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Critique de frconstant


Ce livre est un cri hurlé au monde, souvent, chuchoté parfois à l'oreille de nos ceurs ! Ce témoignage nous fait passer de l'insouciance de Nadia et des siens à sa crainte, puis à la peur, la douleur, la colère, vertige de l'abandon, la désespérance d'une descente aux enfers où elle ne peut plus compter que sur ses forces intérieures et sur ce tison de vie qui se consume en toute personne et qui, par rage de vaincre, par chance et bonheur se laisse parfois ranimer. Oui, ce récit est dur, indicible. Pourtant, Nadia MURAD nous le dit. Son histoire commence par des moments de tendresse, de bonheur, de vie simple et partagée, dans la pauvreté de Kocho, mais aussi dans la richesse de l'esprit de famille de Nadia, puis le récit se tord et nous livre ce qu'on a trop souvent envie de réléguer dans un coin de nos consciences alors qu'il se doit d'être une pierre salvatrice jetée dans la mare des pensées qui devraient nous empêcher de dormir. C'est une pierre philosophale. Composé de pépites d'or tirée de la vie de l'auteure mais de scories aussi, cet amalgame est capable de nous communiquer la vie, une vie nouvelle qui vaut d'être défendue et promue. Ou nous la rejetons, sous prétexte que nous, ici, 'nous ne pouvons tout de même rien faire, pas vrai ?' ou nous la choisissons comme 'caillou dans nos godasse', comme 'petit pois sous le matelas de nos certitudes' ... alors, cette pierre lancée vers nous deviendra pierre angulaire pour notre humanité ! Car c'est bien d'humanité qu'il s'agit. Nadia MURAD, jeune yézidie a été enlevée à 21 ans et réduite à l'état d'esclave, pire, d'objet sexuel. Ses bourreaux ? Les combattants de l'état islamique. Ce Daech aussi fou que fondamentaliste a su insuffler à ses combattants l'idée que leur devoir était de terroriser le Monde, de rayer de celui-ci la communauté yézidie sous prétexte que cette croyance était impie, n'avait pas de Livre sacré et que ses membres pouvaient être réduits à l'appellation "adorateurs du diable", donc, à ce titre pouvaient être utilisés comme esclaves sexuels, vendus, torturés, battus et abattus.

Perdu au coeur d'un conflit qui sévit par les armes et/ou par les sanctions politiques qui pèsent avant tout sur la population bien plus que sur ses dirigeants, les yézidis ont fait l'objet de tentatives de récupération aussi bien de la part des arabes que des kurdes. Jamais ils n'ont été considérés pour eux-mêmes et la dignité qu'ils pouvaient revendiquer ne leur a pas été accordée en temps voulu. Il a fallu bien des années de sévices pour qu'une résolution onusienne, enfin, reconnaisse comme génocide l'attaque de Daech contre ce peuple.

Nadia MURAD a été une de ces trop nombreuses victimes du génocide. Dignement, voulant rester debout, elle a entamé un combat pour que ce génocide soit reconnu et que les responsables soient, un jour, appelés à rendre compte de leurs actes.

Elle nous raconte ici son parcours, sa vie dans le petit village de Kocho, les petits bonheurs partagés avec sa famille, malgré la pauvreté, la dureté du quotidien. Elle nous dit, là, la force d'une vie de famille, celle du lien qui relie chacun à l'autre. Mais elle nous dit aussi les tentatives de déstabilisation de la communauté yésidie. Elle nous explique les notions de bases qui font vivre cette communauté et puis, l'aveuglement occulte de Daech, la destruction de l'homme par l'homme et ce, 'au nom de Dieu'.

Nom de Dieu ! Que cela fait du bien d'être mis en contact avec cette vérité obscure qu'on devine à peine à travers nos journaux télévisés et qui est si vite remplacée par d'autres infos, bien plus futiles souvent !

Par ce livre, Nadia MURAD se fait passeuse de mémoire ! Elle nous dit l'importance et la fragilité de toute communauté humaine. Elle nous invite à être plus attentifs à ce que requiert l'appartenance à cette espèce humaine et aux combats qu'il nous faut mener pour accéder à la dignité d'hommes et de femmes capables de vivre en bonne ordonnance et entente avec les autres. Ce livre est un cri, il va droit au coeur ! Admiration et respect, Madame Nadia MURAD!
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