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Critique de kuroineko


Relecture de la fabuleuse Course au mouton sauvage de Murakami Haruki. Je l'avais déjà beaucoup apprécié en 2009, alors que les deux premiers tomes de la trilogie du Rat n'étaient alors pas disponibles.
Lire tout récemment Écoute le chant du vent et Pinball, 1973, forcément, ça m'a donné envie de repartir en Hokkaido à la recherche du fameux mouton. Relecture jouissive avec des éléments complémentaires issus des premiers volumes. Mais le roman reste lisible seul.

J'aime beaucoup ce que fait Murakami. Son décalage par rapport à la réalité crue. Ou plutôt cette frontière diaphane entre ce qui passe pour la réalité et des éléments plus fantasques. Nébuleux. Fabuleux. Ça tient sans doute aussi à la perpétuation au Japon d'une culture animiste avec les《kamis》, déités omniprésentes du shintô.

Résumer l'intrigue? Impossible et inutile. Autant s'immerger dedans, à l'aveuglette et à l'intuition, comme pour le narrateur (celui des deux précédents) et sa petite amie aux incroyables oreilles. Ledit narrateur a désormais la trentaine, un chat, un divorce, un boulot et une tendance à trop fumer et lever le coude. Une vie de routine et d'ennui posé comme un acquis. Une vie en dehors des clous de la grande majorité des hommes japonais, entrés frais émoulus de l'université dans une entreprise comme salarymen, entreprise à laquelle ils se voueront corps et âme. Murakami lui-même n'a pas suivi cette voie toute tracée, comme il l'explique dans sa préface à la réédition d'Écoute le chant du vent. Et ses personnages, ceux de cette trilogie comme la plupart par la suite, ne correspondent pas non plus au cliché.

Néanmoins l'insensibilité apparente du narrateur, comme si la vie glissait sur lui sans l'effleurer, va ici se trouver mise à mal. Déjà par la rencontre d'une paire d'oreilles au pouvoir d'attraction immense, puis par la convocation du secrétaire - l'homme en noir - d'un leader important de l'extrême droite qui va le lancer à la poursuite d'un mouton extraordinaire, dans l'île septentrionale du Hokkaido.
Et c'est parti pour un voyage passionnant, immersif et décalé, comme sait si bien les peindre Murakami.

Dedans, au demeurant, on y retrouve nombre de sujets récurrents chez l'auteur. La référence au puits par exemple, qu'il s'agisse d'une métaphore, de rêve ou de puits effectifs, chargés de symbolisme, ils reviennent régulièrement dans sa prose.
De même, les livres et les disques occupent une place considérable pour ses personnages et l'on pourrait, à chaque ouvrage, dresser une liste d'oeuvres littéraires, nippones ou occidentales, et de titres musicaux, souvent de jazz et de classique.
Enfin la Mandchourie, autre point récurrent chez Murakami. du moins, la Mandchourie sous occupation et colonisation japonaise à partir des années 1930, lorsque l'empire oeuvrait à fonder le Grand Empire d'Asie en voulant soumettre à sa botte militariste Corée, Chine, Mandchourie, Mongolie et bien d'autres. Chez Murakami, c'est l'état fantoche du Mandchoukouo qui revient. Les lecteurs des Chroniques de l'oiseau à ressort se souviendront sûrement de la bataille de Nonmonhan qui est relatée...

Et le Rat dans tout ça? Puisqu'il s'agit du troisième opus de la trilogie éponyme. Et bien, il en est question en effet. J'invite toutes les personnes tentées par le livre de partir également à sa (re)découverte. Il y a tant à gagner à se perdre dans les méandres murakamiens!
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