurs mesquineries et regrets. Dans ces vies insignifiantes, les cruautés du destin paraissent d'autant plus dures qu'elles demeurent invisibles et discrètes, ne provoquant que des ravages intimes et souterrains.


Chaque nouvelle est extrêmement bien construite et réussit en quelques traits d'une parfaite précision à restituer l'univers et la complexité de personnages plus vrais que nature. Toutes ne m'ont pas passionnée, mais leur ensemble m'a laissé une impression douce-amère de tristesse nostalgique, celle qui vous étreint en feuilletant un vieil album photo empli de personnes inconnues et disparues. La vie y apparaît fragile et fugace, si ce n'est dérisoire, dans un monde indifférent qui ne garde aucune trace des états d'âme et des émotions qui ont pourtant empli toute l'existence de ces êtres oubliés. La leçon à en tirer semble en être la nécessité de parvenir à être soi pour vivre pleinement, et pour cela de refuser d'abdiquer et de se soumettre à une pression sociale et familiale, débilitante et absurde, pour les femmes de cette époque.


Avec ce premier recueil paru quarante-cinq ans avant son obtention du Prix Nobel de Littérature, Alice Munro montre d'emblée un indéniable talent : celui de savoir déceler la subtilité derrière la plus apparente simplicité.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Peinture douce-amère des années 40 en Ontario.

Cet ouvrage est un recueil de nouvelles écrites et publiées en anglais en 1968 (traduites en France en 1979), pour la plupart des souvenirs d'enfance et de jeunesse, parfois le portrait d'une femme plus particulière.

Au début de chaque récit, on ne sait pas très bien « où on va », les personnages sont peu définis d'entrée. Un élément est modifié dans la routine du quotidien, puis souvent a lieu une rencontre particulière. Une grande part est donnée à l'analyse psychologique de l'événement chez le personnage féminin et là réside tout l'intérêt du texte. L'intrigue semble secondaire. Un ton assez mélancolique avec une pointe d'amertume ressort fortement des différents récits mettant en scène une jeune fille, Hélène, qui revient dans plusieurs nouvelles et qui rappelle assez l'auteur elle-même.
Les lieux sont minutieusement décrits avec force détails mais de façon très concise car il s'agit de nouvelles. J'ai eu souvent l'impression que l'on me décrivait une photographie tellement les images sont fortes et construites comme si tout était à sa place.
On reste dans l'ordinaire et le quotidien de gens simples, la vie de tous les jours à cette époque, et principalement la place de la femme et des filles dans la société mais sans parti pris, juste comme un cliché du moment. L'analyse psychologique permet une réflexion sur la vie, le sens à donner à son existence, le rapport aux autres. C'est dans cette simplicité, je crois, que l'écriture d'Alice Munro peut devenir universelle et prendre du sens pour le lecteur car c'est l'humanité de ses personnages qui ressort avant tout.

Un style très singulier, un univers précis et une époque révolue. J'ai l'impression d'avoir fait un saut dans le temps mais j'en « reviens » réconfortée par ces histoires qui m'ont tenu compagnie, un peu comme si j'avais rendu visite à une personnage âgée qui m'aurait raconté des anecdotes de sa jeunesse et me montrant des photographies. Voilà le ressenti précis que j'en ai.
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N°726 – Février 2014.
LA DANSE DES OMBRES HEUREUSESAlice Munro – Rivages
Traduit de l'anglais par Geneviève Doze.

Ce recueil de sept nouvelles date des années soixante dix. Il n'est donc pas vraiment récent mais comme je l'ai déjà dit dans cette chronique, la nouveauté ne saurait être le seul critère d'intérêt pour un livre.

