Le grand public connait-il réellement Véronèse ? Bien entendu, quelques amateurs le situeront à Venise (et non pas à Vérone) dans la seconde moitié du XVIe siècle. Mais je mets au défi quiconque de me citer son vrai nom à savoir Paolo Caliari. Et, comme le rappelle
Pierre Rosenberg dans l'introduction de ce volume de la collection solo, le musée du Louvre conserve quelques-uns de ses tableaux les plus célèbres dont « les Noces de Cana », le plus grand tableau de ses collections. Ici, un portrait féminin dit « la Belle Nani » est le sujet de toute l'étude, véritable écho d'une conférence de
Jean Habert en 1994. Vingt ans plus tard, il faut bien reconnaître que le tour de la question a été fait et bien des pistes explorées puis rejetées le sont restées, sans qu'aucun nouvel élément n'ait relancé l'intérêt des chercheurs. Après avoir confirmé l'attribution à Véronèse,
Jean Habert se pose la question de l'identité du modèle, de la qualification du portrait (personne réelle ou type), pour brosser globalement un historique, avec les exemples de Giorgione, du Titien et du Tintoret. En multipliant les détails (la mode est souvent appelée à la rescousse), les citations littéraires, les sources, se brossent l'image de la Sérénissime de l'époque et celle de la société patriarcale qui la dirige.
Une fois de plus, une totale réussite même si, en fin de compte, l'énigme reste toujours posée… Un jour, peut-être, dans un lot d'archives (testament, inventaire, catalogue de vente…), trouvera-t-on le véritable nom de la « Belle Nani ».