L'arrivée d'un nouveau roman de Marie Ndyane est un événement qui sera beaucoup commenté. Retrouvée l'écriture de cette auteure est un plaisir, même si il s'accompagne de tellement d'interrogations. Car, chacun lit les mots si particuliers de Marie Ndyale selon son prisme personnel avec une grande liberté.
La vengeance m'appartient trompe son lecteur avec son titre digne d'un polar. Car ici aucune enquête, puisque le crime, l'assassin et la délibération du procès sont connus. Marie Ndyale fait cheminer son lecteur auprès de trois femmes qui ont toutes en commun un événement qui les fait basculer dans le chaos.
La première est Marlyne Principaux, femme parfaite, mère aimante et attentive qui est en préventive pour l'infanticide de ses trois enfants, Jason, 6 ans, John 4 ans et Judith, 6 mois. Évidement, cela évoque Médée. Elle, l'ex-professeur de français a trouvé enfin la paix en "posant son acte ". Cette expression chemine tout au long du roman sans qu'on sache vraiment quel sens Marie Ndyale lui donne.
Me Susane est le personnage principal. Avocate bordelaise de 42 ans, pas vraiment jolie mais massive. Elle est déstabilisée lorsqu'elle reconnait son client, Gilles Pincipaux, le mari de Marlyne. Elle revoit l'adolescent de 14 ans qui a changé sa vie en l'invitant dans sa chambre lorsqu'elle avait 10 ans.
De plus, Me Susane balade avec étrangeté le sentiment de ne jamais être légitime à la place qu'elle occupe. Ni en tant que fille, ni plus encore à la place de défenseure, ni celle de patronne de la femme de ménage. Ce sentiment la projette dans une atmosphère de duperie qu'elle n'arrive pas à dépasser. Elle ne s'autorise à aucun moment à être en désaccord ou à révéler ses faiblesses, acceptant même de manger jusqu'à l'indigestion des plats dont elle n'a pas envie.
Sharon s'occupe de son intérieur. Me Susane espère pouvoir donner des papiers à cette Mauricienne qui un jour a décidé de partir puis plus tard de faire venir enfants et mari. Mais, Sharon ne désire rien que de bien faire son travail.
Une petite fille Lila complète cette galerie. Fillette prise entre l'envie de plusieurs femmes qui désirent l'accaparer pour montrer cet amour maternelle omniprésent dans ce roman.
La folie, le déséquilibre, la faille n'est jamais loin dans cette écriture travaillée semble-t-il jusqu'à l'obsession. Dans certaines phrases, plusieurs adjectifs accolés posent, déséquilibrent ou contredisent la pensée. le conditionnel, présent ou passé, est omniprésent, comme un renforcement de l'indécision, l'incertitude ou de l'hypothétique du ressenti du personnage principal.
Marie Ndyale propose deux monologues. L'un d'une dizaine de pages concerne Marlyne dont chaque phrase commence par un Mais. Et l'autre mené par Principaux avec chaque phase débutant par un Car. Celui-ci sur quatre pages et demi. de cette opposition nait le malaise où l'imagination du lecteur vient compléter l'absence de précisions sur le mobile de ces infanticides et la relation toute singulière entre les deux époux. Aucune explication n'est proposée juste assez suggérée pour que chacun imagine, comme le père de Me Susane sur cette rencontre dans la chambre.
Le récit des infanticides est un moment terrible et pourtant cette Marlyne n'est jamais antipathique.
La vengeance m'appartient est une expérience littéraire, comme chacun des romans de Marie Ndyale. La romancière réussit à embarquer son lecteur dans son monde au bord du déséquilibre. L'impression produite est l'étouffement et le trouble. Sûr qu'il faut se laisser embarquer dans ce monde particulier où le plaisir de lire est puissant !
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