« Le cowboy des frères Walker » met en scène un père de famille qui a dû, après de mauvaises affaires comme éleveur de renards se reconvertir comme représentant. Un jour il amène ses enfants avec lui en tournée et dépasse un peu son secteur rural pour rencontrer Nora qu'apparemment il connaissait déjà. J'ai le sentiment qu'il regrette sa vie d'avant, et peut-être son mariage. Avec « La danse des ombres heureuses » qui donne son titre au recueil nous voyons une vieille dame, Miss Marsalles, professeur de piano qui donne chez elle sa séance musicale annuelle avec ses élèves. C'est tous les ans le même rituel et cela ne s'arrange guère mais cette année un groupe d'enfants un peu attardés venus d'une autre école participent au spectacle. Parmi eux une jeune fille se met au piano pour interpréter une pièce inconnue jouée par elle passablement. Miss Marsalles s'en déclare satisfaite mais cet épisode montre à toute l'assistance que le vieux professeur n'est décidément plus de son temps. « La carte postale » évoque Helen, une jeune fille qui reçoit une carte de Clare, un garçon de douze ans son aîné, parti en Floride et dont elle attend le retour. Elle en parle avec sa mère et se souvient qu'il a eu un temps l'envie de l'épouser mais elle a refusé, préférant Ted Forgie, au grand dam de sa mère. Or il s'avère que Clare est allé en Floride pour se marier et Helen prend cela comme un coup de massue. Elle pète même carrément les plombs quand il revient en ville. « Images » relate une étrange anecdote où il est question d'une infirmière célibataire qui est aussi la cousine de la narratrice. Cette dernière fait avec son père une promenade dans la nature afin de relever des pièges et il rencontrent un homme un peu sauvage qui vit dans une cave avec un chat alcoolique ! « Quelque chose que j'avais l'intention de te dire » met en scène deux soeurs Ette et Char qui reviennent sur leur passé commun. Char était amoureuse d'un jeune homme, Blaikie Noble, au point qu'elle avait même tenté de se suicider en apprenant son mariage avec une autre femme. Elle a ensuite, par dépit, épousé Arthur, un professeur d'histoire plus vieux qu'elle mais Ette est restée célibataire. A la mort de Char (peut-être volontaire et réussie cette fois), cette dernière s'était rapprochée d'Arthur et avait l'intention de lui faire des révélations sur Char avant de mourir mais elle hésitait encore. A cette lecture, on a l'impression qu'elle ne le fera jamais parce qu'Arthur est resté amoureux de Char, même dans la mort. « La vallée de l'Ottawa » est une somme d'anecdotes familiales et « Le matériau » relate l'histoire d'une femme qui a eu une fille avec un homme de Lettres, Hugo, qu'elle n'a pas épousé. Elle s'est mariée ensuite avec un ingénieur et lit par hasard une nouvelle Hugo qui s'inspire d'une anecdote dont elle se souvient du temps où elle vivait avec lui. Ainsi, il transforme en personnage de roman une modeste voisine. Maintenant qu'elle n'est plus avec lui, la narratrice confesse qu'elle n'a jamais cru au talent d'Hugo et se retrouve envieuse de sa réussite. C'est, à titre personnel, la nouvelle qui m'a le plus parlé.

Ces nouvelles nous sont contées par une narratrice aussi simplement qu'elle nous raconterait une histoire, presque sur le ton de la confidence, avec cependant un grand souci du détail et une écriture agréable à lire. Pour autant on a l'impression qu'il ne se passe rien et que l'ambiance de chaque texte est un peu morne, que les personnages sont un peu falots et sans grand relief. L'auteure reprend ici des thèmes favoris, celui de la véritable personnalité parfois complexe de ses personnages derrière leur masque et leur volonté de garder intacts leurs secrets et peut-être leurs illusions, de fuir aussi pour continuer à vivre simplement même si cette vie n'est pas exaltante. Elle est aussi attentive aux relations entre parents et enfants et reste fidèle à l'implantation géographique canadienne. Il est souvent question de ménage raté, d'amours contrariées, de temps perdus, de regrets et de remords. Au moyen d'analepses, elle évoque le temps qui passe, rendant compte de la fragilité de la vie dont chacun de nous n'est que l'usufruitier. J'avoue que j'ai été un peu déçu par ce recueil, pas vraiment passionné par ce que j'ai lu.

