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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
On dit que toute belle histoire connait une fin ; celle-ci est annoncée dès son titre, inutile de se le cacher : Maqroll va mourrir… Maqroll doit mourrir, pour clore ce cycle, que Mutis ne refermera jamais vraiment, gardant la voie ouverte pour d'autres épisodes, mettant en scène d'autres personnages, certains évoqués le long de cette trilogie, exceptionnelle, car on le pressent déjà, forcément, prenant les avis de tous bords, que la suite ne sera pas à la hauteur de ces trois premiers, dont la rencontre, l'ouverture, La Neige de l'Amiral, en constitue l'acmé.

Il n'empêche, il soigne rudement bien sa sortie, le bougre ; cette fois-ci, loin des mers ou des rivières, abordant enfin cette cordillère, la sortant de son rôle de toile de fond, l'abordant malgré cette malédiction, prévisible écueil pour ces marins qui n'ont pas grand chose de terrien.

Récit, plume, déroulement, épilogue, tout semble si facile, si limpide, que le livre ne se referme qu'une seule fois, la dernière ligne achevé.
Rien ne manque, rien n'est en trop, forçant l'avare consciencieux de ses astres à, pour une fois, les mettre tous sur la table, donnant cette note maximale qui, encore une fois, devrait donner lieu à de rudes justifications, pour être correctement appliquée, faisant briller ici l'exceptionnelle qualité de cette trilogie ; de ce personnage qui devrait, à force, bien finir par exister, en vrai.

C'est bien sûr à regret qu'on le quitte, tout juste consolé par l'idée d'en retrouver des à-côtés, mon dieu quel homme ce Maqroll le gabier !
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La Feuille Volante n° 1140
Un bel morirAlvaro Mutis – Grasset.
Traduit de l'espagnol par Eric Beaumartin.

Cette fois Maqroll a décidé de se domicilier temporaire dans l'improbable port de la Plata avec la projet de remonter le fleuve à la rencontre de ceux qui auparavant avaient partagé avec lui quelques entreprises mirifiques. Pour cela il choisit une chambre bizarrement située en surplomb des eaux boueuses assez loin de l'estuaire (c'est un peu l'image de sa propre vie), dans une auberge tenue par une femme aveugle. Il rencontre un ingénieur belge qui doit réaliser un tronçon ferroviaire au sommet de la cordelière et l'engage pour convoyer du matériel. Il ne tarde cependant pas à s'apercevoir que cette histoire de ligne de chemin de fer devait bien cacher quelque chose d'illégal dans un endroit où les autorité avaient depuis longtemps cesser d'être présentes. Cela paraît bizarre pour cet homme qui est avant tout un marin qui a bourlingué sur toutes les mers du globe mais c'est comme cela et de cette aventure improbable il ne sortira pas indemne. Elle met encore une fois en évidence sa naïveté ordinaire qui le pousse dans des aventures incroyables face à la cupidité d'autrui mais qui nourrit largement son expérience en matière de connaissance des bassesses dont l'espèce humaine est coutumière.
Maqroll El Gaviero (le gabier), est un personnage de fiction dont Mutis (1923-2013), à partir de 1985, a décliné la vie à travers sept romans au point qu'on peut dire qu'il est l'alter ego de l'auteur. Mais l'est-il en réalité. Il y a quelques années, je me suis demandé en quoi Mutis et Maqroll pouvaient être considérés comme des personnages hétéronymes comme ont pu l'être Pessoa et Alvaro de Campos ou Ricardo Reis. C'est toujours un sujet délicat qui amène à réfléchir sur le rôle de l'écriture pour l'auteur lui-même, une manière de rendre compte d'une certaine réalité ou l'occasion de se créer, à travers l'imaginaire, un univers idéal qui compense fictivement un quotidien plus morne.
Maqroll est un marin en perpétuelle errance, un homme au passeport constellé de visas périmés, un solitaire, plus que marginal au regard de la loi, mais un être cultivé, érudit, épicurien, polyglotte, fidèle en amitié cependant, n'hésitant pas à traverser les océans pour répondre à la sollicitation d'un ami (« Le rendez-vous de Bergen ») sans qu'on sache très bien comment la lettre a pu lui parvenir. Il pratique avec modération la fréquentation des tavernes et les passades amoureuses mais que quelques femmes ne parviennent pas à oublier, lui non plus d'ailleurs. Elles ont nom Antonea, Flor Estévez ou Iliona... le Gabier semble exercer sur les femmes en général une séduction naturelle et l'oubli, cette faculté étonnement humaine, ne parvient pas à entamer la trace qu'il laisse dans la mémoire des gens qu'il croise. Ici c'est Amparo Maria qui succombe à son charme et qui rejoint ainsi ses femmes mythiques. Il n'a pas de véritable projet d'avenir mais, sans qu'il y puisse rien, il a l'art de se mettre, sur terre comme sur mer, dans des situations inextricables, à participer à des affaires douteuses dont il se sort au dernier moment mais où il laisse toujours le peu d'argent qui lui reste. le temps a fait sur lui et sur ses facultés des ravages ordinaires et il se sent vieux mais se rappelle opportunément ce que furent ses bonnes années, tumultueuses et amoureuses et cela sans doute le maintient en vie, même si les regrets l'accompagnent. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que l'auteur aborde ce thème à travers son héros.
Ce n'est pas première fois non plus que Maqroll côtoie la mort. Dans un précédent roman il l'avait déjà approchée dans les miasmes d'un marigot mais s'en était tiré in extremis. Ici, elle s'invite à nouveau en frappant autour de lui à occasion de cette indéfectible habitude qu'ont les hommes, depuis la nuit des temps, de se battre et de s'entre-tuer. Dans ce roman tout l'art de l'auteur est d'entretenir chez son lecteur un suspens qui pourrait bien se conclure pour Maqroll par un fin tragique. C'est un thème d'autant plus prégnant dans l'oeuvre de Mutis que Maqroll n'a jamais eu d'enfant (du moins à sa connaissance) et donc n'a pas assuré sa descendance, mais cela a-t-il de l'importance ? Ce roman a été publié en 1989 dans son édition originale, soit bien avant le décès de Mutis. de plus ce n'est pas son dernier roman où apparaît Maqroll. Dans un appendice à ce récit, Mutis ne laisse pourtant aucun doute sur la disparition de Maqroll et la citation de Pétraque, « Un bel morir tutta la vita onora », qui sert d'exergue à ce roman, vient conclure cette vie aventureuse et tourmentée. C'est en effet une prérogative d'auteur de disposer purement et simplement de l'existence, même fictive, de son personnage.
Comme toujours dans les romans de Mutis, j'ai retrouvé ces descriptions poétiques, ce qui nous rappelle qu'il était avant tout un poète, et ici le lecteur circule avec Maqroll dans la douce fragrance des caféiers autant que dans le danger des sentiers de montagne pleins de brouillard glacé, près des précipices et des torrents… Comme l'a dit fort justement Bernard Clavel « Mutis est un enchanteur ». J'ai apprécié aussi ces évocations subtilement humoristiques, le phrasé délicat, cette délicieuse façon d'exprimer les états d'âme du Gabier et cette nostalgie qui lui colle à la peau comme son ombre. Ma lecture a été passionnée et Mutis a ce talent de transformer une histoire qui aurait pu être une banale aventure en un récit passionnant. Il reste pour moi un génial conteur qui entraîne son lecteur de la première à la dernière page sans que l'ennui ne s'insinue dans sa lecture.

