« Elle lui avait confié le souvenir de sa première exposition publique là-bas à Iéna, à l'époque de la RDA. Ce fut tout de suite la censure, l'interdiction. S'ensuivit sa rage de résister à tout prix. »
Berlin, décembre 1989, juste après la chute du mur : Stan, narrateur tout juste adulte, n'a connu la guerre froide que de loin mais quitte Paris pour vivre cette libération de l'intérieur. A son arrivée sur ce qu'il reste du mur, fasciné par la vue de tous ces gens en train de continuer la démolition avec leurs marteaux, ou de ramasser des bouts de mur pour ne pas oublier, il rencontre Maya. C'est le coup de foudre immédiat entre lui et cette jeune peintre
Berlinoise à fleur de peau. Mais Maya, gonflée de joie, dansant devant les visages à nouveau souriants et pour sa liberté retrouvée, demeure traumatisée par les années d' « enfermement » et de surveillance constante du régime de Berlin Est. Et elle traverse des crises de tristesse et de panique incommensurables pour Stan qui voudrait tant la comprendre.
« Je souhaitais qu'elle apprenne à se laisser plus souvent aller à la beauté, à soustraire ses pensées de la laideur et des douleurs du monde. Elle rétorquait que, nous, ceux de l'Ouest, étions trop candides, désarmés, aveugles devant l'horreur et l'absurdité que pouvaient produire les êtres humains.
J'avais mal dès qu'elle m'exilait vers un monde qui n'était pas le sien, peut-être se battait-elle depuis trop longtemps. Maya m'effrayait quand elle perdait la mesure, elle explosait à la moindre contrariété puis s'acharnait comme si de l'issue de notre discussion dépendait le sort de toutes les plaies de l'humanité. »
Lorsque dès 1990, si peu de temps après qu'elle ait commencé à goûter à sa liberté nouvelle, des groupuscules néonazis célèbrent ouvertement l'anniversaire d'Hitler, déversant leur flux de haine et de violence dans sa ville, c'est une peur sans limite qui s'empare de Maya : Car d'origine Cubaine, elle est consciente que tout peut recommencer… Et que sa couleur de peau fait d'elle une cible facile dans sa propre ville.
« Il lui semblait irréel qu'une réminiscence aussi sombre du passé de l'Allemagne puisse voir le jour aux heures de la liberté retrouvée. La pauvre fut anéantie, détruite quand une bande de skinheads envahit les rues avec des slogans à la gloire du Troisième Reich et contre les étrangers. »
Le gouffre se creuse entre elle qui, directement concernée, tellement déçue et impuissante, pressent que l'histoire pourrait se répéter, et Stan, qui tente de minimiser les faits qui se déroulent sous leurs yeux afin de l'apaiser. Maya se sent rejetée de son pays, envisage la fuite. Mais, avec son art qu'est la musique, Stan va se battre pour que Maya puisse se sentir de nouveau en sécurité chez elle…
« le mur de Berlin est tombé pour libérer les âmes et les corps, pour vénérer les différences, nous accrocher aux rêves de jours meilleurs, nourris de la folie de croire aux destins les plus fous. »
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Au moment où l'on craint que l'oubli de la seconde guerre mondiale et de ses conséquences ne permette à l'histoire de se répéter, Wilfried N'Sonde rappelle qu'il est important de défendre nos libertés tant qu'il est temps, car les peuples ont la mémoire courte et les reconstructions sont toujours difficiles. Sa plume décrit cette période de transition de manière onirique et touchante. On compatit au combat de Maya pour vivre enfin libre, et l'on vit surtout une formidable histoire d'amour, passionnée et intense, presque trop, où l'auteur de «
Fleur de Béton » aborde aussi la difficulté d'aimer, sans les juger, ceux que l'on peine à comprendre.
« Je t'aime, Maya. N'oublie pas les caprices du vent, la course des planètes, la tiédeur d'une eau de pluie d'été sur ta peau, l'intensité d'un frisson cueilli lors d'un baiser, la magie d'un frémissement quand des doigts l'on se frôlait. le feu des amoureux qui nous consumait toi et moi, un magma, un brasier de joie autour duquel nous dansions une valse des merveilles. »
Envie d'une jolie plume toute douce ? Je vous conseille ce roman !
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