L'univers de la nouvelle est toujours délicat à aborder pour un lecteur. de plus, à l'évidence, cette auteure que je ne connaissais pas avant l'attribution de son Prix Nobel en 2013 mérite toute mon attention. Cette distinction prestigieuse m'invite a poursuivre ma découverte cependant.


©Hervé GAUTIER – Février 2014 - http://hervegautier.e-monsite.com
Lien : http://hervegautier.e-monsit..
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J'ai pris une fois de plus un grand plaisir à entrer dans l'univers d'Alice Munro. Les deux premières nouvelles m'ont particulièrement enveloppée. "Le cow-boy des frères Walker" se déroule à ras d'enfant navigant à vue dans le flou mystérieux qui entoure la vie des adultes, dans cette campagne des années 30 où jouer au marchand de couleurs s'avère difficile tant la poussière prend le pas sur l'herbe verte. "La danse des ombres heureuses" est quant à elle un petit bijou de perfection, de ces nouvelles qui donnent toute leur brillance et tout leur sens à ce genre littéraire, en expriment la quintessence et font s'épanouir le coeur ému de la lectrice. Progression du récit, présence des personnages, tonalité d'une époque, chute à la fois saisissante et qui en dit long, tout est parfait.

Alice Munro saisit ce qui a du sens dans le flot de réalité, comme ces "bottes exhalant une odeur compliquée de fumier, d'huile de machine, de vase durcie". Elle sait retranscrire ce qui, dans la succession de nos perceptions, va prendre assez d'importance pour habiter notre environnement, intérieur et extérieur, construire notre histoire personnelle et nous donner des directions vers où diriger nos pas. Vision parcellaire, toujours. Nous parcourons l'existence à tâtons. Mais il faut bien, pourtant, avancer hardiment.