Depuis de nombreuses années cette chronique s'est fait l'écho de l'oeuvre de Mutis à travers les tribulations de Maqroll mais cette modeste évocation n'a pas vocation à tout résumer. Alvaro Mutis reste cependant pour moi un auteur majeur dont Octavio paz a pu dire « (qu'il est) un poète dont la mission consiste à convoquer les vieux pouvoirs et faire revivre la liturgie verbale, dire la parole de vie »  Maqroll, loin d'être une sorte de mythe, reste malgré tout un personnage assurément humain et attachant.

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Maqroll se retrouve à La Plata sans trop savoir pourquoi. Il loge chez doña Empera, une vieille femme aveugle, avisée et pleine de bon sens, qui devient une amie précieuse. Passant ses journées avec des femmes dont la très belle Amparo Maria ou au bar, il rencontre dans ce dernier un Belge van Branden, qui lui propose de convoyer du matériel à dos de mules sur les pentes du Tambo (projet de chemin de fer). Ni une, ni deux, Maqroll se lance dans ce nouveau plan bien foireux. Vous aurez compris que notre ami le Gabier a tendance à s'aventurer dans des entreprises douteuses.

Après plusieurs ascensions du Tambo, il comprend avec l'aide de don Anibál qu'il transporte des armes venant de Tchécoslovaquie destinées à la guérilla. Les militaires le soupçonnent et lui demandent de jouer le jeu et de faire la dernière livraison pour glaner des informations. Cette expédition sera t-elle la dernière pour Maqroll le Gabier ?

Dans Un bel morir, on fait face à un Maqroll désenchanté, désabusé par ce monde en ruine où seules les femmes lui redonnent un peu le sourire. La passion amoureuse qu'il vit avec Amparo Maria lui rappelle ses deux amours passés : Ilona et Flor Estevez et par là même un peu de sa jeunesse perdue. La Neige de l'Amiral, Ilona vint avec la pluie et Un bel morir constituent un véritable triptyque (car on ne peut pas à proprement parlé de suite), les histoires de Mutis s'imbriquent de façon naturelle et donnent une vraie cohérence à son oeuvre. Alvaro Mutis est un très grand auteur, qui malheureusement reste dans l'ombre de son compatriote Gabriel Garcia Marquez. Un conseil : lisez Mutis, vous ne serez pas déçu.
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A découvrir absolument ! Alvaro Mutis est un écrivain colombien. Fils de diplomate on sent l'enrichissement dont il a pu profiter par ses voyages. Je l'ai lu en espagnol et j'espère que la traduction française rend justice à ce chef d'oeuvre.
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La vie tumultueuse de Maqroll le gabier s'achéve dans une dernière aventure de contrebande d'armes.
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