La première qualité d’un écrivain était de savoir captiver son lecteur par une bonne histoire. Un récit capable de l’arracher à son existence pour le projeter au cœur de l’intimité et de la vérité des personnages.
L’existence d’un écrivain est le truc le moins glamour du monde. Tu mènes une vie de zombie, solitaire et coupée des autres. Tu restes toute la journée en pyjama à t’abîmer les yeux devant un écran en bouffant de la pizza froide et en parlant à des personnages imaginaires qui finissent par te rendre fou. Tu passes tes nuits à suer sang et eau pour torcher une phrase que les trois quarts de tes maigres lecteurs ne remarqueront même pas. C’est ça, être écrivain.
Dans toutes les vies, même les plus merdeuses, le ciel te donne au moins une fois une vraie chance de faire basculer ton destin.
C'était en partie pour cela que j'aimais autant lire. Pas pour fuir la vie réelle au profit d'un univers imaginaire, mais pour revenir vers le monde transformé par mes lectures. Plus riche de mes voyages et de mes rencontres dans la fiction et désireux de les réinvestir dans le réel.
Stephen King répétait souvent que trente maisons d’édition avaient refusé Carrie. La moitié des éditeurs londoniens avaient trouvé le premier tome de Harry Potter « beaucoup trop long pour les enfants ». Avant d’être le roman de science-fiction le plus vendu au monde, Dune de Franck Herbert avait essuyé une vingtaine de rejets. Quant à Francis Scott Fitzgerald, il avait, paraît-il, tapissé les murs de son bureau avec les cent vingt-deux lettres de refus envoyées par les magazines à qui il avait proposé ses nouvelles.
Les éditeurs… Les éditeurs sont des gens qui voudraient que tu sois reconnaissant quand ils te disent en deux phrases ce qu'ils pensent de ton livre, alors que tu as trimé deux ans pour le faire tenir debout. Des gens qui déjeunent jusqu'à 15h00 dans les restaus de Midtown ou de Saint-Germain-des-Prés pendant que tu te brûles les yeux devant ton écran, mais qui t'appellent tous les jours si tu tardes à signer leur contrat. Des gens qui aimeraient être Max Perkins ou Gordon Lish, mais qui ne seront jamais qu'eux-mêmes : des gestionnaires de la littérature qui lisent tes textes à travers le prisme d'un tableau Excel. Des gens pour qui tu ne travailles jamais assez vite, qui t'infantilisent, qui savent toujours mieux que toi ce que veulent lire les gens ou ce qui est un bon titre ou une bonne couverture.
Il est écrit quelque part, dans l’une des pages du livre du destin, que les roses trop belles vivent avec la hantise de se faner.
"L'unique salut des vaincus est de n'en espérer aucun."
(Virgile)
- Un roman, c'est de l'émotion, pas de l'intellect. Mais pour faire naître des émotions, il faut d'abord les vivre. Il faut que tu ressentes les émotions de tes personnages. De tous tes personnages : les héros comme les salauds.
Si tu crois que les écrivains possèdent les vertus morales qu'ils prêtent à leurs personnages, tu es vraiment naïf. Et même un peu con.