Lien : http://versautrechose.fr/blo..
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C'est le premier recueil d'Alice Munro et il regoupe des nouvelles écrites sur une période de vingt ans. Ces quinze nouvelles se déroulent au Canada, soit dans des villages de l'Ontario, soit, plus rarement à Vancouver. Il est impossible de résumer chaque nouvelle mais on peut noter quelques récurrences. D'abord dans la narration puisque plusieurs nouvelles sont racontées du point de Del, une femme qui se remémore des épisodes familiaux de son enfance ou adolescence. Je me suis souvent ennuyée dans ces nouvelles-ci. Mais il y a bien sûr laLa Danse des ombres heureuses récurrence de thèmes, et celui qui ressort est l'intégration ou l'absence d'intégration dans un groupe, le souci ou le refus de se conformer aux normes de ce groupe, même si on sent que ces normes sont critiquées par l'auteur. Il y a un fossé entre l'auteur et ses narratrices, dont certaines ne comprennent pas ce qui leur arrive. Et il y a aussi ce rapport à la mère, souvent conflictuel ou intérieurement conflictuel car les adolescentes ne se rebellent pas ouvertement. Les mères sont oppressantes, mais elles sont aussi malades (ou enceintes) . Jamais les relations avec la mère ne sont harmonieuses. J'ai préféré les nouvelles qui n'avaient rien du nature writing, dans lesquels le paysage n'avait que peu d'importance, sauf pour servir de métaphore. Celle sur la place de la femme écrivain, sur la façon dont elle est perçue et sur sa recherche d'un bureau qui l'éloignerait enfin de la maison, espace maternel qui ne peut être associé au travail, est sans doute ma nouvelle préférée, car elle est traitée avec humour. Celle qui donne son nom au recueil et qui traite du handicap est aussi réussie. Mais si j'en juge par les autres nouvelles, elle n'est pas caractéristique du style d'Alice Munro.
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
L’autre femme de l’Armée du Salut, qui était plus âgée et avait une figure jaune et huileuse et une voix presque masculine, disait : Au jardin du ciel les enfants poussent comme les fleurs. Dieu avait besoin d’une autre fleur et il a pris votre enfant. Ma sœur, vous devriez le remerciez et être contente.
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Dans cette famille, il était mal vu d'être réputée sensible, comme l'était ma mère. Tous, tantes, cousins et oncles s'étaient prodigieusement endurcis à l'égard de toute forme de cruauté personnelle, insouciants, fiers même semblait-il, d'une défaillance ou d'une difformité susceptible de provoquer l'hilarité générale.
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Les bottes de mon père marchaient devant. Je les trouvais aussi uniques et familières, aussi révélatrices de sa personne que son visage. Quand il les enlevait, elles restaient dans un coin de la cuisine, exhalant une odeur compliquée de fumier, d"huile de machine, de vase durcie et du tissu mûr en décomposition qui doublait leurs semelles. Elles faisaient partie de lui, provisoirement laissées de côté, en attente; elles avaient une expression à la fois opiniâtre et intransigeante, brutale même, que je pensais faire partie de l'aspect de mon père, le pendant de son visage, avec son goût pour les plaisanteries et les amabilités. Cette brutalité ne me surprenait pas non plus : mon père revenait toujours vers nous, ma mère et moi, depuis des endroits où notre jugement ne pouvait pas le suivre.
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Le problème, le seul problème, c'est ma mère. Et c'est elle, bien sûr, que je cherche à cerner; c'est pour l'atteindre que tout ce parcours a été entrepris. A quelle fin ? Pour la délimiter, la décrire, la mettre en lumière, la célébrer, m'en débarrasser : cela n'a pas marché, car elle m'écrase de se proximité, comme elle l'a toujours fait. Elle est lourde, comme toujours, elle est accablante, et pourtant elle est floue, ses contours fondent et coulent. Ce qui signifie qu'elle s'est attachée à moi aussi étroitement que jamais et a refusé de s'écarter : je pourrais continuer, continuer, faisant appel à toutes mes capacités, utilisant les subterfuges que je connais, et il en serait éternellement de même. (140)
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Voilà Dotty, extraite de la vie, mise en lumière, suspendue dans la merveilleuse gelée transparente qu'Hugo a appris à confectionner tout au long de son existence. C'est de la magie, on ne peut le nier : un acte, pourrait-on dire d'amour particulier, généreux, positif. une bienveillance admirable et porteuse de chance. Dotty avait de la chance, diraient les gens qui comprennent cet acte et l'estiment (...) Elle est devenue de l'Art. Cela n'arrive pas à n'importe qui.
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Vidéo de Alice Munro
Samedi 19 septembre 2020 / 9 h
Florence Seyvos et Anne Alvaro nous font parcourir l'univers de Sisyphe est une femme, l'essai de Geneviève Brisac, à travers l'évocation d'Alice Munro, Marguerite Duras, Rosetta Loy...
Florence Seyvos est écrivaine et scénariste. Les Apparitions, Prix Goncourt du premier roman 1995 et le prix France Télévisions 1995. L'Abandon, 2002, le Garçon incassable, 2013 (prix Renaudot poche). Elle a également publié à l'École des loisirs une dizaine de livres pour la jeunesse et coécrit avec la réalisatrice Noémie Lvovsky les scénarios de ses films, comme La vie ne me fait pas peur (prix Jean-Vigo), Les Sentiments (prix Louis-Delluc 2003) ou Camille redouble. Elle publie en septembre 2020 Une bête aux aguets, aux éditions de l'Olivier.
Anne Alvaro est actrice de théâtre et de cinéma. Elle a joué dans des pièces mises en scène par Georges Lavaudant, Claude Guerre ou Hubert Colas. Au cinéma dans le film Danton d'Andrzej Wajda en 1981, et dans quatre films de Raoul Ruiz. En 1999, elle reçoit le César de la meilleure actrice dans un second rôle pour son rôle dans le film d'Agnès Jaoui, le Goût des autres et une seconde fois en 2010 pour le personnage de Louisa dans le Bruit des glaçons de Bertrand Blier.
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