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Elizabeth Chabuel (Traducteur)
EAN : 9782742708789
285 pages
Actes Sud (04/06/1999)
3.75/5   2 notes
Résumé :
Où il est question du fonctionnaire chargé de rebaptiser les rues de Tirana au moment de l'avènement d'Enver Hoxha ; ou d'un vieil homme semant la panique quand il s'agit de choisir le cadeau destiné à Staline pour son soixante-dixième anniversaire ; ou d'un paysan devenu soudain gloire nationale pour avoir perdu sa fille sur un chantier de jeunesse ; ou encore de la curieuse idée de déclarer son enfant sous le nom de MaoZedong...

Tout au long de ces ... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Après la seconde guerre mondiale, l'Albanie est devenue communiste, sous la houlette d'Enver Hoxha, grand admirateur de Staline. Et même plus communiste que l'URSS elle-même, l'Albanie ayant rompu ses relations avec celle-ci après la « trahison » de Khrouchtchev.

Ce recueil de nouvelles présente la vie quotidienne des habitants de cette région, pratiquement coupée du monde pendant 40 ans. La paranoïa règne, là où un habitant sur trois a eu affaire à la police politique du pays. La moindre phrase est prononcée avec crainte, car elle sera analysée consciencieusement par tous les interlocuteurs, à la recherche de la moindre trace de trahison. Mais impossible de se taire non plus, car le silence peut être considéré comme un manque d'enthousiasme pour la politique du Parti ou un reproche insidieux.

On suit ainsi les angoisses intérieures d'hommes pris dans des conversations et des situations banales, mais qui ne peuvent s'empêcher d'imaginer dans leur tête tout un réseau d'indicateurs et de juges attentifs à leurs paroles et leurs gestes. L'auteur rend particulièrement bien cette ambiance de psychose collective qui finit par devenir drôle, car les tourments du personnage sont en total décalage avec l'insignifiance de la situation initiale (mais pas toujours injustifiés).

Le mystérieux tambour de papier du titre revient en filigrane dans chaque nouvelle, reliant les récits les uns aux autres.

L'auteur parvient à nous immerger dans l'histoire de l'Albanie, sans devoir rien connaître de son pays au préalable. Découvrir la vie sous un régime communiste du XXe siècle, dans lequel la réalité doit toujours se plier aux volontés du Parti, reste pour moi un plaisir un peu coupable.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
En passant et repassant dans sa tête tout ce qui arrivait, une autre supposition, plus plausible, naquit en lui. La blague, qu'il n'osait plus appeler blague, mais qu'il ne savait comment nommer, avait bien sûr été écrite ici, dans son village, et portée au loin d'un bureau à l'autre, pourquoi pas jusqu'à Tirana. Jusqu'à Tirana certainement. Et elle n'avait pas été portée comme la blague immature d'un instituteur débutant avec de jeunes enfants. Les détails "plumes cassées", "taches d'encre sur les pages d'écriture", "bouleversement d'une petite fille", etc., avaient été mis de côté. Ce qu'il était nécessaire de souligner, c'était que l'instituteur M.B., un simple fils du peuple, ancien soldat exemplaire de la garde républicaine, soupçonnait que quelqu'un à Tirana tramait une activité ennemie. Cela seulement avait suffi à attirer l'attention des principaux dirigeants du Parti sur ce grand problème. Finalement, c'est tout ce qu'on demande au peuple. Puis les investigations pour trouver les coupables avaient été de toute évidence plus faciles et avaient été accomplies par des gens du métier.
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— Vous me prenez pour un fou parce que je l'insulte pas le pouvoir et le Parti. Vous vous trompez. Il y en a qui n'ont pas perdu la tête et qui n'insultent pourtant pas la politique de l'État. Tu m'as compris ? Pourquoi faudrait-il que seuls ceux qui parcourent les rues avec un tambour de papier suspendu autour du cou et qui insultent le pouvoir aient leur tête en règle ? Même parmi nous qui ne proférons pas d'insultes, il y a des sains d'esprit. Voilà, toi qui ne profères pas d'insultes, tu ne te plains jamais, par exemple, d'être fou ?

Le jeune restait figé, les épaules basses. Sh. K. se calma un peu et se mit à expliquer au garçon que les ennemis étaient devenus très rusés et utilisaient la folie pour justifier la propagande contre le pouvoir populaire. Le Parti avait bien compris cela et ne tombait pas dans le piège. Les véritables fous, ce sont ceux qui louent tout le temps le régime, ça se sait maintenant. Mais ce serait une grave erreur de prendre pour fous tous ceux qui ne profèrent pas d'insultes...
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Tous savaient que la récolte avait été maigre. Nulle part les plans fixés n'avaient été atteints. Le ministre avait fait son autocritique pour la sécheresse qui avait duré plus de cent jours et il avait déchargé toute la responsabilité sur celui à qui elle incombait : l'inspecteur en chef de la culture du maïs à la direction des Céréales.
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