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Critique de Le_chien_critique


Une sombre anticipation aux accents proustien et priestien autour du temps qui passe et de l'identité culturelle dans une Europe essoufflée rattrapée par ses vieux démons. Un récit haché, saccadé par le tic tac de l'horloge.

Arthur Blond est donc chargé de mettre en place la politique de rétro-archéologie de l'Europe. Cela consiste à restituer à leurs propriétaires tous les objets spoliés du temps des colonies. Un devoir de mémoire pour reconnaitre les méfaits du colonialisme ? Non, juste la continuation d'une politique cynique. La France tente une politique écologique pour redresser la barre en pure perte et dérive vers un régime sécuritaire et hygiéniste : Fumer nuit gravement à la santé. La prohibition touche tous les produits nicotiniques, de la cigarette au patch en passant par les gommes.
Les pays du Sud ont pris leur revanche, la vieille Europe n'en finit plus de sa décrépitude, et cède aux injonctions de restitution. Pas sans contrepartie : le deal, rétro-archéolgie contre désimmigration. On vous rend vos oeuvres, mais vous reprenez vos ressortissants ! Ressortissants pourrissants dans des "jungles" multiculturelles.

Las, les pays du Sud n'ont que faire de ces objets restitués dénués d'identité culturelle. Sans compter ces énigmatiques Emirs qui semblent avoir fait leur le capitalisme.
Sur cette trame, Lorris Murail va dérouler son intrigue autour du passé, de la mémoire, des souvenirs et du temps qui passe. Son narrateur est un personnage un peu perdu, paumé dans l'addiction d'une nouvelle drogue qui étire la notion de temps et qui altère sa réalité et ses souvenirs. le récit est à son image, le lecteur ne sait pas quoi penser de la véracité des dires d'Arthur et nous progressons avec lui dans ce labyrinthe de pages.

Pas d'ordinateur quantique, de trou noir, le futur décrit est notre présent, en plus sombre. Les seules inventions présentes sont loin de glorifier notre créativité. Par exemple, cette mode des geishas au ventre gelé dans un éternel cinquième mois afin de pouvoir parader et plaire; ces chaines de télévision crachant la nourriture avariée aux yeux affamés...

Une lecture qui ne plaira certes pas à tout le monde, il faut accepter de perdre pied, de comprendre entre les lignes cette société décrite. Il y a aussi cette noirceur qui baigne le récit, une désespérance en l'homme en perte de repères et qui se noie dans un maintenant en oubliant son passé et son avenir, reproduisant sans cesse les mêmes erreurs.
Une radioscopie de notre société sans concessions et sans espoirs.
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